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Chapitre 2. La recension des écrits et le cadre théorique

2.5 Le cadre théorique et les questions spécifiques de la recherche

2.5.1 La théorie de la transition

La théorie intermédiaire de la transition de Meleis et al. (2000) sert d’ancrage théorique pour la présente recherche. Meleis a d’abord présenté une première version de cette théorie en 1975, laquelle s’attardait spécifiquement à la transition de rôle. Meleis explique alors que la transition demande à la personne « […] d’incorporer de nouvelles connaissances, d’altérer son comportement et de changer sa définition de soi-même dans un contexte social » (traduction libre de Meleis, 1975, p.2). Plus tard, lors d’une analyse de concept, Chick et Meleis ont défini plus largement la transition comme « un passage d’une étape de vie, d’une condition ou d’un statut à un autre » (traduction libre, 1986, p. 239). Bien que la théorie ait évolué au fil du temps, la définition de la transition demeure la même (Meleis et al., 2000). La Figure 1 présente la traduction française de la théorie de la transition de Meleis et al. (2000).

Figure 1. La théorie de la transition de Meleis, Sawyer, Im, Messias, & Schumacher (2000) traduite en français par Aubin et Dallaire (2008).

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La nature des transitions

La première composante de cette théorie porte sur la nature des transitions, qui se divise en trois dimensions : les types, les modèles et les propriétés.

D’abord, les différents types de transitions sont celles reliées au développement de la personne (l’adolescence, devenir parent, la vieillesse), à une situation (immigration, retraite, nouvel emploi), à une expérience de la santé et de la maladie et au niveau organisationnel (Meleis et al., 2000). Dans le cadre de cette recherche, la transition est plus particulièrement considérée situationnelle, comme elle est liée à un emploi dans un nouveau contexte professionnel.

Par la suite, la deuxième dimension porte sur les modèles de transition. La transition peut être simple ou multiple, séquentielle ou simultanée, reliées ou non l’une à l’autre (Meleis et al., 2000). Bien que la transition professionnelle soit le centre d’intérêt de cette recherche, les IDI ont en commun qu’elles vivent aussi une transition reliée à l’immigration. Cette dernière est simultanée et interreliée à la transition professionnelle. Il est possible que d’autres transitions soient également présentes. Pour Meleis et al., la simultanéité de transitions vient fréquemment rendre celles-ci plus éprouvantes et plus difficiles à vivre (2000).

Enfin, cinq propriétés viennent compléter la nature des transitions. La prise de conscience d’une transition, l’engagement ou l’investissement d’une personne dans cette expérience, le changement et la différence, l’espace dans le temps et les points critiques et événements constituent des notions essentielles à tenir compte pour mieux comprendre la transition (Meleis et al., 2000). Ces propriétés sont externes à la personne, mais peuvent occasionner un changement de comportement ou de perception relié au processus interne de la transition (Meleis et al., 2000).

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Les conditions facilitantes et entravantes

La deuxième section de la théorie comprend les conditions qui facilitent ou entravent la transition. Elles incluent des conditions personnelles, communautaires et sociétales. Les conditions personnelles peuvent être reliées au sens donné à l'événement précipitant la transition, aux croyances et aux attitudes culturelles, au statut socioéconomique ainsi qu’à la préparation et aux connaissances de la personne. Quant aux conditions communautaires, elles réfèrent aux ressources de l’entourage et de la communauté qui viennent influencer la personne dans son cheminement. À un niveau plus large, les conditions sociétales font appel aux valeurs de la société. Les conditions influencent la façon de vivre la transition, mais également les résultats de celle-ci (Meleis et al., 2000).

Les modèles de réponse

Les modèles de réponses sont la troisième composante de la théorie intermédiaire de la transition de Meleis et al. (2000) et se divisent en indicateurs de processus et de résultats. Les premiers permettent d’estimer l’évolution de la transition de la personne. Ils incluent le sentiment d’être en lien, l’interaction entre la personne aidante et la personne aidée, la situation dans le temps et l’espace ainsi que le développement de la confiance et du coping (Meleis et al., 2000). Ils sont utiles pour saisir qu’un processus de transition est actuellement en cours. Les indicateurs de résultats comme la maîtrise des habiletés et des comportements nécessaires à la nouvelle situation ainsi que le renouvellement de l’identité sont pour leur part présents à la fin de la transition (Meleis et al., 2000).

Les interventions infirmières

Les trois grandes sections (nature, conditions et modèles de réponses) discutées préalablement permettent de déterminer quelles sont les interventions infirmières pertinentes durant la transition. Meleis et al. (2000) répartissent celles-ci selon trois concepts, c’est-à- dire l’évaluation du niveau de préparation, la préparation et l’évaluation du rôle de soutien et de suppléance. Le choix de ces interventions et la manière de les mener influencent à leur tour la nature, les conditions et les modèles de réponses (Meleis et al., 2000).

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Liens entre la théorie et la recherche

Le concept de transition rejoint bien ce que les IDI vivent lorsqu’elles font le passage d’un rôle professionnel à un autre. En effet, elles doivent apprendre de nouvelles connaissances, modifier leurs façons d’être et d’agir pour devenir une infirmière répondant aux attentes et aux normes du pays d’accueil.

Pour Meleis et al. (2000), la transition débute à l’anticipation, donc aux premiers moments où la personne réfléchit aux changements et aux différences à venir. Ce qui amène donc à considérer la période du programme d’intégration comme une partie intégrante et cruciale de la transition professionnelle.

En outre, la théorie a été développée initialement pour soutenir les infirmières dans leurs interventions auprès des personnes qui vivent des transitions. Par contre, plusieurs chercheurs en sciences infirmières l’ont également utilisée pour mener des recherches en éducation des infirmières en accord avec la théoricienne Meleis (Brennan & McSherry, 2007; Delaney & Piscopo, 2007; Duke, 2010; Sharoff, 2006; Wieland, Altmiller, Dorr, & Wolf, 2007, tous cités dans Meleis, 2010). Il est donc approprié d’utiliser ce cadre théorique, même si la recherche prend place dans un contexte d’éducation.

Pour la présente recherche, un intérêt plus particulier sera porté sur la propriété de la différence. Comme le sujet de la recherche est la transition professionnelle, ce sont donc plus spécifiquement des différences professionnelles qui seront recherchées. Les différences professionnelles désignent tous les éléments différents entre la pratique professionnelle au pays d’origine et celle au pays d’accueil.

Les conditions facilitantes et entravantes seront également recherchées afin de mieux comprendre ce qui influence la transition professionnelle des IDI. Les sous-catégories proposées par le cadre théorique serviront à guider l’exploration.

37 2.5.2 Les questions spécifiques de la recherche

Comme précisé à la fin du Chapitre 1, le but de la recherche est d'explorer la transition professionnelle telle que perçue par les IDI au moment de la réalisation d’un programme d’intégration. Plus précisément, cette recherche tentera de répondre aux deux questions suivantes : 1) Quelles sont les différences professionnelles perçues par les IDI? 2)Quelles sont les conditions perçues par les IDI qui influencent leur transition professionnelle?

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