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La bio-huile est définie comme le liquide récupéré après la condensation des vapeurs de PF. Sa composition dépend de la nature de la biomasse, du type et des conditions opératoires du réacteur et, du système de condensation utilisé. Dans ce paragraphe nous aborderons les caractéristiques d’une bio-huile standard, produite dans des conditions opératoires typiques d’un système de PF conventionnel, c’est-à-dire : une taille de particules de biomasse millimétrique, un faible temps de séjours des vapeurs (<2s) et, une température de réaction comprise entre 450°C et 500°C.

La bio-huile est une substance complexe avec, généralement, plus d’une centaine de molécules organiques dans différentes concentrations, de l’eau et des microparticules solides de charbon entrainées avec le flux principal des vapeurs.

En termes morphologiques, la bio-huile se présente sous forme d’émulsion dont la structure dépend fortement du type de biomasse utilisée. Une bio-huile issue de la PF de bois contient typiquement entre 15-30%(m/m) d’eau et se présente comme une émulsion homogène d’une phase continue organique et d’une phase discontinue de goulettes d’eau. Au contraire, pour une bio-huile issue de la PF d’un résidu agricole, la forte présence des matières inorganiques dans la biomasse favorisera la production d’eau lors de la PF avec pour effet la démixtion de la bio-huile en deux phases: une phase organique à faible teneur en eau et, une phase aqueuse avec une certaine quantité des composants organiques solubilisés. Dans le cas d’une biomasse à forte teneur en extractibles (résineux, écorces…), la bio-huile peut présenter une troisième phase riche en composés phénoliques extractibles et de faible teneur en eau.

Au niveau chimique, la bio-huile est une matrice complexe constituée par des molécules de polarité et volatilité différentes qui nécessite des fractionnements préalables pour son analyse ainsi que plusieurs techniques analytiques en parallèle pour couvrir la large gamme de constituants. L’élucidation de la composition chimique des bio-huiles a progressée en parallèle au développement des techniques analytiques au cours de 40 dernières années. Ces avancées ont porté généralement sur le couplage d’une première étape séparative avec une deuxième étape d’indentification-quantification. Diverses revues recensant les méthodes analytiques utilisées pour la caractérisation des bio-huiles sont disponibles dans la literature168–172. Ci-dessous, nous présentons une liste non exhaustive des techniques analytiques les plus utilisées :

- méthodes séparatives : le fractionnement chimique (LLE)173, SPME172, la chromatographie en phase gazeuse (GC) ou liquide (SEC).

- méthode spectrométriques : UV, FTIR, MS, NMR, 31P-NMR174, 2D-NMR171, ESR, FT-ICR172

- méthodes d’analyse par voie humide (dosages): la potentiométrie, colorimétrie, acidité (TAN)175, détermination teneur en fonctions caboxyliques176.

- Analyse thermogravimétrique.

- Microscopie optique177,178, SEM179 ou diffractométrie SANS180. - Analyse élémentaire.

Compte tenu de la grande quantité et diversité des molécules présentes dans les bio-huiles il n’est pas possible d’établir une liste exhaustive et générale de toutes les molécules présentes dans la

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huile. Néanmoins, celles-ci peuvent être classifiées en quatre grands groupes en fonction de leurs propriétés physico-chimiques et, en particulier de leur masse molaire et température d’ébullition. Suivant cette classification, nous présentons dans la Figure 16, un exemple d’une bio-huile obtenue à partir de la PF du bois de feuillu. Notons que dans cette classification le terme « volatile » fait référence aux molécules présentes dans les bio-huiles analysables par chromatographie en phase gazeuse (Mw<200 g.mol-1).

Figure 16 : Composition d’une bio-huile typique issue de la PF de bois.

La composition de la fraction organique volatile a été amplement caractérisée par couplage de la chromatographie en phase gaz et la spectroscopie de masse. En général, cette fraction est composée par un grand groupe des molécules oxygénées de polarité variable, telles que :

- Des fonctions oxygénées de faible masse molaire : aldéhydes, cétones, acides carboxyliques et alcools.

- Monomères à motif furane ou pyranne.

- Mono-phénols avec différente dégrée de substitution, soit : méthyl, hydroxy, methoxy ou phénylpropane

Par sa nature oligomèrique (Mw >200 g.mol-1) la composition de la fraction organique non-volatile a été beaucoup moins élucidée. Cette fraction, est majoritairement constituée des oligomères provenant de la décomposition partielle de holocelluloses et de la lignine, dégagés de la particule de biomasse sous forme d’aérosols. Le caractère hydrophile des oligomères provenant des holocelluloses contraste avec le caractère hydrophobe des oligomères de la lignine168. Cette différence permet d’isoler la fraction oligomèrique à fort caractère aromatique par simple précipitation de la bio-huile dans l’eau. Le précipitât formé est nommée : lignine pyrolytique (LP). D’après Stankovikj et al.174, plus du 80% des motifs phénoliques présents dans la bio-huile, constituent des oligomères. Par ce fait, s’inspirant de l’ample éventail des techniques et méthodes analytiques développées pour la caractérisation des lignines natives181, divers auteurs se sont intéressés à la caractérisation de la structure et composition chimique de ces oligomères, généralement extraits sous forme de LP182–189. La LP est un hétéro-polymère à fort caractère aromatique dont la structure et la composition dépendent de : (1) L’espèce de biomasse, (2) des conditions opératoires du réacteur de PF et, (3) du processus d’extraction de la bio-huile. Sur la base des résultats disponibles, il peut être affirmé que la LP d’une bio-huile standard présente une nature poly-dispersée, constituée majoritairement par des oligomères de deux à huit motifs phénoliques

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avec une masse molaire qui varie dans une gamme entre 200 et 2000 g.mol-1. A titre d’exemple, la Figure 17-A illustre les fonctionnalités identifiées pour une « unité » de LP extraite d’une bio-huile produite à partir du hêtre. D’après Fratinni et al.180, des nanostructures (micelles) pourraient être formées par association des unités de LP au sein de la bio-huile (Figure 17-B). Sous une hypothèse de structure ouverte, une sphère de volume équivalent à ce d’une micelle présenterait un diamètre approximé de 7Å.

Figure 17: (A) Structure et fonctions d’une « unité » de LP de formule moléculaire (C76H67O21) et masse moléculaire égal à 1315Da et, (B) deux possible modèles des micelles formées par association de neuf unités de tétramères constituées par monolignols du type G (Adapte de180,185).

Moins étudiée que la LP, la fraction d’oligomères provenant de la décomposition des carbohydrates peut atteindre des rendements supérieurs au 20% de la masse de bio-huile brute. Ces oligomères sont constitués majoritairement par des motifs furaniques et pyraniques et se caractérisent pour leur haute solubilité dans l’eau. Après son isolement du reste de la bio-huile, cette fraction constitue un « sirop » avec une distribution de Mw dans une gamme entre 200 et 800 g.mol-1 dans le cas d’une bio-huile produite par PF du hêtre172. L’hydrolyse190 ou l’acetilization172 sont deux techniques typiquement utilisées pour simplifier l’analyse de cette fraction.

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