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Conclusion

Les méthodes actuelles permettent l’examen du cerveau humain in vivo avec l’IRM. Une des méthodes de l’IRM est la DTI, qui se base sur l’anisotropie de la diffusion des molécules d'eau dans le cerveau. La fraction d’anisotropie (FA) est une mesure de la direction de diffusion et comme les axones ont une structure directionnelle, celle-ci est plus élevée dans la substance blanche. Les valeurs de FA et d’autres mesures de diffusion, tels que la diffusivité moyenne, axiale ou radiale, sont utilisées comme indicateurs de l'intégrité des fibres nerveuses.

La compréhension de la connectivité du réseau de substance blanche peut fournir des renseignements cruciaux de la fonction, en particulier lorsqu'elle est étudiée en parallèle avec les corrélats cliniques dans le cadre d’une pathologie, où les voies de fibres anormales, absents ou endommagées peuvent être associées à des déficits fonctionnels plus ou moins sévères.

Déterminer le pronostic des patients avec un AIC aiderait à améliorer leur prise en charge, à réduire les coûts hospitaliers et à offrir des soins selon les besoins particuliers de chacun. En plus, la nature de la maladie et des déficits présentes en post-AVC (moteurs et / ou de langage) en font un sujet d’étude intéressant, qui peut renforcer la connaissance du fonctionnement de diverses structures cérébrales. Pour ces raisons, dans cette thèse j’ai montré des études d’IRM et DTI, faits sur des patients survivants à un accident ischémique cérébral (AIC).

Dans nos protocoles de recherche, nous avons dû affronter plusieurs défis, comme les contraintes techniques des méthodes d’analyse et la complexité de l’étude de l’anatomie et de la fonction du cerveau sain et lésé.

Tout d’abord, en cherchant une méthode d’analyse de l’intégrité de la substance blanche la plus adaptée à implémenter en pratique clinique, nous avons trouvé que différentes techniques produisaient des résultats visiblement différents, et par conséquent, elles pourraient aboutir à des valeurs des paramètres de DTI (FA, MD, etc) différentes. Dans cette étude, nous avons constaté que les deux méthodes étudiées (tractographie « spécifique » individuelle vs. l’analyse d’un faisceau template) n'ont pas donné des résultats identiques. En effet, que ce soit pour les témoins ou pour les patients, les valeurs de FA étaient plus élevées avec l'approche de la tractographie probabiliste qu'avec la méthode de segmentation d’un template. Cependant, les deux

méthodes ont été en mesure de détecter une diminution de la valeur de FA dans le faisceau corticospinal (FCS) ipsilésionnel chez des patients victimes d'AVC, par rapport à des volontaires sains, et ont montré une corrélation significative entre leurs valeurs de FA et les scores cliniques.

Il semble que l’effet de la normalisation, du lissage des images de FA, les limites de la correspondance inter-sujets (dans les cas de l’utilisation du template du FCS), le seuil de FA et les problèmes de volume partiel (dans le cas de la tractographie), sont les facteurs qui ont provoqué les différences dans les résultats.

La manque de corrélation entre les valeurs de la tractographie et les images fonctionnelles peut être due à que l’effet de la contrainte imposé par l’utilisation d’un seuil de tractographie soit plus « délétère » que les effets produits par la correspondance inexacte entre le template et l’anatomie des sujets cibles et la normalisation / lissage des images.

Les deux méthodes ont des avantages et des limites, et toutes les deux sont capables de détecter les altérations et les différences dans les valeurs de diffusion. En conséquence, le choix d'une méthode sur une autre dépendra des caractéristiques spécifiques de l'acquisition de DTI et de l'expérience du clinicien ou du chercheur. Pour notre équipe, suite à ces résultats, nous avons décidé d’utiliser la FA issue de la segmentation du template du FCS dans l’article suivant « Contribution of CST and functional connectivity in hand motor impairment after stroke ». Ce choix a été réalisé car cette méthode est fiable et moins chronophage. Elle semble plus robuste aux corrélations avec les données de l’IRM fonctionnelle. Dans ce deuxième article, dont je suis co-auteur, nous avons déterminé que la sévérité du déficit moteur était liée aux dommages subis par le FCS, mais aussi que la « synchronisation » entre le cortex moteur primaire ipsilésionnel et le cervelet contralésionnel lors du mouvement était aussi indépendamment un facteur déterminant de la sévérité du déficit (Voir l’Annexe 5.4).

