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Dans toutes les sciences le problème de la représentativité des échantillons est récurrent. Notre objectif étant de décrire des systèmes fluviatiles à grande échelle, nous allons voir que nous sommes confrontés à deux contraintes d’échantillonnages indépendantes qui vont accroître l’incertitude sur nos données.

Un échantillon est il représentatif du sédiment analysé ?

Considérons un tas de sédiments homogènes fractionné en échantillons identiques. Quelle est la « répétabilité » de la mesure granulométrique pour une quantité d’échantillon donnée ? Naturellement il n’existe pas de réponse unique à ces questions, tout dépend du mode de mesure choisi « sieve-by-weight » ou « grid-by-number ».

Quel volume est il nécessaire de tamiser pour bien caractériser à priori la granulométrie d’un matériau (« sieve-by-weight ») ? Une série de critères a été définie depuis les années 80 pour répondre à ce problème [Haschenburger et al. 2007]. En premier lieu, le volume à échantillonner doit être largement supérieur au volume des plus grosses particules prélevées (Figure 12). Par exemple, Mosley and Tindale [1984] proposent que la masse du plus gros claste soit inférieure à 5% de la masse totale de l’échantillon. Le volume à échantillonner devrait également être ajusté en fonction de l’hétérométrie des grains, de leur classement, de leur morphométrie, et cætera [Gale and Hoare, 1992 ; Milan et al., 1999]…

Figure 12 : Volume de sédiment à prélever pour caractériser la granulométrie d’un échantillon, estimation de l’incertitude sur les classes granulométriques [Milan et al., 1999]

Les marges d’incertitude indiquées portent sur le spectre granulométrique complet, c'est-à-dire la valeur du D50. D’après cet abaque nous pouvons estimer une incertitude de l’ordre de 1% à 5% pour nos échantillons (voir notre protocole expérimental dans les paragraphes suivants). Nous n’avons pas besoin d’une précision plus importante.

Milan et al. [1999] ont compilé sur ce graphique les données obtenues par d’autres auteurs. L’enjeu de leurs travaux est de définir le volume à échantillonner plus important encore pour caractériser au mieux chaque classe granulométrique. En réalité la précision dépend également de la morphométrie des grains [Milan et al., 1999], du contexte sédimentaire [Gale and Hoare, 1992], et cætera. Les « critères » pour un échantillonnage granulométrique idéal sont d’ailleurs encore discutés [Haschenburger et al. 2007].

Le nombre d’objets à compter pour obtenir un échantillon représentatif par la méthode « grid-by-number » a été moins étudié dans le domaine de l’analyse granulométrique. Habituellement on procède à une centaine de points de mesure, la résolution est donc de l’ordre du pourcent, et la précision au mieux de plusieurs pourcents. Nous verrons ultérieurement que cette valeur de 100 points est suffisante pour notre étude. Notons qu’il convient également de choisir une surface de mesure suffisamment grande [Rollet, 2007].

Un échantillon est il représentatif des sédiments présents sur un

segment de rivière ?

L’étape la plus critique lors d’une campagne de mesure de la granulométrie en milieu fluviatile, est le choix des emplacements adéquats pour prélever les échantillons. Plusieurs phénomènes compliquent considérablement l’opération : la variation verticale de la granulométrie (présence d’une « armure » ou de patchs de sable), et la variation spatiale dans le lit de la rivière. Nous allons voir qu’une grande quantité de mesures s’avère généralement nécessaire pour caractériser la charge de fond réelle totale transportée par une rivière [Mosley and Tindale, 1984 ; Gale and Hoare, 1992 ; Milan et al. 1999 ; Haschenburger et al. 2007]. Obtenir des résultats précis demande de toute façon beaucoup de temps et de labeur.

