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champ électrique local, un rayonnement UV-C ainsi que des espèces réactives. De nombreux chercheurs étudient actuellement la possibilité de mettre en œuvre des plasmas froids pour des applications biomédicales relativement variées allant de la modification de surface pour des matériaux médicaux aux traitements des ulcères et des plaies.

On remarque néanmoins que la contribution et la nature des espèces réactives initiées par plasma reste assez peu détaillée dans la littérature. La plupart des auteurs se contentent de mentionner la présence, la plupart du temps supposée, d’espèces réactives oxygénées (ROS) et d’espèces réactives nitrogénées (RNS) pour expliquer les effets de leur dispositif plasma sur le vivant.

Un des objectifs de ce travail de thèse est par conséquent d’identifier les espèces réactives produites dans un liquide activé par plasma puis de relier leur présence aux effets observés sur des supports biologiques, des tumeurs dans notre cas. Plus précisément, nous avons choisi d’utiliser des cellules du cancer colorectal HCT116. Alors que la plupart des essais de traitement plasma sur des tumeurs ont été réalisés sur des modèles in vitro 2D, nous avons eu l’opportunité de prendre en compte la morphologie des tumeurs en utilisant un modèle in vitro 3D. Cette approche permet généralement une meilleure anticipation de l’efficacité du traitement final. À la fin de ce mémoire, nous présenterons un essai de traitement sur modèle in vivo qui sera comparé aux quelques études portant sur le traitement in-vivo de cellules cancéreuses par plasma [156, 134, 157, 158].

Afin de ne considérer que l’effet des espèces réactives à longue durée de vie initiées par plasma, nous avons effectué des traitements de manière indirecte en plongeant les tumeurs dans une solution liquide préalablement activée par un jet de plasma. Cette approche est réaliste pour le traitement de cancer en situation réelle où, bien souvent, il est impossible d’exposer directement la tumeur à un jet de plasma.

Le dispositif plasma utilisé pour l’activation des liquides de traitement est identique à celui décrit dans la sous-section 2.2.4.1 et dans la figure 2.2.5. Ce choix a été fortement influencé par le nombre important de publications sur le traitement du cancer avec une configuration de jet plasma similaire à celle développée au sein du groupe PRHE.

Dans la suite de ce mémoire, le chapitre 3 présentera la culture et la mise en forme en 3D des modèles de tumeurs. Dans ce chapitre, seront également abordées les techniques de diagnostic propres aux traitements du cancer que sont par exemple la recherche de dommages à l’ADN et de la mort cellulaire par apoptose. Le chapitre 4 est dédié aux techniques de détection des espèces dans le liquide activé par plasma avec une attention particulière sur la détection et la quantification des espèces radicalaires à faible durée de vie. Enfin, le chapitre 5 décrira l’ensemble des techniques utilisées dans le domaine des plasmas froids pour caractériser les jets de plasma dans l’objectif de concevoir un dispositif plasma optimisé pour les traitements biomédicaux.

“Trouver n’est rien, c’est le plan qui est difficile.”

Supports biologiques et diagnostics

Pour étudier la réponse de cellules saines ou cancéreuses à l’action des jets de plasma froids, diverses méthodes existent notamment l’étude sur cellules plates appelées aussi mo- dèle 2D. Ce type de méthode consiste à observer la réponse de cellules en suspension dans un milieu de culture, ces cellules étant isolées ou en faible interaction les unes par rapport aux autres.

Récemment une méthode alternative utilisant des modèles en 3D de tumeurs in vitro (sphéroïdes) a été développée par diverses équipes de part le monde dont notamment l’Ins- titut des Technologies Avancées en sciences du Vivant (ITAV) dont une équipe a participé aux travaux présentés dans cette thèse. Ce nouveau modèle permet une approche plus réelle de l’interaction plasma-cellules [159]. En effet, plusieurs expériences ont montré que les réponses des sphéroïdes à divers traitements notamment de radiothérapie donnent des ré- sultats très proches de ceux observés sur xénogreffes1 [160, 161]. Inversement, les résultats

sur cellules monocouche ne donnent qu’une idée approximative des effets attendus dans la réalité. Le sphéroïde est donc un modèle in vitro plus adapté pour prédire l’effet d’un traitement sur une tumeur in vivo. Ces micro-tumeurs dénommées sphéroïdes permettent de prendre en compte des paramètres déterminants dans la prolifération cellulaire que sont l’hétérogénéité cellulaire au sein d’une tumeur mais aussi les interactions entre les cellules et leurs micro-environnements [162]. L’amas de cellules (saines ou cancéreuses) de ces micro- tumeurs reproduit l’organisation spatiale tridimensionnelle d’une tumeur non vascularisée pouvant nous apporter des informations concernant la limite de pénétration de nos traite- ments plasma. Au cours de sa croissance, cette structure va voir apparaître des gradients d’oxygène et de nutriment en son sein conduisant à un gradient de prolifération [42, 163, 164]. De part l’établissement de ces gradients, les cellules en prolifération seront situées sur la couche périphérique du sphéroïde [165]. Plus profondément sont localisées des cellules en état de quiescence c’est-à-dire en phase de repos sans division cellulaire. Enfin lorsque les sphéroïdes deviennent relativement important en terme de volume, les régions centrales sont

