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Apprendre en enseignant : « quand on parle on apprend beaucoup »!

CHAPITRE 3 : LA VIE CACHÉE D’UN GROUPE HYPER COMPÉTITIF : INTÉGRATION,

3.2 L’apprentissage collaboratif : contraignant mais enrichissant!

3.2.1 Apprendre en enseignant : « quand on parle on apprend beaucoup »!

Les étudiants ont apprécié positivement l’activité d’apprentissage réalisée en « casse-tête d’expertise ». Cette technique de coopération amène chacun des étudiants à partager avec d’autres l’information qu’il détient pour arriver à maîtriser l’ensemble des notions à assimiler. Les exercices effectués selon ce principe requéraient de la part des étudiants d’apprendre un certain nombre de notions pour ensuite les enseigner à leurs équipiers. En effectuant l’exercice de verbalisation de celles-ci, ils ont pu remarquer que le fait d’enseigner aux autres consolidait leur propre apprentissage. La verbalisation des informations stimule la mémoire, accroît le niveau de compréhension et nécessite une structuration du contenu présenté, comme le confirment des études dans ce domaine.19

« J’ai appris beaucoup en l’expliquant aux autres. Le fait de l’expliquer aux autres faisait que j’apprenais au moins ce que je disais. Ce fut pertinent pour moi. » (12-1)

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« En parlant aux autres, il fallait que je le lise et que je le comprenne mais souvent quand c’était les autres qui me l’expliquaient, je le comprenais moins. En l’expliquant, je comprenais. » (10 -1)

En plus de faciliter la compréhension, l’effort investi pour traiter l’information et la partager avec les coéquipiers porte fruit. Il faut non seulement la traduire dans ses propres mots et l’expliquer aux autres mais également faire l’effort d’écouter ses coéquipiers, ce qui constitue en soi un apprentissage significatif. En outre, le fait de devoir expliquer une notion oblige à la décortiquer et à s’assurer de bien la comprendre soi-même avant de la présenter à d’autres. En discutant par la suite avec leurs équipiers, ils finissent par développer une compréhension commune des notions à l’étude. La discussion permet d’approfondir le sujet traité et de partager les interrogations suscitées par l’objet d’apprentissage. Certains conçoivent que cela soit même plus efficace qu’un exposé magistral puisque cela les force à demeurer plus actifs, en se questionnant davantage notamment.

« Oui, pour être certain que tout le monde comprenait la même chose, sinon chacun aurait compris d’une façon différente. (…) quand quelqu’un posait une question, moi j’étais obligé de clarifier, on en discutait et on pouvait se rendre compte si tous avaient bien compris. (…) C’est pas mal bon pour voir si quelqu’un a compris, en lui demandant de l’exprimer, c’est mieux que seulement lire les définitions. (…) J’ai aimé cette façon, c’est certain que le professeur peut clarifier en faisant un survol, si je peux dire ou seulement faire une vérification pour voir si on a bien compris. Ce que j’ai aimé, c’est qu’on comprend mieux et on s’en souvient plus facilement quand on écrit et dit les choses. Nous, on écrivait, de façon individuelle, nos définitions en arrière de la feuille et on comparait, alors on avait une bonne idée parce que souvent les définitions sont un peu compliquées, ce ne sont pas des mots qu’on emploie souvent. La comparaison des définitions de chacun nous permettait de voir si on avait bien compris. (…) Oui, quelquefois il y avait des définitions qui étaient difficiles, mais comme la personne avait eu une discussion avec son équipe auparavant, on se disait qu’elle avait sûrement clarifié des choses avec ses partenaires et qu’elle avait compris. » (4-1-2)

