• Aucun résultat trouvé

Conception d’une lentille de Laue

Avant de voir avec l’exemple de la lentille du Gamma Ray Imager (GRI) la m´ethode pour concevoir une lentille de Laue, nous allons nous int´eresser dans cette section au comportement des facteurs de m´erites F M et F Mm (d´efinis au d´ebut du chapitre 4) en

fonction de trois param`etres d’importance majeure : – La distance focale

– La section des cristaux (carr´es) – La mosa¨ıcit´e des cristaux

La comparaison entre les diff´erents mat´eriaux cristallins sera faite par la suite, dans cette section, on ne consid`ere que des cristaux de cuivre diffractant selon les plans (111). Il sont mod´elis´es avec une longueur de cristallite de 50 μm, et sont orient´es id´ealement en ´etant r´epartis sur des anneaux concentriques dont l’axe de sym´etrie d´efinit l’axe optique de la lentille. Ces anneaux diffractent dans la bande d’´energie comprise entre 800 keV et 900 keV . L’´epaisseur de chaque anneau est optimis´ee en fonction de l’´energie principale qu’il diffracte, et le nombre d’anneaux est calcul´e en fonction du domaine de rayons correspondant `a la bande d’´energie `a couvrir et `a la taille des cristaux.

6.2.1

La distance focale

A distance focale donn´ee, une bande d’´energie est diffract´ee par des anneaux occupant une plage de rayons. Le rayon ri de l’anneau diffractant une ´energie Ei est donn´e par l’expression 2.8 qui est rappel´ee ici :

ri ≈ 12, 3984 f

Eidhkl (6.1)

Lorsque la focale augmente, les rayons extrˆemes diffractant dans la bande d’´energie vont augmenter lin´eairement et leur ´ecart va lui aussi augmenter lin´eairement. Cela signifie que pour une bande d’´energie donn´ee, plus la focale est grande et plus la surface de cristaux diffractant dans la bande d’´energie est grande.

Il y a deux contreparties `a ce fait ; premi`erement lorsque la focale augmente, la masse de cristaux diffractant dans une bande d’´energie donn´ee augmente de fa¸con quadratique. Deuxi`emement, le diam`etre de la PSF augmente lin´eairement avec la focale du fait de la mosa¨ıcit´e des cristaux. Cela contribue `a l’´etalement du signal sur le plan de d´etection et donc tend `a r´eduire la sensibilit´e. Cela ne s’applique pas `a une raie fine puisqu’un un seul angle de diffraction lui est associ´e.

La figure 6.6 montre les facteurs de m´erite F M et F Mm en fonction de la distance

focale. Les cristaux simul´es sont du Cu 111 de 30 arcsec de mosa¨ıcit´e. Sur le graphique de gauche, la section des cristaux est fix´ee `a 10 mm x 10 mm, alors que sur le graphique de droite elle varie proportionnellement `a la focale, avec comme r´ef´erence une section de 15 mm x 15 mm pour f = 100 m. Dans ce dernier cas, le nombre d’anneaux reste constant et ´egal `a 7 quelle que soit la focale, la section des cristaux variant de 4,52 mm2 `a 452 mm2.

Dans le cas ’section constante’, les oscillations observ´ees sur les courbes sont dues au fait que le nombre d’anneaux augmente de fa¸con discr`ete avec la focale.

Fig.6.6: Facteur de m´erite incluant la masse (en tirets) ou non (en trait plein) en fonction de la distance focale de la lentille pour diffracter dans une bande d’´energie comprise entre 800 et 900 keV. Les cristaux simul´es sont du Cu 111 de 30 arcsec de mosa¨ıcit´e. Sur le graphique de gauche, la section des cristaux est fix´ee `a 10 mm x 10 mm, alors que sur le graphique de droite, leur section varie proportionnellement `a la focale, avec comme r´ef´erence 15 x 15 mm2 pour f = 100 m.

Dans les deux cas, on voit qu’augmenter la focale conduit `a une augmentation du facteur de m´erite F M , mais cela n’est pas rentable en terme de masse investie : le facteur de m´erite F Mm d´ecroˆıt avec la focale. Cela signifie que l’on gagne `a prendre la focale la

plus longue possible, dans la limite de la masse autoris´ee.

Dans le cas ’section proportionnelle’, la fraction des coups pris en compte reste constante (voire mˆeme augmente l´eg`erement) avec la focale, alors que dans le cas ’section constante’ c’est le rayon optimal qui reste constant, impliquant une fraction sf toujours plus faible lorsque la focale augmente (figure 6.7). Bien que le nombre total de coups diffract´es soit l´eg`erement sup´erieur dans le cas ’section proportionnelle’ (dˆu au fait qu’il y a moins de perte de surface collectrice dans les espace inter-cristaux), le facteur de m´erite F M est sup´erieur dans le cas ’section constante’.

