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Choix d'un logiciel de simulation

Chronologiquement, le choix d'un logiciel de simulation électromagnétique par éléments finis a été la première tâche de notre travail. Nous exposons ci-dessous la démarche qui nous a amenés à choisir le logiciel "Mega", développé par l'université de Bath (Grande-Bretagne), au terme d'une sélection de plusieurs mois.

V.1.1 Identification du problème étudié

Dans une première étape, nous cherchons à cerner précisément le problème à traiter. Conformément à ce qui est présenté dans le chapitre II, nous identifions les transformateurs de puissance comme faisant partie de la gamme des problèmes quasi-statiques: les équations de base utilisées par le logiciel peuvent donc négliger le courant de déplacement. D'autre part, on constate que la densité du maillage doit pouvoir varier très largement dans le modèle (compte tenu des ordres de grandeur respectifs des sections de cuivre et de ferrite). Ces deux caractéristiques orientent le choix vers la méthode des éléments finis, classiquement utilisée pour tous les problèmes de simulation électromagnétique de moteurs, transformateurs, actionneurs électromagnétiques, etc. Par opposition, on utilise plus volontiers la méthode des différences finies ou des volumes finis (voir §V.2.3 et [13]) pour les problèmes de propagation.

On identifie ensuite les besoins suivants:

- le logiciel doit être capable de modéliser des conducteurs massifs, c'est-à-dire dans lesquels la densité de courant n'est pas supposée uniforme,

- du point de vue des conditions aux limites, il va de soi qu'un programme qui permet uniquement d'imposer la densité de courant sur la section d'un conducteur n'est pas satisfaisant puisque celle-ci est précisément la variable à étudier: il faut pouvoir au minimum imposer un courant total, ou mieux encore connecter les conducteurs massifs à des éléments localisés (sources et charges), seul moyen d'étudier de manière réaliste le fonctionnement d'un transformateur en charge (voir §VI.7.2),

- on recherche a priori un logiciel capable de traiter des modèles bidimensionnels aussi bien que tridimensionnels. Dans ce dernier cas, il faut pouvoir traiter des géométries multiplement connexes (cas d'une spire autour d'un noyau),

- la présence d'un noyau de ferrite demande de préférence la possibilité de considérer des matériaux non linéaires,

- enfin l'existence de formes d'ondes quelconques, et plus particulièrement d'ondes carrées, demande la capacité de réaliser des simulations en régime transitoire.

En cumulant ces différents critères, on obtient une exigence extrêmement sévère: la nécessité de disposer d'un programme de simulation de champs 2D et 3D en régime transitoire non linéaire avec modélisation de conducteurs massifs et connectables à un circuit extérieur.

En plus de ces critères de sélection, il faut également examiner d'autres caractéristiques plus générales comme les outils de construction du modèle et de maillage, le temps de calcul, la facilité d'utilisation, d'éventuels outils d'optimisation, la qualité du support, le prix, etc. Enfin, il est indispensable de prévoir une phase de test afin de valider les possibilités annoncées.

V.1.2 Choix du logiciel

Recherche des logiciels de simulation électromagnétique

La sélection commence par une recherche la plus large possible des logiciels de simulation électromagnétique de niveau professionnel. Sont répertoriés:

Logiciel Développeur

XFDTD Remcom Inc. (USA)

EMA3D Electro Magnetic Applications (USA)

HFSS Hewlett-Packard (UK)

NISA/Emag Wilde & Partners (UK)

ANSYS/Emag Ansys Inc. (USA)

MSC/EMAS Mac Neal Schwender Corp. (USA)

Magnet Infolytica Ltd. (Canada)

FLUX3D Cedrat (France)

Opera3D Vector Fields (USA)

Maxwell3D/EMSS Ansoft Corp. (USA)

Mega University of Bath (UK)

Tableau 3: Logiciels de simulation électromagnétique répertoriés au début de la recherche

La documentation reçue permet d’écarter un premier groupe de logiciels qui ne correspondent pas réellement au problème posé:

- XFDTD et EMA3D sont destinés aux problèmes non-stationnaires (propagation), il s’agit d’ailleurs de programmes basés sur la méthode des différences finies;

- HFSS est initialement un programme de simulation des systèmes fermés (guides d’ondes, cavités). L’extension du logiciel vers les systèmes ouverts semble encore trop peu convaincante pour l’appliquer au cas des transformateurs;

- NISA/Emag est le module électromagnétique d’un programme multi-usages. Ses performances générales sont jugées insuffisantes par rapport au problème à traiter (pas de géométrie complexe ni de modélisation des enroulements massifs).

