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STRATEGIE ENERGIE DOMESTIQUE

Chapitre 5: L'autonomie et l'organisation des marchés ruraux

Le transfert par l'Etat vers les populations rurales de la légitimité de la gestion locale des ressources ligneuses naturelles n'implique pas de la part des ruraux et des structures sociales villageoises l’acceptation enthousiaste et sans réserve du cadeau de l'autogestion locale des ressources ligneuses.

Même une fois comprise l'invention du marché rural et levée la méfiance compréhensible des ruraux (tant de fois grugés ou déçus par des discours), les populations rurales resteront souvent en retrait dans un attentisme prudent sachant que le nouveau système réglementaire et fiscal sur le bois-énergie remet en cause le pouvoir économique dominant des commerçant-transporteurs dont le lobby est puissant et dispose d'accès aux niveaux les plus élevés de l'Etat. Elles attendront d'être rassurées quant au caractère irréversible de la réforme.

Dans ces conditions, la création des marchés ruraux du bois ne pourra résulter au Niger que d'une action volontaire et planifiée de l'Etat (par l'intermédiaire du PE II - ED) en direction des zones les plus névralgiques de la ressource où s'oriente préférentiellement la dynamique d'exploitation minière des

commerçant-transporteurs. Mais, ceci n'implique en rien pour autant, la remise en cause d'une part du principe de l'autonomie des marchés ruraux et d'autre part de la nécessité du volontariat des populations villageoises comme préalable à la création des marchés ruraux.

1. Un choix volontaire du village

Même dans le cas d'une création du marché rural à l'initiative de l'administration de

l'Environnement dans une zone névralgique du fait de sa ressource ligneuse, de son accessibilité et de son intérêt pour l'exploitation incontrôlée il est indispensable de conditionner la création du marché rural à un choix positif complètement autonome et volontaire du village concerné. Certes toutes les actions préalables à la création du marché rural viseront à la fois à:

* préciser et à expliquer le concept de marché rural aux populations villageoises de toute la zone considérée, à les convaincre qu'il peut être très intéressant pour elles de se l’approprier et de le faire fonctionner à leur profit,

* et à sélectionner au sein de la zone considérée le ou les quelques villages les plus intéressés, les plus volontaires (et donc à priori les plus intéressants) pour la création d'un marché rural,

* enfin à vérifier pour chacun des villages sélectionnés que le choix en faveur du marché rural est bien collectivement conscient, accepté par tous les groupes sociaux intra-villageois (sans opposition même d'un groupe minoritaire néanmoins susceptible d'engendrer ultérieurement un conflit).

La vérification préalable du volontariat villageois pour la création du marché rural constitue une des conditions essentielle de sa création officielle dans le cadre réglementaire nouveau. C'est avec les études préalables nécessairement simplifiées et rapides s'il s'agit de créer plusieurs centaines de marchés ruraux le seul gage fiable d'une pérennité probable des marchés ruraux.

Dans le cas d'une démarche initiée volontairement par un village pour la création d'un marché rural le volontariat ne pourra être mis en doute. Il sera néanmoins nécéssaire d'apporter aux villageois tous les éclaircissements sur les conséquences de leur choix et de leur exposer les étapes de la création du marché rural où l'administration ne jouera plus que le rôle de maître d'ouvrage délégué.

2. Une structure aussi simple, souple, transparente, au tono m e et peu coûteuse que possible

L'objectif de mettre sous autogestion locale paysanne des marchés ruraux la plus grande partie des ressources ligneuses les plus névralgiques pour l'approvisionnement urbain suppose la création rapide de multiples marchés. Pour que ces marchés ruraux puissent être viables et durables il est indispensable qu'ils soient dès leur création le fruit d'une action volontaire des villageois et qu'ils soient complètement autonomes.

Pour assurer cette viabilité et cette durabilité il est préférable que la structure locale de gestion du marché rural soit aux yeux des villageois concernés la plus simple possible et la plus transparente, la mieux adaptée aux exigences locales et aux spécificités de la société villageoise.

Ceci implique l’absence de modèle standard de structure locale de gestion et la possibilité de formes organisationnelles variées: groupements villageois (simples ou à vocation coopérative), coopératives, etc,... et le caractère adaptatif et évolutif des structures locales de gestion pour faire face aux évolutions ultérieures de la situation du marché rural.

