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konsé i  na fans‐us 3 2 asymétrique 

19. e ta bay na continuer se étude

[e ta baj na kɔ̃tinye se etyd]

3SG.SBJ AS.HAB aller EN.ASRT continuer POSS.3PL étude

PRN PRT V PRT V PRN N

Ils vont continuer leurs études

Dans cet exemple, ce qui est remarquable c'est la combinaison de la marque du possessif casamançais de troisième personne du pluriel renvoyant à plusieurs possesseurs avec le nom français étude /etyd/ sans que ce dernier mot ne prenne de marque segmentale de pluriel. Ceci est remarquable dans la mesure où, en créole de Casamance, au pluriel, les noms exprimant des entités plurielles précédés d'un possessif renvoyant à des possesseurs pluriels (ici le possessif se) prennent la marque du pluriel (se karus = leurs voitures). Par ailleurs, la séquence se /se/ ne provient visiblement pas du possessif français ses (qui aurait pu être employé à la place du français standard leur dans un usage populaire) car, si /se/ provenait du français, la réalisation phonologique de ses étude serait /sezetyd/ (phénomène de liaison) et non /se etyd/. On a donc dans cet exemple, un mot français inséré précédé d'un déterminant en créole de Casamance mais dépourvu de la marque segmentale de pluriel que ce déterminant est censé contrôler.

12) Recatégorisation grammaticale

20. jënd-al popoline après ñu batik la

acheter-2SG.IMP popoline après.ADV 3PL.SBJ batik 2SG.OBJ

V N ADV PRN V PRN

Achète du popoline après on te batik (= achète du popoline pour qu’on t’en fasse du batik)

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Ce qui est remarquable dans cet exemple c'est la recatégorisation grammaticale du mot français batik73. En effet, ce mot, qui est à l'origine un nom en français, est employé dans ce contexte mixte en tant que verbe, puisqu'il est précédé du pronom personnel sujet wolof ñu et suivi du pronom personnel objet wolof la.

13) Doubling

J'entends par doubling, au sens de Polleto (2006, 211), des cas de double détermination dans lesquels les deux éléments doublés sont morphologiquement dictincts même s'ils forment une seule unité du point de vue sémantique.

Dans cet exemple, ce qui est remarquable c'est l'empoi du possessif ña et du cardinal unsoŋ en créole de Casamance pour déterminer le nom français grand.

73 Ce mot n'est pas d'usage courant en France métropolitain. Il est surtout employé en afrique francophone

(Sénégal, Mali ...). Il s'agit d'une technique artisanale d'impression de «°tissu dont les motifs sont obtenus en faisant des réserves à la cire avant la teinture, à usage vestimentaire ou décoratif°» (N’Diaye Corréard 2006, 63).

21. a.

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14) Utilisation d'un suffixe d'une langue donnée en combinaison avec une base lexicale provenant d'une autre langue

22. a. faf yel ki sedi

cependant.CO 3SG.TON que.REL.SBJ COP

CONJ PRN CONJ V

En fin de compte, c'est lui qui est

b. si policier-ndadi

POSS.3SG policier-SUF

PRT N

sa propre police

Dans cet exemple, ce qui est remarquable c'est le mot policier-ndadi. Il s'agit d'une construction mixte obtenue à partir du nom français policier auquel on a postposé le suffixe casamançais -ndadi.

23 a-nos no ta ray-í na

EMPH-1PL.TOP 1PL.SBJ AS.HAB caresser.VT EN.ASRT

PRN PRN PRT V PRT

Nous, on caresse = nous on fait habituellement des câlins

Dans ce second cas, ce qui est remarquable c'est le mot mixte ray-í, constitué du verbe wolof ray (caresser) auquel on a suffixé la voyelle thématique -í du créole de Casamance.

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15) Utilisation d'une conjonction provenant d'une langue en combinaison avec des éléments provenant d'une autre langue

24. kon mais cor i i ka boŋ

donc.CO mais.CO deuil 3SG.SBJ 3SG.SBJ NEG ê.bon

CONJ CONJ N PRN PRN PRT ADJ

Donc mais (c’est un) deuil, ce n’est pas bon.

Dans cet exemple, ce qui est remarquable c'est l'emploi successif de deux conjonctions dans deux langues différentes, con (donc) en wolof et mais en français, en combinaison avec un énoncé dans une troisième langue (le créole casamançais).

16) Absence de détermination en contraste avec l'usage unilingue pour la langue employée

25. créole est considéré comme étranger Créole AS.PRF.etre considérer comme.CMPR étranger

V V V ADJ N

Le créole est considéré comme (une langue) étrangère

Ce qui est remarquable dans cet exemple c'est l'utilisation du nom français créole sans détermination alors que l'énoncé est entièrement en français et qu'on s'attendrait à ce que le nom en question soit précédé d'un déterminant (vraisemblablement un article).

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2.5 Conclusion

Mon corpus a été recueilli dans les régions du Sénégal où les créolophones sénégalais sont les plus nombreux. Ma démarche sur le terrain a été facilitée par mes différents réseaux. Le fait d'alterner différentes techniques de recueil de données et de combiner différentes situations d'enregistrement m'a permis de diversifier mes données et de les situer par rapport aux propositions de typologie de Lüdi & Py (2003) et de Vion (1992). Ceci me permet de mieux observer comment les pratiques langagières hétérogènes des créolophones casamançais mélangent créole, français et wolof.

J’ai noté un certain nombre de phénomènes intéressants dans mon corpus mais j’ai choisi de ne traiter dans cette thèse que les phénomènes remarquables concernant le repérage temporel, les déterminants et le génitif. Ce choix s’explique par trois raisons: (1) l'intérêt tout particulier que présentent les phénomènes en question pour la discussion des cadres théoriques en linguistique de contact (cf. Myers-Scotton & Jake à paraître) ; (2) la richesse des combinaisons observées en termes de mélanges de langues ; (3) la fréquence élevée de ces phénomènes dans mon corpus.

Dans le chapitre suivant, nous commencerons par nous pencher sur le repérage temporel.

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