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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.5 Modélisation numérique des écoulements multiphasiques de type solide-fluide

2.5.5 CFD-DEM

La CFD-DEM n’est pas un modèle proprement dit, mais plutôt le résultat du couplage entre la mécanique des fluides numérique (CFD) et la DEM. Deux grandes familles de CFD-DEM peuvent être identifiées : la CFD-DEM résolue et non résolue.

Dans la CFD-DEM résolue, le maillage fluide est discrétisé plus finement que les particules et celles-ci se manifestent comme des conditions limites pour le fluide. Le couplage entre les deux phases découle directement de l’application de la condition limite de non-glissement à la paroi des particules [81, 82, 107, 108, 167–169]. La nécessité de résoudre l’écoulement à l’échelle des particules limite fortement le nombre de particules pouvant être simulé. Par exemple, lorsque la LBM est utilisée comme schéma numérique, un minimum de 8 noeuds par diamètre de particules doit être utilisé afin de garantir une précision suffisante [302]. De surcroît, l’application des conditions limites de non-glissement à la surface des particules en mouvement requiert un schéma spécifique, généralement basé sur des conditions limites immergées, ce qui augmente fortement les temps de calcul.

La seconde classe de CFD-DEM, la CFD-DEM non-résolue, consiste à résoudre les équations VANS pour la phase fluide à une échelle plus grande que celle des particules, tout en décrivant le comportement de la phase solide à l’aide de la DEM. Ainsi, plusieurs particules peuvent occuper une même maille fluide. Le couplage entre les deux phases s’effectue en employant des expressions explicites pour chaque force d’interaction solide-liquide : traînée, portance de Saffman, etc. [336]. La forme des équations de VANS utilisée requiert aussi une attention particulière. Les trois formulations partagent la même équation de conservation de la masse :

∂t(f) + ∇ · (fu) = 0 (2.57)

mais la formulation de l’équation de conservation de la quantité de mouvement diffère entre les trois modèles :

Forme A (ou II) : ρf ∂t(fu) + ∇ · (fu ⊗ u) ! = −f∇p + f∇ · (τf) − FpfII + ρffg (2.58) FpfII = 1 ∆V np X i (fpf,i− f∇p,i− f∇·τ ,i) (2.59) Forme B (ou I) : ρf ∂t(fu) + ∇ · (fu ⊗ u) ! = −∇p + ∇ · (τf) − FpfI + ρffg (2.60) FpfI = 1 ∆V np X i fpf,i (2.61)

Forme B simplifiée (ou III) :

ρf ∂t(fu) + ∇ · (fu ⊗ u) ! = −∇p + ∇ · τ − FpfIII + ρffg (2.62) FpfIII = 1 f∆V np X i (fpf,i− f∇p,i− f∇·τ ,i) − 1 ∆V np X i ρfVp,ig (2.63) avec

fpf,i =fd,i+ f∇p,i+ f∇·τ ,i+ fvm,i+ fB,i+ fSaff,i+ fMag,i (2.64)

où Fpf est le terme de transfert de momentum entre le fluide et la phase solide, Vp,i le volume

des particules, np le nombre de particules et fpf,i est la force individuelle agissant sur la

particule due à la présence du fluide environnant. La forme B simplifiée n’est pas générique, car elle est valide uniquement si :

ρf(1 − f)

∂u

∂t + ∇ · (u ⊗ u)

!

→ 0 (2.65)

Concrètement, ceci implique que l’écoulement du fluide circulant entre les particules est en régime stationnaire. Les formes A et B sont quant à elles complètement génériques et il est facile de montrer que, suite à quelques manipulations algébriques, elles sont mathématique- ment équivalentes. Cependant, elles se distinguent de par la manière dont l’incompressibilité est mise en oeuvre. Dans la forme A, f multiplie directement le gradient de pression, ce

Navier-Stokes standard. Il fut montré par Bouillard et al. [43] et Gidaspow [105] que cette forme peut souffrir d’une perte du caractère hyperbolique. La définition d’une telle perte et les conséquences s’y rattachant sont définies dans l’annexe A.

