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Cet échantillonnage est principalement dédié à l’étude de la Série Différenciée du Piton de la Fournaise et à l’obtention d’éléments permettant de discuter le positionnement de cette série dans l’évolution de l’île. Nous avons donc ciblé l’échantillonnage sur les formations appartenant à cette Série Différenciée, et nous l’avons complété par un échantillonnage réalisé au Piton des Neiges, sur des laves du même type, afin d’en identifier les similitudes ou les différences (Fig. III.10).

Figure III.10. Carte de localisation des échantillons subaériens du Piton de la Fournaise et du Piton des Neiges.

Au Piton de la Fournaise, nous avons également réalisé un échantillonnage plus large sur la partie plus récente (laves entre 88 et 10 ka). Deux finalités ont orienté ce choix : (1) disposer de notre propre base de données chimiques sur l’ensemble de la Fournaise, afin de pouvoir la comparer aux nombreuses analyses existantes et, en l’absence de biais analytique, intégrer si besoin ces données à notre étude, (2) apporter des éléments de discussion sur l’évolution structurale récente du Piton de la Fournaise.

L’objectif de cet échantillonnage est également de répondre aux questions suivantes :

• Pour les Roches Pintades du PdF et du PdN : - quelle est l’origine des Roches Pintades ?

- sont-elles les marqueurs d’une série de laves différenciées ?

- si oui, les pintades de la Série Différenciée de la Fournaise appartiennent elles vraiment à ce volcan ?

• Pour le reste du massif fournaisien :

- est ce que l’on observe une évolution chimique de part et d’autre de marqueurs structuraux ? -peut-on valider le nouveau modèle de Merle et al. (2010) en apportant de nouvelles

datations ?

L’échantillonnage de la partie subaérienne concerne donc trois principaux sites : la Rivière des Remparts pour la Série Différenciée du Piton de la Fournaise, la Fournaise ancienne et récente et le Massif du Piton des Neiges (Fig. III.10).

III. 2.1. Le Massif du Piton de la Fournaise

Figure III.11. Carte de localisation des échantillons subaériens prélevés sur le massif du Piton de la Fournaise. Les échantillons sont référencés de la façon suivante : ”BC” pour Bras Caron, ”BM”

pour Bras Mahavel, ”NB” pour Nez de Bœuf, ”PB” pour Pas de Bellecombe, ”Plt B” pour Plateau des Basaltes, ”PS” pour Plaine des Sables, ”RL” pour Rivière Langevin et ”RR” pour Rivière des Remparts. Les coordonnées GPS des sites d’échantillonnage sont en annexe. Extraite de Google Earth.

Rivière des Remparts : la Série Différenciée du Piton de la Fournaise

La Série Différenciée est la plus ancienne unité de laves attribuée au Piton de la Fournaise, allant de 527 ka (Gillot et al., 1990 ; Fig. III.11 et III.12) à environ 395 ka (données non publiées de Gillot, 1991 dans Luais, 2004). Son origine et son appartenance sont débattues dans cette étude.

Figure III.12. Carte géologique de La Réunion focalisée sur le Massif du Piton de la Fournaise. La Série Différenciée du Piton de la Fournaise y est représentée en marron orangé. D’après le Laboratoire Géosciences Réunion et le BRGM, 2006.

Se situant à la base de l’édifice de la Fournaise, elle a été depuis largement recouverte par des coulées de laves plus récentes du Piton de la Fournaise. Il est donc difficile d’y avoir accès, excepté aux endroits incisés par l’érosion. La Série Différenciée du Piton de la Fournaise affleure sur la moitié inférieure du rempart (de plus de 1000 m de hauteur) de la rive droite de la Rivière des Remparts (Fig. III.13), dans la Rivière Langevin, dans le fond de la Rivière de l’Est et dans la Plaine des Palmistes (Fig. III.12).

Figure III.13. Vue sur la Rivière des Remparts depuis le point de vue du Nez de Bœuf. L’affleurement de la Série Différenciée de la rive droite est en bleuté. Les étoiles jaunes correspondent aux roches datées dans la zone par Gillot et al. (1990) et Gillot, 1991 (non publiée).

Une grande partie des roches de cette Série Différenciée sont des roches basaltiques très riches en phénocristaux de plagioclase (Fig. III.14), localement appelées les Roches Pintades. Ces Roches Pintades sont aussi présentes sur le Piton des Neiges (dans les laves appartenant à la Série Différenciée) et elles marquent la transition entre le stade bouclier et le stade différencié de ce volcan (Upton et Wadsworth, 1972 ; Kluska, 1997). Facile à repérer et abondantes, nous avons ciblé l’échantillonnage des Roches Pintades, parce qu’elles paraissent être déterminantes pour comprendre le dynamisme du volcan à cette période.

