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Chapitre 5 La démarche FOS au service de la DNL

5.5. Application de la démarche de FOS au service de la DNL

D’après Mangiante (2010), plusieurs expériences d’application de la démarche de FOS ont déjà été menées au sein d’établissements bilingues en Espagne et en Roumanie depuis 2006 et consistent à intégrer, dans une partie du cours de français, une démarche méthodologique de FOS, dans le but de mieux préparer les élèves à la compréhension des cours de DNL. Ainsi, c’est dans cette même logique que nous allons appliquer la démarche de FOS pour construire un cours précédant l’entrée en section bilingue destiné à des apprenants de collège.

La difficulté pour l’enseignant de langue sera de mettre en relation des stratégies linguistiques et langagières avec une réflexion construite sur des savoirs qui relèvent de champs scientifiques divers (Aden & Peyrot, 2009). Pour cela, l’enseignant de FLE tachera de travailler en étroite collaboration avec les enseignants des disciplines et de mettre en place une répartition des taches dans un réel dispositif de mutualisation, comme par exemple le choix d’un thème commun et de supports partagés. Il en va de même pour l’enseignant de DNL : « Un cours de DNL n’est pas et ne devrait pas être la traduction en langue étrangère d’un cours en français, mais un dispositif riche et multiperspectiviste qui ne peut émerger que dans les échanges et la collaboration entre les enseignants » (Aden & Peyrot, 2009 : 21).

Afin de réaliser l’analyse des besoins, l’enseignant de L2 examinera les documents auxquels les apprenants sont exposés en classe de DNL. Il pourra utiliser en classe des textes issus des cours de disciplines (supports documentaires utilisés par les enseignants, textes tirés de manuels scolaires, etc.). Ceci afin de préparer les apprenants à suivre les cours de DNL en les initiant aux structures linguistiques, aux actes de paroles, au lexique qu’ils seront susceptibles de rencontrer. Toutefois, le cours de L2 ne doit pas devenir un cours de DNL, mais plutôt un cours au service de la DNL, du moins en partie.

Les objectifs de la DNL (savoir, savoir-faire…) sont toujours fournis par les programmes disciplinaires. La réflexion interdisciplinaire doit donc se concentrer sur les objectifs linguistiques à atteindre et sur les compétences transversales en distinguant trois niveaux : la langue déjà maitrisée par l’apprenant, la langue de la DNL à acquérir (lexique, grammaire, type de discours…), la langue nécessaire pour accéder aux contenus de la DNL (langue des consignes expressions, causes/conséquences, hypothèses…) (Beliard & Gravé- Rousseau, 2009 : 70).

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Ainsi, Mangiante (2010 : 4) s’inspire des précédents travaux de Mangiante et Parpette (2004) pour proposer une application de la démarche de FOS aux sections bilingues :

• Identification de la demande/ commande de formation linguistique ► La réussite scolaire au sein des DNL

• Analyse des besoins des élèves

► La compréhension des cours et le respect des exigences scolaires • Collecte des données

► Documents issus des cours dispensés en français et enregistrements de cours, extraits du discours pédagogique de l’enseignant

• Analyse des données

► Le discours d’accompagnement pédagogique et le discours disciplinaire

L’analyse des besoins permettra de relever un échantillon le plus complet possible des situations de communication et d’apprentissage disciplinaires auxquels les élèves seront confrontés durant le cours de DNL : qu’auront-ils à écouter ? A dire ? Sur quels sujets ? De quelle manière ? que liront-ils ? Qu’auront-ils à écrire ? Sur quels critères seront-ils évalués ? Quelles seront les compétences langagières à privilégier ? Quelles seront les types d’interaction en classe ?

Idéalement, la collecte se fera en collaboration avec les enseignants de DNL (qui devraient être en mesure de fournir des fiches pédagogiques, des documents et supports pédagogiques utilisés en classe, notamment), par des entretiens individuels et par des observations de classes avec enregistrement vidéo durant lesquelles il serait intéressant de porter une attention particulière aux discours identifiés durant le cours de DNL.

