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PARTIE I - À CHAQUE CIAP SA STRATEGIE DES PUBLICS

PARTIE 2 - LA POLITIQUE DES PUBLICS DES CIAP PRECEDEE PAR CELLE DE LA COMMUNICATION ?

4. D ES CHOIX DE COMMUNICATION ALEATOIRES D ’ UN TERRITOIRE A L ’ AUTRE

4.2. Une communication déterminée localement

C’est à partir de là que la politique de la ville, en termes de communication et de gestion des publics, va prendre toute sa mesure. À Pontoise, par exemple, où la commune clame haut et fort les couleurs de son label, l’animatrice de l’architecture et du patrimoine ne bénéficie pas d’un accès libre aux dispositifs de communication de la ville pour annoncer ses événements et communiquer sur ses actions en cours. Qu’il s’agisse des réseaux sociaux ou du site de la

Panneau du service Angers Patrimoines installé près du Musée Pincé. Cliché réalisé en juin 2019.

Panneau installé sur le pont de Verdun, à l’entrée du quartier de la Doutre. Cliché réalisé en juillet 2020.

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commune, tout doit passer par le service de communication de la ville, apparemment plutôt réactif, et ne peut faire l’objet d’un traitement particulier. Ainsi, pas de page Facebook, Twitter ou Instagram dédiée au CIAP, ni même un hashtag qui permettrait de repérer la liste des publications faites par l’équipe de Mme Prévot. Pas de possibilité non-plus de publier directement des photos d’activités ou de visites guidées dans la ville, et encore moins de gérer un site web avec un agenda dynamique et réservé au CIAP… L’équipement fait partie du giron de la municipalité, qui souhaite en contrôler le propos et la communication, comme pour tous les services de la ville. Il en va de même pour l’affichage et l’installation de panneaux dans la commune, qui répond à une réglementation très stricte. On le comprend, cela peut créer une certaine frustration chez l’AAP qui, par son passé de conservatrice et de webmaster d’un musée littéraire, a l’habitude de communiquer et connaît bien les ressources et méthodes de communication possibles.

Frustration similaire chez l’animatrice de l’architecture et du patrimoine de Plaine Commune, qui par l’organisation de sa collectivité se retrouve dépendante d’une direction aux objectifs éloignés du label qu’elle représente. Là, le CIAP toujours en projet ne bénéficie pas de la moindre communication, seul le label de Ville et Pays d’Art et d’Histoire fait l’objet d’une simple page web… sur le site de l’office de tourisme de la communauté de communes. La politique des publics a du mal à s’y mettre en place, en ce qui concerne le CIAP.

Il est à noter, pourtant, que dans son dossier de candidature au label Plaine Commune promet la mise en place d’un site web dédié, en plus d’une communication sur les supports déjà déployés par la communauté de commune.

À Bordeaux, le CIAP dispose de plusieurs pages web sur le site de la ville68, où quelques petites vidéos permettent de se rendre compte, même très vaguement, de ce qu’on peut y trouver et où un agenda spécifique recense le planning des visites guidées et des activités programmées. On y remarque un document plutôt bien détaillé destiné aux enseignants, et quelques brochures VPAH sur le patrimoine de la ville y sont téléchargeables.

Dijon communique déjà sur son projet de CIAP, notamment sur le site de la ville. Si l’accent est porté sur la Cité internationale de la gastronomie et du vin, la présence du CIAP dans ce nouvel équipement n’est pas oubliée dans la communication de la localité. Le travail de l’équipe de l’AAP peut également se lire sur le site du patrimoine et des musées de la ville69 :

68 Ville de Bordeaux. Bordeaux Patrimoine Mondial [en ligne]. Date de publication : 12 février 2018 Disponible sur : http://www.bordeaux.fr/p128626/centre-d-interpretation-bordeaux-patrimoine-mondial

[Consultée le 15.05.2020]

69 Ville de Dijon. Dijon en fascicules [en ligne]. Date de publication : 28 février 2019 Disponible sur : https://patrimoine.dijon.fr/dijon-fascicules [Consultée le 15.05.2020]

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on y retrouve très facilement les brochures publiées sous le label des VPAH. Ce site présente d’ailleurs le logo du label en bonne place auprès de ceux des Musées de France et des Musées de Dijon.

