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3.3.1.1 Approche de Bardeen

Dans l'approche de Bardeen, développée pour traiter le cas des jonctions tunnel planaires, le courant tunnel résulte du faible recouvrement des orbitales électroniques de la pointe (  ) et de

l'échantillon (  ). L'interaction entre la pointe et l'échantillon est négligée, et le courant tunnel

s'exprime à partir à partir de la règle d'or de Fermi:

I=2e

 

[ f  E1− f  E]∣M 2

[ f E1− f  E] E−EeV  .

Dans cette expression, les valeurs propres E ( E ) sont les énergies associées aux fonctions

propres  (  ) des états électroniques non perturbés de la pointe (de l'échantillon). Les

énergies E ( E ) sont définies relativement au niveau de Fermi de l'électrode de la pointe (de

l'échantillon). f est la fonction de Fermi-Dirac déterminant l'occupation des états électroniques dans les deux réservoirs à l'énergie E et à la température T. L'expression (3.5) assure que l'effet tunnel se

produit d'un état occupé vers un état inoccupé et la présence de la fonction δ garantit que cela se

produit de façon élastique. V est la tension de polarisation tunnel. M  représente les éléments de

matrice de la perturbation couplant les fonctions d'ondes non perturbées  et  . L'expression

obtenue par Bardeen pour ces éléments de matrice s'écrit:

( 3.3)

( 3.4)

M = 2 2me

S0dS* − *

Ils sont évalués sur une surface S0 quelconque se trouvant dans le vide entre les deux électrodes.

3.3.1.2 Modèle de Tersoff et Hamann

La difficulté principale de l'équation 3.5 est l'évaluation des éléments de matrice tunnel M  dans

une approximation plus réaliste qu'un simple modèle uni-dimensionnel. Ces éléments de matrice dépendent de la position géométrique des atomes de l'échantillon et de la pointe ainsi que des fonctions d'onde électroniques aux énergies concernées. Puisque la tâche principale du STM est de produire une image de la surface de l'échantillon, on aimerait que idéalement la DOS de la pointe

soit totalement plate autour de Ef pour pouvoir totalement la négliger. Malheureusement, malgré

certaines tentatives pour déterminer la structure de la pointe par microscope à champ ionique, field- ion microscope (FIM) avant de les utiliser dans le STM (Kuk, Silverman, and Nguyen, 1988), aussi bien la géométrie réelle de l'extrémité de la pointe que sa composition chimique ne sont pas connues, donnant une DOS inconnue.

Dans le cas de la jonction tunnel du STM constituée d'une pointe devant une surface plane, Tersoff et Hamann (Tersoff and Hamann, 1983; Tersoff and Hamann, 1985) ont pu exprimer ces éléments de matrice en assimilant la pointe à un puits de potentiel sphérique de rayon R. On peut voir cela comme une réduction de la pointe à son dernier atome (i.e. celui qui est le plus proche de la surface qui contribue principalement au courant tunnel). Les fonctions d'onde de ce puits sont donc de type

s, i.e. à symétrie sphérique. Sa densité d'état ρpte est supposé constante dans l'intervalle d'énergie

d'intérêt. La distance entre la pointe et la surface est s.

Supposons la pointe orientée suivant l'axe z tel que l'échantillon soit parallèle au plan (x,y). En appliquant les périodicités bidimensionnelles (2D) du cristal dans le plan (x,y), les états électroniques dans le vide au voisinage de la surface sont décrits par des fonctions de Bloch dans le plan (x,y) et par une fonction exponentiellement décroissante suivant z:

=k∣∣, E=

G Ck ∣ ∣,Ge k∣ ∣G ⋅r exp−k∣ ∣Gz où k∣ ∣=

∣k∣ ∣2 2

et k∣ ∣ est le vecteur d'onde (parallèle à la surface) d'un état de Bloch 2D donné. κ est donné par

une relation similaire à 3.2. G est un vecteur d'onde quelconque du réseau réciproque 2D. Les

Ck

∣ ∣, G correspondent aux coefficients apparaissant dans le développement en série de Fourier de

la partie périodique de l'état de Bloch 2D de  . Les termes k∣ ∣ correspondent à l'inverse de la

portée de l'état évanescent  à k∣ ∣, E fixés. Cela montre clairement que les états

électroniques de vecteurs d'onde k∣ ∣≠0 « tunneleront » moins bien que ceux de vecteurs k∣ ∣=0

car leur amplitude sera toujours plus faible.

