I.2 Les alliages de magnésium
I.2.3 Comportement mécanique à chaud
L'augmentation de la température va permettre d'activer d'autres mécanismes de
déforma-tion engendrant ainsi une plus grande déformadéforma-tion des matériaux. Il existe trois grands
méca-nismes de déformation à chaud : le uage par mouvement des dislocations, le glissement aux
joints de grains et le uage par diusion. Ces trois mécanismes peuvent être décrits par la loi de
uage suivante :
˙
ε=ADGb
k
BT
σ
E
nb
d
p, (I.9)
D=D
oexp (−Q/RT) le coecient de diusion approprié (m
2.s
−1), σ la contrainte
d'écoule-ment, E le module d'élasticité, b le vecteur de Burgers, d la taille de grain moyenne, n l'exposant
de contrainte et p le coecient de sensibilité de la vitesse de déformation à la taille des grains.
On utilise également souvent le coecient de sensibilité à la vitesse de déformation m, qui est
l'inverse de l'exposant de contrainte n. Les valeurs de D, p et n vont permettre d'indiquer la
prédominance d'un des mécanismes de déformation par rapport à l'autre.
I.2.3.1 Déformation par mouvement des dislocations
À chaud, en plus du mouvement des dislocations par glissement, vient s'ajouter la montée des
dislocations. La déformation va alors être contrôlée par le mécanisme le plus lent des deux. Pour
ce mécanisme la taille de grain n'intervient quasiment pas (p≈0), le uage est alors décrit par
une loi puissance avec n supérieur ou égal à 3 et Q correspond alors à l'énergie d'activation de la
diusion en volume. En plus de ces phénomènes thermoactivés qui se mettent en place, la bonne
déformabilité des alliages de magnésium provient également de la chute de la CRSS des plans
non-basaux. Une étude a été faite sur l'évolution de la CRSS des diérents plans activables par
Barnett et al. Ils ont constaté qu'à 400 K la valeur de la CRSS des plans non basaux chutait d'un
facteur 100, alors que celle du glissement basal diminuait d'un facteur d'environ 1,2 [Barnett et
al., 2004].
Lors d'une forte déformation à chaud du matériau une recristallisation dynamique peut avoir
lieu en même temps que le matériau se déforme ; ce qui a été observé dans le cas d'alliages de
magnésium [Boissière, 2008; del Valle and Ruano, 2008; Tan and Tan, 2003a].
40% de déformation
(a)
100% de déformation
(b)
Figure I.26 Microstructures de l'alliage AZ31 au cours d'un essai de traction à 523 K et une vitesse
de déformation de 1.10
−4s
−1: après 40% de déformation (a) et après 100% de déformation (b) [Tan
and Tan, 2003a].
Tan et al. ont montré que les paramètres permettant un anement maximal de la
microstruc-ture, dans le cas de l'AZ31 (d'une taille de grains initiale de 12 µm), sont une température de
I.2. Les alliages de magnésium
523 K et une vitesse de déformation de1.10
−4s
−1. La gure I.26 présente leurs microstructures
observées après diérents taux de déformation [Tan and Tan, 2003a].
Maclage à haute température : Le paramètre de Zener-Hollomon, déni par l'équation
I.10, permet d'obtenir une équivalence température-vitesse de déformation.
Z = ˙εexp (Q
vRT), (I.10)
avecε˙la vitesse de déformation,Q
vl'énergie d'activation de la diusion en volume, R la constante
des gaz parfaits et T la température.
En fonction de ce paramètre Z et de la taille de grain, Barnett et al. ont tracé le diagramme gure
I.27, qui permet de prédire les zones de prédominance du maclage par rapport au glissement des
dislocations [Barnett et al., 2004]. La variable d
∗correspond à la taille de grain critique pour
laquelle on passe d'un mécanisme à l'autre.
Prédominance du
maclage
Prédominance du
glissement des
dislocations
d*
Figure I.27 Transition entre un mécanisme de déformation par maclage et par mouvement de
disloca-tions, en fonction du paramètre de Zener-Hollomon et de la taille de grains dans le cas d'une sollicitation
en compression [Barnett et al., 2004].
Par exemple pour une taille de grain de 25 µm et une vitesse de déformation maximale de
1.10
−3s
−1, l'activation du maclage se fera pour un Z supérieur à environ7.10
11s
−1et donc pour
des températures inférieures à environ 473 K.
I.2.3.2 Glissement aux joints de grains
Bien que la déformation par mouvement des dislocations soit le mécanisme le plus courant,
il est possible de se placer dans des conditions de superplasticité en activant du Glissement aux
Joints de Grains (GJG), permettant généralement d'obtenir des déformations très importantes.
