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Conclusion sur les expériences avec mousse et perspectives

3.4 Des codes de simulations pour préparer et interpréter

4.2.4 Conclusion sur les expériences avec mousse et perspectives

En résumé nous avons réalisés une série d’expériences sur l’installation LULI2000 utilisant un milieu extérieur sous forme de mousse. Ces expériences avaient pour objectif l’étude de l’évolution de l’IRT jusqu’à sa phase non-linéaire ainsi qu’une étude paramétrique de l’effet des conditions initiales : nombre d’Atwood, et longueur d’onde de modulation. Ces objectifs ont en grande partie été atteints et ces expériences ont produit une grande quantité de résultats. Dès lors, le problème principal est la cohérence imparfaite de ces résultats. Celle-ci est d’une part due aux fluctuations de conditions laser mais aussi à la qualité des cibles et à l’imprécision des équations d’états utilisées (pour les mousses poreuses).

De cet ensemble de résultats nous avons pu vérifier que la densité de la mousse influence directement la décélération de l’interface. Cependant c’est à travers le nombre d’Atwood que la densité joue un rôle plus important. Nous avons aussi vu que les différences de croissance d’instabilité entre les cas mono et bi-mode ne sont que peu franches.

Par ailleurs la mousse à 100 mg.cm−3 après 30 ns possède (d’après nos simulations) les mêmes valeurs de nombres adimentionnés que les RSN de type Ia jeunes de 100 ans (cf tableau4.1). Ces deux situations sont donc similaires et devraient donc présenter une évolution comparable. La phase non-linéaire de l’IRT étant observé à ces instants en expérience, il devrait en être de même en astrophysique. Cela confirme donc les résultats de simulations astrophysiques, qui prédisent une telle phase non-linéaire après 100 ans d’évolution de RSN de type Ia [Fra+10].

Nous avons aussi procédé à la comparaison de nos résultats expérimentaux aux simulations FLASH ayant subi un abattement d’intensité laser de 50 %. Celui-ci, que nous avons calibré sur nos résultats pour une densité de 100 mg.cm−3, est nécessaire pour rendre compte de la sur-absorption du laser dans FLASH ainsi que de l’absence de la couche d’or. Les deux cas de basse densité ont pu être reproduit par nos simulations mais pas celui de haute densité, 500 mg.cm−3. Nous noterons que nos simulations prédisent correctement le développement d’instabilités secondaires, mais les surestiment (absence de force de cohésion : tension de surface, champ magnétique...). Cela a un impact sur la croissance l’instabilité. En particulier, nous noterons que nos simulations surestiment la croissance de l’IRT dans le cas multi-mode.

Enfin à l’aide des simulations et de quelques points de référence nous avons procédé à l’étude de l’évolution des longueurs de pics et de bulles. Cette étude expérimentale, inédite en HDE, a révélé que la croissance de l’instabilité s’effectue principalement par ses bulles. Nous attribuons le défaut de croissance des pics à la proximité du choc et à ses conséquences. Cette conclusion ne s’applique bien sur qu’à nos conditions expérimentales où le choc reste proche de l’interface et ne prédit en rien les résultats pouvant être obtenus dans d’autres conditions (laser plus puissant : OMEGA, LMJ, NIF, composition de cible différente...). À ce sujet nous remarquerons que la vitesse fluide post-choc et donc la vitesse initiale de l’interface son relativement proche pour la plupart des matériaux (équations

Une partie de ces conclusions se rapportant à l’IRT peut être adaptée aux études astrophysiques. En particulier, celle relative aux phénomènes de cohésion et à la comparaison de la croissance entre les cas mono et multi-mode. Il faut tenir compte de ses points lors de raisonnement sur les objets astrophysiques.

Plusieurs points seraient à modifier afin d’améliorer ces expériences que ce soit dans un objectif de les réaliser de nouveau ou de les adapter à d’autres thématiques. Nous allons ici expliquer ce qui a posteriori nous semblerait être les meilleures conditions expérimentales.

Commençons par la question des cibles. Il va de soi qu’avoir possession des séries de cibles parfaitement identiques serait idéale mais irréaliste pour un laboratoire en raison du prix alors exorbitant (General Atomic). Tout au mieux nous pourrions espérer une caractérisation de chaque cible individuelle, ce qui se traduit par un travail et un coût conséquent. Parlons plutôt des éléments entourant la cible qui peuvent améliorer les résultats en facilitant l’imagerie (réduction des émissions parasite). Nous avons déjà parlé du cône face avant qui cache l’émission X du plasma de couronne nuisant à l’imagerie. À celui-ci il est nécessaire d’ajouter une rondelle en face arrière de l’ablateur, autour du pousseur pour des raisons similaires. Une dizaine de microns de matériaux opaque (cuivre, tantale,...) suffit. Le point important est qu’aucun trou ne subsiste. Idéalement cette rondelle se repliera donc sur le cône, faute de quoi un filet de colle sur l’ensemble de son pourtour sera un élément positif. Si des trous ne doivent pas exister sur la partie extérieure, il en va de même pour la partie intérieure. Ainsi, il faut que la rondelle soit jointive au tube, une autre possibilité est de coller le tube directement sur cette rondelle. Cette dernière solution nécessite d’utiliser un tube plus large que le trou de la rondelle. Cela est dû au fait que la rondelle aura tendance à se surélever sur les bords.