Nous avons également prélevé des coulées de laves intercalées avec les coulées de laves de pintades ainsi que des filons magmatiques (par exemple basalte aphyrique (RR29), cotectique (RR34), à plagioclase (RR40), à olivine (RR47)…) en remontant la Rivière des Remparts, de façon à échantillonner sur différents niveaux stratigraphiques et à recouvrir une plus large gamme de temps de l’histoire du volcan. Les échantillons présentés ici sont numérotés ”RRx”.

Figure III.14. Photographie d’un échantillon macroscopique de roche Pintade de la Série Différenciée du Piton de la Fournaise, échantillonnée dans la Rivière des Remparts. Il s’agit d’un basalte très riche en phénocristaux de plagioclase pluri millimétriques.

Dans la Rivière des Remparts, nous avons également échantillonné (Fig. III.11) au niveau de la tête de la Rivière (NB), à l’aplomb du lieu dit Nez de Bœuf et dans deux de ces affluents, le Bras Caron (BC30 et BC 31) et le Bras Mahavel (BM2, BM3 et BM4). Ces prélèvements ont le même objectif que celui cité ci-après pour la Fournaise ancienne.

Fournaise ancienne et récente : quelques problèmes de structure

Cet échantillonnage vise à prolonger la connaissance de l’histoire du Piton de la Fournaise vers les stades plus récents de son évolution. Le choix des sites s’appuie sur les travaux récents de Merle et al. (2010), qui revisitent les hypothèses sur l’évolution de la Fournaise au cours du temps (Bachèlery, 1981 ; Bachèlery et Mairine, 1990 ; Mairine et Bachèlery ; 1997). Le but est de voir si l’évolution structurale du volcan, comme la formation d’une caldeira, peut être corrélée à une évolution chimique. Les roches sélectionnées se trouvent donc parfois de part et d’autre d’une faille identifiée ou supposée sur le terrain (par exemple au Pas de Bellecombe PB1 et PB3, PB4 et PB5). Certains de ces échantillons ont été datés pour mieux contraindre les modèles (par exemple dans la vallée de la Rivière Langevin, RL1).

D’autre part, les analyses de ces échantillons récents permettent de comparer les résultats analytiques nouveaux obtenus dans le cadre de ce travail, à l’importante base de données bibliographique existant sur le Piton de la Fournaise.

Echantillonnage du Pas de Bellecombe

L’étude structurale de la Fournaise a montré à plusieurs reprises que certaines structures tectoniques pouvaient être masquées par des coulées postérieures, comme c’est le cas pour le remplissage de la paléo-Rivière des Remparts clairement visible au lieu dit ”Le Bloc” (Fig. III.15 ; Bachèlery et Mairine, 1990 ; Mairine et Bachèlery, 1997 ; Merle et al.

2010).

La morphologie des cônes, l’épaisseur et l’inclinaison des coulées de laves peuvent être un indicateur d’une telle formation. Par exemple, une discordance dans le pendage des coulées peut renseigner sur l’ancienne existence d’une caldeira (Fig. III.16).

Figure III.15. Exemple ”d’enregistrement” de structures tectoniques et/ou d’érosion anciennes.

Photographie et interprétions du lieu dit ”Le Bloc” sur la rive droite de la Rivière des Remparts. Le creusement de la paléo vallée de la Rivière des Remparts (dans une formation de Roches Pintades / Pintades Unit) est fossilisé avec des dépôts volcano-sédimentaires (Debris flow), puis par le remplissage de coulées de lave de basaltes à olivine (Morne Langevin Unit). Localisation au niveau de l’échantillon RR32 de la figure III.11. D’après Merle et al., 2010.

Figure III.16. Formation d’une caldeira (a) remplie par des coulées de lave postérieures jusqu’au débordement (b). L’ensemble est ensuite érodé (c, d, e). Le concept est donné en 3D (colonne A) et en coupe (colonne B). D’après Merle et al., 2008.

Lorsque l’on regarde la morphologie de certains cônes adventifs de la Plaine des Sables (Piton Chisny, Demi Piton), on remarque leur forme particulière dite en ”demi lune”

(Fig. III.17). Cette morphologie peut avoir plusieurs explications comme un effondrement post éruptif, une orientation préférentielle des projections volcaniques qui forment un édifice par accumulation directe ou qui sont emportées avec l’écoulement des laves, ou encore l’existence d’un évent éruptif orienté par une structure préexistante.

Le Piton Chisny et le Demi Piton sont orientés selon un axe Nord-Sud, parallèlement à la caldeira de l’Enclos Fouqué. Des études de tomographie en cours tentent de mettre en évidence une faille cachée dans la Plaine des Sables. L’hypothèse de l’existence de cette faille repose d’une part sur l’orientation des deux demi-pitons et d’autre part sur l’observation d’une différence d’épaisseur des coulées dans le Rempart du Pas de Bellecombe, de part et d’autre de la ”descente du Pas de Bellecombe”. Cette faille pourrait constituer la limite entre un substrat plus ancien et le remplissage par des coulées d’une caldeira prédatant celle de l’Enclos Fouqué. Lorsque l’on observe le Rempart de Bellecombe depuis le Formica Léo dans l’Enclos (Fig. III.18), du côté droit de l’escalier se trouvent des coulées de laves épaisses et massives (PB1), alors que du coté gauche, elles sont plus fines (PB3). Cette observation a fait

l’objet d’un échantillonnage des coulées de laves de part et d’autre de l’escalier, pour analyses chimiques et datation.

