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L’étude des jeunes de notre échantillon, qui sont donc, en lien avec la Région Grand-Est, a permis de mettre en évidence des différences avec la jeunesse en général.

Aucun jeune de notre échantillon n’est issu de milieu défavorisé, même quand leur milieu d’origine est modeste. Ils ont tous un parcours scolaire exempt de difficultés majeures.

Par ailleurs, ces jeunes sont plus investis dans le bénévolat et les actions citoyennes que la jeunesse en général. Ils ont une conscience citoyenne assez développée.

Ces deux aspects interpellent donc la question de la représentativité des instances de démocratie participative mises en place par les pouvoirs publics, et particulièrement de celles pour lesquelles la jeunesse est conviée : Comment assurer une participation des franges de la jeunesse éloignées de l’action publique socialement ou géographiquement ?

Malgré une conscience citoyenne assez forte chez tous les jeunes, nous distinguons néanmoins des raisons variées à leurs actuels engagements.

Certains des jeunes rencontrés, fortement investis et guidés par des valeurs, ont réussi à créer leur emploi dans le monde associatif grâce à leur engagement.

D’autres jeunes, bien que diplômés, retardent leur entrée dans le monde du travail et peuvent même accepter une baisse de rémunération pour conserver la possibilité de s’engager dans des domaines les intéressant, en adéquation avec leurs valeurs.

D’autres jeunes encore, en situation d’impasse concernant leur employabilité, s’engagent dans des formes plus institutionnalisées telles que le service civique, pour bénéficier également des revenus de substitution qu’il procure, tout en espérant une profitabilité ultérieure pour leur parcours.

Chaque type d’engagement contribue à améliorer l’employabilité des jeunes rencontrés, mais de façon inégale selon les types d’engagement : Les formes institutionnalisées de type service civique y contribuent de façon moindre que les engagements choisis par les jeunes en dehors de toute contrainte financière individuelle et de tout cadre institutionnel.

Ces éléments nous amènent à nous interroger au sujet de la jeunesse davantage précarisée que celle de notre échantillon, celle plus éloignée des bassins d’emplois, ou plus fragile socialement.

Il serait aussi nécessaire d’explorer de façon exclusive le dispositif d’engagement du service civique que nous n’avons pu privilégier spécifiquement dans notre étude pour les raisons expliquées précédemment.

L’engagement apparait donc aussi comme un outil supplémentaire, destiné à atténuer les différences sociales d’origine un peu comme l’école, dont les limites sont déjà bien connues, car il profite à tous, mais il ne remet pas en cause fondamentalement les différences sociales et économiques, dans un environnement où de toute façon, les parcours ne sont plus aussi linéaires qu’auparavant quel que soient les classes sociales d’origine.

Toutefois, l’engagement permet réellement aux jeunes de vivre une activité productive en restant très proche de valeurs citoyennes qui leur tiennent à cœur. La confiance en soi et la reconnaissance sociale qu’ils en retirent est indéniable, voire salutaire parfois à leur épanouissement.

Il n’en reste pas moins que l’engagement et les dispositifs tels que le service civique constituent autant un traitement social du chômage qu’un moyen de vivre des valeurs nobles que les entreprises et leur cadre très productiviste n’offrent pas forcément.

Les jeunes d’ailleurs, émettent différentes hypothèses d’avenir pour concilier leurs valeurs et la manière de gagner leur vie. A la lisière du privé et du public, le monde associatif et l’économie sociale et solidaire apparaissent comme un espace de réalisation intéressant pour les jeunes.

Le monde entrepreneurial quant à lui, semble se tenir encore un peu éloigné finalement des enjeux de citoyenneté, alors même que son pouvoir grandissant lui donne un rôle de plus en plus institutionnel, capable de rivaliser avec l’Etat lui-même. Cette position de force lui confère pourtant aussi de plus grandes responsabilités sociétales.

Si la préoccupation immédiate des entreprises concerne strictement l’employabilité et leur rentabilité, elles ne pourront mobiliser pleinement leurs employés sans tenir compte de l’attachement de ceux-ci à des valeurs nobles que la jeunesse et les citoyens expriment. Les entreprises développent un discours éthique qui se veut rassembleur, mais les jeunes rencontrés semblent peu dupes, tant ils recherchent des solutions hors du champ entrepreneurial, pour se tourner vers les associations et l’économie sociale et solidaire.

La réelle valeur ajoutée, pour la cohésion sociale, ne serait-elle pas que le monde entrepreneurial, encouragé et guidé, par les pouvoirs publics, garantisse à la fois un emploi à chacun, et crée également les conditions internes en entreprise pour valoriser et favoriser l’expression des valeurs nobles recherché par les jeunes et les citoyens ?

Sur la base des constats plutôt positifs que l’engagement a pour la jeunesse, mais aussi après avoir pris acte que l’engagement réellement volontaire, c’est-à-dire libéré des contraintes financières liées au chômage de masse, profite davantage aux jeunes, n’appartient-il pas aux pouvoirs public, au système éducatif et aussi aux parents, de créer les conditions pour que les jeunes, le plus tôt possible dans leur vie, et en tout cas bien plus tôt qu’en fin de parcours scolaire ou universitaire, se sentent encouragés à s’investir dans les causes et des domaines qui leur tiennent à cœur ?

Comment faciliter l’expression des plus jeunes, les écouter et soutenir leurs envies initiales, dans un cadre qui soit donc plus souple vis à vis de leurs singularités personnelles ? Comment laisser les jeunes (re)prendre leur place …

… et laisser œuvrer la spirale vertueuse individuelle et collective de la confiance en soi, et de la reconnaissance sociale ?