Le marché rural est créé à l'initiative de la communauté villageoise à la suite d'un consensus général garantissant les droits d'usage de chaque groupe d'utilisateurs villageois de la forêt ou de chaque catégorie sociale du village. Les bûcherons sont les principaux acteurs du marché rural. Le choix du village est volontaire et la création du marché rural n'est pas une initiative administrative même si l'existence du marché rural est reconnue par l'administration et reçoit une consécration réglementaire par l'enregistrement

administratif. Le marché rural est constitué au niveau villageois. Les bûcherons sont des villageois et leur nombre est limité en fonction de la capacité de production de la zone et donc indirectement du quota annuel d'exploitation du marché rural.

Le marché rural est donc à la fois une association regroupant une partie des hommes du village (et/ou des femmes, rarement au Niger) réellement contrôlée par ses membres et en même temps une structure commerciale, une entreprise qui contribue par les revenus du bois à l'amélioration des conditions de vie des villageois et à la gestion viable des ressources ligneuses naturelles du terroir villageois.

3 . Des textes juridiques rassurants et protecteurs pour assurer la légitimité de la gestion locale

La légitimité nouvelle de l'autogestion locale des ressources ligneuses naturelles de la forêt villageoise dévolue au marché rural est consacrée:

* d'abord par l'Ordonnance N ° 9 2 -0 3 7 du 21 Août 1992,

* ensuite par l'agrément administratif délivré par l'administration de l'Environnement lors de la création du marché rural:

- concrétisé par l'attribution d'un quota annuel d'exploitation,

- donnant lieu à la remise à la structure locale de gestion des coupons permettant la taxation différentielle privilégiée du bois (dans le cadre de l'exploitation orientée ou contrôlée), - et la perception à la source des taxes forestières par la structure locale de gestion

L'ensemble de ces dispositions vise à rassurer les populations rurales et à lever progressivement leur méfiance, bien compréhensible, face à une réforme qui apparaissait avant sa promulgation à la majeure partie des ruraux comme "hors de l'horizon des possibles".

4 . La planification de l'extension des marchés ruraux et l'au ton om ie des ruraux: com plém entarité et implications pour les procédures de création des marchés ruraux

Comment concilier l'indispensable planification des actions de création des marchés ruraux dans les zones prioritaires les plus névralgiques au plan de la ressource ligneuse et permettre la plus large expression de la non moins nécessaire libre expression villageoise du volontariat et de l'autonomie de gestion?

Dans la phase actuelle au début de la transition entre l'exploitation incontrôlée, minière et prédatrice des ressources ligneuses et la "montée en puissance” des marchés ruraux et de la gestion viable à long terme de la ressource ligneuse naturelle, l'objectif de mise sous gestion durable des espaces les plus névralgiques de la ressource constitue évidemment une priorité.

Au cours de cette même phase actuelle, il faut lever l'attentisme des ruraux face à la réforme de la réglementation et de la taxation forestière et l'initiative publique (par l'intermédiaire du PE II -ED) planifiée par les Schémas Directeurs d'Approvisionnement des villes pour inciter à la création des marchés ruraux revêt une importance déterminante.

Mais ultérieurement, lorsque les marchés ruraux géreront l'essentiel des ressources ligneuses les plus névralgiques et contribueront de manière significative à l'approvisionnement urbain, on peut penser que la logique économique de référence de la filière bois-énergie passera de l'exploitation incontrôlée à l'exploitation orientée dans le cadre des marchés ruraux. Dans ce cas l'attentisme des ruraux rassurés sera levé et la demande réellement autonome et volontaire des populations rurales pourra s'exprimer. L'administration de l'Environnement recevra des demandes de création de marchés ruraux de la part de villages volontaires:

- situés dans des zones où ont été crées dans des villages voisins des marchés ruraux mais n'ayant pas été retenus comme prioritaires lors des phases précédentes de création des marchés ruraux à l'initiative de l'administration.

- ou situés dans des zones disposant de ressources forestières limitées mais susceptibles d'alimenter un marché rural.

- ou encore ne contrôlant que des ressources limitées ou marginales ou situés dans des zones qui ne peuvent en aucune manière être considérées comme névralgiques, du point de vue de la ressource,

Il convient donc que les procédures de création des marchés ruraux soient, avant le filtre de la vérification du volontariat villageois, temporairement encore à double entrée soit à l'initiative de l'administration

Chapitre 6: Le Marché Rural, une structure commerciale préalable à