« Cela nous a aidés à mieux comprendre, je pense. En étant obligé de travailler avec, on a été obligé de comprendre, qu’on le veuille ou non, on a été obligé de travailler. Un exposé au tableau est moins efficace si on est moins attentif, on l’oublie plus vite. Alors que l’interaction nous permet de mieux saisir. (…) Pour moi, la seule difficulté ce sont les mots nouveaux à décortiquer, des mots qu’on ne connaît pas. Il faut d’abord les apprendre, chercher la définition, sinon ça devient du “par cœur”. Ce n’est pas une vraie compréhension. Pour moi la seule difficulté, ce sont les mots nouveaux, sinon tout va bien. Quand les mots sont difficiles, on

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est porté à les mémoriser, on est certain de ne pas se tromper. Mais je serai moins à l’aise pour l’expliquer. On comprend plus quand on se pose des questions. » (4-3)

En prime, certains avouent avoir trouvé cette manière de travailler moins « plate ». Face à des étudiants peu motivés par le cours, cela constitue certes un avantage. En plus de dégager le professeur de devoir porter tout le poids de l’exposé des notions inhérentes au cours, les étudiants qui ont été séduits par l’approche estiment mieux retenir l’information de cette façon. Par contre, lorsque des coéquipiers manifestent de la difficulté à transmettre leur part d’informations, cette carence est perçue comme étant légèrement problématique dans le contexte mais non pas comme une lacune insurmontable. Même lorsqu’on se perçoit comme une personne préférant travailler seule, l’on daigne reconnaître un intérêt à la méthode.

« J’ai trouvé çà effectivement moins plate, on voit l’effort des professeurs de rendre çà interactif, cela aurait été facile pour (le prof) d’être en avant, de nous donner carrément les feuilles, dire apprenez-les chez vous, mais j’ai trouvé çà intéressant dans le sens que cela nous fait placoter, parler, quand on enseigne on apprend beaucoup, alors la notion que moi j’ai eue à enseigner, probablement que je la retiens plus que ce que les autres m’ont appris, mais c’est certain que cette notion-là je la comprends mieux que les autres. Ensuite, ce qui était difficile des fois, comme il y en a qui font des travaux plus ou moins bien, il y en a qui explique plus ou moins bien, mais cela fait partie de la “game”, je me dis que c’est à nous de poser des questions si on comprend mal le sujet en question, mais j’ai trouvé çà bien. Je ne ferais pas cela dans tous les cours, parce que c’est plus long que lire par soi-même, moi j’aime çà être efficace, je n’aurais pas détesté apprendre du texte chez nous, mais je ne suis pas certaine que tout le monde l’aurait fait, d’un autre coté, c’est moins bien. Ce qu’un professeur essaie, c’est d’aller chercher la plus grande quantité de personnes, mais moi personnellement j’aime bien travailler seul. Je travaille en équipe en Techniques policières, mais j’ai bien aimé cela quand même de le faire en équipe. » (6A-1,2)

Certains étudiants ont même saisi spontanément que l’un des objectifs de la stratégie d’apprentissage employée est de rendre l’étudiant plus actif au cours du processus d’apprentissage en mettant à contribution tous ses sens.

« (…) quand on le dit c’est différent que d’écrire, cela fait appel à un sens qu’on n’utilise jamais en classe, habituellement, il faut mémoriser. Là on utilise tout, les oreilles, la voix, les yeux. Et moi j’ai toujours mieux appris en enseignant. Moi cela m’aide beaucoup quand j’enseigne, on apprend beaucoup en enseignant. C’est là qu’on se rend compte si on

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comprend la signification de tout, c’est peut-être pour çà qu’on réfère après parce qu’on n’est pas certain d’une partie quelconque, quand on la verbalise. » (6A-6)

Évidemment, cette forme de travail ne peut pas plaire à tous : certains étudiants insistent pour affirmer que le fait de travailler seul demeure plus efficace tout en soulevant des doutes sur la compétence de leurs équipiers à effectuer cette tâche. Cette difficulté à faire confiance aux coéquipiers se situe au cœur des malaises soulevés par le travail en équipe.

« On aurait pu le faire seul ou dans une même équipe. Certaines personnes n’ont pas été capables de nous expliquer les définitions. Peut-être nous donner plus de consignes. » (5-1)