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C’est dans une perspective de valorisation de l’achat local auprès de fermes à dimension humaine que le Marché de solidarité (via les AmiEs de la Terre) prend contact auprès des producteurs agricoles régionaux. Sans avoir une liste de critères spécifiques, le Marché sélectionne les producteurs qui ont des pratiques allant dans le sens du respect de la terre et

de l’environnement (Marché de solidarité, document interne). Les fermes qui font affaire avec le Marché de solidarité ne font pas toutes de la production biologique certifiée. Le choix de ces producteurs par les responsables du Marché va dans le sens de la mission de cette organisation, où les préoccupations environnementales et de développement local influencent dans le choix des fermes retenues. Dans la présente section, nous classerons ces fermes selon les informations que les producteurs nous ont données afin de dégager un portrait des différentes applications concrètes effectuées en matière agro-environnementale.

Nous n’avons pas choisi de terme spécifique pour désigner les fermes ayant des pratiques agro-environnementales non certifiées biologiques (tels que la low imput sustainable

agriculture, l’agriculture raisonnée, l’“ecoagriculture”, etc. (Décary-Gilardeau et al., 2007 ;

Altieri, 2004). Les informations qui permettent de classer une approche par rapport à une autre ne sont pas assez bien établies dans le cadre de notre étude et dépassent les objectifs de celle-ci. Nous désignons comme étant des pratiques « écologiques» celles effectuées dans le but de diminuer la pression environnementale exercée sur les systèmes cultivés. Les pratiques biologiques ont quant à elles des critères de certification bien établis. Nous constatons à partir des résultats obtenus que six fermes sur onze sont certifiées biologiques et qu’une est en voie de le devenir. Cette proportion est légèrement sous-représentée par rapport à la population totale des producteurs impliqués au sein du Marché de solidarité où 23 fermes mentionnent leur certification sur un total de 34 producteurs présents, soit les deux tiers. Au total, nous retrouvons cinq producteurs ayant des pratiques « écologiques » et six producteurs ayant une certification biologique. Parmi les « bios », nous observons que deux fermes ont une approche « éco-systémique » et une met l’accent sur des technologies à énergie renouvelable.

5.2.1 Pratiques « écologiques »

Nous qualifions de pratiques « écologiques » celles qui tendent vers une diminution de la pression environnementale, tout en utilisant de manière amoindrie des pesticides et des fertilisants de synthèse. Ces fermes sont de petite taille. Le contrôle des mauvaises herbes est manuel ou mécanique et l’utilisation du compost est valorisée. Pour les animaux, il y a élimination de l’ensilage du foin car considéré comme non naturel pour des ruminants, à

cause de sa fermentation, et on évite de leur donner du grain. Lorsque grain il y a, des efforts sont faits afin d’en trouver sans OGM. Un travail manuel est effectué dans l’entretien de la litière des animaux et la gestion des fumiers se fait avec des fosses à fumier ou avec du fumier solide. Enfin, l’utilisation des antibiotiques est effectuée de manière curative et non préventive.

Je vaccine, puis les veaux quand ils sont malades, je les traite. Je les laisse pas mourir, ça c’est officiel. (…) Mes animaux, je les aime. De toute façon quelqu’un qui maltraite ses animaux, y’a pas de rendements (E6)

5.2.2 Pratiques biologiques

Les pratiques biologiques sont celles qui sont conformes aux normes de certification en vigueur. Celles-ci prennent en compte les cycles biologiques de la ferme : réutilisation des fumiers d’animaux comme fertilisant pour d’autres cultures. Le principe de la synergie des différentes composantes des productions est utilisé afin de recycler les déchets de l’une pour fertiliser l’autre. Il est question de nourrir la terre (avec engrais naturels) au lieu de nourrir directement la plante (par des engrais chimiques). Selon le Conseil des appellations réservées et des termes valorisants (2011), l’agriculture biologique peut être définie comme suit:

Celle-ci est une méthode d'agriculture fondée sur des pratiques d'aménagement et de gestion agricole visant à créer des écosystèmes propres à assurer une productivité soutenue, le contrôle des plantes adventices et des parasites grâce à une diversité de formes de vie interdépendantes, au recyclage des résidus végétaux et animaux, à la sélection et à la rotation des cultures, à la gestion des eaux. (…) Elle vise donc à restreindre les apports de l'extérieur, et à éviter l’emploi d’engrais et les pesticides chimiques (Conseil des appellations réservées et des termes valorisants, 2011, p. 2).

Pratiques biologiques « éco-systémiques »

Il est important d'indiquer que certains producteurs vont au-delà des critères définis par les organisations de certification. Nous retrouvons par exemple des soins prodigués aux animaux par le biais de l’homéopathie et des huiles essentielles. L’éthique particulière face à cette

approche ressort explicitement des propos recueillis et intègre le mode de production biologique dans une vision d’ensemble propre à une cohabitation harmonieuse de l’humain et des non-humains, afin de travailler dans le sens de la Terre. Ces producteurs utilisent les normes officielles correspondant à une façon de voir les choses, tout en cultivant selon leur perspective. C’est ainsi qu’une perspective critique se dégage quant aux limites de la certification biologique.

En Californie, les fermes bio travaillent comme les conventionnels avec des produits biologiques. Ce n’est pas le vrai bio qu’on veut faire. On devrait avoir un autre type de nom pour ce qu’on fait (E4).

Volet technologique des énergies renouvelables

Les producteurs utilisant ces technologies rappellent l'importance d'utiliser des énergies renouvelables pour leur production : géothermie, utilisation du solaire passif, biodiesel, etc (E2, E4). Un producteur mentionne qu’il est même plus approprié de mettre l’accent sur cet aspect que sur le logo de certification biologique, étant donné l’intérêt de sa clientèle pour cet aspect de sa production. Il est intéressant de mentionner l’intérêt de ces producteurs pour le développement constant de nouvelles façons d’améliorer les technologies existantes et ce, par l’entremise de leur propre ingéniosité. Un producteur travaille dans le but d’intégrer des énergies renouvelables pour la machinerie (avec du biodiesel) et pour l’entretien mécanique des mauvaises herbes (tracteur fonctionnant à l’électricité). Une autre productrice mentionne l’expertise que les individus possèdent afin de réfléchir et de créer de nouveaux procédés technologiques qui amélioreront les performances environnementales et économiques de son établissement.

Ces diverses pratiques agro-environnementales reflètent dans une très large mesure l’intérêt et la préoccupation qu'ont les répondants quant aux nécessités environnementales de l’agriculture, que celle-ci soit biologique ou non.