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appropriation et pérennisation de l’embocagement

Prendre en compte les réalités locales



Élaborer une stratégie et programmer les actions



L’ancrage du projet : production et diffusion élargies



Le désengagement du projet :

N

plus poussée avec l’agriculture, le souci de se dégager de règles col-lectives de gestion de l’espace jugées trop contraignantes, la volonté d’affirmer son droit sur les parcelles cultivées, forment une alchimie si complexe qu’on peut se demander s’il est vraiment possible de soutenir des dynamiques d’em-bocagement à partir d’une intervention d’origine extérieure. Embocager est un travail si lourd et contraignant, et entretenir ensuite une haie est si exigeant, qu’on ne peut imaginer de tels investissements sans que cela ne rencontre to-talement les stratégies propres des paysans. Dans ces conditions, peut-être est-il préférable de laisser les agriculteurs-éleveurs changer, à leur rythme et en fonction de leur volonté, leur façon de gérer leur espace cultivé ?

Pourtant, les mêmes exemples qui ont illustré la complexité des processus d’embocagement nous montrent aussi qu’il n’est pas vain de les soutenir. Ainsi, l’embocagement du Niumakélé aux Comores ne se serait peut-être pas fait si un projet de développement n’avait pas introduit (sans forcément le faire volontai-rement) le matériel végétal adapté aux attentes des agriculteurs. Il n’aurait pas dif-fusé ensuite sur d’autres parties de l’île si un autre projet n’en avait pas fait un de ses thèmes principaux d’intervention et n’avait pas aidé à la multiplication des boutures nécessaires. Au Fouta-Djalon, un appui à la multiplication de cer-tains plants favorise l’enrichissement des clôtures et leur extension en dehors des tapades traditionnelles, en particulier dans les bas-fonds maraîchers.

Nous nous intéresserons donc dans cette partie à la façon de soutenir la mise en place d’un programme d’appui à l’embocagement, en respectant les logiques existantes et, dans toute la mesure du possible, en s’appuyant sur elles.

Parce que le développement rural procède d’interactions, les interventions sont de plus en plus multisectorielles. On ne peut donc plus imaginer, comme cela a pu être le cas par le passé, un projet d’appui à l’embocagement propre-ment dit. On raisonnera plutôt en composante « embocagepropre-ment » à l’intérieur d’un projet de développement intégrant plusieurs thèmes d’intervention (cré-dit rural, appui aux organisations de producteurs, approvisionnement en in-trants, structuration des filières de commercialisation, intensification agricole, élevage...). Les termes « projet d’appui à l’embocagement » doivent donc être compris, ci-après, comme définissant le « volet appui à l’embocagement » d’un projet plus global et territorial. Un tel projet trouve toute sa pertinence lorsque

les populations concernées ne disposent ni du matériel végétal ligneux néces-saire à l’établissement de haies, ni des techniques de multiplication, de mise en place et d’entretien de ce matériel végétal. Développer des réponses pertinentes, adaptées et respectueuses des écosystèmes en termes d’introduction de maté-riel végétal mais aussi de formation des agriculteurs, suppose d’abord de dé-celer les ressorts qui incitent les agriculteurs à intensifier leur système de pro-duction, à intégrer davantage l’élevage à l’agriculture. La réussite de ce parcours tient ensuite à la capacité d’organiser les services apportés pour maximiser l’ef-ficience de l’intervention. En un mot, la réussite d’un projet est une question de méthodologie, c’est-à-dire un ensemble de questionnements préalables, de moyens à mobiliser, de méthodes de travail, de comportements à adapter et à ajuster en permanence au contexte. À l’opposé d’un modèle « plaqué » qui au-rait toutes les chances d’échouer, l’animation, l’accompagnement, la coordination pour rechercher les complémentarités, articuler les actions, tisser les réseaux d’ac-teurs, faire vivre des dynamiques naissantes des sociétés locales deviennent essentiels pour produire un modèle approprié et appropriable par les produc-teurs, et les habitants de l’espace concerné.

Danielle Domingue

Prendre en compte

les réalités locales

L

a conception d’un projet de développement quel qu’il soit passe par l’identification des besoins en développement de populations vivant dans un cadre géographique défini. Cette identification repose souvent sur le point de vue d’experts qui ont préparé le projet sans avoir eu la possibi-lité matérielle de confronter leurs hypothèses avec les réactions des popula-tions concernées1. Dans ces conditions, un projet, lorsqu’il se met en place, est amené à améliorer, voire à réorienter ou corriger l’approche initialement défi-nie et à « rentrer » dans la réalité paysanne sous peine d’être voué à l’échec ou d’avoir recours aux « cadeaux » pour exister artificiellement.

LE DIAGNOSTIC INITIAL

La phase initiale de diagnostic est une étape importante. Elle met en évidence certaines informations dont ne bénéficiaient pas nécessairement les identifica-teurs. Même si ce diagnostic peut être effectué dans des délais relativement

1Pour des raisons d’économie, les missions d’identification ne disposent pas du temps néces-saire pour effectuer des enquêtes approfondies auprès des populations, et pour organiser des réu-nions au cours desquelles les différents groupes d’intérêt commun pourraient exprimer leurs priorités en matière de développement.

courts, permettant ainsi un démarrage précoce des actions, il est essentiel qu’il soit poursuivi lorsque les actions ont été commencées afin d’avoir des infor-mations complémentaires facilitant, si nécessaire, une réorientation rapide du programme.

Un projet de terrain est toujours défini en fonction d’un territoire donné. Ce territoire n’est jamais homogène sur le plan des conditions physiques : les sols, la pente, l’hydrographie, l’exposition des versants marquent des contraintes et des atouts qui varient d’un endroit à l’autre. L’embocagement peut être une ré-ponse adaptée dans certaines parties du terroir et pas dans d’autres. La façon de le pratiquer peut aussi changer. D’autre part, en matière d’embocagement, la situation individuelle des unités de production compte beaucoup : certains paysans peuvent être « intéressés », alors que pour d’autres, les exigences en travail qu’un tel aménagement nécessite ne se justifient pas. Enfin, l’emboca-gement est un « chanl’emboca-gement ». Comme tout chanl’emboca-gement, il peut aller à l’en-contre des intérêts de certains, qui vont marquer leur résistance, parfois de façon indirecte et peu visible, alors qu’il en favorise d’autres, qui apparaîtront rapidement comme des interlocuteurs privilégiés. Or, pour qu’une action soit efficace, le traitement des « résistances » est tout aussi important que de satis-faire ceux qui adhèrent rapidement. Bien comprendre les ressorts du change-ment est ainsi indispensable à l’action.

Le diagnostic préalable se compose de trois parties :