• Aucun résultat trouvé

Partie II - Changements globaux et risques d’assèchement en Europe

II.1. Changement climatique à l’échelle européenne

II.1.1. Modèles, scénarios et modification du cycle hydrologique

A ce jour, de nombreux modèles ont été développés afin de simuler l’impact des

changements climatiques. Parmi eux, des modèles à haute résolution, à l’échelle planétaire,

dont les « Global Atmospheric General Circulation Models (GMCs) », sont couramment utilisés (IPCC, 2007 ; Beniston et al., 2007) afin de comparer les différences observées entre la période 1961-1990 (état de référence) aux simulations produites pour la période 2071-2100.

Néanmoins, ces modèles ne fournissent qu’une estimation grossière des changements climatiques à l’échelle des régions ou des bassins hydrologiques. En effet, selon la région du globe considérée, les perturbations attendues pourront être nuancées par la présence de courant atmosphérique et/ou océanique, la proximité des océans et/ou des reliefs, ou encore

39

différentes pressions d’origine anthropique, dont la demande en eau et l’irrigation arrivent au premier plan. Pour réduire les incertitudes, d’autres modèles « Regional Climat Models

(RCMs) » se focalisent sur certaines régions du globe, comme l’Europe (Beniston et al.,

2007 ; Van Vliet et al., 2012).

Différents scénarios d’émission de gaz à effet de serre ont également été développés par l’IPCC, afin d’évaluer l’amplitude des variations possibles, allant de scénarios

catastrophiques (A2, forte émission) à des scénarios plus modérés (B2, faible émission). Les simulations à long terme (2090-2099) divergent selon les scénarios, de +1.8 à 4°C, par rapport à la période (1980-1999). Ainsi, selon le scénario considéré, le changement climatique

pourrait avoir diverses conséquences, de nature et d’intensité proportionnelle à l’augmentation moyenne des températures. Néanmoins, l’ensemble des scénarios s’accordent sur une

augmentation moyenne des températures de 0.4°C au cours des vingt prochaines années à

l’échelle planétaire. A l’échelle européenne, les simulations selon le scénario A2 prévoient une augmentation moyenne des températures estivales, passant de 16.8°C pour la période de référence (1960-1990) à 19.9 °C ou 23.3°C pour la période 2070-2100 (Van Vliet et al., 2012).

Cette augmentation des températures atmosphériques globales devrait induire une modification significative des cycles hydrologiques et des régimes de précipitations, à

l’origine du risque d’assèchement en Europe, mais également modifier localement de nombreux autres processus (détaillés ci-dessous) agissant généralement en synergie avec les modifications hydrologiques.

II.1.2. Intensification des régimes de précipitation

Les modifications des régimes de précipitations sur l’Europe résulteraient

essentiellement de la modification des flux atmosphériques d’origine océanique (modèles

GCMs et RCMs, IPCC, 2007a).

Les simulations concernant l’impact du changement climatique sur les précipitations en

Europe prédisent une intensification des régimes actuels, soit une augmentation des

précipitations dans le Nord, plus particulièrement en hiver, accompagnée d’une réduction des

précipitations dans le Sud, plus particulièrement en été (IPCC, 2007a ; Maracchi et al., 2005,

Planton et al., 2005), conformément aux simulations à l’échelle planétaire concernant les

Une réduction de l’intensité des précipitations est notamment attendue dans la région

méditerranéenne, et plus particulièrement dans la péninsule ibérique, les Alpes, et à l’est de

l’Adriatique (Beniston et al., 2007). Une fois encore, bien que l’impact diffère selon les scénarios, pouvant conduire localement à une augmentation des précipitations, toutes les tendances confirment une région méditerranéenne de plus en plus aride, caractérisée par des sécheresses estivales de plus en plus longues (entre 20 et 30 jours de plus pour la période 2070-2100, en péninsule ibérique, respectivement selon les scénarios B2 et A2).

II.1.3. Dynamique des écoulements et humidité des sols

La dynamique hydrologique continentale, et plus particulièrement la représentation des écoulements, est plus complexe et difficile à évaluer que la dynamique hydrologique

atmosphérique (Planton et al., 2005). L‘impact du changement climatique sur le débit des

fleuves dépend fortement de la résolution des modèles utilisés, bien que la tendance générale suppose une augmentation des amplitudes saisonnières des débits corrélée aux régimes de précipitation.

