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Circulation des réfugiés congolais à la frontière Gabon/Congo

CHAPITRE 4 : LES REFUGIES DANS LES ZONES FRONTALIERES

3. Circulation des réfugiés congolais à la frontière Gabon/Congo

Le statut de réfugié implique à la fois un attachement à son pays d’origine et un désir de construction d’une vie nouvelle dans son pays d’accueil dans un monde où la construction identitaire et la reconnaissance de la citoyenneté restent attachées à la nation. Cette situation, pour les réfugiés, pose question dans la mesure où sans totalement être accepté dans leur espace d’accueil, par la déchirure de la guerre, ils ont perdu une partie de leur fondement du pays de départ. Lisa Malkki dit à ce propos que : « It is precisely the interstitial position of

refugees in the system of nation-states that makes (…) the rethinking of nationness, of

126 Le territoire dont il est fait état est le territoire gabonais.

127 Déclaration de l’ERDDUN : http://membres.lycos.fr/jecmaus/erddun08.html

statelessness, and of the interconnections between historical memory and national consciousness »129 (Malkki, 1995: 1). Certains réfugiés adoptent de ce fait une stratégie d’appropriation de leur statut en organisant des va-et-vient entre les deux pays.

A. Le concept de circulation migratoire dans le contexte des réfugiés

En sciences sociales, les définitions d’un concept sont variables. Pendant longtemps, l’évocation de la migration internationale renvoyait aux phénomènes d’émigration et d’immigration, c’est-à-dire au passage d’un pays à un autre. Ce passage implicitement exprimait un sous-entendu : l’installation de l’immigré dans son ‘‘nouveau pays’’. Les migrations, en tant que flux transnationaux, se révélaient être l’expression de la capacité de contrôle de l’autorité de l’Etat aux frontières et d’encadrement de ces espaces. Pour parler comme Alain Tarrius (1996), l’immigrant ne naviguait qu’entre nos espaces juridiques et éthiques jusqu’à ce qu’il rejoigne le point consensuel des identités collectives appelé ‘‘citoyenneté’’. Cette rencontre à la citoyenneté décrivait alors un parcours à l’intégration et établissait le couple immigration/intégration comme le seul faisant sens pour tous ceux qui, nouveaux venus ou autochtones, refusaient d’opposer à l’étranger la ‘‘terre’’ (Tarrius, 1996).

Dans les années cinquante, Robert Montagne parle de « noria » humaine, c’est-à-dire un système circulaire de migrations dans lequel il désigne « l’arrivée de migrants d’un village

d’origine en remplacement de ceux rentrés définitivement » (Doraï; Hily; Ma Mung, 1998 :

2). Cette notion a été très critiquée notamment par Abdelmalek Sayad en 1977 qui la juge négative et dénonce le lissage que ce terme opère sur la réalité des situations observées en prenant les migrants pour des êtres identiques alors que chacun migre pour ses propres raisons. La noria présentait l’image d’un système en vase clos qui permettait le remplacement constant des populations en migration.

Considérant l’ensemble des critiques, la noria sera dépassée pour laisser place à la notion de va-et-vient qui dégage dès cet instant une forme de fonctionnement des groupes de migrants qui vont construire des réseaux et surtout, maintenir des liens étroits entre les pays d’origine et les pays d’accueil (Doraï; Hily ; Ma Mung, 1998). Le concept de va-et-vient sous-tend déjà celui de circulation migratoire. Cette évolution se déroule dans un glissement de la problématique sur les migrations où l’on est passé d’une sociologie de l’intégration à la sociologie de la constitution de savoir-faire migratoire et de la construction de réseaux transnationaux. Alain Tarrius contribue alors à ce mouvement par ses travaux en proposant à

129 « C’est précisément la position interstitielle des réfugiés dans le système des Etats-nations qui fait (…) la

reconsidération du nationalisme, de l'apatridie, et des interconnections entre le souvenir historique et la conscience nationale ».