Sélection

L’étape suivante consiste à envoyer un questionnaire approfondi orienté sur les possibilités spécifiques du logiciel par rapport au problème à résoudre et/ou à se rendre chez le distributeur ou chez un utilisateur pour une démonstration. Un second groupe de logiciels peut alors être écarté, sur base des caractéristiques suivantes (valables à la fin de l'année 1995):

V.1 - Simulations numériques par éléments finis: Choix d'un logiciel de simulation II - 126 - ANSYS/Emag est le module électromagnétique du logiciel ANSYS, développé

initialement pour le calcul des structures mécaniques. Malgré ses possibilités intéressantes d’optimisation et de connexion du modèle en éléments finis à un circuit extérieur, il doit être abandonné: il semble que l’adaptation a posteriori du logiciel à l’électromagnétisme le rende assez lourd à utiliser, avec notamment un temps de calcul très élevé. Le distributeur affirme d'autre part que ce logiciel n’est pas capable de traiter des problèmes électromagnétiques aux fréquences utilisées dans les alimentations. - MSC/EMAS, utilisé dans le service d’électricité générale à l’U.L.B., est jugé fort peu

convivial et ne semble pas apte à traiter le problème des transformateurs dans toute sa complexité (temps de calcul élevé, conditions aux limites mal adaptées, etc).

- Magnet est écarté après une démonstration à la K.U.L.: le modèle 3D se construit exclusivement par extrusion d’un dessin en 2D (ce qui limite l’étude à des géométries de base), il semble fort difficile de modéliser des enroulements massifs, et le temps de calcul d’un modèle 3D semble de surcroît prohibitif.

- FLUX3D est écarté sur base des réponses données par Cedrat au questionnaire approfondi: l’étude transitoire n’est pas possible en 3D et l’étude harmonique semble trop lourde en temps de calcul. Pratiquement, le programme ne permet pas de modéliser des conducteurs massifs pour le problème considéré.

Finalement, trois logiciels montrent des performances réellement attrayantes:

- Opera3D (Vector Fields) permet de modéliser des géométries suffisamment complexes et de prendre en compte un matériau non linéaire en transitoire, mais n’offre pas de possibilités de connecter le modèle à un circuit extérieur en 3D,

- Maxwell3D (Ansoft) présente la même limitation. On peut noter l’approche alternative de l’utilitaire EMSS pour la connexion à un circuit extérieur: le calcul en éléments finis est réalisé pour toute une série de valeurs des conditions aux limites et les résultats sont tabulés pour être réutilisés ultérieurement dans un simulateur de circuit. Néanmoins cette possibilité, très lourde du point de vue du temps de calcul, n’existe pour l’instant qu’avec un modèle 2D et ne permet pas d’imposer un courant total comme condition aux limites,

- Enfin Mega est le seul logiciel permettant de réaliser une connexion entre un circuit massif en trois dimensions et un circuit extérieur, tout en répondant également aux autres critères. Il a également l’avantage d’être très polyvalent puisqu’il rassemble toutes les possibilités de simulation en un seul logiciel (2D/3D en électrostatique, magnétostatique, magnétodynamique AC ou transitoire).

Opera3D et Maxwell3D ont une excellente réputation et sont probablement les meilleurs logiciels commerciaux existant sur le marché. Mega est un logiciel beaucoup moins connu, qu’on doit plutôt classer dans la catégorie des logiciels "de recherche". Bien qu’il laisse parfois apparaître un caractère plus artisanal quant à son interface utilisateur, il offre incontestablement du point de vue de la simulation des possibilités plus étendues que les deux autres logiciels. Il est donc considéré sur base de ce critère comme le meilleur choix.

Avantages et inconvénients du logiciel Mega

Mega est un logiciel développé depuis une quinzaine d’années par l’Applied Electromagnetic Research Center de l’Université de Bath (Angleterre) sous la direction du professeur Dave Rodger. La raison fondamentale qui est à la base du choix de Mega est la possibilité, unique sur le marché au moment de notre étude, de connecter les éléments massifs du modèle avec des éléments localisés extérieurs pour tous les types de simulation. Cette possibilité est évidemment considérée comme très importante pour l’étude des transformateurs en charge: en son absence, l’utilisateur est obligé d’imposer lui-même un courant au secondaire, alors qu’il s’agit précisément d’une des variables du problème.

