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Choix de la phase d’adaptation

Résultats expérimentaux

IV.1.5 Choix de la phase d’adaptation

Nous concluons l’analyse de cette expérience en nous intéressant aux choix de phase effectués par le contrôleur au cours de la mesure adaptative. Ce sont ces choix qui per-mettent d’améliorer la convergence de la décimation. Nous étudierons d’abord la fréquence des changements de phase effectués par le contrôleur avant d’en décrire principales carac-téristiques.

IV.1.5.a Fréquence des changements de phase

Nous avons expliqué, en donnant la structure de l’expérience à la section IV.1.1, que nous imposons une limite aux changements de phase effectués par le contrôleur. Des chan-gements trop fréquents sont en principe à éviter, car ils introduisent des imprécisions dans notre estimation d’état (nous ne calibrons pas les POVM correspondants à toutes les suc-cessions de phase possibles). Nous limitons donc les changements de phase à des valeurs significatives de la diminution attendue de l’entropie moyenne : celle-ci doit être supérieure à 10−3.

La fréquence de changement de phase calculée sur l’ensemble des traces sélectionnées dans ces conditions est représentée à la figure IV.10. Nous constatons effectivement que les changements de phase sont de moins en moins fréquents au cours de la mesure. Le tracé obtenu est en bon accord avec une courbe exponentielle de temps caractéristique 55 échan-tillons ce qui est également l’échelle de temps typique de la convergence des probabilités. Les premiers échantillons voient leur phase modifiée en moyenne une fois sur cinq. Étant donné que l’on détecte en moyenne 0,35 atomes par échantillon, et que le contrôleur ne peut modifier la phase que lorsqu’il y a détection, la fréquence de changement ne peut pas dépasser ce nombre (que l’on obtiendrait en alternant les phases comme pour une mesure passive). Les changements sont donc plutôt fréquents en début de trajectoire, mais leur fré-quence décroît ensuite rapidement ; il ne s’en produit pour ainsi dire plus dès l’échantillon 200. La régulation des sauts joue donc bien son rôle : à titre de comparaison, si l’on simule l’algorithme non régulé, la fréquence de saut atteint une valeur asymptotique de 0.05 (soit le quart de sa valeur initiale).

Figure IV.10 – Fréquence moyenne des changements de phase durant la mesure adap-tative, et ajustement exponentiel (noir). Les modifications de la phase de Ramsey sont restreintes dans l’algorithme de contrôle à des diminution de l’entropie supérieures à 10−3.

IV.1.5.b Statistique des choix de phase

Les réglages typiques des phases de Ramsey employées ont été présentés à la figure IV.2 : les phases φ0, φ1 φ2, et φ3 sont choisies de façon à ce que l’interféromètre soit sur un milieu de franges si le champ contient les nombres de photons 0, 1, 2, et 3 respectivement. Afin de pouvoir traiter les trajectoires sélectionnées de façon globale, nous définissons pour chaque nI un indice de phase relatif δp(nI) variant de -1 à 2 (il y a quatre directions de mesure possibles), tel que la phase relative φ

δp corresponde à un axe de rotation dans le plan équatorial de la sphère de Bloch aligné sur le nombre de photons relatif ∆n. φ

0 est donc la phase pour laquelle l’axe de rotation est aligné sur le pseudospin associé à nI et φ

2

correspond à la direction orthogonale. Ainsi on a pour nI = 7, φ

0 = φ3 (axe aligné sur le pseudospin correspondant à nI), φ

1 = φ1, φ

2 = φ2 et φ

−1 = φ3. Explicitement, en notant p l’indice des phases initiales φp, on a :

δp = ((p− nI + 1) mod 4) + 1.

Nous nous intéressons d’abord à la fréquence d’utilisation de chaque phase relative. Pour cela nous définissons formellement l’entier mk(δp) qui vaut 1 si la phase de détection de l’échantillon k est la phase φ

δp et 0 sinon. La fréquence d’utilisation de la phase φ δp

(pour l’échantillon k) est alors la moyenne de mk(δp) sur l’ensemble des trajectoires, notée mk(δp). L’évolution de cette moyenne pour les différentes valeurs de δp est représentée à la figure IV.11.

