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Généralités

Les collecteurs lymphatiques (fig.14) font suite aux pré-collecteurs. Contrairement à ces derniers, leur trajet est« rectiligne » et leur lumière plus grande, elle atteint 0.2 à 0,8 mm pour les collecteurs superficiels des membres (Tourani et al., 2013) (Huxley et al., 2011).

Un collecteur du membre supérieur ou du creux axillaire, peut atteindre, dans des conditions de remplissage avant l’expulsion du bolus de lymphe par lymphangion, un diamètre de 1 à 2 millimètres.

Macroscopiquement, les collecteurs

correspondent à de fins tubes

transparents et collabables.

Figure 13: Drainage de la paroi thoracique vers des lymphonœuds de la chaîne mammaire interne. Visualisation après injection de masse de Gerota modifiée et technique de

diaphanéisassion.

Source : Dr.M Amore – service d’Anatomie Vasculaire – Université de Buenos Aires - Argentine

Figure 14 : Modèle du réseau lymphatique cutané. Un des collecteurs est coloré en bleu pour l’identifier. Les vaisseaux verticaux correspondent aux pré-collecteurs qui relient les collecteurs au réseau des lymphatiques initiaux qui naissent au sein des papilles dermiques.

Source: Adaptation avec autorisation de l’auteur – Földi - Textbook of lymphology.

Contrairement aux veines et aux artères, les collecteurs sont poreux sur tout le réseau (fig.15), (Breslin, 2014; Scallan et al., 2013).

La porosité des collecteurs contribue à la deuxième étape de concentration de la lymphe. En effet, à chaque contraction des lymphangions, la pression hydrostatique

augmente brutalement entre deux

valvules, avant que la valvule proximale ne laisse passer la lymphe, la pression hydrostatique favorise la sortie des petites

molécules, notamment l’eau, du

collecteur. Cette eau réintègre

l’interstitium contribuant à l’équilibre hydrique local tout en concentrant progressivement la lymphe au sein du collecteur. Dans le cas des œdèmes secondaires, les collecteurs dépourvus de leur lymphonœud ne se drainent plus en fin de parcours. Les collecteurs continuent malgré tout de se contracter propulsant leur lymphe dans d’autres collecteurs via les collecteurs communicants et perforants, ou par un reflux vers les pré-collecteurs et ensuite le réseau dermique superficiel. La résistance hydraulique ayant augmentée, un retour accru de l’eau du collecteur s’opère vers l’interstitium. Les macromolécules restant toutefois séquestrées dans le collecteur qui avec le temps se densifie et finit par se fibroser. Ce processus obstrue progressivement les collecteurs depuis les distalités. Lorsqu’un collecteur est densifié sur une longue portion, une corde apparaît sous la peau, ce phénomène est connu sous le nom de WEB syndrome (Bergmann et al., 2012; Moskovitz et al., 2001; Shoham et al., 2011).

Les collecteurs reçoivent la lymphe depuis le réseau initial via les pré-collecteurs et la transportent activement vers les lymphonœuds successifs pour finalement rejoindre le canal thoracique qui est le plus grand collecteur du corps. Ce dernier se draine dans le réseau veineux au niveau de l’angle jugulo-sous clavier. La figure ci-contre (fig.16) montre un schéma simplifié du circuit lymphatique.

Figure 15 : la porosité des collecteurs participe aux mécanismes de concentration de la lymphe.

Source : Scallan & Huxley Capillary fluid exchange

Figure 16 Schéma simplifié du circuit lymphatique

Les collecteurs lymphatiques superficiels sont très nombreux, ils cheminent sous le derme, en faisceaux plus ou moins parallèles (fig.17).

Les anatomistes nomment généralement ces faisceaux de collecteurs du nom de la veine qui est la plus proche. S’il n’y a pas de veine à proximité, le nom de l’anatomiste ayant décrit le courant ou le collecteur lui est attribué.

Les collecteurs sont composés d’une concaténation de lymphangions, dont la longueur oscille entre 1 et 4mm, ces derniers sont les unités motrices des collecteurs lymphatiques, ils sont limités par deux valvules consécutives (fig.18).

Les valvules sont constituées par un repli de l'endothélium vasculaire lymphatique. Leur développement à partir des

cellules endothéliales nécessite l’expression d’un facteur de croissance vasculaire : le FOXC2. C’est précisément la non expression chez l’adulte de ce facteur de croissance qui empêche la reconstruction ad integrum des collecteurs lymphatiques après leur section.

