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4. La technologie Batterie « Tout-Solide »

4.4. Les Batteries Li-S « Tout-Solide »

Comme nous l’avons vu précédemment dans les microbatteries en couches minces, notamment celles utilisant le silicium comme matériau d’électrode, l’usage d’un électrolyte solide permet d’obtenir de meilleurs performances avec certains matériaux en comparaison avec les batteries conventionnelles. Ainsi, hormis l’aspect sécuritaire, les Batteries « Tout-Solide » apparaissent comme la solution aux limitations imposées par les électrolytes liquides. C’est dans l’optique de montrer l’intérêt des électrolytes solides que de nombreuses recherches ont été menées sur le système Li-S, système posant aujourd’hui de nombreux problèmes.

Dans la littérature, la technologie lithium-soufre, ou Li-S, apparaît comme une des meilleures alternatives aux batteries Li-ion [7]. Comme l’illustre la Figure I.38a, les véhicules électriques équipés des batteries utilisant la technologie Li-S présenteraient une autonomie de 400 km, soit deux fois l’autonomie des véhicules électriques utilisant la technologie Li-ion actuelle. De plus, le coût de ces batteries serait quatre fois moindre, passant de 600$ à moins de 150$ le kW/h. Malheureusement, la dissolution de la matière active au cours du cyclage constitue un verrou de taille, qui ne permet pas à cette technologie de répondre aux attentes des industriels à l’heure actuelle. En effet, comme on peut le voir sur la Figure I.38b, la réduction du soufre S vers Li2S passe par la formation de chaînes de polysulfures Li2Sx (1 ≤ x ≤ 8), solubles dans l’électrolyte, qui se déposent sur la contre-électrode de lithium et entraînent une détérioration des performances électrochimiques. C’est dans le but de limiter ce phénomène de dissolution et donc d’améliorer les propriétés de ces batteries, que ces Batteries « Tout-Solide » Li-S ont été étudiées.

Figure I.38. Vue d’ensemble des différentes technologies de stockage d’énergie pour systèmes embarqués (a). Courbe de charge-décharge typique des batteries Li-S (b).

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L’utilisation du soufre élémentaire S8, pour une application en Batterie « Tout-Solide » a posé de nombreux problèmes du fait du caractère extrêmement isolant de ce composé (σ=5x10-30 S/cm). Alors que la plupart des électrodes composites que nous avons vues précédemment sont obtenues par simple mélange au mortier, la préparation des électrodes composites à base de soufre a dû être optimisée. Dans la littérature, deux techniques ont été majoritairement utilisées : le broyage mécanique et le mélange en phase gazeuse.

La première, proposée par Machida [139], puis reprise et améliorée par le groupe d’Hayashi, a été celle du broyage mécanique. Pour compenser la trop faible conductivité du soufre, un mélange S/CuS obtenu par broyage mécanique de soufre et de cuivre a été utilisé dans les premières batteries. Ce dernier, mélangé dans un mortier avec l’électrolyte 80Li2S/20P2S5 et du noir d’Acétylène, a présenté une excellente rétention de capacité de 650 mAh/g pendant 20 cycles, à une densité de courant de 64 µA/cm², fruit de plusieurs mécanismes réactionnels mettant en jeu CuS, S et l’alliage LixCuS [140]. Le mélange Li2S/Cu a également été étudié mais présentait des performances électrochimiques moindres en comparaison avec son homologue utilisant le soufre élémentaire [141].

L’usage de cuivre fut rapidement abandonné, car trop lourd et trop cher, au profit d’un mélange plus classique : matière active, électrolyte et additif conducteur. En 2011 Nagao a présenté une Batterie « Tout-Solide » (Li-In)/S avec des propriétés électrochimiques largement supérieures à celles des batteries utilisant un électrolyte liquide organique [142]. Celle-ci, reposant sur le mélange simultané du soufre, de l’électrolyte 80Li2S-20P2S5 et du noir d’acétylène par broyage mécanique (25:50:25 respectivement), délivrait une capacité de 1450 mAh/g après dix cycles à une densité de courant de 64 µA/cm², comme le montre la Figure I.39i.

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Figure I.39. (i) Influence de la préparation de la composite sur la capacité délivrée : au mortier (a), au mortier + broyeur planétaire (b) et au broyeur planétaire (c). (ii) Rétention de capacité de la composite préparée par broyage mécanique.

Néanmoins, lors de la charge, l’oxydation du Li2S obtenue par réduction du soufre s’accompagne de l’oxydation du Li2S contenu dans l’électrolyte. Ce phénomène, observable sur la courbe de cyclage où l’on peut remarquer que la capacité de la première charge est sensiblement supérieure à celle de la première décharge, conduit à une diminution rapide de la capacité par détérioration de l’électrode composite. Comme on peut le voir sur la Figure I.39ii, l’augmentation du régime de cyclage a permis de limiter l’oxydation de l’électrolyte et a conduit à une rétention de capacité de 1000 mAh/g pendant 200 cycles à une densité de courant de 1,3 mA/cm². Par ailleurs, il est intéressant de constater que l’allure de la courbe de cyclage de la Figure I.39i est sensiblement différente de celle de la Figure I.38b, laissant supposer des mécanismes réactionnels différents lors de l’utilisation d’un électrolyte solide dans lequel les polysulfures ne sont pas solubles.

En 2012, Nagao a présenté la première Batterie « Tout-Solide » Li-S, utilisant un dépôt par PVD de lithium pour stabiliser l’interface entre le lithium et l’électrolyte comme nous l’avons vu dans la partie 2.4.2 [125]. Cette batterie a délivré une capacité de 1000 mAh/g pendant 20 cycles à une densité de courant de 64 µA/cm², soit un régime de C/15 (1 Li+ en 15 heures).

La deuxième technique de préparation de l’électrode composite fut présentée par le groupe de Kanno et consistait en un mélange Solide-Gaz entre le soufre et un carbone poreux. Le but de cette technique est de mélanger par broyage mécanique le soufre et le carbone, puis

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de les traiter thermiquement dans un tube scellé sous vide afin d’évaporer le soufre et d’améliorer l’homogénéité du mélange [143, 144]. Comme l’illustre la Figure I.40a et b, l’électrode composite préparée de cette manière présentait une rétention de capacité de 400 mAh/g pendant 5 cycles à une densité de courant de 0.13 mA/cm², en comparaison avec les 40 mAh/g délivrés par la composite préparée par simple broyage planétaire.

Figure I.40. Courbe de charge/décharge des électrodes composites préparées par broyage mécanique (a) et par mélange gaz-solide : soufre-noir d’acétylène (b) et soufre-CMK 3 (c) [143, 144]

Afin d’améliorer les performances électrochimiques de ces batteries, le noir d’acétylène a été remplacé par le CMK-3, un carbone présentant une structure bidimensionnelle de bâtonnets cylindriques. L’organisation structurale de ce carbone permet des contacts plus intimes entre l’électrolyte et le composite soufre-CMK-3 et donc de meilleures performances électrochimiques comme on peut le voir sur la Figure I.40c.

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