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Dans les établissements bilingues, les cours de FLE et de DNL devraient être liés constamment pour permettre une meilleure homogénéité des enseignements. En effet, dans ce contexte, la L2 devient plus qu’une discipline scolaire, c’est également une langue d’enseignement/apprentissage, un outil de travail aux côtés de la L1. « Elle est à la fois objet d’étude et moyen d’apprentissage » (Duverger, 2009 : 84). Le contact permanent de la L1 et de la L2 donnera lieu à différents type d’alternance des langues en classe.

4.1. L’enseignement du FLE en classe bilingue

D’après Duverger (2009), les études tendent à montrer que dans beaucoup d’établissement bilingues, le cours de français suit une progression classique, souvent celle d’un manuel de FLE généraliste. Pourtant, le professeur de FLE d’une section bilingue a pour mission de préparer l’apprenant à utiliser cette langue en tant qu’objet de communication mais aussi en tant d’instrument d’apprentissage aux cotés de la langue maternelle.

« Au sein du programme de L2, il est donc important de redéfinir le rôle de la langue, en prenant en considération le fait qu’elle sert ou servira aussi à l’acquisition des savoirs dans d’autres disciplines » (Beliard & Gravé-Rousseau, 2009 : 67).

Selon Vigner (2000 cité dans Duverger, 2009 : 32), Le travail de l’enseignant de L2 devra être orienté de sorte que l’apprenant développe ce qu’il nomme :

- la flexibilité discursive, soit « la capacité à ajuster les conduites langagières aux caractéristiques de la situation, à se décentrer, expliciter, reformuler, commenter ses propres démarches intellectuelles » ;

- la maitrise des outils de la langue : « capacité à mobiliser les formes adéquates de la L2 de manière automatique dans les situations d’apprentissage, lui permettant de se concentrer pleinement sur les opérations de haut niveau ».

Il est évident que l’apprenant ne sera pas immédiatement capable de mettre en œuvre de telles stratégies, surtout dans le cas d’apprentissage au niveau débutant, mais ces compétences doivent être travaillées pour pouvoir apprendre à apprendre en L2.

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4.2. L’enseignement de la DNL en classe bilingue

L’expression « discipline non linguistique » désigne toutes les disciplines scolaires mis à part les cours de langue. Bien que baptisées non linguistiques, les DNL sont enseignées en deux langues, la L1 et la L2. Cette formulation généralement utilisée est pourtant contestée par certains chercheurs, car il est évident que toute discipline est forcément linguistique puisqu’elle nécessite l’usage des langues pour être enseignée et apprise. Selon Duverger (2008), la différence réside dans le fait que l’enseignant de langue fait une entrée par le code alors que l’enseignant de DNL effectue cette même entrée par le sens. D’ailleurs Gajo utilise une autre dénomination, les disciplines dites non linguistiques (Ddnl)52.

Il est difficile de définir précisément le rôle de l’enseignant de DNL. En effet, celui-ci va dépendre des pratiques et des finalités prévues par les différents dispositifs, d’autant plus, au sein d’une structure en démarrage qui évolue en permanence. Ainsi, pour pouvoir définir cette spécialisation au sein du métier d’enseignant, il faudrait connaitre clairement les objectifs visés, or, ceux-ci varient considérablement en fonction de chaque situation. A priori, le professeur de DNL devrait être avant tout un enseignant de discipline et son premier objectif sera que les apprenants assimilent les concepts de sa matière tout en améliorant leur maitrise de la L2 (Duverger, 2009). Cependant, dans certains établissements, comme c’est le cas pour le lycée bilingue de Niteroi, l’assimilation du contenu disciplinaire n’est pas nécessairement l’objectif principal mais il représente une manière différente d’accéder à la langue, de la pratiquer et de la rendre utile à l’acquisition de plusieurs types de savoirs.

De la même manière, les méthodes mises en place par ces enseignants diffèrent selon les établissements. D’après Duverger (2009 : 92), on peut observer plusieurs cas de figure :

- le professeur donne en L2, le cours ordinaire qu’il donnerait en L1, donc en traduisant son cours de L1 en L2 ; variante possible : il donne son cours en L1, puis le répète (entièrement ou partiellement) en L2 ;

- le professeur fait son cours ordinaire en L1 et, régulièrement, fait un cours supplémentaire entièrement en L2 ;

- le professeur fait un cours original, articulant les contenus, les méthodologies et les langues ; on est alors dans un enseignement de type « intégré », qui se décline en de

52Bien que partageant l’opinion de Laurent Gajo, nous conserverons dans cette étude l’appellation DNL, puisque c’est celle qui est le

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nombreuses variantes : ou bien on élabore à l’avance des thématiques et des contenus originaux, ou bien – cas le plus fréquent – on prend comme trame de travail le programme officiel national et, pour chaque thématique, on fait des ajouts, des incises, des ouvertures.