Les moyens mis en œuvre pour la communication ne sont clairement pas les mêmes d’une commune à l’autre. Sa gestion, le plus souvent cadrée par une direction de la Communication et par un élu dédié, peut dans certains cas laisser une certaine liberté aux AAP et à leurs équipes. Idem pour les pôles culturels regroupant plusieurs directions, comme on le constate à Dijon avec ce site des musées de la ville. Passer par des intermédiaires pour communiquer sur ses événements n’est pas le souci majeur, si les personnes modérant ces plateformes réagissent rapidement. Le blocage peut venir des ressources choisies pour communiquer et d’un cadre trop restreint, qui ne permet pas de donner une idée de l’attractivité et du dynamisme d’un équipement.

Il est également difficile pour les services de l’animation de l’architecture et du patrimoine d’avoir des retours sur l’intérêt marqué du public, s’il est recueilli par des dispositifs de communication mis en place par une autre direction que la leur. Le nombre de visiteurs sur une page web, de téléchargement des fascicules en ligne ou des recherches de contact sur Google, par exemple, ne leur seront fournis que si les directions de la communication leur donnent la main sur ces dispositifs… ou leur fournissent ces données. Tout un pan de l’étude de leurs publics ne sera donc disponible au CIAP que si la collectivité anticipe ce partage d’informations entre les services, ce qui accentue la disparité de traitement d’un territoire labellisé à l’autre.

On remarque ainsi combien un service des publics, dans une collectivité, dépend des autres directions que la sienne pour pouvoir s’évaluer, se développer et prendre toute sa mesure. Le management de la ville en dessinera en grande partie les contours…

L’implication des élus fait aussi communication : ainsi, nous constatons que certains élus prennent la parole et représentent aux yeux du public le responsable de ce nouvel équipement culturel en amont de son ouverture dans la presse locale, voire au journal télévisé régional. Ce fut le cas à Dijon quand François Rebsamen présenta la préfiguration de la Cité internationale de la gastronomie et du vin de sa ville, et donc du CIAP en septembre 2017, devant les caméras de France 3 Région Bourgogne-Franche-Comté. Autre exemple, l’inauguration du CIAP de Pontoise et de ses dispositifs numériques firent l’objet d’une

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couverture par la presse locale, avec des articles dans Le Parisien70 et sur le site Actu.fr71. Ils sont encore aujourd’hui dans la première page des résultats de Google quand vous recherchez les termes « CIAP Pontoise » .

On lit dans ces articles l’intérêt des élus pour leur patrimoine local et leur fierté de proposer un équipement culturel moderne. Ce sont eux, et non l’animatrice de l’architecture et du patrimoine, qui présentent le CIAP aux journalistes, et ce sont leurs bons mots qui sont repris pour illustrer le plaisir d’utiliser les dispositifs de médiation du lieu. Mais surtout, ce sont eux qui dessinent le public qui y sera accueilli :

« Le Carré Patrimoine est un lieu pour tous, petits et grands, passionnés par Pontoise ou néophytes, Pontoisiens de longue date ou visiteurs de passage. »72

Les intervenants d’un projet, dont les scénographes, peuvent aussi intervenir en amont de l’ouverture du projet pour donner une image du lieu et de son public.

70 Le Parisien.fr. Pontoise ouvre un musée high-tech pour valoriser son patrimoine [en ligne]. Date de publication :14 septembre 2017. Disponible sur : http://www.leparisien.fr/val-d-oise-95/pontoise-ouvre-un-musee-high-tech-pour-valoriser-son-patrimoine-14-09-2017-7260561.php

[Consultée le 16 mai 2020]

71 Actu.fr. Ouverture du CIAP, un carré où le patrimoine est VIP [en ligne]. Date de publication : 22 septembre 2017. Disponible sur : https://actu.fr/ile-de-france/pontoise_95500/ouverture-du-ciap-un-carre-ou-le-patrimoine-est-vip_12335067.html [Consultée le 16.05.2020]

72 Philippe Houillon, maire de Pontoise, en septembre 2017. Propos recueillis par Joseph Canu pour La

Gazette du Val d’Oise, repris sur Actu.fr.

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À Dijon, par exemple, l’agence Arc-en-Scène publie sur son site des illustrations du projet sur lequel elle travaille, et propose un montage incluant des personnages. Elles donnent ainsi à voir une population particulière, qui rentre dans la communication discursive des publics. Nous y voyons une population plutôt jeune, des familles avec des enfants en bas âge et des personnes habillées de façon très décontractée, visiblement en promenade. Ce choix de personnages d’illustration n’est pas, a priori, celui du commanditaire. Mais l’architecte ou le scénographe qui a réalisé cette vue l’a certainement faite à partir de la commande à laquelle il répond. Nous pensons donc que si ce n’est pas un support de communication réalisé par la municipalité de Dijon, elle reflète au moins en partie sa volonté.