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CHAPITRE 2 COMPORTEMENT MECANIQUE ET EVOLUTION MICROSTRUCTURALE DE

B. Caractérisation microstructurale

L’étude métallographique du demi-produit ∅254mm a été réalisée à partir d’une bande radiale, qui a été coupée en trois, afin d’obtenir des échantillons de dimensions plus restreintes. Dans la suite de cette étude, nous distinguerons les échantillons « Centre », « Mi-Rayon » et « Périphérie », nommés respectivement C, MR et P.

Lors du forgeage libre de l’Udimet 720, l’écoulement de la matière s’effectue dans le sens long de la barre et il induit un fibrage au sein du matériau. Il est aisément visible en microscopie optique, puisque les bandes de précipitation fine et dense suivent ce dernier. Selon les hypothèses précédentes, la variation de perméabilité aux US apparaît fortement liée à ces bandes et donc à l’évolution du fibrage.

De ce fait, l’ensemble des caractérisations microstructurales de cette étude a été effectué dans un plan transverse au sens long de la barre (plan RZ) de manière à pouvoir suivre toute modification du fibrage. Le sens long de la barre correspond à l’axe Z.

1. Analyses en microscopie optique

Afin d’étudier quantitativement la microstructure des trois échantillons centre, mi-rayon et périphérie, les premières analyses ont été réalisées en microscopie optique. Pour cela, les échantillons ont été polis mécaniquement jusqu’au micron, avant d’être attaqués chimiquement avec une solution de type Kalling II (voir composition du réactif et conditions d’attaque dans l’Annexe B).

Les résultats ont mis en évidence que la microstructure du demi-produit ∅254mm est globalement constituée de petits grains d’environ 10µm avec des précipités γ’ primaires aux joints de grains et de bandes de précipitation fine et dense. La différence entre les trois échantillons réside dans le fait que plus la zone analysée est à proximité de la périphérie de la barre et plus la structure en bande s’atténue, signe d’une meilleure homogénéité de la phase γ’ (Figure 2.12).

Figure 2.12 : Evolution de la structure en bandes en fonction de la distance par rapport au Z

200 µm 200 µm 200 µm

Des analyses à plus fort grandissement, montrent qu’en périphérie, la taille moyenne de grains est plus faible et la fraction de phase γ’ plus importante que dans les deux autres échantillons (Figure 2.13).

Figure 2.13 : Evolution de la taille de grains et de la fraction de phase γ’ en fonction de la distance par rapport au centre de la barre

2. Analyses EBSD

En vue d’obtenir des informations quantitatives sur la microstructure (notamment la taille de grains), ainsi que sur l’orientation cristallographique des grains, des mesures EBSD ont été réalisées sur des échantillons provenant des trois zones. La préparation des échantillons consiste en un polissage mécanique jusqu’au micron, suivi d’un polissage électrolytique avec une solution A8 de chez Struers. Les paramètres de polissage électrolytique sont détaillés en Annexe

B.

La Figure 2.14 présente les mesures EBSD réalisées sur les trois échantillons centre, mi-rayon et périphérie. La représentation utilisée est une superposition des distributions des directions cristallographiques parallèles à l’axe Z (code de couleur défini par le triangle standard) sur la distribution des indices de qualité (niveaux de gris). Le pas d’analyse utilisé pour ces mesures est de 1µm, de manière à pouvoir observer les bandes de précipitation fine et dense, tout en quantifiant la fraction de joints faiblement désorientés (nommée fLAB par la suite).

Mesure : 850x850µm² pas de 1µ m Mesure : 900x900µm² pas de 1µ m Mesure : 500x500µm² pas de 1µ m

50 µm 50 µm 50 µm

Z

Centre Mi-rayon Périphérie

Matériau de référence de l’étude

L’analyse des cartographies EBSD confirme ce qui est observé en microscopie optique, à savoir qu’en périphérie la structure en bandes est atténuée et la taille moyenne de grains est inférieure à celle des deux autres régions. Le pas d’analyse de 1µm utilisé ici ne permet pas de caractériser correctement la taille moyenne de grains pour l’échantillon P. Pour cette raison, des mesures EBSD complémentaires avec un pas plus fin de 0,3µm ont été réalisées. Les résultats (Figure 2.15) montrent que la taille moyenne de grains Dmoyen, est nettement plus faible en périphérie (Dmoyen =3 7, µm) que dans les régions mi-rayon (Dmoyen =6 5, µm) et centre (Dmoyen =7 3, µm).

Figure 2.15 : Distribution de la taille de grains pour les échantillons centre, mi-rayon et périphérie

Un des intérêts notable des mesures EBSD est de pouvoir déterminer les fractions de macles de recuit Σ3 et de faibles désorientations des échantillons analysés. Dans cette étude, nous considérons que les faibles désorientations sont comprises entre 2 et 15°. Il n’existe pas de règle universelle concernant les limites pour les faibles désorientations, mais il est couramment admis que l’angle critique (entre faible et forte désorientation) est égal à 15°.

L’analyse des fractions de faibles désorientations et de macles Σ3, présentée dans le

Tableau 2.2, montre qu’en se rapprochant de la périphérie de la barre, la première augmente et la seconde diminue.

Tableau 2.2 : Fractions de faibles désorientations et de maclesΣ3dans les échantillons centre, mi-rayon et périphérie issus de la barre 254mm

Mesures avec pas d’analyse de 1µm

Centre Mi-rayon Périphérie Fraction de faibles

désorientations (%) 14,0 17,3 38,5

Fraction de macles (%) 19,5 14,9 10,6

Cette évolution microstructurale suivant la bande radiale peut provenir du gradient thermomécanique engendré lors de la mise en forme anisotherme de l’Udimet 720. La barre de demi-produit ∅254mm est obtenue par une succession d’étapes de refoulement suivis

l’homogénéité de la microstructure. Lors de cette déformation à haute température (~1100°C), l’évolution microstructurale est régie par des mécanismes de recristallisation dynamique. Il a été montré dans la partie I.B que ces phénomènes dépendent de la température, du taux de déformation ainsi que de la vitesse de déformation.