l’analyse, la notion de « territoires circulatoires » faits de centralités multiples et où le migrant est pensé avant tout comme plus libre et où sa seule référence « est le territoire qu’il

construit, parcourt, traverse, conquiert parfois, sans se soucier outre mesure des valeurs ou usages des lieux ; il peut être ‘‘transmigrant’’, ‘‘nomade’’, toujours ‘‘étranger’’, avant de prendre éventuellement place ‘‘in’’ » (Tarrius, 1996 : 93). Ce changement d’approche renvoie de facto au couple ‘‘migration/territoire’’ qui, pour lui, de nos jours, fait plus sens et traduit

mieux la réalité des migrations que le couple ‘‘immigration/insertion’’. C’est ainsi que « l’idée selon laquelle les Etats-nations étaient une forme stable et aboutie s’est trouvée

entamée par la construction progressive de réseaux transnationaux, de nouvelles formes de mobilités des hommes et par le développement de nouvelles technologies » (Hily ; Rinaudo,

2002 : 63). Chadia Arab mentionne pour sa part que dans cette forme de migration, l’immigré devient un véritable circulant qui participe à l’élaboration d’itinéraires qui n’existaient pas. Il met en place de nouvelles stratégies migratoires aussi bien pour atteindre les anciennes destinations traditionnelles que pour trouver de « nouveaux pôles d’arrivée » (Arab, 2008). Autrement dit, pour le migrant, il s’agit de décider de partir, de faire le choix du lieu, la manière de s’installer et de regrouper tous les réseaux possibles mis à la disposition de celui qui veut partir. Chez le réfugié, tout ceci n’est pas réuni dans la mesure où il part par contrainte.

Mais, cela n’empêche pas que la dimension circulatoire soit aussi analysée et comprise pour les réfugiés puisque la circulation migratoire se présente comme une forme nouvelle. Le cheminement habituellement décrit menant d’une altérité aux identités locales, c’est-à-dire ce processus qui fixe l’étranger comme immigré et l’oblige à s’intégrer, parfois à s’assimiler, à l’identité de son espace d’accueil devient totalement obsolète. Pour Alain Tarrius, la circulation migratoire a ceci de particulier qu’elle permet au migrant de sortir du statut du sédentaire, elle lui donne la possibilité de refuser d’être in situ. Au contraire, la circulation migratoire octroie au migrant « une capacité nouvelle d’être d’ici, de là-bas, d’ici et de là-bas

à la fois, en un mouvement ternaire donc hautement processuel, se substitue à la vieille opposition entre d’être d’ici ou de là-bas » (Tarrius, 2005 : 388). On sort de cette obligation

de choisir entre être d’ici ou de là-bas qui confinait le migrant à la sédentarisation pour entrer dans l’ère du mouvement. Suivant cette logique « processuel », les réfugiés peuvent aussi intégrer cette dynamique en devenant des réfugiés circulant dans la mesure où ces derniers ne demeurent pas statiques mais circulent entre des lieux et des espaces, en particulier ceux qui vivent dans les zones frontalières à leur pays d’origine où ils partent et reviennent souvent.

Le réfugié, quand il arrive quelque part, est avant tout un étranger même s’il arrive dans un milieu où il connaît les gens ou même lorsqu’il retrouve ses ‘‘frères ethniques’’130. Cette situation d’étranger, de l’autre qui vient d’ailleurs, fait qu’au bout d’un moment, quand la période d’accueil et d’urgence passe pour entrer dans celle de l’intégration, certaines divergences peuvent naître entre les réfugiés et les populations autochtones. Lorsque les réfugiés arrivent, ils tentent de se reconstruire dans leur zone d’accueil et peuvent parvenir parfois à avoir de meilleures conditions de vie et un seuil d’enrichissement plus élevé que celui des populations locales. Cette situation peut susciter des ressentiments chez les autochtones et peut être source d’exclusion des réfugiés. C’est par exemple le cas qu’expose Jennifer Hyndman sur les réfugiés somaliens au Kenya. « Not only have government

authorities demonstrated their intolerance of Somali refugees, but Kenyans living in proximate areas have also expressed their resentment, particulary with respect to issues of housing, business practices; and land »131 (Hyndman, 2000: 151). Devant cet état de fait, la question de la gestion des rapports avec les autochtones s’impose pour les réfugiés.

