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Codex Medicamentarius Gallicus

Partie II : Pratique officinale sous la loi de Germinal (1803-1941)

4) Évolutions des officines de pharmacie : 1803-1941

4.2 Les médicaments

4.4.2 Codex Medicamentarius Gallicus

Nous allons retracer ici la chronologie du Codex Medicamentarius Gallicus et des

Pharmacopées, les données suivantes reprennent de nombreux éléments des publications

du Dr Hélène Lehmann. Tout commence lorsque l'article 38 de la loi de Germinal charge une commission de rédiger un « Codex ou formulaire » de portée nationale, « publié avec la

sanction du gouvernement, et d'après ses ordres. » Il nous faut faire ici un dernier appel à

l’œuvre d'Antoine-François de Fourcroy, puisqu'il est chargé de diriger ces travaux. 15 années d'efforts seront nécessaires aux 11 membres de la commission pour aboutir à la publication du Codex Medicamentarius sive Pharmacopoea Gallica, le 20 septembre 1818. La première édition de ce Codex emploie exclusivement le latin. Qu'importe si on ne peut le lire, son succès est garanti : l'ordonnance du 8 août 1816 en impose l'acquisition à tous les pharmaciens, sous un délai maximal de 6 mois à compter de la date de sa publication.

Les auteurs se sont inspirés des pharmacopées locales, comme la parisienne déjà étudiée. L'ouvrage de 636 pages rassemble 923 monographies : 820 drogues végétales, 67 drogues minérales et 37 d'origine animale. Ce travail n'est pas épargné par les critiques, le chevalier Cadet de Gassicourt - dont nous avons déjà évoqué le formulaire - juge le prix trop élevé et déplore le choix de la langue. D'autres trouveront la classification « incommode et vicieuse », le choix des préparations discutable et certaines descriptions « erronées ou incomplètes. » (132) Cette édition a tout de même le mérite d'utiliser la livre métrique tout en expliquant l'équivalence avec les poids anciens, de faire de même avec diverses autres unités (définir la température 2, la masse des gouttes / des poignées / des pincées, …), d'être suffisamment fournie en détails dans la réalisation des préparations et d'expliquer sans ambiguïté les différentes opérations pharmaceutiques. (133,134)

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2 Parfois avec des explications étranges : "35° Réaumur est le degré auquel on peut prendre communément le thé - ordinairement on ne peut pas plonger les pieds dans une eau à 38° R sans quelque douleur." (133)

La traduction française de la première édition est publiée le 20 août 1819, cependant l'édition latine reste la seule reconnue officiellement par le gouvernement. Plusieurs autres versions non officielles verront le jour, proposant de corriger et compléter ce premier travail : une seconde traduction d'Antoine-Jacques-Louis Jourdan (1821), une « seconde édition » d'Antoine-Laurent Fée (1826), l'édition de Félix-Séverin Ratier (1827) et la Pharmacopée

Universelle d'Antoine-Jacques-Louis Jourdan (1828). (132)

La seconde édition officielle se veut résolument plus moderne. On constate, lors de sa publication en 1837, l'abandon du latin au profit du français, la disparition de 530 monographies jugées obsolètes et la réécriture de la nomenclature. L'ouvrage comporte 617 pages, il décrit 263 substances dont 199 qui, signalée au moyen d'un astérisque, doivent pouvoir être préparées systématiquement dans toutes les officines. (132) Ce Codex propose des méthodes de fabrication et de contrôle simples, détaillées et bien expliquées. Nous pouvons, en guise d'illustration, prendre l'exemple de la méthode d'extraction de la morphine. Elle est décrite avec grande clarté et s'effectuait au moyen d'un solvant organique en milieu alcalin. L'identification est réalisée par l'ajout du perchlorure de fer devant donner une coloration bleue foncé à la solution. Un soin particulier est apporté au choix de procédés de fabrication simples et pratiques, à ce titre la production de l'urée sort du lot, dans la mesure où sa fabrication part de 10 litres d'urine fraîche. On imagine que ce recueil devait mobiliser toute l'équipe officinale ! (134)