Dans la forme B, la pression est résolue de manière traditionnelle, et la pression au temps antérieur est alors soustraite de celle-ci pour faire apparaître le facteur f devant le gradient

de pression. Comme nous en avons discuté dans la section 2.1, la pression dans les équations de Navier-Stokes incompressibles, et aussi les équations VANS incompressibles, est définie instantanément en fonction du champ de vitesse compte tenu de la vitesse infinie de la propagation des ondes de pression. Conséquemment, l’utilisation d’une pression antérieure pour calculer la pression subséquente peut parfois mener à des instabilités numériques. Kafui et al. [144] ont comparé les résultats obtenus par ces deux formulations pour la fluidi- sation de particules et ont montré que les résultats obtenus par la forme A se comparaient favorablement avec des expériences. Cependant, les commentaires soumis à cet article par Feng et Yu [96], ainsi que les réponses de Kafui et al. [145] mènent à la conclusion que les deux formes donnent des résultats qui sont théoriquement équivalents. L’analyse de Zhou et al. confirme cette hypothèse [336].

Il est intéressant de constater, à partir des formulations A et B, que le couplage solide-liquide requiert un nombre minimal d’hypothèses et permet d’intégrer toutes les forces hydrodyna- miques désirées à partir de leurs expressions individuelles. Théoriquement, les formes A et B sont génériques et applicables à toute concentration, à toute valeur de Rep et à tout régime

d’écoulement.

Une étape importante du couplage entre les phases, qui est rarement détaillée, est le schéma de projection utilisé pour projeter les particules sur le maillage eulérien afin de définir la fraction volumique de fluide f et de calculer le terme de forçage Fpf. Le schéma employé

pour cette projection doit conserver la masse et doit produire un champ f menant à des

simulations stables tout en ayant un coût de calcul acceptable.

La méthode standard proposée dans la littérature consiste à attribuer le volume d’une par- ticule à une cellule fluide si le centroïde de cette particule réside dans la cellule [199]. Cette méthode donne de bons résultats pour les cas où dp

∆x ≤ 3, avec ∆x la grandeur caractéristique

des cellules. Cependant, lorsque le maillage est raffiné, cette méthode mène à des fractions volumiques fortement discontinues. Les méthodes suivantes ont été proposées pour améliorer l’étape de projection :

— le comptage de particules [199] ;

— la nuée conservative et non conservative de particules [199] ; — la projection Gausienne préservant les moments [199] ;

— la formulation à deux grilles [75] ; — l’approche divisée [61, 113, 156] et

— le reprisage de chaussettes (darning socks) [251].

Les travaux de Marshall et al. [199] et de Pirker et al. [251] ont analysé les capacités de certaines de ces méthodes. Les auteurs ont conclu que l’approche standard, le reprisage de chaussettes et la nuée conservative étaient les méthodes les plus appropriées, car elles étaient conservatives et menaient à un champ de fraction volumique bien posé. L’approche divisée, qui sous-divise une particule en poids de Gauss qui sont ensuite projetés par la méthode standard, ne fait que raffiner la méthode standard et possède les mêmes avantages tout en étant dotée d’un meilleur comportement lorsque ∆x diminue. La méthode à deux grilles, qui emploie deux maillages différents pour la CFD et pour la définition de la fraction volumique, donne de fort bons résultats, mais est nettement plus complexes au niveau de l’implémentation et difficilement généralisable au cas de maillages non structurés. Il est important de noter que ceci demeure un sujet de recherche actif et qu’aucune méthode de projection ne réussit à être à la fois conservative, bien posée dans la limite où ∆x → 0 (et de mener à un champ f ∈ C0, ou préférablement f ∈ C1) et à un coût de calcul acceptable.

Applications

La CFD-DEM a été utilisée de manière étendue pour étudier principalement les écoulements gaz-solide dans des lits fluidisés [68,87,144,247] et dans le convoyage pneumatique [163–165]. Cependant, son utilisation dans des géométries complexes reste limitée. Pour le cas où la phase continue est un liquide, à la connaissance de l’auteur, la méthode a été utilisée uniquement pour des cas où la phase liquide est de l’eau dans des applications de sédimentation [85, 87], d’hydrocyclones [336]. Elle a aussi été utilisé dans le contexte du mélange solide-liquide sous la forme CFD-DEMh par Derksen [80] Ayranci et al. [15], Gua et al. [115]. Les limites de ces études et les conclusions qui s’y rattachent seront abordées dans la section 2.6.

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