Par exemple, les discours oraux spontanés émis par l’enseignant seront d’une grande importance pour comprendre un cours de DNL. Comme le soulignent Mangiante et Parpette (2004) :

Les discours oraux, du fait de leur spontanéité et de leur fugacité, sont rarement l’objet d’une réflexion de la part de ceux qui les produisent. Emis en même temps qu’ils sont produits, ils ne laissent aucune trace matérielle. Il est difficile d’avoir une prise de distance et donc de les connaitre vraiment. (p.52)

En outre, il existe différents formats de communication verbale auxquels les apprenants pourront être confrontés en classe. C’est ce que Beacco (2011) nomme les genres de discours. En fonction des participants, il distingue entre autres :

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- l’exposé de l’enseignant : il s’agit d’un cours magistral, l’enseignant parle, transmet un savoir et les apprenants écoutent.

- l’exposé avec interactions (cours dialogué) : durant son exposé, l’enseignant pose des questions, un élève répond et l’enseignant évalue la réponse.

- l’échange collectif : l’enseignant facilite la conversation et apporte certains éléments pour que les apprenants construisent les connaissances sur la base de l’argumentation, le savoir n’est pas directement transmis mais plutôt « négocié » par le groupe classe.

- l’exposé par un ou des élève(s) : exposition préparée à l’avance qui implique une recherche documentaire et répond à des normes discursives particulière (progression, clarté, argumentation).

Il parait pertinent d’entrainer les apprenants à communiquer en L2 en fonction des différentes formes de communication en classe. Les compétences langagières et transversales à développer seront différentes : la compréhension orale pour le cours magistral, la production pour les échanges interactifs, les structures argumentatives pour les échanges collectifs. En outre, d’après Mangiante (2010) on peut dégager trois catégories de compétences requises pour suivre un cours de DNL : les compétences de scolarisation, les compétences disciplinaires et les compétences culturelles.

Figure 8 : tableau des contenus linguistiques possibles pour chaque type de compétence(Mangiante, 2010 : 5)

Compétences requises Savoir-faire langagiers et contenus linguistiques

Compétences de scolarisation Lexique de la scolarisation (livre, cahier, chapitre, ciseaux colle…), répétition, reformulations (« c'est-à-dire, on pourrait dire, c’est comme…), consignes (ordre, défense, impératif, futur d’obligation…)…

Compétences disciplinaires Lexique spécialisé (scientifique, sciences humaines…), discours explicatif et descriptif, imparfait et présent, la causalité et la conséquence, les énoncés définitoires (verbes d’état, caractérisation, dénomination...), la chronologie, la durée et les mesures, les partitifs, les tournures passives, les participes présents à valeur causale…

Compétences culturelles L’expression de l’opinion, les adjectifs, les axiologiques, les modalisateurs (adverbes en particulier) de manière, les comparatifs et superlatifs, les tournures hypothétiques, le conditionnel…

- La compétence de scolarisation correspond à l’acquisition de savoir-faire scolaires : comprendre les consignes de travail, identifier les reformulations, saisir les références au

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contexte scolaire, les règles méthodologiques (En effet, il parait important de traiter ces modalités discursives qui sont susceptibles de freiner la compréhension des apprenants) ; - La compétence disciplinaire désigne la maitrise des savoir-faire disciplinaires : comprendre les discours disciplinaires, le lexique spécifique ;

- la compétence culturelle s’illustre par le fait que les disciplines ne sont pas traitées de la même manière selon les pays et les cultures éducatives, les langues véhiculent des visions différentes du monde.

En définitive, les discours ainsi que les compétences que les apprenants devront être capables de mettre en œuvre dans un cours de DNL sont variés et ils seront précisés par l’analyse des données collectées sur le terrain.

Le cadrage théorique a été l’occasion d’appréhender plus précisément l’utilité que peut avoir la démarche FOS dans l’enseignement bilingue. Cette démarche permettra de cibler les situations langagières que les élèves devront maitriser au sein d’un cursus bilingue, pour qu’ils soient en mesure d’acquérir des savoirs disciplinaires tout en s’enrichissant d’un autre mode de pensée à travers une langue étrangère.

Il a également permis de faire le point sur les différents éléments qui serviront d’appui pour la recherche de terrain et pour l’analyse des données qui aboutiront sur les propositions didactiques du programme de formation présenté dans la partie suivante. En admettant que sur le terrain, les actions et les constatations qui en résultent servent à prendre de la distance entre les éléments théoriques et la pratique.

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Partie 3 - Mise en œuvre de la démarche FOS