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La justice sociale est un concept qui se base sur l’égalité de tous devant la loi. C’est une philosophie, une manière de pensée, une conception morale visant à réunir les citoyens et à les mettre tous à un même pied d’égalité. Nous pouvons la considérer comme un élément de modernité puisqu’elle a été mise en place dans les sociétés afin de garantir aux êtres humains un droit et une unité. Les injustices sont nombreuses dans le monde, en Amérique latineplus particulièrement, étant donné que ses pays ont passé aux mains de multiples dictateurs et ses habitants ont donc soufferts de ne pas avoir cette justice sociale à leur disposition. Le concept est un des progrès de l’humanité puisque pendant de nombreuses époques, seuls le rang social, la richesse et les privilèges assuraient à une minorité une certaine forme de justice. Dans son ouvrage Théorie de la justice82 de 1971, le progressiste John Rawls écrit qu'une société est juste si elle respecte trois principes, dans l’ordre : 1) garantie des libertés de base pour tous ; 2) égalité « équitable » des chances ; 3) maintien des seules inégalités qui profitent aux plus défavorisés. Philippe Adair, Doyen de la Faculté́ de Sciences Economiques et de Gestion, Maître de Conférences en Sciences Economiques et docteur en Sciences Economiques et en Sociologie, a publié en 1991 un ouvrage intitulé : La Théorie de la justice de John Rawls.

Contrat social versus utilitarisme. Il base son étude sur les réflexions de Rawls, et s’interroge

sur les principes de la justice (Chapitre 2), la procédure des choix des principes (Chapitre 3) et les structures politiques et socio-économiques (Chapitres 4 et 5), toutes issues de l’ouvrage de Rawls.

« La Théorie de la justice de Rawls élabore une version moderne de la théorie du contrat social en mettant l'accent sur la justice distributive qui s'efforce d'offrir une alternative à la doctrine utilitariste. A l'encontre de l'utilitarisme, la théorie de Rawls n'est ni altruiste ni téléologique mais déontologique : il s'agit de procéder au choix de règles justes sans se prononcer sur le but poursuivi (le bien recherché) par les individus. Ces règles, les deux principes de la justice — libertés de base les plus étendues et égalité démocratique assortie d'un avantage aux plus désavantagés (fraternité) —, sont hiérarchisées selon l'ordre lexical. Elles fondent un optimum social (le juste) qui est compatible avec, mais prime sur l'optimum économique (relatif au seul bien). Le choix de ces principes relève de la théorie des jeux. Les partenaires choisiront ces deux principes de préférence à ceux de toute autre doctrine en vertu du critère du maximin. Rawls s'expose aux critiques du public choice qui réfutent la justice distributive

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(fraternité) selon des arguments utilitaristes. Par ailleurs, le constructivisme de Rawls ne s'accorde pas aisément avec l'individualisme et le libéralisme que l'auteur affiche »83.

La justice sociale progressiste que nous connaissons aujourd’hui, a ses fondements qui remontent jusqu’à l’époque du XVIIe siècle. Deux figures emblématiques marqueront à jamais le concept de justice sociale : John Locke et Jean-Jacques Rousseau. An Essay

Concerning Human Understanding écrit en 1689 et publié en 1690 par John Locke, est une

œuvre philosophique qui constitue l’une des principales sources de l’empirisme en philosophie moderne. Du Contrat Social ou Principes du droit politique est, quant à lui, un ouvrage de philosophie politique écrit par le philosophe Rousseau en 1762. Ces deux œuvres ont marqué un tournant décisif dans plusieurs domaines mais également dans la pensée collective des sociétés modernes. Les deux ouvrages assurent et expliquent les principes de souveraineté du peuple face aux injustices. Ils garantissent des conditions de vie décentes tout et instaurent des principes d’égalité.

« Les individus sont autonomes et consentent librement à adopter ces principes; il n'y a donc ni injonction divine comme le défendait la philosophie du droit naturel classique ni soumission à une quelconque autorité comme imaginait Hobbes Naville 1988) ni délégation de cette décision à un tiers comme envisageait Locke le pacte social est l'œuvre des individus eux-mêmes qui sanctionnent la création de leur association par adoption de principes de justice »84.

L’éradication de la pauvreté, l’inclusion sociale et le développement et le bien-être des citoyens sont au centre des préoccupations d’une société moderne. En contrepartie, comme le souligne Rousseau, les humains doivent accomplir leurs devoirs et leurs fonctions. Les droits à l'éducation, la sécurité sociale et publique assurent, quant à eux, l'égalité des chances et la justice sociale pour faciliter et assurer le développement humain. Chaque personne doit avoir un droit égal au système total le plus étendu de libertés de base égales pour tous compatible avec un même système de libertés pour tous85. Dans son essai, L'éthique économique de John

Rawls86, Jean-Paul Maréchal, qui est maître de conférences en science économique à l'université de Rennes II, s’intéresse à la conception de la justice, présentée par Rawls, cette dernière, comme le signale Maréchal, généralise et porte à un haut niveau d'abstraction la

83 . Adair Philippe. La Théorie de la justice de John Rawls. Contrat social versus utilitarisme. In: Revue française de science politique, 41e année, n°1, 1991. p. 81-96.