Lors des étapes d’étirage, un gradient de température et de déformation apparaît entre le centre et la périphérie de la barre, entraînant une hétérogénéité de recristallisation. La périphérie de la barre correspond aux régions les plus déformées, mais également à celles où les températures sont les moins élevées. De ce fait, ces conditions sont défavorables à une bonne recristallisation, ce qui explique l’augmentation de la fraction de faibles désorientations ainsi que la diminution de la taille de grains.

Quant aux zones situées plus près du cœur de la barre, bien que la déformation soit moins élevée, la température supérieure permet une meilleure recristallisation. Ceci se traduit par une taille de grains plus importante ainsi qu’une fraction de faibles désorientations plus faibles qu’en périphérie.

Enfin, bien que l’évolution de la fraction de macles Σ3 ne soit pas très marquée entre le cœur et la peau de la barre (Tableau 2.2), l’évolution est cohérente avec le gradient de recristallisation. Les régions du centre, mieux recristallisées, présentent une fraction de macles plus importante que la périphérie.

3. Corrélation entre microstructure et perméabilité aux ultrasons

En confrontant les résultats des contrôles ultrasons (Tableau 2.1) avec l’évolution microstructurale de la bande radiale du demi-produit ∅254mm, il apparaît que les régions possédant la plus faible perméabilité aux ultrasons correspondent à la périphérie. Dans cette zone, la faible taille de grains associée à la forte fraction de faibles désorientations sont en accord avec l’hypothèse 1 (page 32). Selon cette hypothèse, les bandes de précipitation fine et dense, composées de petits grains d’orientations proches (forte fraction de faibles désorientations), se comportent comme de gros grains et altèrent la perméabilité aux ultrasons en favorisant la dispersion des ondes.

Dans le Tableau 2.1, on observe une plus grande disparité des résultats lors du contrôle axial que lors du contrôle radial. Cette disparité peut s’expliquer par l’orientation géométrique des bandes au sein des échantillons, par rapport à la direction d’émission des US.

- Lors du contrôle radial, les bandes de précipitation fine et dense pour les échantillons C et MR sont perpendiculaires au faisceau ultrasonore (Figure 2.16 a). Pour l’échantillon P, la microscopie optique a révélé une microstructure assez homogène, avec une structure en bandes atténuées. Les mauvais résultats US obtenus pour cet échantillon

Matériau de référence de l’étude

dispersion des ondes est plus grande et l’atténuation plus importante, comme c’est le cas en périphérie.

- Lors du contrôle axial, les bandes de précipitation fine et dense des échantillons C et

MR, sont parallèles au faisceau ultrasonore (Figure 2.16 a). De ce fait, les ultrasons

sont moins dispersés par les bandes et la bonne perméabilité aux ultrasons peut s’expliquer de deux façons. Soit les ultrasons arrivent majoritairement à se propager dans l’espace inter-bandes (la partie du signal ayant rencontrée les bandes étant négligeable), soit ce sont les bandes qui guident les ultrasons. Nous verrons dans le

chapitre IV que la modélisation numérique de la propagation des ultrasons permet de

valider un cas plutôt que l’autre.

Concernant l’échantillon P, la microstructure peut être considérée comme une succession de bandes à courte distance (Figure 2.16 b). Bien que les bandes soient également parallèles au faisceau ultrasonore, ce serait le faible espace inter-bande qui expliquerait une atténuation des ondes plus importante que dans les deux autres échantillons.

Figure 2.16 : Schéma de la morphologie et de l’orientation géométrique des bandes dans les prélèvements : (a) centre et (b) périphérie

L’hypothèse des bandes de précipitation fine et dense apporte une explication concernant la variation de perméabilité aux ultrasons. Cependant, l’analyse de la région périphérie a également révélé la présence d’une forte fraction de faibles désorientations, probablement due à une « mauvaise recristallisation ». Le fait que les valeurs de contrôle en axial et en radial dans cette zone soient similaires et non conformes au critère (Tableau 2.1) permet de supposer que, de manière générale, les faibles désorientations sont néfastes aux ultrasons.

Par conséquent, il semblerait que deux phénomènes soient à l’origine de la variation de perméabilité aux ultrasons dans le demi-produit ∅254mm, tout deux basés sur la fraction de

faibles désorientations. Premièrement, il apparaît qu’une fraction de faibles désorientations importante soit à proscrire pour l’obtention d’une bonne perméabilité aux ultrasons. Certaines conditions thermomécaniques peuvent provoquer une mauvaise recristallisation qui conduit à une forte fraction de faibles désorientations. Deuxièmement, dans le cas où ces faibles désorientations sont regroupées au sein d’amas allongés (bandes de précipitation fine et dense), la relation entre l’orientation géométrique de ces bandes et la direction d’émission des ultrasons est un facteur prépondérant. Il est probable que les amas soient vus comme des gros grains uniques, favorisant la dispersion des ondes ultrasonores, chaque fois qu’ils se présentent perpendiculairement aux ultrasons.

Au final, l’explication de la variation de perméabilité aux ultrasons est complexe, du fait que ces deux phénomènes peuvent évoluer distinctement l’un de l’autre, tout en pouvant interagir de manière complémentaire vis-à-vis des ultrasons.

C. Choix de la microstructure initiale pour les essais mécaniques de