¾ Variations verticales de la granulométrie : l’armure et bancs de sable

Dans le cas de rivières à fond graveleux la granulométrie des dépôts superficiels est souvent faiblement représentative de la granulométrie des dépôts plus profonds [Diplas and Sutherland, 1988 ; Mosley and Tindale, 1984]. La surface des barres fluviatiles est fréquemment recouverte par un amoncellement de galets grossiers sur une dizaine de centimètre, soit approximativement la taille des plus gros galets à un endroit donné. La granulométrie de surface apparaît alors 2 à 2.5 fois plus grossière que la granulométrie en sub-surface [Diplas and Sutherland, 1988 ], parfois 3 à 4 fois plus grossière [Garcia et al., 1999, 2000]. Cette « armure » ou « pavage »12 (aussi appelée « cuirasse » en français, « armour » ou « armor » en anglais) résulte d’un processus de tri granulométrique complexe [Parker and Klingeman, 1982 ; Vericat et al., 2005 ; Rollet, 2007]. Elle dépend fortement du contexte local (quantité de sédiments disponible, hétérométrie et granulométrie des grains, morphologie de la rivière), et de la chronologie des crues. Deux théories fondamentalement différentes tentent d’apporter une explication à ce phénomène :

1. Lors de crues secondaires de faible ampleur, le courant suffisamment fort pour transporter le sable ou les graviers laisserait les gros galets sur place, ce qui aurait pour effet de « nettoyer » localement la surface du lit. Ce tri granulométrique est appelé « vannage vers l’aval » (« downstream winnowing »).

2. Une autre hypothèse repose sur le concept de « mobilité équivalente » des clastes de tailles différentes. Lors du transport, les particules fines auraient tendance à s’accumuler dans les creux entre les particules plus grosses, et progressivement migreraient vers la sub-surface. Leur mobilité se réduirait alors, et s’équilibrerait avec celle des grosses particules subjacentes. Ce processus est appelé « vannage vertical » (« vertical winnowing »).

Quoi qu’il en soit, une forte crue peut briser l’armure et remobiliser l’ensemble des sédiments disponibles. L’armure évolue donc au cours du temps, se déplace voire disparaît d’une année sur l’autre. Elle peut aussi se morceler, ce qui justifie fréquemment la détermination d’un « indice de pavage » (« armouring ratio ») correspondant à la proportion de la surface du lit couverte par l’armure. Si elle devient trop discontinue les auteurs parlent plus volontiers de « patchs de galets » [Garcia et al., 1999, Wittenberg et al., 2006]. Naturellement la présence d’un pavage protecteur presque inamovible a une forte influence sur le taux d’incision et l’érosion latérale du cours.

Figure 13 : L’effet de pavage dans les rivières Siwaliks (amont).

(a) Armure vue en coupe. Cette coupe dans une barre de galet de la Churre Khola montre clairement la sous représentation des sables dans les niveaux les plus superficiels, sur une épaisseur de 15 cm environ. Cette photographie a été prise dans la zone montagneuse des Siwaliks.

(b)Armure non tuilée vue de dessus. (c) Patchs de particules grossières et fines à la surface de certaines barres fluviatiles. L’armure apparaît généralement discontinue et fortement remaniée par les crues successives.

(d)Absence d’armure dans une rivière du Téraï. L’indice de pavage devient généralement plus faible vers l’aval. Encore plus loin en aval, les rivières à fond sableux ne présentent pas de dépôts de surface plus grossiers que les dépôts de sub-surface. En outre plus le caractère « en tresse » se développe, moins l’armure parait continue.

Dans notre secteur d’étude le pavage semble mieux formé dans les cours en amont, notamment dans la zone montagneuse (Figure 13). Il apparaît parfois « tuilé » : les particules sont alors imbriquées les unes dans les autres suivant le sens du courant. Dans le cours aval (Teraï) la proportion de sable des dépôts les plus superficiels augmente : il ne semble plus y avoir de différences marquantes entre les dépôts superficiels et profonds. Le caractère « en tresse » s’accentue également. Ce type d’observation semble classique [Diplas and Sutherland, 1988]. Cependant, l’intense exploitation des galets de rivière par les habitants de la région pourrait simplement expliquer de la faiblesse du pavage dans le Teraï.

Il arrive également que la surface soit recouverte par des « patchs de particules fines » plus ou moins épais, voire par de véritables bancs de sable. Ce type de dépôts apparaît de façon générale dans les rivières du Teraï (Figure 14), et localement dans la zone montagneuse, sous forme de minces dépôts

Vue en coupe

sableux centimétriques discontinus. Comme la cuirasse, la répartition de ces dépôts en surface varie fortement dans le temps et dans l’espace et dépend des caractéristiques des dernières crues. La nature bimodale des sédiments provenant des Siwaliks (« RESULTAT 1 : Comparaison de la granulométrie et des lithofaciès entre les molasses Siwaliks et les alluvions actuelles, interprétation de la transition sable-gravier », p. 108) pourrait expliquer leur abondance.