La valeur de n de l'équation de uage (équation I.9) est alors proche de 2 et la taille de grains
a alors une grande inuence. Les valeurs de p diérent suivant que le glissement aux joints de
grains est accommodé par la diusion en volume (p= 2) ou par la diusion aux joints de grains
(p= 3). Un comportement superplastique a été observé pour de nombreux alliages de magnésium
et les études réalisées montrent que le glissement aux joints de grains est favorisé pour des tailles
de grains nes. L'obtention d'une microstructure ne peut se faire par un traitement
thermo-mécanique classique de recristallisation ou bien par Extrusion Coudée à Aire Egale (ECAE)
[Mussi, 2003; Lapovok et al., 2008]. Des valeurs d'allongement à rupture en traction de300% à
900%ont pu être obtenues dans le cas d'alliages traités thermo-mécaniquement [Lapovok et al.,
2008]. Une autre approche proposée par Tan et al. consiste à engendrer de la recristallisation
dynamique an que les grains issus de cette recristallisation permettent du glissement aux joints
de grains et ainsi une déformation superplastique de l'alliage [Tan and Tan, 2003b].
Outre le rôle essentiel d'une taille de grains ne, les auteurs ont mis en évidence l'importance
de la vitesse de déformation et de la température dans l'activation du glissement aux joints de
grains [del Valle et al., 2005; Boissière, 2008].
0 10 20 30 40 50 60 70 0 0.5 1 1.5 2
e
s
(MPa)
6*10-4s-1 1*10-4s-1AZ31
400 °C
α=90°
1*10-2s-1 5*10-2s-1 5*10-3s-1 1*10-3s-1673 K
(a)
Température ambiante 373 K 523 K 473 K 573 K 623 K 673 K(b)
Figure I.28 Courbes contrainte-déformation en traction d'un alliage d'AZ31 avec une taille de grains
initiale de 15 µm. Eet de la vitesse de déformation sur l'allongement à rupture à une température de
673 K (a). Eet de la température sur l'allongement à rupture à une vitesse de déformation de6.10
−4s
−1I.2. Les alliages de magnésium
Les courbes de la gure I.28 montrent que la capacité de déformation augmente grandement
pour des vitesses de déformation faibles et pour des températures élevées. La gure I.28.a montre
qu'une diminution de la vitesse de déformation diminue la contrainte d'écoulement et augmente
la déformation à rupture et sur la gure I.28.b, on constate bien que l'augmentation de la
température améliore la capacité de déformation du matériau.
I.2.3.3 Domaine des mécanismes de déformation
À chaud la capacité de déformation du matériau est reliée au coecient de sensibilité à la
vitesse de déformation m, qui indique notamment le mécanisme de déformation préférentiel. Pour
une température donnée, en traçant le logarithme de la contrainte d'écoulement en fonction du
logarithme de la vitesse de déformation, on obtient une droite dont la pente nous donne la valeur
de m. La valeur de m permet alors de délimiter rapidement les domaines de prédominance des
mécanismes de déformation : pour m 6 0,3 on a plutôt du mouvement des dislocations et pour
m ≈ 0,5 on a plutôt du glissement aux joints de grains. Sur la gure I.29 sont regroupées les
mesures de contrainte d'écoulement en fonction de la vitesse de déformation pour diérentes
températures dans le cas d'un alliage de magnésium AZ31 d'une taille de grain d'environ 15µm
[Boissière, 2008].
Con
tr
ai
nt
e
d’
éc
ou
le
me
nt
(
MPa
)
Vitesse de déformation (s
-1)
673 K
623 K
573 K
523 K
m ≈ 0,2 m ≈ 0,3 m ≈ 0,7Figure I.29 Courbes de contraintes d'écoulement en fonction de la vitesse de déformation pour
dié-rentes températures mesurées pour un alliage de magnésium AZ31. La valeur du coecient de sensibilité
à la vitesse m est donnée par la pente des droites. [Boissière, 2008]
vitesse de déformation augmente et pour une vitesse de déformation donnée, m augmente avec
la température qui augmente. Ces variations de m indiquent un changement de mécanisme de
déformation. Pour une température de 673 K, à partir d'une vitesse de déformation de6.10
−4s
−1,
m prend des valeurs supérieures à 0,5 qui sont associées à l'activation du glissement aux joints
de grains. On peut ainsi dénir un domaine susceptible de mettre en jeu de la superplasticité.
Dans le document
Elaboration par co-déformation de matériaux stratifiés alliage léger / verre métallique
(Page 46-52)