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konsé i  na fans‐us 3 2 asymétrique 

4 Les déterminants en contact

4.3 Comparaison des GNs unilingue et mixte de mon corpus

Mon corpus permet de constater l’existence de deux types d'utilisation des déterminants des GNs, l’une en contexte unilingue et l’autre en contexte mixte. Dans cette section, il s'agit de faire une comparaison de ces déterminants dans ces deux contextes d'utilisation et d'en tirer des conclusions.

Tableau 29. Occurrences générales des déterminants dans le corpus

Déterminants Proportion de chaque langue dans mon corpus Langues Contexte Unilingue % Mixte % casamançais 399 74 91 65 71, 3% français 104 19 05 4 15,5% wolof 36 7 43 31 13% Total 539 100 139 100

Ce tableau révèle une nette domination de l'emploi des déterminants casamançais en contexte unilingue (DET casa + N casa = 74%) comme en contexte mixte (65%) dans mon corpus. Les déterminants wolofs, pour leur part, sont comparativement beaucoup plus utilisés pour déterminer un objet dans une autre

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langue qu’en contexte unilingue (contexte mixte : DET wol + N {casa ; fra ; und} = 31% contre 7% en contexte unilingue), alors que les déterminants français sont beaucoup moins utilisés pour déterminer un objet dans une autre langue qu’en contexte unilingue (avec seulement 4% d’occurrences en contexte mixte – soit 5 cas dont 4 déterminent un objet en casamançais – contre 19% en contexte unilingue) (cf. tableau 31).

Par ailleurs, en contexte mixte, il y a une spécialisation des langues des déterminants en fonction du type de détermination dans mon corpus comme on peut l'observer dans le tableau 30.

Tableau 30. Nombre d'occurrences par rapport au type de déterminant en contexte mixte

Langues

wolof français casamançais Type de déterminant Défini 34 0 0 Indéfini 3 0 21 Démonstratif 0 0 25 Possessif 4 0 33 Interrogatif 1 0 4 Qualificatif 0 4 6 Numéral 1 1 2

Dans le tableau ci-dessus, on voit que, en contexte mixte :

– (1) les déterminants définis sont tous wolofs. Cela s’explique par le fait que le casamançais (statistiquement dominant dans le corpus, cf. tableau 29) n’a pas de déterminant défini (cf. 4.1.3.1) correspondant à l’article du wolof.

– (2) le casamançais domine de façon très nette pour tous les autres types de déterminants. Au niveau du déterminant (à l’exception du défini), c’est donc le créole casamançais qui impose son système grammatical en contexte mixte.

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– (3) en ce qui concerne les déterminants qualificatifs, le français (dont les déterminants sont très rares en contexte mixte) est représenté. Cette absence du wolof s’explique par le fait que le déterminant qualificatif est systématiquement exprimé au moyen de verbes en wolof (cf. 4.1.1.6) et que, au niveau du groupe nominal, le wolof n’a pas de déterminants qualificatifs comparables à ceux du français et du casamançais.

Tableau 31107. Langue des déterminants et langue des noms déterminés en contexte mixte dans mon corpus

Langue des déterminants Langue du nom déterminé Nombre d’occurrences casamançais français 68 wolof 03 und 00 mul 9 mixte 11 Total 91 français casamançais 04 wolof 00 und 00 mul 00 mixte 1 Total 05 wolof casamançais 00 français 27 und 00 mul 16 mixte 00 Total 43

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Tableau 32. Nombre de noms d’une langue donnée combinés avec un déterminant provenant d’une autre langue en contexte mixte dans mon corpus

Langue du nom déterminé Langue du déterminant Occurrences

casamançais français ou wolof 05

français casamançais ou wolof 95

wolof casamançais ou français 03

Les deux tableaux ci-dessus révèlent une dissymétrie nette entre le casamançais et le wolof d’une part et le français d’autre part :

– les noms casamançais et wolof sont rarement déterminés, en contexte mixte, par un déterminant dans une autre langue (respectivement 5 et 3 occurrences). – en revanche, toujours en contexte mixte, les noms français sont très fréquemment combinés avec un déterminant wolof ou casamançais (95 occurrences dans mon corpus).

