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Problématique, cadre théorique et méthodologie

I. 2.1.2.3 La période des années

I.2.1.3. Comment intégrer l’Histoire dans l’enseignement des mathématiques ?

Cette question est liée aux arguments en faveur de l’utilisation de l’Histoire car elle concerne la stratégie à mettre en place et les moyens à mobiliser pour l’atteinte des objectifs de l’introduction d’une perspective historique dans l’enseignement des mathématiques. La stratégie et les moyens dépendent en grande partie des éléments de contexte tels que l’effectif de la classe ; ce qui fait que les réponses proposées dans le cas de la France ou de l’international peuvent connaître des adaptations pour le Sénégal dont le système éducatif est caractérisé par des effectifs pléthoriques d’élèves. Toutefois Barbin (1997, p. 22) propose la lecture des textes anciens et le travail interdisciplinaire, si l’on veut que l’Histoire des mathématiques remplisse ses fonctions vicariantes, dépaysante et culturelle. D’après elle (ibid, p. 22) :

« La lecture des textes anciens produit un “ choc culturel ˮ qui peut satisfaire aux fonctions vicariantes et dépaysantes de l’Histoire. A condition cependant que la lecture ne soit pas téléologique, c’est-à-dire de ne pas analyser les textes uniquement d’après nos conceptions actuelles. Une telle lecture peut entrainer des conceptions erronées. […] La lecture des textes anciens doit être contextualisée, c’est-à-dire lue dans le contexte de l’époque. Cela suppose d’étudier le contexte scientifique, mais parfois aussi philosophique ou social, dans lequel l’auteur a écrit. Il faut penser que l’auteur ne s’adresse pas à nous, mais à des contemporains. »

Bkouche (2000, p. 48) soutient que cette lecture est essentiellement le travail de l’historien de Mathématiques et il est nécessaire d’après Moyon (op.cit. p. 650) d’encourager la production de ressources en Épistémologie et Histoire des mathématiques comme les source-books à l’instar de Katz (2007) qui permettent de rendre accessible des textes anciens traduits de leur langue originale par les spécialistes et accompagnés de commentaires mathématiques et historiques. Une fois ces ressources en sa possession, le professeur de Collège ou de Lycée fait l’effort de se les approprier et les organise de manière qu’elles puissent apporter un éclairage sur ce qui est enseigné.

Cette lecture des textes originaux peut se faire dans le cadre d’un travail interdisciplinaire, avec la collaboration de professeurs d’Histoire pour préciser le contexte de l’époque, de professeurs de Français pour une bonne traduction et interprétation du texte en rapport avec les courants littéraires dominants de la période, du professeur de Géographie pour situer et délimiter l’aire géographique où s’est déroulée l’activité mathématique et du professeur de Philosophie pour expliquer les conceptions épistémologiques et philosophiques qui sous- tendent le texte. Moyon (ibid, p. 646) abonde dans le même sens en ces termes :

« L’interdisciplinarité semble donc inhérente à la pratique scolaire de l’histoire des sciences, et celle des mathématiques en particulier. En effet, l’utilisation en classe de l’histoire des mathématiques – avec ou sans la lecture d’un texte ancien – nécessite de se situer dans le contexte scientifique, philosophique et culturel de la création ou de la rédaction des mathématiques étudiées. Il en est de même lorsque l’enseignant désire problématiser son enseignement autour, par exemple, de grands problèmes, de découvertes, de la naissance d’une discipline ou encore de la construction de concepts mathématiques. »

64 Malheureusement le travail interdisciplinaire autour d’un projet ou d’un sujet, où des professeurs de disciplines différentes apportent leur contribution pour sa réalisation, est rare pour ne pas dire inexistant au Sénégal. Cela demande l’aménagement de plages horaires dédiées à ce type d’activités ; ce qui est difficile à réaliser au Sénégal avec d’une part les emplois du temps surchargés des professeurs et d’autre part les cours particuliers ou dans les écoles privées qu’ils donnent en sus, qui font qu’ils ont rarement du temps libre. Un travail à distance est toutefois possible et cette piste doit être explorée pour améliorer davantage nos expérimentations.

De manière explicite, une liste de neuf types d’utilisation de l'histoire dans l'enseignement des mathématiques est proposée dans le livre rapport : History in Mathematics Education: The

ICMl Study, (Fauvel et van Maanen) publié en 2000 par the International Commission on

Mathematical Instruction (ICMI). Ces différents types d’utilisation de l’Histoire sont bâtis sur les ressources ou activités suivantes :

- les capsules historiques qui sont en général des encadrés retraçant l’évolution d’un concept, la biographie d’un mathématicien ou relatant des anecdotes historiques. - Les projets de recherche qui sont des sujets ou des thèmes sur l’Histoire des

mathématiques donnés à des groupes d’élèves pour leur permettre de découvrir ou de consolider une notion.

- Les textes historiques constitués d’extraits d’anciens documents produits par des mathématiciens à une époque de l’Histoire.

- Les instruments historiques qui sont des outils élaborés par une civilisation ou des mathématiciens d’une époque pour répondre à un besoin.

- Les activités expérimentales qui sont des activités mathématiques qui replacent l’élève dans le contexte où l’expérience a été réalisée.

- Les problèmes historiques qui sont des problèmes apparus à travers l’Histoire, qui n’ont pas de solution ou qui ont été résolus avec beaucoup de difficultés ou qui mettent en relief des erreurs, des conceptions alternatives des paradoxes ou des controverses.

- Les pièces de théâtre qui sont des activités où on fait jouer des rôles à des élèves pour retracer la vie et l’œuvre d’un mathématicien, l’évolution d’un concept ou les péripéties d’une découverte.

- Les films ou vidéos pour visionner des aspects de la vie d’un mathématicien, l’histoire d’une découverte, etc.

- Les activités à l’extérieur qui font sortir les élèves des classes pour des expérimentations ou pour découvrir les mathématiques présentes dans leur environnement.

Notre souhait a été d’expérimenter le maximum d’approches utilisées dans le cadre de l’introduction de l’Histoire en classe de mathématiques afin de mettre en exergue leurs atouts. Mais en raison des contraintes de temps (concevoir l’activité, faire plusieurs partages avec le professeur de la classe, inscrire l’activité dans la progression de la classe) nous nous sommes contenté :

- des capsules historiques avec la position relative d’une droite et d’un cercle ; - des projets de recherche avec l’Histoire des nombres ;

65 - des textes historiques avec les Éléments d’Euclide dans le cadre du critère d’existence

d’un triangle ;

- des activités expérimentales avec la démonstration du théorème de Pythagore par le 20ème Président des États-Unis, James Garfield.

Beaucoup d’autres expérimentations suivant les différentes approches sont exposées dans la littérature et nous en présentons quelques-unes réalisées surtout en France.