La fonction du langage a été un autre aspect étudié dans nos patients post AIC.

Le langage est une faculté extrêmement complexe qui nous permet d'exprimer et de comprendre des idées. Il émerge de l'interaction d'un certain nombre de régions corticales et sous-corticales fonctionnellement et anatomiquement spécifiées, reliés par un système complexe des faisceaux de substance blanche.

Les faisceaux de la voie dorsale sont chargés du traitement phonologique, du traitement moteur du langage et du traitement des phrases syntaxiquement complexes. Les faisceaux de la voie ventrale sont chargés de la fonction sémantique et des processus syntaxiques de base202. Les évidences indiquent que les deux voies travaillent ensemble pour soutenir les activités langagières, donc l’efficience de la connectivité de tout le réseau est fondamentale.

L’étude présentée dans cette thèse a été réalisée afin d’identifier les régions spécifiques de substance blanche qui déterminent la sévérité globale de l’aphasie post-AVC.

Les résultats montrent que l'intégrité de la substance blanche mesurée par l’analyse voxel-à-voxel corrélait avec la gravité globale de l’aphasie. En effet, les scores de l’aphasie étaient corrélés avec les anomalies de FA dans une région autour de la jonction temporo-pariétale (JTP), malgré que le chevauchement des lésions était localisé autour de la région insulaire. Cette région paraît cruciale, car elle réalise une double déconnexion simultanée des voies dorsale et ventrale.

L’importance fonctionnelle de la JTP est très connue. Cependant, le fait que au-dessous de son cortex passent plusieurs faisceaux de substance blanche a été moins considéré. Cette zone est un point de convergence notamment de la partie postérieure du faisceau Longitudinal Supérieur et du faisceau Arqué, du faisceau Fronto-Occipital Inférieur c’est-à-dire des faisceaux impliqués dans le langage oral, la cognition visuo-spatiale, l'attention et la lecture168.

Toutes ces données sont en accord avec les résultats de notre étude, qui souligne la corrélation des déficits globaux de l’aphasie avec le degré d’intégrité de la substance blanche au-dessous de la JTP, tout en minimisant l’effet de le volume de la lésion et en suggérant que la déconnexion des voies dorsale et ventrale est plus importante que l’intégrité des faisceaux isolés.

En conclusion, l’étude de l’AVC avec l’IRM est un problème complexe dû aux défis propres de l’IRM, aux contraintes techniques imposées selon la méthode d’analyse utilisée et aux particularités anatomiques et fonctionnelles du cerveau.

La détection des problèmes et la sélection des solutions techniques, comme un bon outil de correction de mouvement ou la méthode d’analyse la plus appropriée pour les données, est très important. En outre, la connaissance des caractéristiques particulières des structures cibles est fondamentale pour l’analyse et l’interprétation correcte des résultats, surtout en sachant qu’ils existent des différences liées à des asymétries normales et au vieillissement, par exemple. Le succès de la recherche dépend de l’intégration de toutes ces considérations dans l’exécution de l’étude et dans l’interprétation des résultats.

La performance fonctionnelle et la récupération des patients post AIC dépend de plusieurs régions de substance grise et de plusieurs faisceaux de substance blanche, qui établissent un réseau dont leur efficience déterminera la qualité de la performance finale. Par cette raison, l’intégrité du FCS et de la substance blanche au-dessous de la JTP semble être un bon prédicteur de la récupération motrice et du langage après un AIC.