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Chapitre 2 : Effet du moment d’éclosion sur la morphologie et la croissance des larves chez le

3.2. Matériel et Méthodes

3.4.1. Caractérisation morphologique des larves de carpe commune en fonction du

% j -1 )

ME1 ME2 ME3

c ac ad ac ab bd 1.6 2.0 1.9 1.5 2.2 1.8 0 1 2 3 F1 F2 Femelle E U V

ME1 ME2 ME3

a ab b a ab b

Figure 33 : Effet de l’interaction F*ME sur le taux de croissance spécifique en longueur (a) et l’efficience d’utilisation du vitellus (b) sur la période J0-J3 chez les larves de carpe commune.

3.4. Discussion

3.4.1. Caractérisation morphologique des larves de carpe commune en fonction du moment d’éclosion

Le moment d’éclosion ne structure pas fortement la morphologie initiale des larves de carpe. Les larves ME1 sont réparties sur les 2 classes discriminées par l’ACP avec des caractéristiques opposées. Aussi la morphologie initiale diffère très peu entre les larves de carpe en fonction du moment d’éclosion. Un seul paramètre (AC0) était significativement différent entre les larves ME1 et ME2 dans l’expérience 1 (Tableau VII) et ME1 et ME3 dans l’expérience 2 (Fig. 31). La diminution de la surface initiale du corps des larves avec le moment d’éclosion n’a pas été accompagnée par une diminution significative de la longueur totale. Il est possible que le CVetr élevé (25%) et la faible puissance du test statistique (51%) aient caché un effet significatif qui confirmerait une diminution de la taille du corps des larves en fonction du moment d’éclosion mais qui toutefois serait faible (écart de 5% entre les moyennes). Ceci dit, sachant que l’augmentation de la surface du corps peut constituer en condition d’hypoxie une source de perte d’oxygène (Van Snik et al., 1997), les larves ME1 seront, par leur morphologie, moins résistantes à des conditions environnementales variables.

Pour les autres variables du corps et du sac vitellin, les différences se sont pas significatives. Ces résultats peuvent être interprétés soit comme une tendance à une homogénéisation de la taille initiale des larves chez la carpe commune soit comme une forte variabilité aléatoire qui explique en partie les CVetr élevés et les faibles puissances des tests statistiques. La première hypothèse s’appuie sur des observations citées dans la littérature où

l’absence de différence significative des variables décrivant la morphologie initiale des larves de poissons a été reportée comme chez l’esturgeon Acipenser gueldenstaedti provenant d’une même ponte incubée à 16°C (Nathanailides et al., 2002) ou la capucette de l’Atlantique (Bengtson et al., 1987). Le point commun entre ces trois études est la température d’incubation appliquée, elle est assez élevée comme chez la carpe commune tout en étant dans l’intervalle thermique optimal pour l’espèce. Il est donc possible que les différences de morphologie des larves par rapport au moment d’éclosion soient dépendantes de la température d’incubation des œufs et que plus la température est élevée, plus la morphologie des larves à l’éclosion devient homogène. Il est en effet établi que les températures élevées accélèrent le développement embryonnaire (Blaxter, 1981 ; Pépin, 1991) et probablement aide à homogénéiser la morphologie des larves à l’éclosion.

A l’exception des paramètres du sac vitellin (ASV, PSV), l’interaction F*ME était non significative sur les autres variables (expérience 2). Ceci prouve que l’effet du moment d’éclosion sur la qualité initiale des larves est peu dépendant des caractéristiques des femelles.

