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4.1 L’ANALYSE ET LA SYNTHÈSE DES RÉSULTATS

4.1.1 Les caractéristiques du cas étudié

Le cas étudié colle parfaitement à la définition de l’impartition élaborée à la section 1.2.1.2. Rappelons-nous brièvement la définition. L’impartition intègre une réflexion sur l’opportunité de se départir d’activités qui étaient antérieurement réalisées à l’interne (Poitevin, 1999; Nollet et Ponce, 2004) en examinant les facteurs tels que le choix des partenaires, les risques, le type de contrat à signer et le volume d’activités à céder (Poitevin, 1999). De plus, l’impartition implique un rapport étroit entre l’entreprise donneur d’ordres et l’impartiteur. D’après Patry (1994), l’entente transforme souvent les parties en alliés stratégiques.

Comme l’entreprise « source » se devait de demeurer compétitive vis-à-vis une concurrence offrant de plus en plus des services virtuels, une réflexion sur la possibilité d’impartir s’est effectivement enclenchée. Il était impératif pour elle d’être à la fine pointe de la technologie, d’optimiser les activités et processus tout en réduisant les coûts dans le domaine des TI. Au cours de leur réflexion, les dirigeants ont pris le temps d’examiner divers facteurs. Ils ont rencontré les dirigeants d’autres institutions financières afin d’observer les différents modèles d’impartition exploités, ils ont procédé à des études d’investissements et à des analyses de coûts/bénéfices, ils ont évalué le risque de perdre en partie le contrôle de certaines de leurs activités en se convertissant au mode faire-faire, ils ont également évalué le fait de pouvoir bénéficier d’une évolution technologique plus rapidement et ce, en réduisant le risque technologique. D’autres facteurs ont été examinés par l’équipe dédiée au

dossier tel que le choix des activités à céder et le choix du partenaire entre deux firmes sollicitées ayant déjà des infrastructures au Québec. Par ailleurs, il importait pour l’entreprise « source » de concevoir son propre contrat et non pas de signer le contrat du fournisseur. En fait, le contrat les a transformé en alliés stratégiques comme le montrent notamment le travail conjoint réalisé en architecture technologique ou dans la gestion de l’entente. En somme, de par le cheminement de l’entreprise « source » et par la teneur du contrat signé avec la firme experte, le cas étudié correspond manifestement à la définition de l’impartition (section 1.2.1.2). Le cas étudié est une délocalisation nationale, soit une externalisation dite classique (figure 1, section 1.2.1.5). En effet, lorsque le conseil d’administration a donné son accord à ce que certaines activités technologiques soient imparties, c’était à la condition que les activités demeurent au Québec, c’est-à-dire au niveau national. En fait, ce fut au sein de la même région (« Off-Sourcing »). Le besoin de proximité, le « patriotisme économique » et la langue sont des raisons qui ont aussi justifié ce choix. Par ailleurs, ce cas comportait une délocalisation non seulement d’activités, mais aussi d’employés ce qui n’est pas le lot de toutes les délocalisations comme on l’a vu. Les typologies et distinctions subtiles faites au chapitre 1 nous ont permis de bien caractériser ce cas par rapport à l’éventail des formes de délocalisation.

Le cas étudié illustre bien les théories du recours à la délocalisation décrites à la section 1.2.3.1. Tout d’abord, l’entreprise « source » a affirmé que leur principale raison d’impartir était d’ordre monétaire. Comme les coûts d’exploitation étaient devenus élevés et que l’entreprise devait en plus investir considérablement dans ses technologies de l’information pour demeurer compétitive, l’impartition est devenue une solution possible à ces défis. Cette décision se rapporte à la théorie de l’internalisation/externalisation et des coûts de transaction (section 1.2.3.1). En effet, selon Coase (1937), les entreprises sont confrontées à deux choix : conserver en son sein les opérations ou confier certaines de ses activités à une autre organisation. Ce choix stratégique repose sur une évaluation économique des coûts (Sclar, 2000) pour savoir si les coûts de réalisation d’une activité à l’externe sont inférieurs à la réalisation de la même activité à l’interne. L’entreprise « source » a pris le temps de bien évaluer ce risque en procédant entre autres à des études d’investissements et à des analyses de coûts/bénéfices. De plus, tout au long de

l’entente avec la firme externe, elle continue de vérifier si les coûts de réalisation à l’externe sont toujours aussi avantageux année après année grâce à des études de benchmarking. On voit également que les coûts de transaction demeurent élevés en termes de ressources financières et humaines impliquées par l’entreprise « source » quand on considère la durée du processus d’évaluation (15-18 mois), ainsi que les mécanismes d’évaluation et de gestion en cours de contrat.

En plus du désir de l’institution financière de réduire ses coûts d’exploitation et d’investissement grâce à l’impartition, elle y voyait également l’opportunité de se concentrer sur ses activités principales que sont les services financiers et ce qui s’y rattachent. Ceci rejoint la théorie de focalisation sur les activités critiques de l’entreprise (section 1.2.3.1). Selon cette théorie, l’avantage d’impartir pour une entreprise est de consacrer ses ressources sur ce qu’elle fait de mieux afin de maximiser le retour sur ses compétences particulières. De plus, elle peut utiliser les investissements, les innovations et les capacités professionnelles du fournisseur externe. Finalement, impartir diminue les risques, réduit les cycles, baisse les investissements et crée une meilleure réponse aux besoins des clients (Quinn et Hilmer, 1994). L’entreprise « source » pouvait donc profiter de tous ces avantages de l’impartition comme le prédit la théorie. En effet, malgré l’importance de la technologie et de l’informatique dans un marché où les transactions sont de plus en plus virtuelles, les activités contrôles d’une institution financière demeurent de fournir des services financiers adéquats pour ses clients. Comme l’entreprise ne souhaitait pas mettre autant de temps et d’argent dans le domaine des TI spécifiquement, elle voyait alors l’avantage d’être partenaire avec un fournisseur qui lui ferait profiter de ses compétences, de ses équipements et de l’expertise déjà développée et ce, en réduisant ses coûts d’exploitation.

En somme, le cas étudié peut être considéré comme relativement typique de ce genre d’expérience. Ses caractéristiques générales correspondent à ce qui est décrit dans la littérature en termes de pratiques et de motivations.