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Bien que les adultes plus âgés ne constituent pas un groupe d’utilisateurs homogène pouvant être aisément caractérisé (Czaja & Sharit, 2013 ; Fusaro, 2012 ; Kern, 2012), la littérature permet de dégager certaines caractéristiques régulièrement retrouvées lorsque l’on s’intéresse à leurs interactions avec les technologies.

Les adultes plus âgés expriment fréquemment un manque de confiance en leurs capacités d’utiliser (Zickuhr, 2013) ou d’apprendre avec succès à utiliser les technologies (Purdie & Boulton-Lewis, 2003 ; Wright, 2016). Les principales barrières évoquées sont en lien avec les capacités attentionnelles et de MdT et concernent la crainte de ne pas être capable de bien retenir, de retenir beaucoup de choses, de se concentrer très longtemps, de ne pas se rappeler l’ordre des procédures à effectuer (Purdie & Boulton-Lewis, 2003).

Par ailleurs, un contexte d’apprentissage de nouvelles compétences est souvent source d’anxiété (Czaja & Sharit, 2013), et d’autant plus, comme nous l’avons évoqué précédemment, avec les technologies. Cette anxiété peut entraîner différents comportements néfastes à l’apprentissage : un « vagabondage », la personne passant alors d’un problème ou d’un sujet à un autre, sans en approfondir aucun, ou au contraire un « enkystement », la personne investissant un intérêt excessif/ une attention excessive sur un petit aspect du problème, sur quelques détails, souvent au détriment d’autres aspects plus pertinents (Czaja & Sharit, 2013). D’après ces auteurs, on peut réduire l’anxiété en veillant à ne pas utiliser trop de termes techniques, de jargon… et en privilégiant les métaphores, en évitant les groupes hétérogènes (en âge ou en compétences préalables), en ne présentant

pas trop de matériel ou d’informations en même temps. Enfin, il convient d’inciter les apprenant à interrompre l’instructeur autant que nécessaire si quelque chose n’a pas été suffisamment clairement formulé (ne pas hésiter à présenter ses excuses pour l’utilisation de mots non compréhensibles afin que les aînés ne se blâment pas eux-mêmes de ne pas comprendre, ce qui risquerait de générer un sentiment d’incompétence). Wandke et al. (2012) constatent par ailleurs que, généralement, si les premiers essais se traduisent par un échec les adultes âgés ont tendance à mettre en place des stratégies d’évitement. Les auteurs concluent sur la nécessité de développer des technologies interactives, faciles à apprendre par tous, associées à des tutoriels et formations adaptés.

Les différents changements physiques et cognitifs accompagnant le vieillissement sont à prendre en compte lors de la conception d’un programme de formation. Ainsi, compte tenu de la présence fréquente de troubles visuels passés 60 ans (voir Chapitre 2), il est important de prendre un temps suffisant en début de formation pour vérifier que l’éclairage de la pièce est suffisant, et lorsque l’on travaille avec des écrans, supprimer la présence de reflets et effectuer les réglages nécessaires (luminosité). Cela implique également d’utiliser sur tous les supports écrits une taille de police suffisamment grande, sans empâtement et suffisamment contrastée par rapport au support.

Si des besoins et des croyances spécifiques peuvent toutefois être dégagés, l’importance des caractéristiques et besoins particuliers montre la nécessité d’une approche centrée sur la personne. Ce qui est par ailleurs applicable à toute situation pédagogique.

Comme souligné précédemment, les personnes âgées sont capables, et désireuses, d’apprendre, y compris à utiliser les technologies (Wandke et al., 2012). Ribeiro & Correia de Barros (2014), dans une étude testant différentes modalités de présentation d’instructions visant à permettre à des personnes âgées de 61 à 92 ans d’utiliser une application proposée sur Smartphone, ont confirmé cette capacité d’apprentissage. Wright (2016) s’est pour sa part intéressée aux difficultés d’apprentissage rencontrées par les personnes âgées lors de la prise en main de la tablette tactile. Au cours de rencontres mensuelles d’1 heure, les participants apprenaient les gestes liés à l’utilisation de l’écran tactile ainsi que différentes procédures permettant d’atteindre un même objectif. Ils travaillaient également leur capacité à distribuer leur attention. La formation veillait par ailleurs à favoriser un équilibre entre le temps formel de pratique et d’apprentissage et les interactions entre les participants. Le format évoluait au cours du temps, en fonction des difficultés rencontrées (ex. manque d’interactions entre les participants, confusion liée aux modèles des tablettes…). La dernière structure de séance retenue débutait par une phase de questions sur le sujet du jour afin de stimuler les échanges entre les participants, suivait une démonstration puis une pratique individuelle en utilisant une aide papier décrivant les étapes pas à pas. Au cours d’un suivi

de 2 ans, l’attractivité pour les tablettes tactiles des personnes âgées, sans expérience informatique préalable, s’est manifestée. En particulier du fait de la taille de cette technologie qui la rend facilement transportable et qui paraît en outre simple à utiliser. L’étude a démontré qu’accéder à Internet via une tablette est possible pour les personnes âgées si elles ont appris comment faire. Ces dernières exprimaient cependant souvent une certaine inquiétude à découvrir l’appareil par elles-mêmes et avaient tendance à auto-déprécier leur aptitude à maîtriser cet outil. Il ressortait un besoin de formation individuelle pour les personnes les plus en difficulté, afin de leur permettre d’acquérir un niveau de base suffisant pour suivre la formation en groupe sans risquer de les décourager. Pour l’ensemble des participants, ce besoin concernait plus particulièrement l’utilisation d’Internet pour la recherche d’informations de santé et la réalisation d’achats, la communication avec la famille et les amis (via la visiophonie et les courriels), la planification des déplacements et la recherche de vidéos en lien avec les activités de loisirs (tricot…). Ainsi, malgré l’apparente facilité d’utilisation de l’écran tactile, différentes difficultés ont pu être mises en évidence, en particulier la distinction entre un appui court et un appui prolongé. De plus, des activations accidentelles de certaines parties de l’écran pouvaient être source de frustration. Bien que les adultes jeunes rencontrent également des difficultés dans l’utilisation des écrans tactiles, les personnes âgées sont généralement moins capables de s’adapter aux changements technologiques (Wright, 2016). En cohérence avec ces observations, elles manifestent un intérêt certain pour les formations à l’utilisation des technologies, de préférence avant d’avoir à utiliser une nouvelle technologie mais également ensuite (Mitzner et al., 2008). Czaja et Sharit (2013) conseillent d’intégrer les utilisateurs au processus de conception des programmes d’entraînement, le plus tôt et le plus souvent possible.

4. 3. 2. Caractéristiques de la formation aux TIC