3.4.2. Différences de croissance en fonction du moment d’éclosion

Les larves qui éclosent tard dans la période d’éclosion ont montré un taux de croissance plus élevé que celui des larves à éclosion précoce (Tableau VII, Fig. 33a, b, femelle F1). Ce résultat est en contradiction avec les conclusions tirées de Nathanailides et al. (2002) et Ivanova et Svirskaya (2009) qui n’ont pas observé de différence significative du taux de croissance larvaire pendant la phase d’alimentation endogène chez le brochet et l’esturgeon du Danube. Chez ce dernier, les auteurs ont calculé un taux de croissance pondéral dont la corrélation avec la taille dépend de l’allométrie de croissance de l’espèce ce qui peut expliquer la divergence avec notre étude. La meilleure efficience d’utilisation du vitellus chez les larves ME3 par comparaison aux larves ME1 (absence de signification qui est vraisemblablement due au manque de puissance du test, 6%) peut avoir une relation avec la vitesse de consommation du vitellus. En effet, à J2 post éclosion (Fig. 30), le sac vitellin est significativement plus grand chez les larves ME1 alors qu’à l’éclosion le périmètre du sac vitellin était similaire chez les trois groupes de larves. Ceci peut traduire une certaine lenteur dans la vitesse d’utilisation des réserves probablement liée à une déficience morphologique du syncitium vitellin. Cette différence de vitesse d’utilisation du vitellus pour la synthèse des tissus, ralentie chez les larves ME1, expliquerait en partie la plus faible croissance relevée entre J0 et J3 chez ces larves.

En conclusion, chez la carpe commune, l’effet du moment d’éclosion sur la morphologie des larves à l’éclosion est difficile à mettre en évidence. Toutes les larves paraissent éclore à des tailles similaires. Cependant, pendant la phase d’alimentation endogène, les larves à éclosion tardive présenteraient une meilleure croissance accompagnée par une meilleure efficience d’utilisation du vitellus. Ceci suggère que le moment d’éclosion peut agir aussi bien sur la morphologie initiale que sur le métabolisme larvaire créant des différences qui auront leurs conséquences plus tard pendant le développement. Les larves à éclosion tardive paraissent favorisées comme en témoigne leur forte croissance pendant les trois premiers jours post éclosion.

Selon Osse et al. (1997), la croissance des larves juste après l’éclosion servira à développer les organes et les systèmes assurant l’obtention de l’énergie et des matériaux de construction des tissus en accord avec les priorités pendant cette phase larvaire. Chez la carpe commune, la priorité consiste au développement de la région céphalique (les yeux pour le repérage des proies et l’ouverture buccale pour l’adaptation au mode d’alimentation par succion) et la région caudale (amélioration de l’activité de nage pour l’échappement aux prédateurs) (Osse, 1990). Ceci implique que les larves de carpe à éclosion tardive auront probablement un développement morpho-fonctionnel plus important que les larves à éclosion précoce vers la fin de la phase d’alimentation endogène. D’autre part, la carpe commune étant un pondeur printanier tardif (Teletchea et al. ,2009), les larves trouveront pendant leurs premiers stades de vie post-éclosion des conditions environnementales et trophiques assez favorables et stables. Le bénéfice potentiel des larves à éclosion tardive, via le développement des organes de capture des proies, sera conservé à moins qu’il y ait une phase de développement compensatrice chez les larves à éclosion précoce qui, selon cette étude, dépensent leur réserves vitellines moins rapidement durant les premiers jours post éclosion et donc gardent plus de réserves.

3. 5. Comparaison de l’effet du moment d’éclosion sur la morphologie et les

performances larvaires entre le brochet et la carpe commune

3.5.1. Objectifs

Lors des deux chapitres précédents, on a pu montrer que le moment d’éclosion ne structure pas la qualité initiale des larves issues d’une même ponte de la même façon, en fonction de l'espèce considérée. Toutefois, le nombre de variables utilisées dans les deux

ACPs n’est pas le même ce qui peut modifier les regroupements discriminés par la CAH. Aussi, en traitant les données de façon indépendante, on n’a pas pu voir s’il existe des associations basées sur la morphologie initiale entre les deux expérimentations. Dans ce chapitre, et en utilisant les données relatives aux deux espèces étudiées auparavant, on a essayé de mettre en évidence de façon plus claire les effets du moment d’éclosion sur la morphologie initiale et la croissance des larves de brochet et de carpe commune tout en prenant en compte les différences d’allométrie de développement et de croissance entre les deux espèces.