1. La xénogreffe désigne la transplantation d’un greffon (organe par exemple) où le donneur est d’une espèce biologique différente de celle du receveur.

alors privées d’oxygène et de nutriment entraînant un processus de mort cellulaire de ces dernières par nécrose.

La culture et la mise en forme des sphéroïdes nécessite diverses manipulations pour ga- rantir des résultats fiables. Les parties suivantes seront donc consacrées à l’ensemble des procédures nécessaires à l’élaboration des sphéroïdes mais aussi aux étapes qui permettent de les préparer aux divers diagnostics pratiqués, ce protocole n’étant pas le même que pour les analyses classiques réalisées sur modèles 2D. On commencera par présenter les caracté- ristiques des cellules utilisées.

3.1 Caractéristiques des cellules

3.1.1 HCT 116 : Cancer du colon

La lignée cellulaire HCT116 est issue de tumeurs humaines du colon possédant une haute capacité proliférative (population doublant en approximativement 21H [166]). Pré- sente chez l’homme, ces cellules peuvent entraîner l’apparition d’une tumeur maligne dé- nommée adénocarcinome colorectal. HCT116 exprime un gène particulier appelé antigène carcino-embryonnaire (ou ACE). Cette protéine impliquée dans l’adhésion cellulaire est un marqueur tumoral du cancer colorectal [167]. Il s’agit d’une protéine produite par le fœtus lors de son développement et qui disparaît après la naissance. Elle peut être cependant pré- sente en faible quantité à la surface des cellules de quelques organes dont le côlon, le rectum, l’intestin grêle mais aussi les poumons [168].

Ce type de cellule cancéreuse est dite à morphologie épithéliale c’est-à-dire dont les cellules sont étroitement juxtaposées ou jointives (voir fig. 3.1.1) et aucune matrice extracellulaire ni aucune fibre ne peuvent les séparer. En culture ce type de lignée est particulièrement adhérente et nécessite donc des interventions particulières pour les détacher de la surface du flasque de culture. De plus, l’obtention et la conservation de sphères 3D utilisables nécessite d’utiliser des plaques de 96 puits traitées au Poly(2-hydroxyethyl methacrylate) (poly-HEMA) qui est un hydrogel évitant l’adhésion des cellules sur les puits.

3.1.2 GM637 : Fibroblaste

Les fibroblastes sont d’origine mésenchymateuse c’est-à-dire dérivant de cellules souches présentes dans l’embryon. Surnommées parfois « cellules de soutient » elles constituent le groupe cellulaire le plus présent dans le derme. L’un de leurs rôles majeurs est d’organiser les éléments présents dans la matrice extracellulaire. L’une des méthode de discrimination la plus utilisée est une analyse morphologique de ces cellules dont la forme est décrite comme étoilée et dotée de longs prolongements généralement fins venant au contact d’autres cellules (Fig 3.1.2) [169]. Contrairement aux cellules cancéreuses HCT116 il peut donc exister des espaces entre ces cellules.

Figure 3.1.1 – Micrographie fluorescente du cytosquelette cellulaire HCT116 : cellules can- céreuses du côlon. Distribution des microtubules (colorées en vert), des noyaux (colorés en bleu) et les micro-filaments d’actine (colorés en rouge) Cette lignée cellulaire nous servira de support pour l’analyse de l’interaction entre les jets de plasma froid et les cellules saines dans le but d’étudier la sélectivité du traitement par plasma. Contrairement aux sphéroïdes de cellules HCT116, l’index prolifératif des sphéroïdes réalisés à partir de fibroblastes est très faible. Il a été démontré que, lors de réponse aux dommages environnants et particulièrement lors de la cicatrisation et de l’inflammation, la prolifération de ces cellules peut être très rapide [170].

Figure 3.1.2 – Micrographie fluorescente de fibroblaste humain. Distribution des microtu- bules (colorées en vert), des noyaux (colorés en bleu) et les micro-filaments d’actine (colorés en rouge)