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Comportement g´ en´ erique et probabilit´ e de r´ eussite

3.2 La variante de F4

3.2.2 Comportement g´ en´ erique et probabilit´ e de r´ eussite

Si{f

10

, . . . , f

r0

}et{f

1

, . . . , f

r

}sont deux syst`emes similaires instances du syst`eme param´etrique

g´en´erique {F

1

, . . . , F

r

}, on souhaite estimer la probabilit´e de r´eussite de l’algorithme F4Remake

de comportement g´en´erique pour une instance al´eatoire d’un syst`eme param´etr´e.

D’un point de vue th´eorique, on peut toujours calculer une base de Gr¨obner de l’id´eal engendr´e

par {F

1

, . . . , F

r

} dans K(V)[X

1

, . . . , X

n

] avec l’algorithme F4 (mˆeme si en pratique, on s’attend

`

a une “explosion” de la taille des coefficients sous forme de fractions rationnelles). On dit que

{f

1

, . . . , f

r

}se comporte g´en´eriquementsi durant le calcul de la base de Gr¨obner de l’id´eal associ´e

avec l’algorithme F4 :

– le mˆeme nombre d’´etapes que pour le calcul du syst`eme g´en´erique est consid´er´e ;

– `a chaque ´etape, le mˆeme nombre de nouveaux g´en´erateurs apparaˆıt avec les mˆemes monˆomes

de tˆete.

Avec cette d´efinition, on peut donner une condition alg´ebrique pour le comportement g´en´erique

d’un syst`eme. On suppose que le syst`eme {f

1

, . . . , f

r

} s’est comport´e g´en´eriquement jusqu’`a la

(i−1)-i`eme ´etape du calcul. En particulier, ceci implique que toutes les paires critiques impliqu´ees

`

a l’´etapeidu calcul pour le syst`eme g´en´erique et l’instance al´eatoire sontsimilairesau sens suivant :

(lcm, u

1

, p

1

, u

2

, p

2

) est similaire`a (lcm

0

, u

01

, p

01

, u

02

, p

02

) si LM(p

i

) =LM(p

0i

) pour i= 1,2

(en particulier, u

i

=u

0i

etlcm=lcm

0

). On consid`ere maintenant les matricesM

g

etM construites

par F4 `a l’´etapei pour le syst`eme g´en´erique et l’instance al´eatoire respectivement. Il est possible

qu’apr`es le pr´eprocessingM soit plus petite queM

g

, mais on supposera pour la d´emonstration que

les multiples des polynˆomes manquants ont ´et´e ajout´es `a M; bien entendu, ces lignes suppl´

emen-taires n’influenceront en rien la suite du calcul de la base de Gr¨obner pour l’instance. Par hypoth`ese,

toutes les lignes deM etM

g

vues comme des polynˆomes ont donc exactement les mˆemes monˆomes

de tˆete ; on notesle nombre de monˆomes de tˆete distincts pour chacune des matrices. Comme d´ej`a

expliqu´e dans la section 2.3, on remarque que l’algorithme F4 construit des matrices quasiment

triangulaires sup´erieures, et que donc s est proche du nombre de lignes des matrices M

g

ou M.

Quitte `a faire des ´echanges de lignes et de colonnes, on peut ramener M

g

et M sous la forme

pr´esent´ee en section 2.3.3 :

s LT(M) RTZ Ag,0

0 A

g,1

A

g,2

A

g,3

M

g

=

A0

0 A

1

A

2

A

3

M =

Les deux matrices ayant les mˆemes termes de tˆete, on peut ´echelonner les s premi`eres colonnes

similairement pour les deux ; soient M

g0

et M

0

les matrices correspondantes.

s LT(M) RTZ

I

s

B

g,1

B

g,2

0

M

g0

=

I

s

B

10

B

20

0

M

0

=

On note ˜M

g

la forme ´echelon r´eduite de M

g0

et r = s+` le rang de cette matrice qui contient

´

s LT(M) RTZ

I

s

0 C

g,1

0 I

`

C

g,2 0 0 0

˜

M

g

=

o`u l’on a repr´esent´e en vert les colonnes des nouveaux pivots. Si l’on fait les mˆemes ´echanges de

colonnes sur M

0

, on obtient la matrice ˜M suivante :

I

s

B

1

0 B B

2

˜

M =

o`u la matrice B contient ` colonnes. Si jamais l’un des pivots consid´er´es dans M

g

s’annule apr`es

sp´ecialisation des param`etres dans la matrice B, les monˆomes de tˆete des polynˆomes g´en´er´es `a

cette ´etape pour l’instance seront distincts de ceux obtenus pour la matrice g´en´eratrice ; en effet les

monˆomes correspondant aux colonnes de la matricesB

2

sont par construction tous plus petits que

ceux associ´es aux colonnes deB, on ne peut donc pas esp´erer faire un ´echange de colonnes qui

com-pense la perte de ce pivot. Il est donc clair que le syst`eme {f

1

, . . . , f

r

} se comporte g´en´eriquement

`

a l’´etapeidu calcul si et seulement si la matriceB obtenue `a cette ´etape est de rang plein.