La commission du Codex est ensuite renforcée par l'ajout de 7 membres consultatifs, la troisième édition publiée en 1866 comporte désormais 831 pages et 620 monographies. L'organisation de l'ouvrage conserve en grande partie celle de l'édition précédente, les principaux ajouts témoignent des progrès de la chimie et des synthèses organiques. Les anciennes unités de mesures disparaissent définitivement, on y ajoute en revanche un tableau de correspondance avec les poids utilisés dans les autres pays. (132,135)

Pour la quatrième édition la commission voit sa taille augmenter à nouveau, elle comporte à présent 17 membres titulaires et 5 membres consultatifs. Le fruit de son travail est publié en 1884 : l'ouvrage, de 752 pages, décrit 440 drogues et 342 préparations chimiques (en comptant son supplément de 110 pages publié en 1895). Le tableau comportant la correspondance avec les poids étrangers disparaît pour être replacé par une nouvelle partie dédiée aux médicaments vétérinaires.

La cinquième édition publiée en 1908 comporte 1023 pages, 311 médicaments chimiques et l'ajout de nombreuses préparations galéniques concomitantes, à la suppression de 200 d'entre-elles jugées désuètes (dont la fameuse thériaque). La vérification préalable des drogues avec la méthode décrite dans le Codex devient obligatoire afin de détecter rapidement les altérations et les falsifications, la rubrique des renseignements divers se dote d'un tableau énumérant pour 145 substances la dose « dont il est prudent de ne pas

dépasser le maximum thérapeutique usuel sans l'avis express du médecin suivi de la mention manuscrite : je dis telle dose. » (134)

Pour cette édition le plan change, on utilise l'ordre alphabétique dans toutes les rubriques. On crée en 1918 une nouvelle commission chargée de l'écriture des suppléments de l'édition en cours (parus en 1920, 1926 et 1931) et de la rédaction du prochain Codex. (132)

L'ajout, la suppression et la modification de nombreuses de formules commence à poser problème, particulièrement en ce qui concerne la validité de celles présentes dans les Codex antérieurs. La nouvelle commission, en accord avec la jurisprudence, statue sur la question en déclarant dans la nouvelle préface « que le Codex devait être considéré comme constitué

par l'ensemble de toutes ses éditions ; qu'il suffisait, en conséquence, qu'un médicament ait été inscrit dans une des quelconques éditions du formulaire légal, pour qu'il conservât une existence légale, sa formule ayant été publiée. Il en est autrement quand une formule est modifiée ; seule, la formule inscrite dans la nouvelle édition devient officielle. »

Cette édition de la pharmacopée marque une transition entre les anciennes, où le pharmacien façonne ses remèdes, et les pharmacopées modernes où le pharmacien devient plus dépendant de l'industrie pharmaceutique. Il devient de plus en plus difficile de réaliser les préparations en se conformant à toutes les obligations du Codex, en utilisant des produits chimiquement purs et en respectant les essais imposés. (134)

La sixième édition est publiée en 1937, l'accumulation des connaissances et du savoir utile à l'art pharmaceutique impose l'impression de deux volumes : le premier, de 623 pages, traite des aspects réglementaires et de renseignements divers. Le second de 1 209 pages rassemble les 1 299 monographies. Parmi les principales nouveautés un tableau récapitule désormais les changements apportés aux monographies par les éditions précédentes, une mention de la classification des substances toxiques et de leurs doses maximales est ajoutée à la fin de la description des substances concernées, enfin des planches colorées sont ajoutées à la description des plantes médicinales.

Suite à l'arrêté du 7 juillet 1931 le Codex Medicamentarius Gallicus se munit de tableaux dressant les doses d’exonération pour les substances du tableau A et B (étrangement les substances du tableau C, les moins dangereuses, n'en ont pas). Les règles de l'étiquetage sont également précisées, et elles sont plus complexes : on différencie le cas des préparations magistrales, des préparations officinales et le cas des médicaments préparés et divisés à l'avance. Chaque catégorie a un étiquetage spécifique, il peut être différent pour les substances classées dans les 3 tableaux des toxiques. (134)