Figure 14 : « Patchs » de particules fines et bancs de sable dans les rivières népalaises.

(Légende de la Figure 14)

(a) Photographie prise sur une barre fluviatile de la Bakeya dans les Siwaliks. La barre de galets est recouverte par une fine couche de sable centimétrique. Ce type de dépôt très peu épais est très répandu surtout dans le Teraï.

(b) Dépôt de sable au fond s’un chenal secondaire de la Churre Khola. Les barres fluviatiles environnantes sont constituées de galets.

(c) et (d) D’épais bancs de sable métriques à plurimétriques se déposent en fin de crue dans des zones abritée du cours tumultueux des grandes rivières népalaises. Ces photographies proviennent des gorges de la Trisuli Nadi (chaîne du Mahabarat), mais les mêmes structures existent dans les vallées de la Bakeya et la Bagmati (notre secteur d’étude dans les Siwaliks). Les gros bancs de sable sont beaucoup moins épais et plus rares en dehors de zones de gorges.

Finalement nous avons choisi de ne pas nous intéresser à la granulométrie de surface

hautement variable d’un point à l’autre (armure discontinue ou absente, patch de particules grossières ou fines), d’abord pour des raisons de temps et d’efficacité. Ce choix semble justifié par certaines études qui

montrent que la granulométrie de la charge de fond, très variable d’une crue à l’autre, est plus proche de la granulométrie de sub-surface que de la granulométrie de surface [Garcia et al., 1999, Attal et Lavé, 2006b] (Figure 15). En outre, les dépôts sédimentaires pérennes dans les cônes alluviaux, visibles sur les coupes d’anciennes terrasses, ressemblent bien d’avantage aux dépôts fluviatiles actuels de sub-surface qu’à l’armure des chenaux.

Figure 15 : Comparaison de la granulométrie de la charge de fond, de la granulométrie de l’armure (surface), et de la granulométrie de sub-surface [d’après Garcia et al., 1999].

Les mesures de la charge de fond ont été réalisées grâce à un piège à sédiment installé au fond d’une rivière. Les courbes de distribution sont toutes tronquées à 2 mm. La granulométrie moyenne pendant cinq crues successives a été enregistrée. Garcia et al. [1999] concluent que la granulométrie de la charge de fond au début d’une crue dépend des caractéristiques des patchs de particules fines à la surface du lit avant la crue. Finalement, lors des différents épisodes enregistrés, cette granulométrie est toujours restée inférieure ou égale à la granulométrie des dépôts de sub-surface, et donc très inférieure à la granulométrie de l’armure.

Nous considérerons donc que la granulométrie « réelle » de la charge de fond transportée par la rivière correspond à la granulométrie de sub-surface. Cela implique de retirer l’armure ou les dépôts de sable trop épais quand ils sont présents, avant de procéder aux mesures de granulométrie (tamisage ou autre)13.

13 Naturellement la mesure peut s’effectuer directement sur les dépôts affleurant en surface si aucune variation

verticale des fciès n’est observée (nous avons vu que c’est souvent le cas dans le Teraï, à condition de bien choisir le site de mesure).

¾ Variations spatiales des faciès sur de faibles distances dans les rivières

La granulométrie fine des dépôts de plaines d’inondation et de berges contraste naturellement avec les dépôts plus grossiers de chenaux. Cependant, au sein d’un chenal, même sur de courts segments, la granulométrie des sédiments présente également une forte variabilité spatiale [Kellerhals and Bray, 1971 ; Mosley and Tindale, 1984 ; Wittenberg et al., 2006, Rollet, 2007]. On peut s’attendre à ce que les galets et graviers se concentrent dans les zones les plus « actives » du chenal, vers le fond et les partie concaves des courbes, et que le sable ne s’accumule que là ou le courant est moins fort, vers les berges et les zones protégées des méandres (Figure 16, p. 63). En fait la répartition des bancs et des patchs de particules fines ou grossières, et des sédiments en général, apparaît beaucoup plus complexe. La sédimentation dans les rivières en tresse se fait sous forme de « barres fluviatiles » longitudinales qui séparent les chenaux entre eux. Ces barres se déplacent et s’accroissent rapidement dans le sens du courant par avalanches de sédiments à leur extrémité aval. Leur taille et leur granulométrie varient selon les conditions du milieu. Le lit de ce type de rivière apparaît donc très hétérogène spatialement (voir les photos de la Figure 13 (c) et de la Figure 14 (b)).