Tersoff et Hamann obtiennent alors l'élément de matrice suivant: M =C r 

où Cν est une constante et r est le centre du puits de potentiel de la pointe, se trouvant à une distance

( 3.6)

( 3.7)

s+R de la surface. Ainsi tous les éléments de matrice sont proportionnels aux fonctions d'onde de la pointe, évaluées au centre de courbure du puits de potentiel. En remplaçant cette expression dans celle du courant tunnel 3.5, il vient en faisant tendre T vers 0 et pour V petit devant les travaux de sortie divisés par e:

= I

V=0.1 R2

e2 Rpte Eféch r , Ef .

Ceci montre que dans la limite de température nulle et de tensions appliquées petites devant les travaux de sortie, la conductance tunnel est proportionnel à la densité d'états de la pointe au niveau

de Fermi, évaluée au centre de son rayon de courbure. De plus, comme ∣ r ∣2

≃e2 R s

, il vient I≃e−2  s et donc la dépendance exponentielle du courant courant tunnel en fonction de la distance pointe-échantillon, expérimentalement observée, est établie également par ce modèle. Dans la limite des petites tensions, l'expression (3.9) montre également que l'image à courant

constant suit un contour iso-densité de la ILDOS autour de Ef. Tersoff et Hamann purent appliquer

avec succès ce modèle au cas de mesures STM de surface métallique comme Au(110), présentant des superstructures de grandes périodes. En effet, l'approximation de fonctions uniquement de symétrie s pour la pointe les conduit à prédire, pour des conditions de tunneling typiques, i.e. R ~

102-104 MΩ, une résolution instrumentale latérale exprimée par:

[2 −1 Rs] , qui pour Rs=15 ˚A et une valeur de κ typique vaut environ 5 ˚A .

C'est là une limitation importante de ce modèle: il ne peut pas rendre compte de la résolution atomique, expérimentalement observée sur différents types de surface, pour des conditions de tunneling typiques.

3.3.1.3 Approche de Chen

Dans une vue plus microscopique du STM, en prenant en compte une structure atomique pour la pointe, J. Chen fut capable d'expliquer par des expressions analytiques la résolution atomique d'environ 2.5 à 3 angstroms obtenue en STM (Chen, 1990) sur des surfaces métalliques comme Au(111), Al(111) ou Cu(100), en supposant des états de symétrie dZ2 pour la pointe. Cette hypothèse est basée sur le fait que les matériaux utilisés pour la pointe sont en général le tungstène (W), le platine (Pt) ou l'iridium (Ir), métaux à bandes d. Des calculs et des expériences ont montré que W, par exemple, peut former des liaisons pendantes localisées en bout de pointe. Le contour suivie par la pointe STM dans une image à courant constant n'est alors plus un contour iso-densité

de la ILDOS autour de Ef mais un contour plus abrupte faisant intervenir les dérivées des fonctions

d'onde de surface de l'échantillon. La résolution latérale prédite, en fonction de la distance pointe-échantillon, pour différentes combinaisons d'états (s, p, ou d) de pointe et d'pointe-échantillon, est tracée sur la figure 3.2 ci-dessous. La partie hachurée indique les conditions permettant d'obtenir une vraie résolution atomique, i.e. avoir une résolution latérale comparable au rayon d'un atome réel. Ce modèle a toutefois des limitations car au-delà d'une distance pointe-échantillon de 6 ˚A , le rayon apparent des atomes augmente de façon monotone au-delà de la distance interatomique typique, alors qu'expérimentalement, on constate qu'il est encore possible d'avoir la résolution atomique même pour de grandes résistances de jonction tunnel.