Un second point à considérer est l’utilisation d’une mousse comme matériau extérieur. Celle-ci s’est montrée difficile d’emploi lors de nos expériences. Outre ses défauts et sa rétractation possible à l’intérieur du tube, elle se révèle être opaque à la lumière visible, mal prise en compte dans nos simulations (nous pouvons y remédier en utilisant d’autres tables d’équation d’états - SESAME) et possiblement inhomogène. Nous pouvons aussi nous questionner sur sa densité réelle et sur son parfait contact avec le pousseur (absence d’écart). L’ensemble de ces points, nous amène à considérer l’utilisation de milieux alternatifs. Dès lors deux possibilités s’offrent à nous : soit nous cherchons un milieu de faible densité, soit nous considérons un changement de pousseur. Si nous optons pour la première solution, nous pouvons considérer l’utilisation d’aérogels (ou de mousses transparentes). Ils présentent une bonne résistance mécanique, pouvant peut-être nous permettre de ne pas utiliser de tube, et sont souvent trans-parent. Le problème serait de les simuler. D’après les résultats d’une étude récente [PSM19], l’Hugoniot (relation caractéristique d’un choc) d’un aérogel de silice est correctement restituée par les tables SESAME. Nous aurions donc les équations d’état nécessaires à nos simulations. La question du parfait contact avec le pousseur se posera encore. Afin de l’assurer il serait nécessaire de faire sécher l’aérogel directement sur le pousseur (ce qui n’est pas forcément faisable). Une méthode similaire pourrait d’ailleurs être employée avec la mousse (des améliorations ont été faite à ce sujet en court de thèse). La seconde possibilité serait d’utiliser un plastique solide comme milieu exté-rieur. Bien choisi, il ne présentera aucun des problèmes de la mousse. En effet un plastique peut être transparent, il peut être usiné pour correspondre à la modulation de l’interface et répond à des équations d’état connues (pas de problème de simulation a priori). Le seul souci serait de conserver le nombre d’Atwood. Cela pourrait être réalisé en utilisant des matériaux plus denses pour le pousseur, bien que la gamme soit réduite. Il nous semble difficile de pouvoir obtenir un rapport 70 de densité comme lors de notre expérience avec une mousse de 20 mg.cm−3, par contre un rapport 10 ou 20 pourrait être réalisable (la densité du platine étant de 21,45 g.cm−3). Du point de vue radiographie, les métaux, que nous pourrions utiliser, présentent une forte absorption ce qui augmenterait le contraste. Le principal problème serait l’énergie nécessaire (intensité laser) pour mener cette expérience ainsi que le flux de rayons X nécessaires à la radiographie d’un plastique solide. De ce point de vue il serait nécessaire de faire appel à des installations lasers de classe supérieure au LULI2000, comme OMEGA, NIF ou LMJ.

4.2. Mousses : une étude paramétrique de l’évolution de l’IRT jusqu’à son régime non-linéaire

Notre préoccupation sur l’opacité des mousses au rayonnement visible, que nous venons de rappeler, nous ramène à un point important : l’absence de diagnostics secondaires, ou plutôt la présence d’une unique image par tir. Cela nuit à la vérification de la cohérence de nos résultats et à leur comparaison aux simulations. Dans l’idéal plusieurs radiographies à différents temps devraient être effectuées. Ceci n’est cependant pas possible sur le LULI2000. Par contre compléter l’étude avec des diagnostics optiques streakés serait une grande amélioration, notamment pour l’étude des cibles non modulées. Cela permettrait entre-autre une meilleure confrontation avec les simulations en leur imposant plus de contraintes, ainsi que l’obtention d’une véritable dynamique expérimentale n’ayant pas besoin d’être complétée par des simulations.

