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III. SYNTHÈSE DES RÉSULTATS ET DISCUSSION

III.1. Niveaux d’imprégnation par le mercure

III.1.1 Concentrations de mercure

D’une manière générale, les concentrations en mercure déterminées dans les dents sont faibles par rapport à celles trouvées dans les autres tissus, de l’ordre du ng/g de poids sec (ps). Ceci est dû au fait que le mercure ne possède que très peu d’affinité pour les tissus calcifiés contrairement aux tissus kératinisés tels que les poils, les cheveux ou les plumes. Ainsi, les concentrations trouvées dans les poils de cette étude sont, elles, de l’ordre du µg/g ps (Tableaux III.1 et III.2).

Les publications en annexes 1 et 2 portent sur le mercure dans les dents des phoques annelés et ours polaires, tandis que les publications en annexes 3 et 4 traitent du mercure dans les poils de diverses espèces de phoques et des ours polaires, respectivement.

Phoque annelé

Chez le phoque annelé, les concentrations en mercure déterminées au cours de cette étude varient de 0,4 à 57,6 ng/g ps dans les dents et de 0,4 à 10,3 µ g/g ps dans les poils (Tableau III.1). Ainsi, les concentrations de mercure obtenues dans les poils sont 1000 fois plus importantes que celles obtenues dans les dents. Toutefois, il convient de noter que les poils et les dents prélevés et analysés ne proviennent pas des mêmes individus, à l’exception de 30 phoques annelés de 2008 de la région centre de l’Ouest du Groenland pour lesquels il a été possible de collecter à la fois dents et poils. La figure III.1 illustre le facteur de différence entre les niveaux d’imprégnation par le mercure dans les dents et les poils de ces individus.

Figure III.1. Comparaison des niveaux de mercure (en µg/g ps) dans les dents et les poils de 30 phoques annelés du Groenland. Les barres verticales aux extrémités des boîtes représentent les valeurs maximales et minimales, le trait en gras, la valeur médiane, tandis que les points représentent les individus détectés comme outliers. L’axe des ordonnées est gradué en échelle logarithmique.

Le tableau III.1 résume les concentrations de mercure déterminées dans les dents et les poils du phoque annelé au cours de cette étude, ainsi que celles rapportées dans la littérature. D’une manière générale, les concentrations de mercure dans les dents de phoques annelés apparaissent plus fortes chez les phoques du Canada que chez ceux du Groenland. Par ailleurs, les niveaux d’imprégnation par le mercure des individus de l’Est du Groenland sont plus importants que ceux des individus de l’Ouest du Groenland (p < 0,001 ; annexe 1).

En ce qui concerne le mercure dans les poils des phoques annelés, les concentrations observées dans la sous-espèce de phoque annelé du lac Ladoga (Phoca hispida ladogensis) sont nettement plus importantes que celles trouvées dans le cadre de notre étude. D’une part, les individus provenant du Groenland, pour lesquels les poils ont été analysés, sont pour la plupart immatures, or l’âge peut avoir une influence notable sur les concentrations de mercure déterminées. D’autre part, le lac Ladoga en Russie a fortement été pollué par les fabriques de papier et de cellulose d’avant-guerre (Reeves et al., 1992) ; ainsi, l’habitat lacustre « fermé » de ces animaux endémiques à ce lac pourrait expliquer leurs fortes concentrations de mercure par rapport aux phoques annelés du Groenland.

Ours polaire

Les concentrations de mercure déterminées dans les ours polaires au cours de cette étude varient de 0,6 à 133,7 ng/g ps dans les dents et de 0,05 à 90 µg/g ps dans les poils (Tableau III.2). Ainsi, comme pour les phoques annelés, les concentrations obtenues dans les poils des ours polaires sont ca 1000 fois plus importantes que celles obtenues dans les dents. La figure III.2 illustre ce facteur de différence entre les niveaux d’imprégnation par le mercure pour 29 ours polaires pour lesquels le prélèvement à la fois de dents et de poils a pu être réalisé ; il s’agit de 11 individus du Nord de l’Arctique canadien datant de 1914 et 18 de la région Sud de l’Arctique canadien datant de 2009.

Figure III.2. Comparaison des niveaux de mercure (en µ g/g ps) dans les dents et les poils de 29 ours polaires du Canada. Les barres verticales aux extrémités des boîtes représentent les valeurs maximales et minimales, le trait en gras, la valeur médiane, tandis que les points représentent les individus détectés comme outliers. L’axe des ordonnées est gradué en échelle logarithmique.

Le tableau III.2 présente les concentrations de mercure déterminées dans les dents et les poils d’ours polaires de différentes régions de l’Arctique dans le cadre de cette étude, ainsi que celles rapportées dans la littérature relatives à cette espèce et à ces deux tissus. Les ours polaires de l’Arctique canadien sont arbitrairement divisés en deux groupes, la région Sud regroupant les 3 sub-populations les plus au sud, et la région Nord, regroupant les 10 autres.

Chez l’ours polaire, les concentrations de mercure déterminées dans les dents varient d’une région géographique à une autre, avec une moyenne ± écart-type (sd) de 6,0 ± 8,3 ng/g ps pour les individus de Svalbard à 26,3 ± 19,4 ng/g ps pour ceux au Nord de l’Arctique canadien. Les concentrations trouvées dans les dents des individus de l’Est du Groenland apparaissent similaires à celles déterminées dans les ours de Svalbard, toutefois, les périodes temporelles comparées pour ces individus diffèrent. En outre, une différence importante dans les niveaux d’imprégnation des poils peut être observée entre les ours polaires provenant du Nord de l’Arctique canadien et les individus du Sud, une différence à laquelle s’associe une grande variabilité d’ordre individuel ou temporel ou encore liée à une hétérogénéité importante au sein de chaque zone (Partie II). Les concentrations de mercure obtenues dans les poils des ours polaires varient de 1,8 ± 0,6 µ g/g ps pour les ours polaires de Svalbard à 17,2 ± 12,8 µg/g ps pour les individus de la région Nord du Canada arctique pour une même période. Ces concentrations déterminées dans le cadre de cette étude apparaissent ainsi être du même ordre que celles rapportées dans la littérature.

Comme pour les dents, les concentrations en mercure se révèlent être ainsi beaucoup plus importantes dans les ours du Nord de l’Arctique canadien que dans les individus de Svalbard, avec des concentrations intermédiaires observées dans les ours du Groenland. Par ailleurs, une différence spatiale des concentrations de mercure dans les poils des ours polaires de l’Arctique canadien, similaire à celle détectée pour les dents, peut être observée entre les régions Nord et Sud. Enfin, une grande variabilité dans les concentrations de mercure dans les poils est à noter pour ces individus contemporains du Nord du Canada arctique, comme il avait été observé pour les dents des individus de cette région, reflétant ainsi des variations soit d’ordre individuel, soit une grande hétérogénéité d’ordre spatial au sein même du territoire Nord de l’Arctique canadien.