Ainsi donc, au niveau du groupe nominal et du système des déterminants, en contexte mixte et dans mon corpus, ce sont en pratique les systèmes des déterminants du casamançais et du wolof qui coexistent tandis que l’apport du français consiste essentiellement en des lexèmes nominaux. De plus, en contexte mixte, le français a généralement un emploi de déterminé et non de déterminant. Les données que j’ai recueillies démontrent donc bien l’existence d’une dissymétrie entre les rôles respectifs du wolof et du créole casamançais d'une part et du français d’autre part dans les mécanismes de détermination en contexte mixte dans mon corpus.

Si on s’intéresse davantage au cas des déterminants possessifs dans mon corpus, on remarque qu’en contexte unilingue il y a 202 occurrences en casamançais, 6 en français et 11 en wolof. En contexte mixte, il y a 33 occurrences en casamançais, 4 en wolof et aucune en français. Tous les cas observés relèvent de valeurs particulières. En casamançais, les cas relevés

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incluent toutes les personnes grammaticales, sauf la deuxième personne du pluriel. Il y a une prédominance de la troisième personne du singulier (15 cas). Nous pouvons retenir ainsi qu’en contexte mixte, dans mon corpus, c’est la troisième personne du singulier qui est la plus utilisée en casamançais pour exprimer la détermination possessive comme on peut le constater dans le tableau 33. Les formes réalisées au singulier (avec 28 cas) sont plus importantes que celles réalisées au pluriel (avec 4 cas). Ceci pourrait être expliqué par le fait que généralement (en contexte unilingue) les formes du singulier sont plus fréquentes et plus courtes que celles du pluriel (Haspelmath 2012, 1), ce qui est dû aussi bien à des causes liées à des motivations économiques c'est-à-dire « the competition between frequency-based form minimization »108 qu'à des motivations dues à la pression du système c'est-à-dire « the tendency or grammatical coding to target entire classes of items »109(Haspelmath 2012, 1).

Tableau 33. Occurrences des déterminants possessifs en casamançais en contexte mixte dans le corpus

Personne Forme Transcription Traduction française

Nombre d’occurrences

Singulier 1ère ña /ɲa/ ma, mon,

mes

9

2ème bu /bu/ ta, ton, tes 5

3ème si /si/ sa, son, ses 15

Pluriel 1ère no /no/ notre, nos 3

2ème bo /bo/ votre, vos 0

3ème se /se/ Leur, leurs 1

108 La concurrence entre la forme de minimisation basée sur la fréquence. [Traduction mienne] 109 La tendance ou codage grammatical de cibler des catégories entières d'items. [Traduction mienne]

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4.4 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons vu que les déterminants présentent, dans mon corpus, des emplois diversifiés et qu’ils peuvent en particulier se combiner de nombreuses façons avec des noms de différentes langues. Selon qu’on est en contexte mixte ou unilingue, l’importance respective de chacune des trois langues en contact varie de manière considérable en ce qui concerne l’usage des déterminants : les déterminants wolofs sont beaucoup plus fréquemment employés en contexte mixte qu’en contexte unilingue ; on observe une tendance inverse pour le français tandis que le casamançais domine de façon nette dans les deux contextes.

Le résultat le plus remarquable de cette étude est certainement la dissymétrie que j’ai pu observer en contexte mixte entre le casamançais et le wolof d’une part, dont les déterminants coexistent et d’autre part, le français qui, en contexte mixte, fournit essentiellement des éléments lexicaux.

Par ailleurs, j’ai pu mettre en évidence en contexte mixte une spécialisation des langues des déterminants en fonction du type de détermination dans mon corpus. Ainsi, le wolof domine dans le domaine de la détermination définie. Tandis que le casamançais domine dans tous les autres types de détermination et que le français semble n’être utilisé de façon significative qu’au niveau des déterminants qualificatifs.

Notons aussi que, dans certains cas, il est dificile de dire à quelle langue appartiennent certains déterminants du fait qu'ils sont susceptibles d'appartenir à plusieurs langues.

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