L’amélioration des résultats et de la fiabilité des dynamiques observées ne peut pas se baser uniquement sur l’amélioration de l’expérience. Une approche statistique sera à notre sens nécessaire. La multiplication du nombre de tir laser permettrait une plus grande certitude, d’un point de vue erreur statistique sur la dynamique étudiée. Ceci n’est pas réalisable sur cette installation laser, ni même sur OMEGA, NIF ou LMJ. De nouvelles installations, telles que SACLA (au Japon) ou l’XFEL européen devraient permettre d’atteindre de plus forts taux de répétition qui seraient propice à cette statistique. Cela demanderait néanmoins d’adapter les procédés expérimentaux et les cibles. Nous noterons que l’utilisation de diagnostic streaké est aussi un moyen de remédier à ce problème. Ainsi nous pourrions obtenir non pas 139 temps d’observations distincts répartis entre 0–60 ns sur 6 sortes de cible, mais 139 dynamiques de 60 ns chacune (dans un cas idéalisé) réparti sur ces mêmes cibles. Dans le cadre d’un diagnostic de radiographie cela peut être réalisé à l’aide d’une frame X (une caméra X qui crée un film - caméra à image intégrales), cependant cela est fait au détriment de la résolution spatiale, ce qui peut devenir critique pour ce genre d’étude. D’autre part l’emploi d’une telle caméra sous-entend l’utilisation d’une source de rayons X d’une longue durée temporelle. Il devient donc nécessaire d’utiliser une impulsion laser longue (maximum ∼15 ns sur LULI2000, 10 ns sur OMEGA, 20 ns sur le LMJ, 35 ns sur le NIF), une grande énergie laser serait aussi nécessaire. Selon sa durée elle peut justifier l’emploi d’un tel diagnostic et la perte de résolution associée. Nous remarquerons que sur un même principe nous pourrions considérer l’utilisation de streak X. Cela ne nous permettrait pas d’étudier la croissance de l’instabilité, mais nous pourrions récupérer le mouvement de l’interface dans le cas des cibles planes.

Enfin il nous semble important de compléter l’ensemble des résultats par des données de référence. Cela comprend naturellement : des tirs de test de radiographie (présence de grille ou d’objet de dimensions connues au même niveau que les cibles pour vérifier la calibration spatiale), des tirs sur cibles planes pour la dynamique de l’interface, mais aussi la caractérisation des cibles avant chaque tir (idéalement leur radiographie dans les mêmes conditions que l’expérience). Tout ne peut pas être fait systématiquement sur n’importe quelle installation. Sur le LULI2000, nous ajoutions les grilles. Par contre nous ne pouvions pas faire de tir de référence, la création de rayons X détruisant le fil servant de source, et chaque tir de cible plane réduisait le nombre de tirs de cibles modulées. Comme nous le verrons dans le chapitre suivant, les installations XFEL (SACLA au Japon) permettent de remédier à ces points. Par contre elles présentent d’autres limitations.

• Afin d’étudier l’IRT dans sa phase de décélération une série d’expériences utilisant des mousses comme milieu extérieur a été effectuée sur l’installation laser LULI2000.

• Une étude paramétrique a été menée en utilisant trois densités de mousses (20, 100 et 500 mg.cm−3) et deux modulations (mono-mode 120 µm et bi-mode 70 et 120 µm de longueurs d’onde) principales. • Le cas 100 mg.cm−3 est similaire à la situation astrophysique des SN Ia et 30 ns en expérience sont

équivalentes à 100 années d’évolution astrophysique.

• La phase non linéaire de l’IRT ainsi que le développement d’instabilité secondaire ont été observés en expérience. Celles-ci se sont développées avant 30 ns. Ce qui confirme que la phase non-linéaire est bien atteinte avant l’équivalent de 100 ans en astrophysique.

• La densité de la mousse entraîne la décélération de l’interface, qui s’accentue lorsque la densité aug-mente. Par contre, cette densité influence principalement la croissance de l’IRT par son effet sur le nombre d’Atwood. Une densité plus faible augmente donc la croissance de l’IRT.

• Nous pouvons reproduire une partie de nos résultats à l’aide de simulation FLASH en utilisant une inten-sité laser de 1014W.cm−2contre les 1,9 × 1014W.cm−2de l’expérience. Cela équivaut à un abattement d’énergie d’environ 50 % nécessaire pour palier l’absence de la couche d’or et de la sur-absorption du laser en simulation. En particulier, nous reproduisons le mouvement de l’interface ainsi que la croissance de la zone de mélange, mais pas pour une densité de 500 mg.cm−3.

• En expérience, la croissance de l’instabilité ne semble pas différer entre les cas mono et bi-mode. Cela ne correspond pas à nos résultats de simulations, où le bi-mode se développe plus rapidement, comme nous l’aurions supposé par une approche théorique (plus petite longueur d’onde).

• En repérant la position de l’interface au cours du temps, nous avons pu obtenir l’évolution de la taille des bulles et des pics. L’instabilité croît ici par l’intermédiaire des bulles.

• Le défaut de croissance des pics, inattendu d’un point de vue théorique, semble provenir de la proximité du choc.

• L’absence de choc sur les radiographies expérimentales, contrairement aux simulations de diagnostics, peut être expliquée par l’aspect 3D du choc (dôme) et par sa proximité avec l’interface.