Lorsqu’elles sont continentes, les valvules permettent d’une part de créer un espace momentanément fermé et déformable laissant le temps au lymphangion de se remplir de lymphe et de se dilater pour solliciter mécaniquement le réflexe de contraction (voir infra) et d’autre part de s'opposer physiologiquement au reflux centrifuge de la lymphe contribuant passivement à la progression centripète de celle-ci.

Lorsque les valvules deviennent incontinentes, le collecteur se dilate progressivement sur toute sa longueur de manière rétrograde. Les vaisseaux se « contorsionnent » sous l’effet des pressions internes, il se déforme progressivement en donnant une image typique de vaisseau tortueux

nommé lymphangiectasie (fig.19).

Figure 17 Lymphographie montrant la disposition parallèle des grands collecteurs lymphatiques Source Dr. JD Picard

Figure 18 : Concaténations des

lymphangions

Sources: W. Olswesky – Lymph Stasis

Figure 19 : Collecteurs lymphatiques dysplasiques qui semblent se contorsionner Source : Dr.JD Picard.

Le lymphangion est l’entité physiologique des collecteurs qui, grâce à ses fibres musculaires lisses organisées dans la média (fig.20) est capable de générer des forces normales qui provoquent la propulsion du contenu du lymphangion considéré vers les lymphangions proximaux.

La contraction du lymphangion ainsi que sa régulation est un mécanisme complexe encore étudié. Il est déclenché d’une part par un phénomène de transduction mécanique qui survient lorsqu’un seuil d’étirement du lymphangion est atteint et d’autre part par l’intervention de substances comme l’oxyde nitrique qui semble jouer un rôle important dans la contraction du lymphangion (Triggle et al., 2012).

Le seuil d’étirement est atteint lors du remplissage progressif du lymphangion qui reçoit

de la lymphe provenant à la fois des lymphangions d’amont et du pré-collecteur qui

abouche dans le lymphangion.

La contraction du lymphangion propulse vigoureusement la lymphe par bolus vers les lymphangions adjacents, qui à leur tour se contractent si les conditions mécaniques sont réunies.

Les bolus de lymphe sont propulsés, par la contraction coordonnée de 2 à 4 lymphangions adjacents, sans que les lymphangions proximaux ne bloquent le transfert par une contraction anticipée.

Des cellules de Cajal situées dans l’adventice des collecteurs seraient impliquées dans cette motricité lymphangionique.

De telles cellules ont dernièrement été identifiées dans le canal thoracique. (Briggs Boedtkjer et al., 2013).

Des expériences menées dans l’Unité de Recherche en Lymphologie de notre faculté, basée sur l’imagerie en fluorescence, chez des sujets sains, montrent que les bolus de lymphe peuvent atteindre une vitesse moyenne de 15mm/sec. (Belgrado & al. 2013).

Les collecteurs lymphatiques étant des tubes collabables, le débit lymphatique peut être interrompu si une force suffisante est appliquée sur le vaisseau et la pression d’occlusion atteinte. La littérature étant controversée à ce propos, nous avons réalisé une étude visant à déterminer la pression d’occlusion des collecteurs lymphatiques superficiels des membres supérieurs chez 30 sujets sains.

Figure 20 : schéma des trois couches des collecteurs

La pression d’occlusion issue des résultats a une valeur moyenne de 86 mm Hg (CI ± 3.7 mm Hg, α = 0.5%) (Belgrado et al., 2016b).

La main du thérapeute qui effectue un drainage lymphatique manuel ne peut donc théoriquement pas empêcher la progression de la lymphe puisque les pressions générées par la main lors d’un massage n’excède pas 10 mm Hg (Segers et al., 2002). Bien que les grands courants lymphatiques soient présents chez chacun de nous, il existe une grande variabilité individuelle (Ciucci, 2004). Tant en termes de présence spécifique, qu’en termes de nombre de collecteurs qui composent le courant lymphatique. Les anatomistes évoquent cette variabilité comme l’un des facteurs qui peuvent expliquer pourquoi certaines patientes développent un lymphœdème et d’autre non (Ciucci, 2004).

La symétrie du réseau lymphatique gauche et droit chez un même individu est relative. Certains courants lymphatiques comportent plusieurs collecteurs chez un individu et un seul chez un autre.

D’un point de vue fonctionnel, il existe de grandes différences (Bourgeois et al., 2010). Avec l’âge le nombre de collecteurs se réduit par une fibrose progressive.

Ce chapitre indique combien les capacités de transport de la lymphe varient en fonction de nombreuses variables intra-individuelles et interindividuelles.