La mise à notre disposition pendant deux mois du logiciel par l’Université de Bath a permis non pas de valider celui-ci complètement, mais de vérifier qu’il permettait effectivement d’étudier la répartition du courant dans les enroulements d’un transformateur de convertisseur de puissance. Des modèles simplifiés de pièces magnétiques à noyau de ferrite ont été testés dans diverses conditions d’analyse (3D, régime transitoire non linéaire, connexion entre source et charge en éléments localisés). Les résultats des simulations ayant été satisfaisants, la décision a été prise d’acquérir définitivement Mega comme outil de simulation.

Parmi les autres avantages de ce logiciel, on peut citer:

- la qualité des choix théoriques qui sont à la base du programme, et le fait que celui-ci soit dédié à l’électromagnétisme (par opposition aux logiciels multi-usages),

- le bon contact établi avec l’équipe de Bath, qui jouit par ailleurs d’une excellente réputation dans le domaine de l’électromagnétisme,

- la possibilité d’avoir pu tester une version non limitée du logiciel pendant deux mois, - la diversité des conditions d’analyse applicables aux modèles (2D/3D,

sinusoïdal/transitoire, linéaire/non-linéaire, et un grand nombre de variantes de source et de charge),

- la facilité d’utilisation (hors maillage),

- la possibilité de faire éventuellement une analyse thermique couplée du modèle (uniquement en conduction cependant),

- le prix (deux à trois fois moindre que les logiciels commerciaux comparables, pour des performances supérieures).

Parmi les inconvénients, on peut citer:

- l'absence de module de maillage automatique et a fortiori de module de maillage auto-adaptatif (raffinement automatique du maillage en cours de calcul), ce qui demande d’apporter une très grande attention et donc beaucoup de temps à la constitution du maillage, dont dépend la qualité des résultats,

V.1 - Simulations numériques par éléments finis: Choix d'un logiciel de simulation II - 128 - l’absence de possibilités d’optimisation de la géométrie,

- l’absence de modélisation de l'hystérèse du matériau magnétique.

V.1.3 Evaluation du logiciel a posteriori

Les arguments exposés ci-dessus sont ceux apparus au début de notre travail (premier trimestre 1996). D'autres remarques peuvent être faites a posteriori:

- la toute grande majorité des simulations ont été effectuées en régime linéaire sinusoïdal (en deux ou en trois dimensions). Les possibilités de non-linéarité et de régime transitoire ont donc été peu exploitées. Ceci ne remet pas en cause le choix effectué ci-dessus: elles pourraient évidemment l'être dans des recherches futures;

- l'absence de module de maillage automatique a été la caractéristique la plus gênante du logiciel. On aurait pu en particulier se contenter, pour développer la formule semi-empirique (qui ne constitue qu'une fraction du présent travail, le chapitre VII), d'un petit logiciel de simulation 2D à maillage automatique. Un tel module est en cours de développement pour Mega;

- la connexion de circuits massifs à des éléments localisés est apparue entretemps dans quelques autres logiciels. Mega garde cependant dans ce domaine une certaine avance; - les articles en bibliographie montrent qu'outre quelques logiciels propriétaires, ce sont

principalement Maxwell (Ansoft), Ansys et Mega qui sont utilisés internationalement en recherche;

- le support client s'est avéré excellent malgré l'absence de structure commerciale. On profite ici de l'avantage qu'il est assuré directement par les développeurs du logiciel; - quelques inconvénients sont apparus, notamment liés à l'interface graphique, d'un

caractère parfois artisanal, et à l'absence de standardisation des formats d'entrée/sortie (maillage et impression).

V.1.4 Conclusion

Après une sélection étalée sur plusieurs mois, c'est le logiciel Mega, développé par l'Université de Bath, qui a été choisi début 1996 pour sa possibilité unique de connecter des circuits massifs à des éléments localisés dans tous les types de simulation. L'inconvénient majeur de ce logiciel est par contre l'absence de module de maillage automatique, à présent en cours de développement. L'utilisation du logiciel au cours du travail a montré sa fiabilité, malgré le fait qu'il s'agisse d'un logiciel "académique" montrant parfois quelques inconvénients liés à l'interface utilisateur. Il s'agit d'un des trois principaux logiciels les plus souvent cités dans la littérature. Le choix effectué au début du travail ne s'est donc pas démenti. On veillera à rester attentif aux évolutions très rapides des différents logiciels dans ce domaine.

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