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Autres constituants des médias d’horreur

Dans le document L'horreur comparée: jeu vidéo et cinéma (Page 56-58)

CHAPITRE 2 CADRE THÉORIQUE

2.2.6 Autres constituants des médias d’horreur

Outre la peur et le dégoût, d’autres caractérisations émotives sont utilisées pour décrire le genre horrifique. Il y a les émotions et les sentiments négatifs, dirigés ou non vers un objet, comme le suspense, la terreur, l’appréhension terrifiée, l’angoisse, l’anxiété, la pression, la lourdeur, la répulsion, un sentiment de menace, le troublant (the uncanny), etc. Certains auteurs identifient également l’horreur comme une émotion particulière (Carroll 1990, Salomon 2004, Grant 2010).

Les médias d’horreur permettent également des émotions et des sentiments positifs comme la sympathie (Freeland 2000, p. 3), le soulagement, le sentiment de justice et le rire. Le désir, de même que les plaisirs de la chair sont également des éléments courants dans l’horreur. Il n’y a qu’à se rappeler les récents films Shark 3D (2011, David R. Ellis) de même que Pirahna 3D et Pirahna 3DD (2010, Alexandre Aja; 2012, John Gulager) où le corps, dans sa plus simple expression, était mis de l’avant. La sexualité est un thème si fort dans les films d’horreur qu’il y est cité comme une des premières causes de mortalité par le personnage Randy (Jamie Kennedy) dans le film hyperpostmoderniste (Valerie Wee 2006) Scream (1996, Wes Craven) : « There are certain rules

28 Traduction de l’auteure : « L’horreur, alors, n’est pas simplement une fonction de la peur en réponse à la capacité létale patente du monstre à mutiler ajouté au dégoût en réponse à l’impureté du monstre. Lorsque la peur et le dégoût sont mélangés dans une imagerie visant à provoquer l’horreur, ce qui est dégoûtant devient en plus épeurant à sa propre manière. C’est le processus de la contamination toxique. »

that one must abide by in order to successfully survive a horror movie! For instance. Number one, you can never have sex. No! No! Big no-no! Big no-no! Sex equals death, okay?29 ».

D’autres composantes sont associées au genre horrifique, comme la surprise, l’agression, l’inquiétude de même que l’indignation.

La surprise est grandement utilisée dans le monde de l’horreur, surtout au cinéma et dans les jeux vidéo grâce aux effets visuels et sonores. Nul besoin d’une grande histoire ou d’effets spéciaux complexes : un monstre surgit de nulle part tandis que la musique gronde et voilà, il y a fort à parier que le spectateur/joueur aura sursauté.

L’agression, quant à elle, est un élément central à l’horreur. Un cimetière, une pleine lune et des fantômes ne sont pas des éléments garants d’un film d’horreur, c’est-à-dire d’un film qui suscite la peur ou le dégoût! Une vie doit être menacée : il doit y avoir du danger, possiblement du mystère. C’est la base même de la pyramide de Maslow qui doit être ébranlée : la survie de l’être doit être mise en jeu. L’agression ou le risque d’agression participe à l’émotion, elle rend un stimulus significatif. Elle mène souvent à une lutte pour la survie, un désir de justice, de punition. De plus, elle peut indigner, comme la fréquente présentation d’un monstre –ou d’un homme– violant sauvagement une jeune fille innocente, la torturant pour son propre plaisir. Comme le soulignent Ron Tamborini et James Stiff (1987, p. 431-432) dans leur analyse de l’audience des films d’horreur; à la fin du film, la punition du méchant amenant une résolution satisfaisante de l’expérience est considérée comme un des trois facteurs principaux influençant l’intérêt des spectateurs envers les films d’horreur. Cette vengeance du gentil, du good guy ou de la final girl selon Carol J. Clover (1992), pourrait ainsi amener un sentiment de justice, ce qui amène le personnage principal à mener une bataille finale, imposant souvent une souffrance proportionnelle à celle apposée par le méchant précédemment. Parfois le méchant gagne, parfois il perd, mais généralement la confrontation a lieu, un peu à la manière du combat contre le « boss final » d’un jeu vidéo. Les films d’horreur peuvent avoir pour but de provoquer des réactions viscérales comme

29 Version traduite en français destinée au Québec : « Il y a des règles auxquelles on ne doit jamais déroger sous aucun prétexte pour réussir à survivre dans un film d’horreur. Pour commencer, règle numéro un : jamais de rapport(s) sexuel(s). (…) Non, jamais non, non, pas de sexe! Le sexe entraîne la mort, d’accord! »

la peur, la répulsion, l’anxiété, le dégoût, l’« appréhension terrifiée30 » ou des émotions de sympathie, voire des pensées malveillantes.

L’horreur est un genre complexe qui joue avec des frayeurs et des répugnances intemporelles, associées à des réactions directement liées à notre survie, à une évolution intellectuelle, demandant l’exercice de la pensée, ancré dans l’actualité de nos vies, de nos expériences personnelles, dans un contexte qui nous rejoint « là où ça fait mal ». Ils sont « (…) designed to prompt emotions of fear, sympathy, revulsion, dread, anxiety, or disgust. And in doing so, they also stimulate thoughts about evil in its many varieties and degrees: internal or external, limited or profound, physical or mental, natural or supernatural, conquerable or triumphant31. » (Freeland 2000, p. 3). Et bien que, ultimement, les films d’horreur représentent l’image même du mal (Freeland 2000, p. 275), il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un genre populaire où la qualité et la violence constante ne sont pas toujours au rendez-vous.

Par ailleurs, le film d’horreur n’est pas spécifiquement un film horrible, dans la mesure où les scènes d’horreur en tant que telles ne constituent qu’une part infime du processus narratif. Le rôle décisif du suspense et de l’angoisse précédant l’éclatement de la violence valorise le plus souvent un scénario d’une minceur squelettique où l’horreur n’est, à ce stade, que la résultante défoulatoire d’une ligne directrice préétablie visant à l’accomplissement d’une catharsis libératrice. (Ross 1985, p.8).

Dans le document L'horreur comparée: jeu vidéo et cinéma (Page 56-58)