Une des solutions pour ceux qui arrivent pour mieux s’insérer dans leurs zones d’accueil consiste à circuler, c’est-à-dire à avoir un pied ici, là-bas, ici et là-bas (Tarrius, 2002). Dans le même sens, Sandra Dessimoz et Eric Levron, parlant des difficultés des humanitaires évoquent le fait que la circulation pour les individus en période de conflit devient un « des mécanismes de survie »132 (Dessimoz ; Levron, 2004). La circulation peut s’avérer donc être une forme d’insertion. La circulation pour le réfugié dans ces conditions devient une façon à la fois de ménager les populations autochtones dans leur exclusion en manifestant à travers les allers et venus une possibilité éventuelle de retour. La compréhension de l’action du réfugié ne peut alors être saisie, dans ce cas, que dans le long terme. C’est l’application du couple mobilité/temporalité, c’est-à-dire de l’espace temps de la mobilité qu’Alain Tarrius a établi comme son ancrage méthodologique. Cet ancrage qui lui permettra, lorsqu’il rencontre les géographes de Migrinter133, de parvenir à travers le concept de territoire, à montrer comment les migrants, dans les dimensions transnationales,

130 ‘‘Frère ethnique’’ entendu dans le sens où il fait partie d’un même groupe ethnique. Par exemple un Nzèbi

congolais qui retrouve les Nzèbi du Gabon.

131 « Non seulement les autorités gouvernementales ont démontré leur intolérance pour les réfugiés somaliens,

mais les Kényans vivant dans les zones proches ont aussi exprimé leur ressentiment, concernant particulièrement les problèmes de logement, d'exercice des affaires et des terres ».

132 Pour eux, ces déplacements sont complexes, mais, très souvent, les individus sont obligés de se déplacer

plusieurs fois entre leurs lieux d’origine et leurs points de départ. Par ces mouvements, qui parfois peuvent être pendulaires comme c’est le cas des réfugiés Afghans à Peshawar qu’ils décrivent, les individus cherchent à retourner régulièrement dans leur pays de départ pour conserver des moyens de subsistance.

133 Equipe de recherche spécialisée dans l'étude des migrations internationales et des relations inter-ethniques

s’approprient l’espace sans prendre en compte les obligations et les attentions « des pouvoirs

et des hiérarchies historiquement institués localement » (Alioua, 2008). A partir des études

que mènent Alain Tarrius sur Belsunce, il apparaît, de cette dynamique circulatoire dans les territoires où bougent les migrants, qu’un usage multiple d’un lieu est utilisé aussi bien pour les besoins locaux des lieux de production et de circulation qu’un usage international que les pratiques « des migrants articulent en ce lieu » (Alioua, 2008).

L’observation des réfugiés congolais à Lébamba permet de constater que ces dimensions qui guident et fondent les analyses autour de la circulation migratoire apparaîssent dans leur fonctionnement. Les réfugiés congolais à Lébamba circulent quand bien même ils gardent un point d’ancrage dans cette commune. Ils circulent aussi bien entre le Congo et le Gabon, qu’entre différentes villes du Gabon, en général, et de la Ngounié, en particulier. Cette circulation se fait, non pas au mépris de la législation, mais plutôt en marge de celle-ci. En fait, ils ne tiennent pas compte dans leurs mouvements des règles qui les interdisent de repartir chez eux en tant que réfugié, au contraire, ils les contournent (cf. chapitre 5). Les réfugiés ici deviennent des acteurs de relations transnationales comme le note Jennifer Hyndman (2000). Mais, pourquoi les réfugiés congolais à Lébamba en particulier, et au Gabon en général, circulent-ils entre les deux pays ?

B. Les réfugiés congolais au Gabon : la circulation, mais pas le rapatriement

Avant d’apporter une réponse à l’interrogation qui conclut la section précédente, il semble utile de montrer d’abord l’importance des mouvements de réfugiés congolais au Gabon depuis leurs points de départs au Congo. Parvenus au Gabon, ces réfugiés ne sont pas tous restés dans les premiers villages ou les premières villes dans lesquels ils sont entrés. Cette section propose de conduire une étude sur les parcours des réfugiés congolais depuis les lieux où ils se trouvaient au Congo au moment de leur départ jusqu’à ce qu’ils sont arrivés à Lébamba. La conduite de cette analyse s’appuiera sur le tableau 3 conçu sur la base des enquêtes de terrain, puisqu’il n’était pas possible d’avoir des informations sur l’ensemble des réfugiés congolais se trouvant au Gabon concernant leurs parcours. La constitution de ce tableau émane d’une question demandant à chaque réfugié de dire où il se trouvait lorsque la guerre a éclaté. Les résultats sont alors les suivants :

