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Codes stabilisateurs

Dans le document Turbo-codes quantiques (Page 65-69)

Les codes stabilisateurs introduits par Gottesman [19] pr´esentent des propri´et´es particuli`eres vis-`a-vis des erreurs de Pauli. Ils sont d´efinis comme des espaces

propres associ´es `a un sous-ensemble commutatif d’erreurs de Pauli appel´e groupe stabilisateur. Le formalisme sous-jacent aux codes stabilisateurs est tr`es puis- sant car il permet de concevoir toute une classe de codes quantiques qui, par construction, ont une distance minimale d´eductible directement du groupe sta- bilisateur, et pour lesquels il existe une proc´edure de d´ecodage par syndrome tr`es proche du d´ecodage par syndrome classique.

Cette section expose des r´esultats essentiels sur les codes stabilisateurs, et est organis´ee de la mani`ere suivante. On d´efinit d’abord un groupe stabilisateur et un code stabilisateur. On introduit ´egalement la d´efinition du commutateur d’un groupe stabilisateur, qui permet de d´eduire des propri´et´es sur la taille du groupe stabilisateur, puis d’exprimer la dimension du code stabilisateur. On montre finalement comment s’exprime la distance minimale d’un code stabilisateur en fonction du groupe stabilisateur et de son commutateur.

D´efinition 2.10.1. Un groupe stabilisateur S de longueur n est un sous-

groupe ab´elien du groupe de Pauli de taille n qui ne contient pas −I⊗n. Un

code stabilisateur de groupe stabilisateur S est la sph`ere unit´e C = B(H) du sous-espace vectoriel H de H⊗n2 invariant par tous les ´el´ements de S. En

d’autres termes :

C = {|ψi ∈ B(H⊗n2 ) : ∀E ∈ S, E|ψi = |ψi}

Afin qu’un code stabilisateur corresponde `a la d´efinition 2.5.1 d’un code quantique, c’est-`a-dire l’image d’un encodage quantique, il faut encore montrer que la dimension du sous-espace vectoriel H dont le code stabilisateur est la sph`ere unit´e est ´egale `a une puissance de 2. On prouve ce r´esultat par la suite. Propri´et´e 2.10.1. Tout groupe stabilisateur S est g´en´er´e par une famille mi- nimale appel´ee base, et S est de cardinal 2t o`u t est le cardinal de toute base

de S.

D´emonstration. La restriction de σ `a S est un isomorphisme. En effet, S ∩ Ker σ = {I⊗n}, car d’une part, par d´efinition −I⊗n ∈ S, et d’autre part, si/

±iI⊗n ∈ S alors par composition on aurait I⊗n ∈ S. De plus, S ´etant un

groupe, σ(S) est un sous-groupe de F2n

2 donc un sous-espace vectoriel de F2n2 .

σ(S) poss`ede donc une base d’un certain cardinal t, et σ(S) est alors de cardinal 2t. Par isomorphisme, S est donc ´egalement engendr´e par une famille minimale

de cardinal t, et a pour cardinal 2t.

D´efinition 2.10.2. Soit S un groupe stabilisateur. Le commutateur de S

not´e N (S) est le sous-groupe des erreurs de Pauli qui commutent avec tous les ´el´ements de S.

Propri´et´e 2.10.2. S ⊂ N(S). De plus, le cardinal d’une base de S s’´ecrit sous la forme n − k o`u k ≥ 0, et N(S) est engendr´e par le sous-groupe des phases Φ × {I⊗n} et une famille minimale de cardinal n + k.

D´emonstration. Comme tout ´el´ement S commute avec tous les ´el´ements de S, on a S ⊂ N(S). Soit ( ¯Z1, ..., ¯Zt) une base de S. Par d´efinition, N(S) est l’ensemble

des erreurs de Pauli qui commutent avec cette base, soit l’image r´eciproque par σ du noyau de l’application lin´eaire :

F2n

2 → Ft2

(x1, ..., xn, z1, ..., zn) 7→ ((x1, ..., xn, z1, ..., zn).σ( ¯Zi))1≤i≤t

Comme (σ( ¯Z1), ..., σ( ¯Zt)) forme une famille libre dans F2n2 , le rang de cette

application est ´egal `a t, et d’apr`es le th´eor`eme du rang, son noyau σ(N (S)) est donc un espace vectoriel de dimension 2n − t. Comme σ(S) ⊂ σ(N(S)), on a par cons´equent t ≤ 2n − t, et donc t = n − k o`u k ≥ 0. De plus, N(S) est l’image r´eciproque par σ de cet espace, donc il est g´en´er´e par Ker σ = Φ × {I⊗n} et un ant´ec´edent par σ d’une base de σ(N (S)), qui est une famille minimale de cardinal 2n − t = n + k.