3.3.1.4 Dépendance I(V)

L'expression (3.9) obtenue par Tersoff et Hamann n'est valable que dans la limite de tensions négligeable devant le travail de sortie. Il est souhaitable de disposer d'une expression du courant tunnel valable dans une gamme de tensions plus élevées. Nous présentons ici les résultats des développements basés sur le travail de Selloni et al. (Selloni et al., 1985) et Lang (Lang, 1986). L'expression généralisée proposée pour le courant tunnel est:

IV , T , r , s ∝

−∞ ∞

dEéch E , r , s pte E−eV  D  E , V , s [ f  E−eV − f  E ]

où r=(x,y) caractérise la position de la pointe relativement à l'échantillon et D(E,V,s) est un facteur de transmission de la barrière, dépendant de l'énergie E, de la tension V et de la distance pointe-échantillon s et T est la température. Cette expression est une simplification drastique du problème posé et élimine, par exemple, la dépendance en k∣ ∣ du facteur de transmission (voir plus loin chap. 3.3.4). C'est une expression cependant très largement utilisée permettant de décrire qualitativement la dépendance du courant tunnel avec la tension. En utilisant alors l'expression (3.25) présentée au chapitre 3.3.4 avec E=W et s=t, dont la validité est assez générale (Wolf, 1985), on a

D E , V , s=exp

[

−2

2m

2 s

 −eV

2 −E

]

où  est donné par (3.24).

En supposant alors que D(E,V,s) varie peu sur les énergies sondées (voir chap. 3.3.4 pour le Fig 3.2: Résolution latérale en fonction de la distance pointe-échantillon. Pour différentes combinaisons d'états (s, p, ou d) de pointe et d'échantillon, la résolution latérale prédite est tracée en fonction de la distance pointe-échantillon. La partie hachurée indique les conditions permettant d'obtenir une vraie résolution atomique, i.e. avoir une résolution latérale comparable au rayon d'un atome réel. La distance minimale est limitée par le contact mécanique (environ 2.5 ˚A ), donc la plupart des images avec une vraie résolution atomique

sont obtenues avec des états de pointe pz ou dZ2 (d'après Chen, 1990).

( 3.10)

domaine de validité de cette approximation), et en supposant que la densité d'états de la pointe est constante sur cette gamme d'énergie, il vient:

IV ,T , r , s ∝pte EF D EF, V , s

−∞ ∞

dEéch E , r , s[ f  E−eV − f  E ] .

En définissant g  E =−∂ f  E 

∂ E et en dérivant (3.12) sous l'intégrale par rapport à V,

dI

dV V , T , r , s∝−∞∞

dEéch E , r , s  g  E −eV  .

La fonction g(E-eV) est une courbe piquée autour de E=eV présentant un élargissement de type

gaussien et une largeur à mi-hauteur valant ∆(T) = 3.2kT. Ceci détermine la résolution en énergie

des mesures spectroscopiques: ∆(300K) ~ 80meV et (5K) ~ 1.5meV . Lorsque T tend vers 0, g(E)

tend vers δ(E), la distribution de Dirac, et on a

dI

dV V , T =0, r , s∝écheV , r , s .

Ceci montre donc, dans le cadre des hypothèses énoncées plus haut, que la mesure de dI/dV à une énergie V donne accès à la densité locale d'états de surface de l'échantillon à cette même énergie. De plus en partant de l'expression (3.12) en utilisant l'expression (3.11) du coefficient de transmission, on peut exprimer s en fonction des termes restants:

sr , I ,V ∝ 1 2

2m  ℏ2 ln

0 eV dEéch E , r ∗pte EFI

Cette expression montre que dans les conditions d'imagerie à courant constant (I et V fixés), et pour un plan atomique, la corrugation, i.e. la variation de distance pointe-échantillon s(r) lorsque la

pointe est balayée sur la surface, suit un contour iso-densité de la LDOS ρéch(E,r) intégrée entre 0 et

eV (ILDOS).