En outre, les rivières en tresse du Teraï et des Siwaliks subissent de fortes variations saisonnières et même journalières de débit (cf. « Hydrologie des rivières étudiées dans les Siwaliks du Népal Central », p. 32). Dans ces rivières à écoulement saisonnier la partie du chenal présentant la plus forte granulométrie en surface est souvent comprise en bordure des multiples chenaux secondaires, tandis que le fond de ces chenaux et les parties les plus élevées du lit de la rivière sont recouverts par des bancs de sable (Figure 16). Les bancs sableux au fond des chenaux (Figure 14 (b)) ont pu se déposer en phase de décrue, lors de crues secondaires, ou pendant l’étiage. Ainsi la répartition de la granulométrie sur le fond lors de l’échantillonnage pendant la saison sèche dépend avant tout de chronologie et de l’intensité des dernières crues des rivières (qui n’ont pas forcément été les plus fortes), ainsi que de la disponibilité des sédiments pendant les crues et du remaniement éventuel de l’armure.

¾ Variations temporelles des faciès

Il est probable que les dépôts de sable que l’on rencontre en surface dans les chenaux des

cônes alluviaux proximaux ne s’accumulent pas durablement : ils doivent être balayés pendant la mousson suivante. En effet les dépôts plus profonds semble presque exclusivement graveleux (avec une matrice sableuse) et probablement plus homogènes que les dépôts de surface (Figure 16). Même les faciès de plaine d’inondation sont très peu conservés à long terme dans le processus d’aggradation des cônes : les faciès fins sont largement minoritaires dans les dépôts pérennes des cônes alluviaux proximaux (observation faites sur d’anciennes terrasses ou des coupes artificielles dans le Teraï).

A une variabilité spatiale correspond donc également une variabilité temporelle des dépôts. D’une année sur l’autre les barres fluviatiles se déplacent, l’armure se transforme, les flux de sédiments varient. Les perturbations du milieu peuvent mettre plusieurs années à se propager le long du cours. A plus long terme la dynamique fluviatile peut complètement changer, souvent en relation avec les activités humaines [Vericat et al., 2005 ; Rollet, 2007].

Figure 16 : Bloc diagramme présentant la répartition granulométrique caractéristique dans une rivière en tresse du Teraï.

Ce bloc diagramme présente l’aspect de la rivière Bakeya au niveau du village de Nijgad, sur le cône alluvial proximal 5 km en aval du front topographique. A cet endroit le lit s’étale sur une largeur de plusieurs centaines de mètre, parfois interrompu par des îles en partie végétalisées. En période d’étiage le flux d’eau se répartie en 1, 2 ou 3 chenaux principaux, mais il existe aussi de très nombreux chenaux secondaires actifs pendant les crues. La rivière divague fortement et érode rapidement latéralement les dépôts fins de plaine alluviale ; au bout du compte seuls les faciès mixtes caractéristiques des chenaux (galets et sable mélangés) s’accumulent à long terme.

Les dépôts sableux se rencontrent à la fois à proximité des berges et sur la plaine alluviale inondable où le courant est plus faible, mais aussi au fond des chenaux principaux. Ces patchs, nappes, ou bancs de matériaux fins mesurent de quelques centimètres jusqu’à plus d’un mètre d’épaisseur. L’armure de galets se forme quant à elle à la surface des grandes barres fluviatiles.

Dans notre cas les dépôts de surface les plus représentatifs des sédiments accumulés à long terme par le système fluviatile se rencontrent en bordure des principales barres fluviatiles, mais un échantillon unique mal choisi n’aura aucune chance d’être représentatif de la charge globale transportée par la rivière.

Suite de la légende de la Figure 16.

Notons que la granulométrie évolue également latéralement dans les boucles de méandre, comme nous avons pu le constater dans la Ratu Khola. Au niveau des sites de mesure P4 et P2 (voir la carte de localisation précise du Chapitre IV) les granulométries de surface et de sub-surface diminue fortement dans les parties les moins actives du lit. Le D50 des barres fluviatiles passe de 2.7 - 2.4 cm rive gauche (exposée) et au centre du chenal, à 1.6 - 0.9 cm rive droite (protégée).

