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La communauté virtuelle

Dans le document Cyberespaces et médiatisation des cultures (Page 130-133)

L’accessibilité d’Internet, son prix abordable et l’anonymat qu’il procure contribuent au succès de ce nouveau médium (Barak et Fisher 2001 ; Barak et Fisher 2003 ; Cooper Sportolari 1997 ; Cooper, McLoughlin et Campbell 2000 ; Katz et Rice 2002 ; Ross et al. 2005). Les fora de discussion en ligne constituent un outil particulièrement apprécié par les différents groupes d’internautes en raison de leurs caractéristiques conviviales. Définis comme des documents numériques dynamiques (conversation en processus) et collectifs (Marcoccia 2001), ils sont considérés comme un sous-type spécifique de conversations multiples ou une forme hybride de conversation : les fora se fondent sur la quasi-simultanéité des échanges, le rapport structurant entre les interventions (interventions-initiatives suivies d’interventions réactives diverses) et un style proche de l’oral, tout en se différenciant de la conversation traditionnelle par l’anonymat qui accompagne les discussions, l’asynchronocité, la nature publique des messages et le cadre participatif complexe (présence de polylogues : soient de multiples conversations souvent discontinues et de multiadressage au sein de ces polylogues, soit un message transmis à plusieurs en même temps sans nécessairement connaître les interlocuteurs directement, Marcoccia 1998, 2000, 2004a et 2004b). Plusieurs fonctions sont associées à l’usage des fora : obtention d’informations et de ressources, offres de services, productions collectives, partage d’informations et

d’expériences, assistance, soutien, conseils, mais aussi empathie, considération et encouragements (Breshnahan et Murray-Johnson 2002 ; Henri et Charlier 2005 ; Hirt 2005). Paganelli et al. (2008) avancent ainsi que les fora sont à la fois des vecteurs de motivation informationnelle (pour combler un manque de connaissances) et émotionnelle (lieu de partage des émotions et du vécu). Ils constituent donc des espaces de communication virtuelle d’où émergent des réseaux, des groupes ou des communautés d’échange et de soutien.

Plusieurs travaux ont tenté de définir la notion de communauté virtuelle. Pour Marcoccia, ces communautés renvoient à « des regroupements socioculturels qui émergent du réseau lorsqu’un nombre suffisant d’individus participent à ces discussions publiques pendant assez de temps en y mettant suffisamment de cœur pour que des réseaux de relations humaines se tissent au sein du cyberespace » (Marcoccia 2002 : 2). Il ajoute aussi que la communauté virtuelle « se définit comme la résultante d’un intérêt commun ponctuel entre des individus autonomes en situation d’interaction dans un espace symbolique » (Ibid. : 3) et qu’elle correspond à une « tribu affectuelle », soit une forme de communication faite d’habitudes, de complicité et d’affectivité (Marcoccia 2002). Proulx, pour sa part, avance la définition suivante :

[…] cette expression [communauté virtuelle] désignera le lien d’appartenance qui se constitue parmi les membres d’un ensemble donné d’usagers d’un espace de clavardage, d’une liste ou d’un forum de discussion, ces participants partageant des goûts, des valeurs, des intérêts ou des objectifs communs, voire dans le meilleur des cas, un authentique projet collectif. (Proulx 2006 : 17)

Plusieurs critères ont été avancés pour définir la présence d’une communauté virtuelle. Pour Proulx (2006), il s’agit d’abord et avant tout d’une communauté d’intérêts, une communauté permettant de développer un sentiment d’appartenance définissant sa propre culture par l’usage de conventions linguistiques, d’abréviations et de codes partagés entre ses membres. Selon Marcotte (2001), la communauté virtuelle permet ainsi de créer un sentiment d’appartenance, un esprit de groupe par différents moyens : une fréquentation et une participation régulières, le développement de relations d’amitié, le développement et le partage de règles, de valeurs, de pratiques, de codes, de croyances, d’un langage et d’intérêts communs au groupe, ainsi que l’instauration d’un mode de régulation (règles de politesse et de savoir-vivre, formelles ou informelles, associées à un système de sanctions et de gratifications). Pour Sangwan, Guan et Siguaw (2009), quatre

critères sont essentiels : le sentiment d’appartenance, l’influence entre internautes, l’intégration des membres et la réponse et aux besoins exprimés par les membres ainsi que le partage de relations affectives. Marcoccia (2001 et 2002) a quant à lui développé une liste plus exhaustive de critères pour définir et reconnaître une communauté de parole virtuelle :

1. La possibilité de construire et de maintenir un sentiment d’appartenance chez les membres ;

2. la possibilité de construire son identité ; 3. l’importance de la dimension relationnelle ; 4. l’engagement réciproque des membres ;

5. le partage des valeurs et des finalités du groupe ; 6. l’émergence d’une histoire commune ;

7. la durée des échanges ;

8. la présence de principes de pilotage et de mécanismes de résolution de conflits ; 9. la réflexivité du groupe, soit la conscience d’appartenir à une communauté.

Nous chercherons à savoir si ces critères se retrouvent dans le contexte d’une analyse d’échanges entre participants d’un forum en ligne portant sur la sexualité post-partum. Trois questions seront soulevées dans cette perspective : comment les parents interagissent-ils sur le forum ? Ce forum se définit-il comme un espace de soutien ? Ces échanges contribuent-ils à la création d’une communauté virtuelle ?

Méthodologie

Pour répondre à ces questions, 250 fora couvrant les années 2003 à 2008 ont été recueillis durant l’été 2008 puis standardisés. Ce processus a permis d’uniformiser les fora en français pour en permettre l’analyse par un logiciel d’analyse de textes Sémato, logiciel web d’assistance sémantique à la catégorisation et à l’exploration des données textuelles développé par des chercheurs de l’Université du Québec à Montréal (Plante, Dumas et Plante, S.d.). Ces échanges ont été collectés sur le site Doctissimo (www.doctissmo.fr), dans la catégorie générale « sexualité » et le sous-thème de discussion « sexe et grossesse ». Les fora choisis concernaient directement le post-partum et possédaient au moins trois interactions. La collecte de ces données ne pose pas de problèmes éthiques particuliers puisqu’elles sont publiques et accessibles sans contraintes. L’anonymat des participants est respecté, rendant toute reconnaissance ou identification impossible. Seul le sexe des participants est indiqué dans l’étude.

Résultats

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