Les arrangements agroécologiques, autant que les institutions des sociétés paysannes
du Nord du Cameroun, doivent aujourd’hui tenir compte des politiques globales,
notam-ment des programmes de conservation de la biodiversité dont l’infl uence va grandissante
depuis une dizaine d’années. La mise en place d’aires protégées, bien qu’elle soit
accom-pagnée de programmes dit de développement ou de conservation « participatifs », révèle
un certain nombre de malentendus entre les aménageurs et les populations rurales. Bien
que les Duupa aient collectivement collaboré à la mise en place d’une aire protégée sur le
territoire d’anciens villages
17, la tendance réglementaire actuelle a conduit à criminaliser
toute forme de prélèvement cynégétique que ce soit dans les aires protégées ou dans les
zones banales. Les prélèvements de grands animaux (à forte valeur patrimoniale pour les
programmes de conservation) sont rares chez les Duupa et ce depuis longtemps, et un
consensus sur leur préservation pourrait être dégagé pour la réglementation du
bracon-nage sur ces espèces. La mise en place d’une politique répressive concernant toutes
for-mes de prélèvement est douloureusement ressentie car la pullulation des primates ou des
rongeurs constitue une menace pour l’agriculture qui est au cœur du fonctionnement de
la communauté. L’organisation des chasses collectives doit aujourd’hui se faire plus ou
moins clandestinement, alors qu’il est fort rare qu’elle conduise à la mise à mort d’espèces
protégées, et qu’elle joue un rôle social et symbolique important, alors même qu’on y tue
du fretin plutôt qu’on y chasse le gros. Dans ce contexte aussi, il serait utile de considérer
dans le détail les pratiques et les représentations spécifi ques du gros et du petit gibier.
16. Voir aussi MULLER 1982, pour des usages sociaux des chasses collectives assez similaires au Nigeria.
Éric GARINE 119
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