¾ Estimation du nombre d’échantillons à prélever : cas du tamisage

Naturellement le nombre d’échantillons prélevés a énormément d’importance sur la qualité des résultats obtenus. Dans leurs travaux de 1984 Mosley et Tindale ont procédé à un échantillonnage intensif sur un court segment d’une rivière néo-zélandaise comparable à nos rivières népalaises. Plus de 200 points de mesure avaient été définis le long de coupes transversales, ou suivant une répartition aléatoire dans le lit. Le volume tamisé à chaque fois avoisinait 30 kg (ce qui semble plutôt faible compte tenu de la granulométrie locale). Dans ce contexte, ils avaient conclu à la nécessité d’échantillonner aléatoirement 228 échantillons à tamiser pour obtenir un intervalle de confiance de 10%, et 50 échantillons à tamiser pour un intervalle de confiance de 20%.

Prélever un tel nombre d’échantillons pour caractériser la granulométrie en un point donné d’une rivière est inenvisageable dans notre étude, l’objectif étant de couvrir le linéaire le plus long possible au fil des cours d’eau népalais sélectionnés. Nous avons donc dû procéder de manière alternative (voir plus loin le paragraphe « Bilan sur les contraintes d’échantillonnage ») et accepter une certaine incertitude sur nos données, allant peut être jusqu’à quelques dizaines de pourcents.

¾ Estimation du nombre d’échantillons à prélever : cas des méthodes « grid-by-number »

Comme les mesures par tamisage, les mesures du type « grid-by-number » sont soumises à une forte incertitude liée à la variabilité spatiale des dépôts. Mosley and Tindale [1984] avaient estimé qu’un échantillonnage « Wolman » (voir « Mesure de la granulométrie par comptage direct en surface », p.96) mené sur 14 sections avec 120 sous-échantillons par sections conduisait à une incertitude de l’ordre de 20% sur l’estimation du spectre granulométrique moyen d’un tronçon de rivière. Nous n’avons pas effectué suffisamment d’essais pour remettre en cause cette interprétation pessimiste, mais nous verrons que nos résultats sont exploitables malgré un nombre limité d’échantillons.

Bilan sur les contraintes d’échantillonnage

Finalement, lors d’une campagne de mesure granulométrique d’alluvions fluviatiles, l’incertitude sur les résultats n’est généralement pas liée en premier lieu à la reproductibilité des mesures, mais à la

variabilité naturelle entre les échantillons [Mosley and Tindale, 1984]. Or, nous n’avons pu effectuer qu’une à dix mesures par site, avec une moyenne comprise entre deux et trois (en tenant compte des

mesures réalisées par des méthodes alternatives au tamisage). Pour compenser cette carence en nombre de mesures par site, nous avons adopté deux stratégies qui seront détaillées dans les paragraphes suivant sur nos protocoles expérimentaux :

1. Tout d’abord nous avons choisi d’augmenter la quantité échantillonnée. Près de 100 kg de sédiments ont été prélevés pour les mesures par « sieve-by-weight », et au moins 100 points (minimum) d’échantillonnage ont été déterminés pour les mesures par « grid-by-number ». L’objectif est de garantir des données plus fiables en un point d’échantillonnage donné. En ce qui concerne le tamisage, d’après la Figure 12 (p.57), et compte tenu de notre granulométrie souvent inférieure à 10 cm, une incertitude de 1% à 5% parait raisonnable [Milan et al., 1999].

2. Ensuite, nous avons décidé de sélectionner les points d’échantillonnage les plus « représentatifs » sur un tronçon de rivière donné.

Choisir les faciès à tamiser est forcément subjectif et pourrait biaiser les résultats obtenus [Mosley et Tindale, 1984]. Cette démarche reste malgré tout envisageable dans notre contexte, compte tenu de nos objectifs et de la précision recherchée relativement faible (voir le paragraphe suivant « Biais et difficultés spécifiques rencontrés sur le terrain »). Elle a d’ailleurs été adoptée et justifiée par d’autres auteurs [Rollet, 2007, sur la basse vallée de l’Ain]. Elle nécessite bien sûr une certaine expérience et une définition claire et constante des critères de sélection. Il faut de toute façon rester conscient de l’existence de « marges de variabilité » sur les classes granulométriques atteignant peut être localement 50 à 100% en un point donné, entraînant nécessairement une certaine dispersion des résultats le long