pour adimensionner la variable d´ependante d’int´erˆet φ. A priori π0 = F(φ1, φ2) = F mes(φ1),mes(φ2)
= F φ1
Φ1
, φ2 Φ2
ne peut d´ependre d’aucun de ses arguments, donc
π0 = constante ⇐⇒ φ = π0 φa10 φb20 . (5.35) Cas avec une grandeur fondamentale et param`etre de contrˆole seulement
Certains mod`elestr`es simplesn’impliquent qu’une grandeur fondamentale et param`etre de contrˆoleφ1, qui doit forc´ement ˆetre homog`ene `a la variable d´ependante d’int´erˆetφ. Le groupement qui permet de l’adimensionner est alors, tout simplement,
π0 = φ
φ1 . (5.36)
En raisonnant comme ci-dessus mais avecF fonction d’une seule variable on montre que, dans un tel mod`ele,
π0 = constante ⇐⇒ φ = π0 φ1 . (5.37)
Autres cas particuliers
On peut envisager divers autres cas particuliers, par exemple, avec deux grandeurs fondamen-tales mais trois param`etres de contrˆole, une grandeur fondamentale et deux param`etres de contrˆole, etc... Le lecteur est invit´e `a r´esoudre ces cas particuliers par lui-mˆeme, avec la m´ethodologie d´evelopp´ee ci-dessus, que l’on peut attribuer `a Vaschy et Buckingham. De tels cas particuliers sont abord´es dans la question 2 du probl`eme4.7ainsi que dans la section 5.3 ci-apr`es.
Nous allons maintenant, dans les deux sections qui suivent, appliquer la m´ethodologie de Vaschy et Buckingham `a deux probl`emes assez diff´erents.
5.2 Application : mod´ elisation d’un probl` eme d’impact ´ elastique
Dans cette section inspir´ee de Sonin (2001), on ´etudie `a l’aide de l’analyse dimensionnelle un probl`eme m´ecanique complexe, `a savoir, celui de l’impact d’une boule ´elastique lanc´ee sur une surface plane. Le ph´enom`ene ´etudi´e est repr´esent´e sur la figure5.1. Une boule de diam`etre D constitu´ee d’un mat´eriau ´elastique homog`ene est enduite de peinture fraiche, et lanc´ee `a la vitesse V sur une surface plane tr`es rigide. Elle s’ ´ecrase sur cette surface en y laissant, par d´eformation, une trace circulaire de diam`etre d, avant de rebondir. On se pose la question de la loi qui donneden fonction de tous les param`etres du contrˆole du probl`eme.
5.2.1 Mise en place du mod`ele : recensement des grandeurs physiques
En se restreignant au cas o`u la boule est lanc´ee perpendiculairement `a la surface plane, d’un point de vue inertie les seules grandeurs pertinentes sont la vitesseV de la boule avant son impact, et sa massem. Cette derni`ere
m = 1
6πρD3 (5.38)
n’est pas ind´ependante de la masse volumique ρ du mat´eriau qui constitue la boule, et de son diam`etreD. De plus l’´elasticit´e de la boule joue un rˆole, puisque, si elle ´etait parfaitement rigide, l’impact serait ponctuel. Comme on l’a vu dans le chapitre4, en faisant l’hypoth`ese simple que le mat´eriau de la boule est isotrope et travaille en r´eponse lin´eaire, on peut caract´eriser son ´elasticit´e par son module d’Young E et son coefficient de Poisson ν. `A cause de la relation (5.38), on peut d´ecider de choisir comme param`etres de contrˆole de ce probl`eme D, ρ, V, E et ν. La grandeur d´ependante est bien sˆur le diam`etre de la zone d’impact d.
5.2.2 Commentaire g´en´eral
Il faut r´ealiser que cette phase qui consiste `a recenser les param`etres de contrˆole du probl`eme, et, dans une moindre mesure, la grandeur d´ependante, est tr`es d´elicate car elle n´ecessite une bonne connaissance de la physique du probl`eme. En effet, si cette phase est mal men´ee elle conduit `a une liste de param`etres de contrˆole soit trop longue9 soit trop courte10. Dans ces deux cas, liste trop longue ou trop courte, l’analyse dimensionnelle sera condamn´ee `a donner des r´esultats peu pertinents, voire, aucun r´esultat pertinent...
5.2.3 Etude et r´´ eduction des param`etres de contrˆole
Construisons la matrice des exposants des dimensions des param`etres de contrˆole :
D ρ V E ν
m 0 1 0 1 0
` 1 −3 1 −1 0 t 0 0 −1 −2 0
.
On voit que l’on est dans la situationstandardo`u les trois premi`eres grandeurs sont dimension-nellement ind´ependantes, la matrice form´ee par les trois premi`eres colonnes ´etant de d´eterminant 1, donc inversible. Le groupementπ4 permettant d’adimensionnerE se construit en calculant les ex-posants a4, b4, c4 tels que
E ≡ Da4 ρb4 Vc4 .
En extrayant les exposants de m, ` et tdans cette ´equation aux dimensions, de fa¸con analogue `a ce qui a ´et´e fait pour passer des ´equations (5.24) `a (5.26) lorsque l’on a ´etablit le th´eor`eme π, il vient
0 + b4 + 0 = 1
a4 − 3b4 + c4 = −1
0 + 0 − c4 = −2
. (5.39)
Ce syst`eme se r´esoud pour donner a4 = 0, b4= 1, c4= 2, d’o`u π4 = E
ρV2 . (5.40)
Le groupementπ5 permettant d’adimensionner ν est, trivialement,
π5 = ν . (5.41)
9. Ce serait le cas ici si on avait rajout´e l’acc´el´eration de la pesanteur g, ou la viscosit´e de l’air η dans les param`etres de contrˆole. Si le lancer de la boule se fait suffisamment pr`es de la surface, et avec une vitesseV pas trop petite, la pesanteur ne jouera pas, et les frottements visqueux de l’air ambiant non plus...
