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Pourquoi avoir choisi d’analyser le potentiel de la mesure de pluie par liens microondes à Niamey et Ouagadougou ?

Le projet Raincell/SMART entamé il y a moins de 10 ans, a été lancé pour étudier la possibilité d’utiliser les réseaux de télécommunication en Afrique pour la mesure de la pluie. Plusieurs études ont depuis montré le potentiel de cette mesure dans ce contexte (Doumounia et al. 2014; Doumounia 2015; Gosset et al. 2016). Ce projet a dans un premier temps été lancé à Ouagadougou, avant d’obtenir des données à Niamey (et plus récemment au Cameroun). C’est pourquoi cette thèse s’intéresse à ces deux agglomérations pour illustrer une question plus large : les liens micro-ondes commerciaux peuvent-ils contribuer à mieux documenter et anticiper les risques d’inondations croissant en Afrique, exposés dans ce chapitre.

La problématique des réseaux de mesure présentée dans la section 4., a mis en avant la faible densité de pluviographes dans la région, et l’absence de radar. C’est pourquoi la mesure de la pluie à l’aide des réseaux de télécommunications, a un potentiel intéressant dans une

région où ils sont déjà bien développés et en pleine croissance (ITU 2004; Noam 1999). Ces réseaux de télécommunications sont composés de liens microondes, dont l’exploitation pour mesurer la pluie est décrite dans le chapitre II.

La problématique des réseaux de mesure présentée dans la section 4., a mis en avant la faible densité de pluviographes dans la région, et l’absence de radar. C’est pourquoi la mesure de la pluie à l’aide des réseaux de télécommunications, a un potentiel intéressant dans la région, où ils sont bien développés (ITU 2004; Noam 1999). Ces réseaux de télécommunications sont composés de liens microondes décrits dans le chapitre II.

A titre d’exemple, la figure I.17. montre le réseau de liens microondes commerciaux (traits blancs à bleus) aux Pays-Bas (Uijlenhoet et al. 2018), l’un des pays pionnier dans l’utilisation de ces données pour l’estimation de pluie. Le réseau de liens microondes (traits bleus) d’Orange au Cameroun est également présenté. On peut voir que dans les deux pays, les liens sont présents sur l’ensemble du territoire, même si dans une plus grande densité dans les centres urbains, et avec au Cameroun quelques vides au niveau des zones moins peuplées (régions Nord et Est).

On a pour le Pays-Bas et le Cameroun une densité de respectivement 1 lien pour 13,4 et 312 km². On a donc une différence importante de densité entre les Pays-Bas et le Cameroun, mais surtout, une densité beaucoup plus importante de liens par rapport à la densité de pluviographes, notamment en urbain. Il est aussi à noter que pour le Cameroun, seul le réseau d’Orange est illustré, mais que des liens appartenant à d’autres opérateurs augmentent cette densité. En urbain la densité de ces réseaux de liens microondes, même en ne considérant qu’un opérateur, est très importante. Par exemple à Yaoundé la densité est d’environ 1 lien pour 1,5

Figure I.18 : Carte du réseau de liens microondes au Pays-Bas en 2018 (à gauche, Uijlenhoet et al. 2018), où l’échelle de couleur montre la disponibilité des liens sur la période étudiée. Carte du réseau de liens microondes Orange au Cameroun en 2019 (à droite), où les liens sont représentés par des traits bleus

km² (avec 272 liens pour ~410 km²), alors que la distribution dans les réseaux de pluviographes est plus homogène entre l’urbain et le milieu rural. Enfin, cette densité déjà intéressante, risque d’aller en grandissant avec la croissance des télécommunications et du nombre d’abonnés à la téléphone mobile en Afrique (figure I.18., Chwala and Kunstmann 2019), notamment avec la perspective du réseau de 5ème génération (5G), et malgré le remplacement de certaines transmissions aériennes de données par de la fibre optique enterrée.

En Afrique sahélienne, l’évolution de la vulnérabilité et de l’aléa pluviométrique engendrent une augmentation des risques d’inondations, dont on attend un renforcement dans le futur. Ce risque est difficilement prévenu par des systèmes d’alerte efficaces, à cause de réseaux de mesures de la pluie mal adaptés au contexte hydrométéorologique de la région. Pour cela, les réseaux de télécommunication semblent être une alternative envisageable grâce à leur haute résolution spatiale et leur potentiel à fournir des données en temps réel.

Figure I.19 : Evolution du nombre d’abonné de téléphonie mobile en Afrique de 2010 à 2020 (Chwala and Kunstmann 2019)

Le chapitre I. a montré la nécessité d’avoir un complément aux réseaux de mesure de pluie traditionnels en Afrique, et notamment en Afrique sahélienne. Depuis une dizaine d’année, à la suite des travaux présentés par Messer et al. en 2006 en Israël et d’une étude détaillée dans la thèse de Leijnse en 2007 au Pays-Bas, la mesure de pluie à partir des liens microondes a montré un potentiel intéressant. Un lien microonde correspond au trajet d’un signal microonde entre deux antennes (émettrice et réceptrice), installées sur deux pylônes d’un réseau de télécommunication. Lors de ce trajet, lorsqu’un événement pluvieux se déroule, le signal reçu à l’antenne réceptrice est atténué (figure II.1.). La mesure de la pluie par un lien microonde se base alors sur l’inversion de l’atténuation liée à la pluie, en intensité pluvieuse. L’ensemble de ces liens microondes composent les réseaux de téléphonie mobile, comme illustré sur la figure II.2 pour les agglomérations de Niamey et Ouagadougou. A la suite des travaux initiaux, de nombreuses études sur la mesure de la pluie par ces liens microondes, de recherche ou commerciaux, ont été menées en Israël (David et al. 2013; Messer and Sendik 2015; Zinevich et al. 2008, 2009, 2010) et aux Pays-Bas (Leijnse et al. 2007a,b, 2008b,a, 2010; Overeem et al. 2011, 2013, 2016a,b; Uijlenhoet et al. 2011; van het Schip et al. 2017; van Leth et al. 2018; de Vos et al. 2019). En parallèle, d’autres études ont été menées dans d’autres pays

Figure II.1 : Schéma représentant un lien microonde, dont le signal reçu est atténué par un événement pluvieux (Doumounia 2015)

occidentaux comme l’Allemagne (Chwala et al. 2012b,a; Graf et al. 2019; Polz et al. 2019), la France (Berne and Uijlenhoet 2007; Schleiss and Berne 2010; Zohidov 2016; Zohidov et al. 2016), l’Italie (D’Amico et al. 2016), le Luxembourg (Fenicia et al. 2012), la République Tchèque (Fencl et al. 2013, 2015, 2017; Pastorek et al. 2019; Smiatek et al. 2017) et la Suisse (Wang et al. 2012; Schleiss et al. 2013) ; ou dans le reste du monde (Doumounia et al. 2014; Hoedjes et al. 2014; Kim and Kwon 2018; Rios Gaona et al. 2017; Sohail Afzal et al. 2018). Ces études ont montré la capacité de ces liens à bien reproduire la pluie, dans les contextes pluviométriques de ces régions.

Ces études sur la capacité des liens microondes à bien reproduire la pluie ont été menées de l’échelle locale, au niveau de chaque lien, à l’échelle du réseau entier (section 1.). De plus, elles ont aussi abordé les différentes incertitudes de la méthode (section 2.).

La mesure de la pluie par des liens microondes commerciaux : de