Afin de donner des estim´ees sur la probabilit´e que cette matrice soit de rang plein `a chaque

´

etape, on supposera d´esormais que l’on travaille sur le corps K = F

q

. On fera de plus les deux

hypoth`eses heuristiques suivantes :

1. les coefficients des matricesB intervenant `a chaque ´etape de l’algorithme sont uniform´ement

distribu´es dansF

q

;

2. les probabilit´es pour chaque matriceB d’ˆetre de rang plein `a une ´etape sont ind´ependantes.

La premi`ere hypoth`ese semble naturelle pour les syst`emes `a coefficients al´eatoires : `a la premi`ere

´

etape, les coefficients sont par construction choisis al´eatoirement dans F

q

, et lors des ´etapes

sui-vantes, on se convainc que les op´erations de mise sous forme ´echelon sont suffisamment m´elangeantes

pour uniformiser les coefficients. Elle est plus critiquable pour les instances al´eatoires de syst`emes

param´etr´es g´en´eriques ; il est par exemple tout `a fait possible que certains coefficients des

po-lynˆomes g´en´eriques soient ind´ependants des param`etres, donc `a valeurs dans F

q

(et non F

q

(V))

et constants pour chaque sp´ecialisation. Un cas particulier important est celui des syst`emes

pa-ram´etr´es g´en´eriques dont la partie homog`ene de plus haut degr´e a ses coefficients constants : dans

ce cas, toutes les instances al´eatoires vont se comporter g´en´eriquement jusqu’`a la premi`ere chute de

degr´e. En particulier, la probabilit´e de succ`es de notre algorithme peut dans ce cas ˆetre meilleure

que pour les syst`emes al´eatoires, mˆeme lorsque le corps de base est relativement petit. On renvoie

aux exemples de la section 3.3 pour plus de d´etails. La deuxi`eme hypoth`ese doit ˆetre per¸cue comme

le “pire cas” ; en effet, on peut s’attendre en pratique `a ce que si une matrice est de rang plein `a

une ´etape, les suivantes tendent `a l’ˆetre ´egalement, c’est-`a-dire que les corr´elations sont positives.

N´eanmoins, les estim´ees qui seront obtenues sous ces hypoth`eses seront satisfaisantes comme on le

verra avec l’exemple de calcul exhaustif donn´e en section 3.3.2.

Sous les hypoth`eses 1 et 2, le lemme et le th´eor`eme suivants donnent alors la probabilit´e de

succ`es de notre variante F4 :

Lemme 3.2.1. Soit M = (m

ij

) ∈ M

n,`

(F

q

), o`u n ≥ `, une matrice al´eatoire, i.e. dont les

coef-ficients m

ij

sont choisis al´eatoirement de fa¸con ind´ependante et uniforme dans F

q

. Alors M est

de rang plein avec la probabilit´eQ

n

i=n−`+1

(1−q

i

). Une borne inf´erieure pour cette probabilit´e est

donn´ee par :

c(q) =

Y

i=1

(1−q

i

)≥

q−1

q

q q−1

.

En particulier, lorsqueq est grand,c(q) = 1−1/q+O(1/q

2

) et la probabilit´e pour M d’ˆetre de rang

plein est tr`es proche de 1.

Pour garantir le comportement g´en´erique d’un syst`eme, les matrices B intervenant `a chaque

´

etape de l’algorithme doivent ˆetre de rang plein.

Th´eor`eme 3.2.2.Si l’on suppose que le pr´ecalcul a ´et´e fait avecF4Precompenn

step

´etapes pour un

syst`eme f

10

, . . . , f

r0

F

q

[X

1

, . . . , X

n

] qui se comporte g´en´eriquement, alors l’algorithme F4Remake

calcule une base de Gr¨obner d’un syst`eme al´eatoiref

1

, . . . , f

r

F

q

[X

1

, . . . , X

n

]instance de la mˆeme

famille param´etr´ee avec une probabilit´e qui est heuristiquement plus grande que c(q)

nstep

.

D’apr`es les r´esultats donn´es en section 2.2, le nombre d’´etapes n

step

dans le calcul de la base

de Gr¨obner d’un syst`eme g´en´erique de polynˆomes avec l’algorithme F4 pour un ordre monomial

gradu´e, est major´e par le degr´e de r´egularit´e d

reg

du syst`eme homog´en´eis´e, qui est plus petit que

la borne de Macaulay P

r

i=1

(deg(F

i

)−1) + 1. Plus la taille du corps F

q

est grande, plus c(q) est

proche de 1, donc `a degr´e de r´egularit´e fix´e, la probabilit´e de r´eussite de notre algorithme sera tr`es

proche de 1 lorsque le corps de base F

q

est suffisamment grand.