La troisième solution semble être la plus adaptée si l’on s’accorde avec la définition de l’enseignement bilingue53

qui ne pourrait être réduit à une somme d’enseignements monolingues (Duverger, 2009). Ainsi, les enseignants seront amenés à faire évoluer leurs pratiques pédagogiques en ce sens. En effet, l’enseignement ne peut être dispensé de la même manière que dans un dispositif classique. Comme le souligne à juste titre Beacco :

il est souhaitable d’éviter la traduction linguistique et méthodologique, d'un système dans l'autre (c'est à dire enseigner en français tout comme on enseignerait dans le cadre local ou enseigner en français exclusivement selon les modalités des systèmes éducatifs des pays francophones) car ces traductions peuvent se révéler déroutantes ou faussement séduisantes (du fait de leur seule « nouveauté ») pour les apprenants comme pour les enseignants (Beacco, 2011 : 52)

Dans le cas du lycée bilingue brésilien, les contenus des cours de SVT en français ont été extraits du programme officiel national de biologie, le reste fait l’objet de cours en langue maternelle. La progression a été conçue par le choix de thème (tels que l’environnement proche, les habitudes de vie et de santé, le développement durable au quotidien, science et éthique), perçus comme actuels et permettant une ouverture afin que les apprenants puissent bénéficier d’un apport différent et selon un point de vue nouveau.

En définitive, l’enseignant doit faire en sorte que cet apprentissage soit un plus pour les apprenants et pour sa discipline.

4.3. L’alternance des langues dans un dispositif bilingue.

Au sein d’un dispositif bilingue, au moins deux langues sont en contacts en permanence et on peut se demander comment s’articule l’alternance entre les deux. Quelle place occupe l’alternance dans un cours de DNL ? Diffère-t-elle en fonction des contenus à enseigner ? Selon Duverger (2009 : 95), il existe 3 formes d’alternance en classe :

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- la macro-alternance : d’ordre structurelle, qui concerne la programmation générale des cours ;

- la mésoalternance, sorte d’alternance séquentielle, la plus délicate sans doute à maitriser, qui se met en place tout au long de l’unité didactique ;

- la microalternance, qui se réfère aux courts passages d’une langue à l’autre, non programmable, d’ordre très conjoncturelle par conséquent.

La macroalternance est déterminée en amont, au moment de la conception du projet pédagogique de l’établissement. A ce moment-là, les contenus du programme à enseigner majoritairement en L1 ou en L2 vont être déterminés.

La mésoalternance concerne l’alternance des langues prévues par l’enseignant au cours de sa séance. Ainsi, même si la L2 est la langue de travail majoritaire, la L1 pourra être utilisée, par exemple, pour mettre en relation divers documents sur un même thème, pour approfondir un certain concept, pour avoir accès à d’autre regards, afin d’améliorer les constructions conceptuelles des apprenants.

La microalternance n’est en revanche pas prévisible, elle peut servir à la reformulation, à exprimer plus précisément le sens d’un mot. Elle est souvent présente dans les interactions entre les apprenants et l’enseignant. Les apprenants peuvent demander des précisions, faire des commentaires en L1, qui pourront par la suite être reformulés en L2 avec l’aide de l’enseignant. Il semble important que l’apprenant, se trouvant en insécurité linguistique, sache que cette alternance n’est pas proscrite car cela pourrait bloquer la communication. Afin d’éviter que les élèves ne décrochent ou ne se sentent découragés par l’ampleur de la tâche, l’enseignant doit être souple et à l’écoute.

D’après Causa (2011), l’alternance des langues, souvent mal perçue dans l’enseignement, doit être réhabilitée de manière raisonnée et justifiée. Les bénéfices de l’alternance sont visibles aussi bien du côté de la DNL, elle permet d’améliorer l’apprentissage des savoirs, que sur le plan linguistique où les deux langues mises en relation génèrent une conscience métalinguistique naturelle permettant la construction de passerelles entre les langues et d’hypothèses concernant leur fonctionnement.

Il parait important de revenir sur le fait qu’un enseignement qui se veut bilingue ne peut apparaitre comme cloisonné et constitué de deux enseignements monolingues, (Duverger, 2009 et Causa, 2011). La mise en relation des cours de FLE et de DNL se trouve ainsi au centre de la démarche.