La succession des phases pour les quatre premiers échantillons est fixée par la fin du bloc de préparation d’état (I) dont ce sont les derniers échantillons préparés, ce qui explique les

Temps (ms) dp = 0 dp = -1 dp = 1 dp = 2 Fréquen ce Echantillon, k

FigureIV.11 – Fréquences d’utilisation des valeurs de phase de Ramsey par le contrôleur, repérées par l’indice δp(nI) de la phase relative φ (voir texte), en fonction de l’indice k de l’échantillon détecté. Après une durée correspondant à dizaine d’échantillons environ, la phase telle que δp = 0 est utilisée préférentiellement tout au long de la trajectoire.

variations rapides initiales de la fréquence. Dès k = 5, le contrôleur est responsable des choix de phase. Après la détection d’une dizaine d’échantillons le choix δp = 0 est progressivement privilégié, représentant plus de la moitié des réglages pour les échantillons entre 50 et 100, ce qui correspond véritablement à la période de «projection» de la distribution de probabilité : l’entropie moyenne atteint à la fin de cette phase S ≃ 0,2 (voir la figure IV.5) ce qui correspond à une probabilité de 90% environ pour le nombre de photons majoritaire. La phase δp = 0 réalise donc en moyenne la meilleure décimation pour le nombre sélectionné nI. La direction de mesure orthogonale δp = 2 est très rapidement peu utilisée : pour cette phase en effet l’interféromètre est à un extremum de frange si le champ est dans l’état nI. Cette direction de mesure distingue donc mal l’état |nIi de ses voisins directs, et n’est quasiment plus utilisée par le contrôleur après une durée typique de l’ordre de 50 échantillons.

Les phases δp = 1 et δp = −1 continuent d’être employées par le filtre jusqu’à la fin de la trajectoire, ce qui peut avoir plusieurs causes : des fluctuations de Pk(n) peuvent se produire suite à un enchaînement particulier de détections, mais la convergence peut aussi avoir lieu vers les nombres de photons voisins ∆n = ±1 (qui sont présents dans la distribution moyenne sélectionnés). La limitation imposée sur les changements de phase est également en partie responsable de ce comportement : la phase peut être «immobilisée» à une valeur

δp donnée si l’espérance de la diminution d’entropie est insuffisante. Ces comportements des fréquences d’utilisation sont bien reproduits par les simulations de l’expérience, et dépendent effectivement de la limitation imposéesur les changements d’entropie . C’est le seul effet visible de cette limitation, qui ne modifie pas, par ailleurs, les performances de la mesure en termes de réduction d’entropie moyenne ou de convergence des probabilités.

Remarque : Nous avons utilisé ici des phases relatives d’indice δp défini par rapport à l’indice nI de la sélection. De cette façon nous n’introduisons pas de connaissances de l’estimateur dans notre sélection, et étudions le comportement du contrôleur sur l’état sélectionné, que nous avons reconstruit indépendamment.

Le comportement du contrôleur est cependant directement lié à l’estimation de la dis-tribution de probabilité. Nous pouvons donc aussi envisager une autre représentation de ces choix de phase, par rapport à l’état dont la probabilité estimée est maximale à la fin de la trajectoire. Ceci revient à définir, de façon analogue à ce qui a été fait ci-dessus pour les probabilités moyennes, un indice de phase relatif δpsup. Pour chaque trajectoire, en fonction du nombre de photons nsup dominant à la fin de la trajectoire, la phase d’indice δpsup(nsup) correspond à un axe de rotation aligné sur le nombre de photons relatif ∆nsup(n, nsup).