Directement liés aux précipitations, le ruissellement et l’humidité des sols sont eux

-aussi susceptibles d’être modifiés par le changement climatique. Dans le Nord et Nord-Ouest

de l’Europe, le ruissellement annuel augmenterait de 5-15% en réponse à l’intensification des précipitations (Andreasson et al., 2004 ; Alcamo et al., 2007), jusqu'à 25% de plus pendant

l’hiver (Arnell, 1999). Dans le Sud et Sud-Est de l’Europe, le ruissellement pourrait diminuer de 0-23% (Iglesias et al., 2005, Falloon and Betts, 2006 ; Alcamo et al., 2007), et jusqu'à 50%

durant l’été (Arnell, 1999).

L’humidité des sols dans le Nord serait ainsi augmentée, en particulier durant l’hiver (Douville 2002) alors que dans le Sud, l’humidité des sols devrait diminuer du fait de la

diminution des précipitations et des ruissellements, particulièrement en été. II.1.4. Intensification des canicules, évaporation, et évapotranspiration

L’augmentation des températures estivales à pour conséquence majeure l’augmentation

de la durée, de la fréquence et de l’intensité des épisodes caniculaires en Europe (IPCC,

2007 ; Beniston et al., 2007). La durée moyenne et l’intensité des canicules pourraient

augmenter d’un facteur de 1 à 8 sur l’ensemble de l’Europe. Le nombre de jours et la

fréquence augmenteraient d’un facteur 10 pour le sud de la France et l’Espagne, et le nombre

2070-41

2100 (Beniston et al., 2007). De plus, ces événements jusqu’alors retreints à la période estivale, seront observés de plus en plus tôt ou plus tardivement dans la saison.

Avec l’augmentation de l’intensité et de la fréquence des canicules, l’évaporation estivale

(Arnell, 1999 ; Hulme et al., 2002) ainsi que l’évapotranspiration induite par le couvert

végétal (Falloon and Smith, 2003, Bradley et al., 2005) devraient eux aussi augmenter,

renforçant la dessiccation estivale des sols et l’assèchement à l’échelle des plaines alluviales. L’évapotranspiration annuelle moyenne devrait augmenter de +17% à +36% pour la période 2070-2100, et plus particulièrement au cours de la période estivale (e.g. +21% to +49% en Juillet, Van Vliet et al., 2012).

En outre, l’absence d’évaporation de surface en hiver et son augmentation au cours de l’été devraient accentuer l’impact de l’intensification des régimes de précipitations à l’échelle

des régions (Planton et al., 2005).

II.1.5. Fonte des glaces et pics printaniers

En Europe, les fleuves peuvent être classés en deux types de régimes hydriques (Arnell, 1999) :

- Un régime dominé par des pluies et de l’évaporation, dont le maximum d’écoulement

a lieu en automne et en hiver (régions maritimes et continentales de basse altitude).

- Un second, dominé par des chutes puis la fonte des neiges, dont le maximum

d’écoulement à lieu au printemps (régions froides ou alpines).

La dynamique des fleuves sous influence maritime ne sera pas affectée d’un point de vu

chronologique, mais uniquement à travers l’amplitude des variations saisonnières (Arnell,

1999). En revanche, la fonte précoce de la neige en réponse au réchauffement climatique devrait conduire à un avancement du pic printanier des écoulements et une diminution de son

intensité du fait d’une accumulation réduite de neige (Douville et al., 2002). Ainsi, les fleuves dominés par la fonte des neiges devraient subir des étiages de plus en plus importants et une

augmentation du risque d’assèchement estival. En Europe du Sud, les flots estivaux pourraient

ainsi diminuer de près de 50% (Eckhardt and Ulbrich, 2003 ; Falloon and Betts, 2006) et plus

particulièrement dans les Alpes, où l’écoulement estival était jusqu’alors assuré par la fonte

II.1.6. Recharge des nappes

Les nappes phréatiques sont essentiellement alimentées par l’infiltration des eaux de

surface, qu’il s’agisse d’eau de ruissellement ou de cours d’eau plus importants. En Europe, la

diminution des pluies et des écoulements au sein des cours d’eau en réponse aux changements

climatiques pourrait donc entrainer une diminution de la recharge des nappes (Eitzinger et al., 2003 ; Mauser et al., 2006), plus particulièrement dans les vallées (Krüger et al., 2002) et dans

les plaines (Somlyódy, 2002). De plus, cette recharge sera limitée par l’augmentation des

besoins en eau et les pompages permanents dans les nappes.