10. Ce serait le cas ici si on avait oubli´e la masse volumiqueρpar exemple.
5.2. Application : mod´elisation d’un probl`eme d’impact ´elastique 109
Fig. 5.1 – Ph´enom`ene d’impact ´elastique. Gauche : situation initiale, lancer de la boule enduite de peinture `a une vitesseV contrˆol´ee en direction de la surface plane rigide.Droite :apr`es impact et rebond, une tache de peinture de diam`etredest laiss´ee sur cette surface.
5.2.4 Cons´equence : propri´et´es de similitude
De fa¸con directe11le groupement adimensionnel associ´e `a la grandeur d´ependante dest π0 = d
D . La relation g´en´erale
d = f(D, ρ, V, E, ν) (5.42)
peut donc, d’apr`es le th´eor`emeπ, ˆetre mise sous la forme r´eduite d
D = F E ρV2, ν
. (5.43)
D’un point de vue physique, la relation (5.43) s’interpr`ete ainsi :
• le diam`etre de la zone d’impactddoit toujours ˆetre compar´e au diam`etre de la boule D;
• d’autre part, cet impact ´elastique n’est pas contrˆol´e de fa¸con ind´ependante par l’´elasticit´e et l’inertie, mais par la combinaison π4 = E/(ρV2) des param`etres qui caract´erisent ces ph´enom`enes ; ce rapportπ4 mesure pr´ecis´ement leur comp´etition.
Ainsi, on peut d´eclarersimilairesou se correspondant par similitudedes exp´eriences qui se feraient l’une avec une boule de diam`etre D1, masse volumique ρ1, lanc´ee `a la vitesse V1, l’autre avec une boule de diam`etre D2, masse volumique ρ2, lanc´ee `a la vitesse V2, pourvu que les param`etres de contrˆole adimensionnels soient les mˆemes entre les deux exp´eriences, i.e.
pourvu que
π4 = E1
ρ1V12 = E2
ρ2V22 , (5.44)
et que les boules aient le mˆeme coefficient de Poisson ν. Ceci permet d’envisager, pour ´etudier le cas d’une grosse boule, de diam`etreD1, une exp´erience analogique, `a l’aide d’une boule beaucoup plus petite, de diam`etre D2; si les conditions de similitude ´enonc´ees ci-dessus sont v´erifi´ees, on peut pr´edire que
d1 = d2
D1 D2 .
11. On pourrait aussi, manquant d’intuition, ´ecrire un syst`eme du type (5.39).
Mat´eriaux E [MPa] ρ[kg/m3] V [m/s] ν E/(ρV2) d/D Symbole
Alumine 366000 3960 43 0,22 50133 0,15 •
366000 3960 59 0,22 26937 0,17 •
366000 3960 77 0,22 15511 0,19 •
Aluminium 69000 2705 80 0,33 3973 0,25 ◦
69000 2705 126 0,33 1608 0,30 ◦
69000 2705 345 0,33 215 0,45 ◦
Caoutchouc 3,93 1060 5 0,47 127 0,50 ?
3,93 1060 7 0,47 79 0,55 ?
3,93 1060 12 0,47 24 0,70 ?
Tab. 5.2 – Table tir´ee deSonin(2001), pr´esentant des exp´eriences num´eriques d’impact ´elastique, ainsi que les symboles correspondant sur les figures5.2et5.3.
(a) (b)
Fig. 5.2 – Etude de l’influence du module d’Young´ (a)ou de la vitesse d’impact(b)sur la taille r´eduite de la zone impact´ee, `a partir des donn´ees de la table5.2.
5.2.5 V´erification `a l’aide d’exp´eriences num´eriques - Courbe maˆıtresse
Des exp´eriences num´eriques `a l’aide d’un code ´el´ements finis, r´ealis´ees par Bathe12 en 2001, et rapport´ees par Sonin (2001), conduisent `a la table 5.2. De grandes gammes de valeurs sont explor´ees, et il est clair que, sans l’analyse dimensionnelle, qui a conduit `a l’insertion des derni`eres colonnes montrantE/(ρV2) etd/D, on aurait du mal `a d´egager des lois g´en´erales quantitatives. De fait, si on veut, ignorant l’analyse dimensionnelle, ´etudier l’influence deE ou V sur d, on aboutit aux figures 5.2, qui pr´esentent des tendances que l’on peut expliquer physiquement, mais, aussi, une grande dispersion.
En appliquant l’analyse dimensionnelle, on est pouss´e `a repr´esenter le graphe ded/D en fonc-tion de π4 = E/(ρV2), ce qui aboutit `a la figure 5.3. Tous les points dispers´es des figures 5.2 s’alignent sur une courbe unique que l’on appelle en g´en´eral, en analyse dimensionnelle, courbe maˆıtresse . Ce fait prouve que le coefficient de Poisson, pourvu qu’il reste dans l’intervalle [0,22,0,47], a une influence n´egligeable : grˆace `a ces exp´eriences on peut affiner le r´esultat (5.43) de l’analyse dimensionnelle et affirmer que, pour ν ∈[0,22 ,0,47],
d
D = f E ρV2
, (5.45)
fonction visible sur la figure 5.3, pour laquelle on pourrait proposer une formule quantitative par
12. Ing´enieur-docteur am´ericain travaillant au MIT.