On obtient avec ce nouveau tri des courbes très similaires à celles représentées ici, à une exception notable : la phase relative d’indice δpsup = 2 voit sa fréquence moyenne tomber à une valeur très proche de 0. Ceci est assez logique, puisque ce choix de phase est inefficace pour les nombres de photons au voisinage de nsup, vers lequel l’estimation converge avec une probabilité proche de 1. On peut donc associer l’emploi de δp = 2 ci-dessus aux seuls cas de convergence vers ∆n = ±1. Les résultats obtenus à l’aide de cette méthode étant très semblables à ceux présentés ici, ils sont reportés à l’annexe D.

IV.1.5.c Corrélations

Les valeurs moyennes étudiées ci-dessus ne nous renseignent pas sur la succession des choix de phase. Intéressons-nous donc dans un second temps aux corrélations qui peuvent exister entre les choix de phases. Nous cherchons à savoir si lorsqu’il a utilisé à l’échantillon k la phase φ

δp1, le contrôleur choisira de préférence la phase φ

δp2 pour un échantillon ultérieur d’indice k + l. Nous calculons dans ce but les fréquences moyennes mk(δp1)mk+l(δp2). Si le choix effectué par le filtre pour l’échantillon k + l était indépendant de son choix à l’échantillon k, autrement dit si les variables mk et mk+l étaient indépendantes, on aurait :

mk(δp1)mk+l(δp2) = mk(δp1)· mk+l(δp2).

Nous définissons donc la corrélation entre les choix de phases δp1 et δp2 comme : C (δp1, k; δp2, k + l)≡ mk(δp1)mk+l(δp2)− mk(δp1)· mk+l(δp2). (IV.6) Ces corrélations ont été calculées sur l’ensembles des trajectoires : nous les représentons à la figure IV.12 pour les indices δp1 et δp2 allant de −1 à 1 seulement (δp = 2 étant très peu utilisé) et pour des délais l allant jusqu’à 100 échantillons. Nous pouvons constater

Dél ai , l Dél ai , l Dél ai , l

Echantillon, k Echantillon, k Echantillon, k

dp2 = 0 dp2 = 1 dp2 = -1 dp1 = -1 dp1 = 1 dp1 = 0 0,25 -0,25 0,00

FigureIV.12 – Corrélations entre utilisations des phases relatives : on trace la corrélation moyenne C (δp1, k; δp2, k + l) entre les phases relatives φ d’indices δp1 et δp2, en fonction de l’indice k de l’échantillon détecté et d’un délai l allant jusqu’à 100 échantillons. On constate essentiellement une tendance à réemployer la même phase pour plusieurs échan-tillons successifs (zones rouges pour les graphes sur la diagonale), qui s’accentue à la fin de la mesure.

que le contrôleur tend de manière générale à réemployer le même réglage de phase sur des échantillons successifs : on obtient des corrélations positives pour δp1 = δp2. Ceci se fait évi-demment au détriment des autres phases d’où les corrélation négatives hors de la diagonale. On peut distinguer deux périodes typiques dans la trajectoire d’après ces corrélations. Jus-qu’à 100 échantillons environ, le réglage de phase est conservé préférentiellement à l’échelle de quelques échantillon atomiques : ceci est principalement lié au fait que le changement de phase ne peut se faire qu’après la détection effective d’un atome, ce qui se produit en moyenne tous les trois échantillons environ : la corrélation ne s’étend donc pas plus loin que quelques échantillons. Puis, au niveau du centième échantillon, on constate une aug-mentation soudaine de la longueur de corrélation : à cette échelle de temps, comme nous l’avons vu plus haut, la distribution est déjà fortement piquée sur un nombre de photons. Il est alors semble-t-il de plus en plus avantageux pour la décimation de conserver le même choix de phase pour les échantillons ultérieurs. Ce phénomène est également amplifié par la restriction que nous avons imposée sur les changements de phase.

Remarque : Comme pour les fréquences d’utilisation de chaque phase, nous pouvons également étudier les corrélations entre phases en définissant l’indice de phase relativement au nombre de photons dominant pour l’estimateur nsup à la fin de la trajectoire. Les résul-tats obtenus sont qualitativement les mêmes que ceux présentés ici. L’annexe D regroupe les statistiques de choix de phases calculées avec cette méthode de tri.