Propri´et´e 2.10.3. Soit S un groupe stabilisateur de base ( ¯Z1, ..., ¯Zn−k). L’es-

pace laiss´e invariant par S :

H(n−k)= {|ψi ∈ H⊗n2 : ∀E ∈ S, E|ψi = |ψi}

est de dimension 2k.

D´emonstration. On a :

H(n−k)= {|ψi ∈ H⊗n2 : ∀i ∈ [[1; n − k]], ¯Zi|ψi = |ψi}

Pour tout t ∈ [[0; n − k]], soit Htl’espace :

H(t)= {|ψi ∈ H⊗n

2 : ∀i ∈ [[1; t]], ¯Zi|ψi = |ψi}

Montrons par r´ecurrence sur t que dim H(t)= 2n−t. Pour t = 0, la propri´et´e

revient `a affirmer que dim H2⊗n= 2n et est donc vraie. Supposons `a pr´esent que

la propri´et´e est vraie pour un certain t ∈ [[0; n − k − 1]]. Par d´efinition : H(t+1)= H(t)∩ H(t+1,+)

o`u H(t+1,+) est l’espace propre de ¯Z

t+1associ´e `a la valeur propre 1. Montrons

l’existence d’une erreur de Pauli E qui anticommute avec ¯Zt+1 et qui commute

avec tous les op´erateurs de la famille ( ¯Z1, ..., ¯Zt). La condition `a satisfaire par

E correspond `a :

(σ(E).σ( ¯Zi))1≤i≤t+1= (0, ..., 0, 1)

Or, la famille (σ( ¯Zi))1≤i≤t+1´etant libre, l’application :

(x1, ..., xn, z1, ..., zn) 7→ ((x1, ..., xn, z1, ..., zn).σ( ¯Zi))1≤i≤t+1

est surjective, ce qui montre qu’une telle erreur de Pauli existe. Comme E anticommute avec ¯Zt+1, on a E(H(t+1,+)) = H(t+1,−). De plus, comme E com-

mute avec les op´erateurs de la famille ( ¯Z1, ..., ¯Zt), on a E(H(t)) = H(t). Par

espaces sont de mˆeme dimension. Etant donn´e que H(t)∩ H(t+1,+)⊕ H(t)

H(t+1,−)= H(t), on en d´eduit que :

dim (H(t+1)) = 1

2dim (H

(t)) = 2n−t−1

ce qui prouve la propri´et´e au rang t + 1, et donc en l’occurrence au rang t = n − k.

Corollaire 2.10.1. Un code stabilisateur C de groupe stabilisateur S, o`u S a une base de taille n − k, est un code quantique qui permet d’encoder l’´etat d’un registre `a k bits.

On introduit d´esormais les images respectives S et N (S) du groupe stabi- lisateur S et de son commutateur N(S) par la surjection canonique du groupe de Pauli sur le groupe de Pauli effectif. Cette d´efinition sera r´eutilis´ee lors de la pr´esentation du d´ecodage d’un code stabilisateur et dans la rubrique pr´esentant la notion d’encodeur.

D´efinition 2.10.3. On note S et N (S) les repr´esentants des ensembles S et

N (S) dans Pn.

La distance minimale d’un code stabilisateur se formule de mani`ere simple en fonction de ces deux ensembles d’erreurs de Pauli effectives.

Propri´et´e 2.10.4. La distance minimale d’un code stabilisateur C est le plus petit poids d d’un ´el´ement de N (S)\S.

D´emonstration. Identifions S et N (S) aux ensembles respectifs de leurs repr´esentants

dans le groupe de Pauli P⊗n. On cherche le plus petit poids d d’une erreur

E ∈ P⊗n telle qu’il existe (|ψi, |ψi) ∈ C2 v´erifiant hψ|ψi = 0 et hψ|E|ψi 6= 0.