On voit donc sur ces graphiques qu’une longue focale permet de gagner en sensibilit´e, quelle que soit la taille des cristaux. D’autre part, bien que cela n’ait pas ´et´e abord´e ici, plus la focale est longue et plus l’alignement des cristaux doit ˆetre pr´ecis pour que le centre de leur empreinte de diffraction intercepte l’axe optique de la lentille sur le d´etecteur, cet argument plaidant bien-sˆur en faveur de cristaux plus gros et d’une focale plus courte.

Fig.6.7: Nombre total de photons diffract´es vers le plan de d´etection et fraction de signal pris en compte pour optimiser la significativit´e de d´etection en fonction de la focale, pour les mˆemes conditions que la figure pr´ec´edente.

6.2.2

Section des cristaux et mosa¨ıcit´e

Lorsque la mosa¨ıcit´e augmente, la surface efficace de la lentille augmente du fait de l’augmentation de la r´eflectivit´e int´egr´ee des cristaux se traduisant par un ´elargissement lin´eaire de la bande passante avec la mosa¨ıcit´e (et d’une l´eg`ere baisse de l’efficacit´e au pic, mais cette effet n’est pas pr´epond´erant). Cependant, un ´elargissement de la bande passante spectrale implique automatiquement un ´elargissement de l’empreinte du cristal sur le plan focal. Ainsi la quantit´e de signal diffract´e augmente avec la mosa¨ıcit´e, mais sa dispersion sur le plan focal augmente aussi. D’autre part, l’´epaisseur optimale des cristaux augmente avec la mosa¨ıcit´e, ce qui implique une augmentation de la masse de cristaux.

La figure 6.8 montre la variation des facteurs de m´erite F M et F Mm en fonction de

la mosa¨ıcit´e des cristaux et de leur section dans le cas d’une lentille de 100 m de focale (constitu´ee de cristaux de Cu 111 diffractant dans la bande de 800 keV `a 900 keV). La figure 6.9 montre la fraction sf du nombre de coups diffract´es vers le d´etecteur `a prendre en compte pour maximiser le niveau de d´etection (graphique de gauche) et le nombre total de photons diffract´es (pour un flux incident de 1 ph/s/cm2/keV).

Les deux derniers graphiques montrent bien que lorsque la mosa¨ıcit´e augmente, la quantit´e de signal diffract´e augmente, mais cela s’accompagne d’un ´etalement sur le plan focal. En cons´equence la fraction de ce signal qui maximise le niveau de d´etection diminue, au point que le facteur de m´erite diminue lui aussi comme on le voit sur la figure 6.8. Pour une focale de 100 m, si la masse n’entre pas en jeu (pas vraiment r´ealiste...), on peut se permettre d’utiliser des cristaux de environ 20 arcsec et jusqu’`a 152 mm2 de section.

Cependant si la masse est un param`etre critique, alors la plus petite mosa¨ıcit´e est la meilleure.

La section des cristaux, quant `a elle, intervient plus sur la forme de la PSF que sur la quantit´e de signal diffract´e, `a l’exception du cas o`u les cristaux sont trop petits par rapport `a la focale utilis´ee et que l’on perd du facteur de remplissage dˆu `a la multiplication des espaces inter-cristaux. Si les cristaux sont de grande dimension, c’est leur projection

Fig. 6.8: Facteurs de m´erite incluant la masse (`a droite) ou non (`a gauche) en fonction de la mosa¨ıcit´e et de la section des cristaux (carr´es) pour une focale de 100 m.

Fig. 6.9: Nombre de photons diffract´es (`a droite) et fraction `a prendre en compte pour maximiser le niveau de d´etection (`a gauche) en fonction de la mosa¨ıcit´e et de la section des cristaux, pour une focale de 100 m.

droite qui va dominer la PSF, la rendant plutˆot cylindrique. Alors que si les cristaux sont petits, c’est la divergence du faisceau diffract´e dˆu `a la mosa¨ıcit´e (mosaic defocusing) qui prend le dessus, cr´eant de grandes ailes `a une PSF relativement fine. La figure 6.8 montre que des petits cristaux sont pr´ef´erables pour maximiser le facteur de m´erite F M , mais on voit sur la figure 6.9 que la fraction de signal `a prendre en compte pour optimiser la significativit´e de d´etection augmente avec la taille des cristaux : En r´esum´e, on utilise plus de signal, mais la sensibilit´e est moindre.

Ces consid´erations ne prennent pas en compte la faisabilit´e de la lentille : plus les cristaux ont une faible mosa¨ıcit´e et plus ils doivent ˆetre homog`enes entre eux et align´es avec pr´ecision. Cela se r´esume de la mani`ere suivante : plus les cristaux utilis´es ont une forte mosa¨ıcit´e, et plus on a de chance d’atteindre les performances id´eales. D’autre part, de plus gros cristaux diminuent le nombre total de pi`eces `a pr´eparer (d´ecouper, orienter, aligner, monter) et sont plus facile `a monter avec pr´ecision. Tout cela conduit `a faire des compromis lors du design d’une lentille.