84 . Ibid. p. 82

85 . Ibid. p. 84

72 théorie du contrat social formulée initialement par des auteurs tels que John Locke, Emmanuel Kant ou Jean-Jacques Rousseau.

« L'idée principale de Théorie de la justice est de présenter une conception de la justice qui généralise et porte à un haut niveau d'abstraction la théorie du contrat social formulée initialement par des auteurs tels que John Locke, Emmanuel Kant ou Jean-Jacques Rousseau. Une telle conception est désignée par l'expression "théorie de la justice comme équité". Elle signifie que les principes de justice défendus par John Rawls seraient adoptés par une société au terme d'une délibération menée, entre tous ses membres, dans une situation initiale équitable »87.

Étudions à présent ce concept de justice au sein de la société vénézuélienne. La montée en puissance des forces bolivariennes au pouvoir dirigées par Hugo Chávez en 1999 est l'un des moments emblématiques qui eu lieu en Amérique latine. Chávez, quant à lui, est un militaire et un homme politique très influent ; il est également l’actuel président très critiqué de la République bolivarienne du Venezuela depuis le 2 février 1999. Il revendique ce qu’il appelle le « socialisme du 21ème siècle ». Les réformes qu’il a mises en place depuis son accès au pouvoir comprennent la promulgation d'une nouvelle constitution, une politique de «démocratie participative», et la nationalisation des industries clés du Venezuela. Cependant, malgré sa personnalité de leader charismatique, il est également vu par la presse et l’opinion publique comme un homme politique corrompu. Nous ne nous attarderons pas sur ce point là mais sur ce qui a amené la justice sociale en Amérique latine afin de mieux avancer dans cette thèse. La question qui est revenu dans beaucoup d’ouvrages que j’ai consulté est « qu'est-ce que la gauche bolivarienne? ». Il faut, pour amener des éléments de réponse à cette question, comprendre tout d’abord le panorama géopolitique du Venezuela au début du XXe siècle. Le socialisme a eu du mal à trouver sa place lors de l'effondrement de l'URSS, la chute du mur de Berlin et avec la montée du capitalisme des États-Unis. Aujourd’hui les critiques et sociologues s’accordent sur le fait qu’il a été un élément fédérateur pour les peuples d’Amérique latinemais l'hétérogénéité politique qui régnait a divisé le peuple. Le mouvement bolivarien au Venezuela a débuté dans les années 70, dans un contexte socio-économique caractérisé par l'épuisement du modèle industriel de substitution des importations qui était alors en place depuis le XXe siècle. L'économie Venezuelienne a continué à chuter dans les années 80.

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“Hitos relevantes de esa crisis fueron el Caracazo de 1989, los golpes de Estado de 1992, la destitución del presidente Carlos Andrés Pérez en 1993, el derrumbe en 1993 del sistema bipartidista y la emergencia de nuevos actores sociopolíticos con propuestas, líderes y estrategias alternativas”88.

Pour lutter contre les contrastes entre les riches et les pauvres, Chávez met en place le projet bolivarien. Ce qui a caractérisé sa monté au pouvoir est avant tout sa volonté d'indépendance vis-à-vis des grandes puissances dominantes et son désir de rassembler les peuples jusque là dominésd’Amérique latine. Sa politique sera très critiquée mais ses actions politiques démontrent sa volonté à instaurer une justice sociale égalitaire. Chávez crée le Mouvement révolutionnaire bolivarien 200 (MBR-200) d'orientation socialiste, et sera à la tête de ce parti en gagnant les élections le 6 décembre 1998.

“Though rich in oil, poverty has long affected a majority of the Venezuelan people. After a series of harsh economic reforms promoted by the International Monetary Fund in 1989, the percentage of Venezuelans living in poverty jumped from 43.9 to 66.5 – over the course of just one year. Elected in 1998, President Hugo Chávez quickly recognized the corrosive impact poverty was having on Venezuela. By forcing millions of citizens to the margins and excluding them from meaningful participation in the country’s political and economic life. High levels of poverty were diminishing people’s faith in Venezuela’s democratic institutions, were serving as a catalyst for crime and were holding the country back from sustainable growth and development. Starting with changes to the constitution that placed additional emphasis on achieving social justice, President Chávez promised to aggressively combat poverty and focus on the economic and social rights of all Venezuelans, a promise that continues to this day”89.

88 . Margarita López Maya. Venezuela: Hugo Chávez y el bolivarianismo. Rev. Venez. de Econ. y Ciencias Sociales, 2008, vol. 14, nº 3 (sept.-dic.), p. 56

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II

LE CONCEPT