Tableau 3 : Lieux d’origine et lieux de vie au début de la guerre de 1997 au Congo des réfugiés congolais installés à Lébamba

Ville/Village Lieu d’origine Lieu de séjour au début de la guerre

Brazzaville 0 6 Dolisie (Niari) 4 15 Divenié (Niari) 10 3 Makabana (Niari) 0 1 Pointe-Noire 0 1 Irogo (Niari) 6 2 Panga (Niari) 1 0 Passi-Passi (Niari) 1 0 Banda (Niari) 1 0 Nyanga (Niari) 1 2 Ngongo (Niari) 2 0 Moungoudi (Niari) 1 0 Mouyondzi (Bouendza) 1 0 Linzolo (Pool) 2 0 Total 30 30

Source : Enquête de terrain, 2008.

La lecture de ce tableau indique que 15 réfugiés, soit la moitié des personnes enquêtées, ont eu comme point de départ la ville de Dolisie dans le Niari. Brazzaville avec 6 personnes est la ville qui a envoyé en deuxième position des réfugiés à Lébamba, puis vient Divenié (3). Brazzaville et Dolisie ont envoyé 21 réfugiés à Lébamba. Or, l’observation du tableau montre qu’aucun réfugié n’est originaire de Brazzaville et que 4 d’entre eux seulement sont originaires de Dolisie. A l’échelle du département, le Niari seul a pourvu 27 réfugiés sur les 30. D’où viennent ces personnes qui sont parties de Dolisie et de Brazzaville ? Qui sont-ils ?

La lecture poussée des résultats montre que parmi les 15 personnes parties de Dolisie, 7 sont originaires de Divenié, 3 de Dolisie, 1 de Banda, 1 de Ngongo, 1 d’Irogo et 1 de Moungoudi. Elles sont toutes issues du département du Niari. Dolisie étant le chef lieu du département, elle exerce une forte attraction sur l’ensemble du département d’autant plus que Dolisie est la troisième ville du pays après Brazzaville et Pointe-Noire. Dès 6 réfugiés partis de Brazzaville, 2 viennent de Linzolo et 4 de la Bouendza, de Dolisie, de Passi-Passi et de

Nyanga. Cela signifie que la moitié est aussi originaire du Niari. En considérant la structure par âge et par sexe de ces réfugiés, la lecture des enquêtes montre que parmi ceux qui sont partis de Dolisie, on a 8 hommes et 7 femmes alors que de Brazzaville ne sont partis que des hommes dont l’âge varie entre 25 et 49 ans. Des réfugiés partis de Dolisie, 2 hommes ont moins de 30 ans et une femme est âgée de plus de 52 ans. Tous les autres réfugiés ont un âge qui varie entre 30 et 43 ans. Sur l’ensemble des réfugiés, ceux qui sont arrivés ont un âge compris dans l’intervalle 25/45 ans avec seulement 2 réfugiés qui ont plus de 50 ans d’âge et 2 autres qui ont 24 ans.

L’interprétation de ces résultats peut suggérer que la proximité géographique du département du Niari avec Lébamba est certainement la principale raison de la présence de ces réfugiés dans cette commune puisque 24 des 30 réfugiés sont originaires du Niari immédiatement frontalier à Lébamba. Etant donné qu’en fuyant la guerre, les réfugiés se sont déplacés en majorité à pieds pour rejoindre le Gabon, il paraît normal que le lieu le moins distant qui peut apporter une protection aux réfugiés soit occupé jusqu’à ce que les possibilités de poursuivre le parcours se présentent comme le rapporte ce témoignage d’une réfugiée : « Lors du commencement de la guerre, je suis partie de Mila-Mila, un grumier m’a

pris au pont du Niari et m’a déposé à Nyanga. J’ai trotté de là jusqu’à Irongo. J’ai passé quelques jours au village, après j’ai fui vers le Gabon. Je suis passé par des raccourcis dans la forêt, je suis sorti à Ngongo et je suis arrivée à la frontière gabonaise où il y avait les militaires ». Donc, le désir de protection fait qu’à l’instant du départ, les réfugiés ne

choisissent pas l’endroit où ils vont mais s’arrêtent dès qu’ils peuvent trouver refuge. Les zones géographiques proches de leurs lieux de départs sont alors les premiers à être occupés.