Figure III.17. (a) Vue sur le Demi Piton dans la Plaine des Sables, au sommet du Piton Chisny, dans la direction sud vers le nord. On remarque l’alignement NS du cône avec une morphologie typique en

”demi-lune”. (b) Localisation sur carte du point d’observation (trait rouge).

Figure III.18. (a) Vue sur le Rempart de l’Enclos Fouqué depuis le Formica Léo (avec un tracé approximatif du sentier pour descendre dans l’Enclos en pointillés blancs). Echantillonnage de part et d’autre de l’escalier du Pas de Bellecombe. (b) Localisation sur carte du point d’observation (trait rouge).

Echantillonnage du Rempart des Sables et du Plateau des Basaltes

La Plaine des Sables reste une structure complexe avec de nombreuses incertitudes d’interprétation. Des travaux de géologie structurale (Bachèlery, 1981 ; Merle et al. 2010) tentent de comprendre la structure et l’évolution de ce site en accord avec les contraintes d’âges (McDougall, 1971 ; Gillot et al., 1994). Certains échantillons ont des âges qui posent des difficultés d’interprétation (Gillot et al., 1990). Nous avons choisi d’analyser et de dater de nouveau quelques échantillons de la Plaine des Sables pour pouvoir mieux contraindre le modèle sur l’évolution de la Fournaise ancienne.

Le Plateau des Basaltes, au nord de la Plaine des Sables, est formé d’un empilement de coulées de laves épaisses et massives. Il semble être en discordance par rapport au Rempart des Sables, sur lequel il s’appuie (Fig. III.19 a et c). L’origine du Plateau est largement discutée (Mairine, Bachèlery, Merle et Michon, com. pers.) : cette structure tabulaire laisse penser à un remplissage (de vallée ou de caldeira). Pourtant, la discordance que l’on observe depuis la Plaine des Sables est beaucoup moins claire du côté du Fond de la Rivière de l’Est (Fig. III.19 b et c).

Nous avons échantillonné à la fois le Rempart des Sables et le Plateau des Basaltes, depuis sa base vers le haut, pour trouver une éventuelle évolution chimique et /ou différence entre les deux structures.

Figure III.19. (a) Plateau des Basaltes observé depuis le Demi Piton. On remarque qu’il ne présente pas le même aspect que le Remparts des Sables, sur lequel il s’appuie. (b) Plateau des Basaltes observé depuis le fond de la Rivière de l’Est. Les structures tabulaires semblent se poursuivre sous la Plaine des Sables. (c) Localisation sur carte des deux points d’observations (traits rouges) : point de vue A pour la photographie a et point de vue B pour la b.

III. 2.2. Le Massif du Piton des Neiges

Le Piton de Neiges est le ”frère aîné” du Piton de la Fournaise sur de nombreux points.

Nous avons tout particulièrement étudié les Roches Pintades du PdN, qui représentent plus de 50% des laves de la Série Différenciée (Kluska, 1997) et montrent une évolution vers des magmas de plus en plus différenciés. Nous avons également échantillonné dans les différentes périodes de sa construction, en nous appuyant sur les travaux de McDougall (1971) pour avoir une base de données géochimiques sur toute l’histoire du volcan. Pour rappel, le but est ici d’obtenir des échantillons pouvant être comparés à ceux de la Série Différenciée du Piton de la Fournaise.

Cet échantillonnage est localisé sur la figure III.20. Le Piton des Neiges n’étant pas l’objet d’étude de cette thèse, les coordonnées et une description rapide des échantillons se trouvent en annexe.

Figure III.20. Carte de localisation des échantillons prélevés sur le Massif du Piton des Neiges. Plus de détails sont disponibles en annexe. Extraite de Google Earth.

Deux groupes de laves se distinguent remarquablement des autres laves qui ont une composition chimique commune et déjà décrites pour des roches de La Réunion. Il s’agit des Roches Pintades et d’une partie des échantillons sous-marins dragués (nommé Groupe Sous-marin 2 PdF) à l’Est de la Fournaise. Le premier groupe est particulier pour ces caractéristiques pétrographiques alors que le second se distingue principalement pour ces différences de compositions chimiques.

Les échantillons de cette étude qui ne font pas partie de ces deux groupes, ont des caractéristiques (pétrologiques et géochimiques) déjà identifiées et décrites dans la bibliographie (Lacroix, 1936 ; Nativel, 1978 ; Kluska, 1997 ; Bachèlery, 1981…). Nous présentons l’ensemble de nos roches, en mettant en avant ces deux groupes, les Roches Pintades et les échantillons sous-marins particuliers par rapport aux autres échantillons.