On va d’abord montrer qu’aucune erreur de Pauli dans S ∪P⊗n\N(S) ne v´erifie

cette condition, et qu’`a l’oppos´e, toutes les erreurs de N (S)\S la v´erifient. Cela prouvera que d est le plus petit poids d’une erreur de N (S)\S.

Soit E ∈ S. Il existe donc c ∈ Φ tel que cE ∈ S. Soit (|ψi, |ψ′i) ∈ C2v´erifiant

hψ′|ψi = 0. On a alors E|ψi = c−1|ψi donc hψ|E|ψi = 0.

De mˆeme, soit E ∈ P⊗n\N(S). Soit (|ψi, |ψi) ∈ C2 v´erifiant hψ|ψi = 0. Il

existe E′∈ S tel que E anticommute avec E. Par cons´equent, si H(+) et H(−)

sont les espaces propres orthogonaux de E′ associ´es respectivement aux valeurs

propres 1 et −1, on a E(H(+)) = H(−)de sorte que E|ψi ∈ H(−), et comme par ailleurs |ψ′i ∈ H(+), cela prouve que hψ|E|ψi = 0.

Soit `a pr´esent E ∈ N(S)\S. Comme E commute avec tous les ´el´ements de S, il stabilise leurs espaces propres associ´es `a la valeur propre 1, et donc E stabilise Vect C. Notons IC l’op´erateur identit´e sur Vect C, et EC la restriction de E `a

Vect C. E2

C = IC et EC est hermitien donc EC poss`ede deux espaces propres

orthogonaux H(+) et H(−) associ´es aux valeurs propres respectives 1 et −1.

Comme E /∈ ±S, EC n’agit ni comme l’identit´e IC ni comme son oppos´e −IC.

Par cons´equent, aucun des sous-espaces H(+)et H(−)n’est r´eduit `a {0}, et H(+)

unitaire |ψ(−)i. Posons alors |ψi = 1 2(|ψ

(+)i + |ψ(−)i) et |ψi = 1 2(|ψ

(+)i −

|ψ(−)i). |ψi et |ψi ´etant des vecteurs unitaires, on a (|ψi, |ψi) ∈ C2. De plus,

hψ′|ψi = 0. Cependant, E|ψi = |ψi ce qui prouve que hψ|E|ψi = 1.

Terminons cette section de pr´esentation des codes stabilisateurs par deux remarques importantes. Par d´efinition, un groupe stabilisateur S agit trivia- lement sur son code stabilisateur. En particulier, toute erreur de S\{I⊗n} est une erreur non triviale qui agit pourtant trivialement sur le code. Ce ph´enom`ene n’a pas d’´equivalent en th´eorie des codes classiques, o`u une erreur non triviale affecte n´ecessairement le code. La prise en compte de cet ensemble d’erreurs ayant un effet trivial sur le code stabilisateur introduit une flexibilit´e au niveau du d´ecodage : si une erreur E de Pauli affecte le code, la v´eritable question du d´ecodage consiste non pas `a trouver l’erreur ˆE la plus probable mais `a trouver l’erreur ˆE dont la classe d’´equivalence modulo S est la plus probable. Cette remarque sera reprise `a la d´efinition 2.12.2 du d´ecodage au maximum de classe de vraisemblance.

La seconde remarque est que pour certains codes stabilisateurs, il existe un ´el´ement de S\{I⊗n} dont le poids est strictement inf´erieur `a la distance

minimale du code. Un tel code est dit d´eg´en´er´e.

D´efinition 2.10.4. Si le poids minimal d’un ´el´ement de S\{In} est stricte-

ment inf´erieur `a la distance minimale du code stabilisateur, ce dernier est dit d´eg´en´er´e.

Dans cette th`ese, on montre que la distance minimale d’un turbo-code quan- tique n’est pas fonction de la distance minimale du code externe comme dans le r´esultat classique, mais plutˆot du plus petit poids d’un ´el´ement de N (S)\{In}.

Si le code externe est non d´eg´en´er´e, cette grandeur correspond effectivement `a sa distance minimale, mais s’il est d´en´en´er´e, elle correspond au plus petit poids d’un ´el´ement de S\{In}. On nommera cette grandeur distance d´eg´en´er´ee au

chapitre suivant.

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