Mais en dehors de cette raison, il semble que les liens de parenté et d’amitié peuvent également guider les directions des réfugiés. Etant donné que la guerre a éclaté à Brazzaville, puis dans les principales villes, les populations sont d’abord retournées dans leurs villages d’origines. Au fur et à mesure que la guerre s’étalait sur l’ensemble du territoire, aucun lieu ne devenait à ce moment sûr, il a fallu par conséquent traverser la frontière. Les déplacements se sont donc déroulés par étapes : de Brazzaville vers les villes secondaires, des villes secondaires vers les villages et des villages au-delà des frontières, particulièrement vers le Gabon. Les propos de ces deux réfugiées expliquent mieux ce schéma. D’abord Marjolaine qui déclare ce qui suit :

« Tout a commencé en 1993, j’étais à Brazzaville, mais ça, on n’a pas trop subi parce que c’était une guerre tribale entre les Lari et les Bapunu et les autres. Moi je suis du groupe

commencé à tirer au quartier Bacongo et ça c’est généralisé. Moi j’habitais au Plateau. On a fui de la maison. Quand on a fui, c’est un peu comme si tu partais de l’aéroport pour te retrouver ici à Nzeng-Ayong134. Puis après, on est parti à Diata où on a fait une semaine. Mais, ça allait de mal en pis, on était obligé de partir à Dolisie. Comme mon père travaillait à la préfecture de police, il ne pouvait pas partir. J’étais donc à Dolisie chez une tante. Papa est venu nous retrouver après. (…). A Dolisie, les Angolais sont venus avec une liste et dans cette liste, on a appris qu’il y avait le nom de mon père. On est parti de la maison pour se cacher chez ma mère parce que mon père et ma mère n’étaient plus ensemble. Ce même jour, ils ont pillés chez ma tante. En 1998, on était reparti à Brazzaville et j’attendais de repartir à l’école. Cette année là, il y a avait quelques tueries, mais c’était des cas isolés. Mais en décembre 1998, l’armée de Sassou, avec les Rwandais et les Angolais, a repris les combats et c’est là que c’était affreux. (…). J’arrive au Gabon en juillet 1999, à Mbinda dans la zone de Moanda. » Une autre réfugiée, Christine N. dit ceci : « J’apprenais à Dolisie, je suis allée à Brazzaville, mais dès mon arrivée, il y a eu les émeutes de 1998, je suis revenue à Dolisie et malheureusement 7 jours plus tard, les émeutes ont commencé et on a marché jusqu’à Biyongo. On a fait 288 km à pieds en une semaine. On a passé six mois à Biyongo avec mes parents, on ne pensait pas que ça allait mettre du temps. Mais comme mon père a des parents ici135, il a jugé utile que je vienne. Il m’a accompagné à pied jusqu’à la frontière136. »

La fuite en temps de guerre est guidée par le besoin de survie. La proximité géographique devient dans ces conditions un soulagement à la souffrance de la fuite dès que le fugitif parvient à un endroit qui le protège. Les affrontements se répandant des centres urbains vers les milieux ruraux plus éloignés, le schéma de la fuite est alors « descendant » et va des villes vers la traversée de la frontière du pays voisin en passant par les villages. Quels ont été les itinéraires empruntés par les réfugiés congolais pour se retrouver au Gabon ?

Une fois de plus, en évoquant les itinéraires empruntés par les réfugiés congolais pour se retrouver au Gabon, il ne s’agit pas de retracer le parcours de l’ensemble des réfugiés congolais installés au Gabon. Les analyses s’appuieront sur les parcours de ceux rencontrés à Lébamba. Pour dégager les principaux itinéraires de ces derniers, il a été recueilli pour chaque