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Le processus de RREA a été prédit pour la première fois par Gurevich et al. (1992). Tout en étant accélérés par un champ électrique, les électrons runaway vont continuer d’interagir avec les électrons et les noyaux des atomes de l’air : diffusions élastiques et inélastiques, et rayonnement Bremsstrahlung. Les diffusions inélastiques peuvent transférer une énergie assez importante aux électrons cibles pour que ces derniers puissent eux-mêmes entrer en runaway si les conditions présentées dans la section précédente sont satisfaites. Cette multiplication du nombre d’électrons runaway est ce que l’on appelle une Avalanche d’Electrons Runaway Relativistes (RREA).

Plusieurs approches peuvent être suivies pour simuler et étudier les RREA. Premièrement, on a l’approche cinétique. La distribution des vitesses des électrons et de leur énergie, ainsi que leur évolution temporelle, peuvent être étudiées avec la forme relativiste des équations de Boltzmann, en utilisant : ∂f ∂t − " 1 − µ2 p ∂f ∂µ + µ ∂f ∂p # eE = δef δt (II.1)

Cette équation suppose un champ électrique appliqué uniforme, et considère deux coordon- nées de quantité de mouvement : sa valeur p, ainsi que µ (l’angle entre le champ électrique et la direction de la quantité de mouvement de l’électron). f est la fonction de distribution des électrons, m est la masse de l’électron, E est la norme du champ électrique. δef

δt est l’intégrale

de collision de Boltzmann, pour les interactions électron/gas, qui peut être réduite à une forme de Fokker-Planck (Chapman and Cowling, 1970). Dans cette approche, le système d’équations obtenu est difficile à traiter en pratique, car il faut résoudre un système d’équations différen- tielles partielles croisées sur plusieurs dimensions. La version la plus aboutie de ce modèle est décrite dans Roussel-Dupré et al. (2008).

Une autre approche consiste à supposer que tous les électrons runaway se déplacent dans la direction du champ électrique (on a donc une seule dimension à traiter), et de s’occuper uni- quement de leur nombre sans considérer leur spectre d’énergie. Pour cela, on utilise l’équation :

∂NR ∂t + vR ∂NR ∂z = NR τi + So(z) (II.2)

NR est la densité (particules/volume) des électrons runaway relativistes, vR ∼ c est leur

vitesse, τi est la constante de temps d’ionisation, et So est la source locale d’électrons graines

relativistes. Cette approche permet de faire des simulations de RREA auto-consistantes, permet- tant de calculer le courant total produit et l’effet que va avoir la production massive d’électron de l’avalanche sur le courant électrique (Gurevich et al., 2006).

Finalement, une autre approche, la plus populaire, est d’utiliser des simulations Monte- Carlo (MC). Le but est ici de suivre les particules une à une et de tirer aléatoirement les localisations, les différentes interactions possibles et leurs résultats. Les tirages aléatoires se font à partir de distributions de probabilités calculées empiriquement ou théoriquement (en utilisant en particulier l’électro-dynamique quantique). Lehtinen et al. (1999) présente le premier

travail utilisant simulations Monte-Carlo pour étudier les RREA, capable de donner des taux d’avalanches corrects. Soit λ l’échelle de longueur de la croissance d’avalanche, τ son échelle de temps, et E la norme du champ électrique. En utilisant les résultats de plusieurs simulations MC de RREA, Coleman and Dwyer (2006) ont établi l’ajustement suivant :

λ (z) = (7300 ± 60) kV E − n(z)n(0)(276 ± 4) kV/m (II.3) τ (z) = (27.3 ± 0.1) kVµs/m E − n(z)n(0)(2767 ± 2) kV/m (II.4)

Cet ajustement est valable uniquement pour un champ électrique E > 300kV/m. Définissons

εc= 7300 kV, la coupure d’énergie du RREA. Celestin et al. (2012) montre que cette coupure

peut être estimée analytiquement par :

εc

νa

c (qE0− FD)

(II.5) Avec un champ électrique appliqué E0= 12.5 kV/cm, une force de friction FD ∼ 2.8 keV/cm et une fréquence d’avalanche νa∼ 39 µs−1. Le facteur multiplicatif de l’avalanche, M peut être

estimé avec : M = exp  L λ (E)  (II.6)

Au maximum on aura Mmax= exp7300 kVU . U est le voltage total disponible, typiquement ∼ 100 MV, ce qui donne Mmax ∼ 106. Il faudrait donc 1011 électrons graines pour produire les

1017 électrons necessaire à produire le TGF.

Quand l’altitude augmente, la densité de l’air diminue et donc les électrons vont subir moins de collisions et donc moins de pertes d’énergie par friction. On a E ∝ n (z) /n (0) et donc l’échelle de temps varie comme l’échelle d’espace : τ ∝ λ ∝ n (0) /n (z). La vitesse de propagation d’une avalanche est quasi-constante et proche de celle de la lumière avec v ≈ 2.65 × 108m/s ≈ 0.88 c. Un autre résultat des études Monte-Carlo est la détermination d’un champ électrique seuil

Et= 286 kV/m à partir duquel le RREA peut se produire (au niveau du sol). Une des limites de

l’approche Monte-Carlo est le fait qu’il est actuellement impossible de calculer (tout en gardant une approche Monte-Carlo) l’effet que va avoir la production massive d’électrons sur le champ électrique supposé initialement (d’autant plus si l’on prend en compte le feedback relativiste, voir section suivante). Celestin et al. (2012) donne une estimation du temps caractéristique de cet effet. En faisant varier ce temps de décharge dans différentes simulations et en regardant laquelle correspond le mieux aux données2, le temps pendant lequel se maintient un champ électrique suffisant est estimé à ∼ 30 ns.

La longueur caractéristique de l’avalanche en fonction du champ électrique appliqué est es- timable par les différents modèles de RREA discutés ci-dessus. En figure II.3, nous présentons un extrait de la revue de Dwyer et al. (2012), qui compare les longueurs caractéristiques d’ava- lanches de différents modèles (le modèle de l’équation (II.3) est tracé avec la courbe noire). On peut voir que tous les modèles sont en très bon accord. On peut ainsi considérer que ce

Figure II.3 – Figure reproduite de Dwyer et al. (2012). Calculs de longueurs d’avalanches

(formes géométriques) et ajustements (courbes solides) en fonction du champ électrique au niveau de la mer, par différents modèles. La ligne verticale en pointillé est le champ électrique seuil des RREA. La courbe noire correspond au tracé de l’équation (II.3).