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Application aux données OMEGA

On a vu en section 2.1.3.3 qu’OMEGA ne peut pas mesurer les températures supé-rieures à ~190 K. Les latitudes polaires (> 60°) sont très frequemment couverte de glace carbonique et/ou de glace d’eau dont les températures respectives sont ~150 K et 180 -200 K (selon la pression atmosphérique). De plus, les inerties thermique des glaces sont très élévées (> 2000 J.K−1.m−2.s−1/2), ce qui augmente fortement l’inertie thermique d’ensemble d’un régolite gelé. Nous voulons caractériser les matériaux libres de toute glace. Nous nous limitons aux latitudes inférieures à 60° et sélectionnons seulement les données qui montrent une absorption à 1.5 µm caractéristique de la glace d’eau inférieure à 3% . Pour limites l’incertitude relative à la correction de la contribution diffusive des aérosols qui augmente aux grands angles de phase, nous ne sélectionnons que les données enregistrées au nadir et à angles d’émergence faibles (<15 °). Les données avec un angle d’incidence supérieur à 75 ° sont également écartées. La figure 2.11 montre le rapport signal-sur-bruit (RSB) des données (voir section2.1.2.3). On choisit un seuil de 30 pour le RSB, ce qui limite l’erreur sur la température due au bruit intrumental à 0.5 K (ce qui correspond à ~98 % des données comme montré sur la figure2.11b). Comme on le voit sur la figure2.11a), les données de faible RSB sont également celles qui ont un fort angle d’incidence.

On écarte également les observations lors de la tempête globale de poussière de l’an-née 28 durant laquelle l’équilibre radiatif est fortement modifié et les températures simu-lées par le modèle sont moins fiables (en tout cas leur accord avec celles de TES est très dégradé). En considérant que les observations OMEGA en mode 16 pixels n’augmentent que très peu la couverture globale tout en augmentant significativement le nombre de pixels du jeu de données et donc le temps de calcul nécessaire pour trouver les inerties thermique apparentes, nous avons exclu les cubes de 16 pixels de largeur de notre analyse. Finalement, nous n’avons pas inclus les cubes enregistrés post-orbite 8485, après laquelle la voie C a cessé de fonctionner. Je n’ai développé une chaîne de traitement des données spécifique aux cubes enregistrés après cette orbite que plus tard durant ma thèse (après la production des résultats présentés dans ce chapitre). La température de ~5000 orbites en-registrées avec seulement la voie L (post-8485 et observations de nuit) peuvent désormais être analysés de la même manière (un exemple est donné dans le chapitre4).

L’ensemble des données séléctionné comporte 4860 cubes OMEGA soit environ 300 millions de pixels ce qui représente ~45% du jeu de données total d’OMEGA. Ces don-nées couvrent quatre andon-nées martiennes complètes (fin 26 à 30) et leur couverture spatiale est montrée sur la figure3.24.

3.3.2 Validation de la méthode

Dans un premier temps, nous avons réalisé une comparaison des températures me-surées par OMEGA avec celle prédites par le modèle. Cette comparaison s’est effectuée sur l’ensemble des données sélectionnées et a pour but de tester la validité des tempé-ratures mesurées par OMEGA (prises avec différentes conditions de calibration à bord, cfJouglet et al.(2009) et section 2.1.2.3). Afin de limiter le temps de calcul nécessaire, nous avons effectué cette comparaison à basse résolution : les cinq colonnes au milieu de

FIGURE3.24 – Couverture spatiale du jeu de données OMEGA séléctionné

chaque cube sont moyennées et un point est extrait tous les 0.3° de latitude, comme illus-tré sur la figure3.25a. On passe ainsi d’environ 50 000 à 300 pixels par cube. Les valeurs d’albédo, de température, de pentes locales et d’azimuths sont extraites en ces points. Les températures extraites sont comparées à des températures simulées avec les paramètres extraits des cubes OMEGA (albédo, pente, heure locale, saison) et en utilisant la carte d’inertie thermique TES de nuit (Putzig and Mellon, 2007a), référence dans la commu-nauté. Un exemple de comparaison est montré en figure3.25b avec le profil d’inertie TES en figure3.25c. Durant ces observations, le soleil est à la verticale au dessus de la latitude -14.9° et la décroissance des températures avec la latitude est due à une incidence solaire qui augmente. Les variations de température vues par OMEGA et simulées avec l’inertie thermique TES sont très semblables, reflétant les même contrastes d’inertie thermique de la surface.

Nous effectuons la même comparaison que sur la figure3.25b pour l’ensemble du jeu de données séléctionné. Les ∆T= TO M EG A− Tmodele` moyennés par orbite sont représen-tés sur la figure3.26et sont comparés avec les valeurs de calibration à bord de la voie L (mesuré au début de chaque orbite) et l’heure locale de l’orbite. Une comparaison visuelle entre les distributions du haut et du milieu de la figure3.26indique que certains ∆T or-bitaux sont corrélés à des brèves excursions de niveau de calibration en vol (par exemple durant l’année 27 entre 140 et 180° de longitude solaire, deux brèves excursion de ca-libration impactent beaucoup les température mesurées). Les fonction instrumentales de transfert calculées par Denis Jouglet et Yves Langevin pour les périodes non-nominales ne semblent donc pas être satisfaisantes pour ces brèves excursions. Les données cor-respondant à ces excursions qui semblent impacter la température mesurée seront donc enlevées de notre jeu de données (~400 orbites). A contrario, la majeure partie des pé-riodes d’OBC non-nominales ne présentent pas de valeurs de température particulières, indiquant que la correction deJouglet et al.(2009) est robuste, ce qui permet l’utilisation de la majeure partie des données non-nominales de la voie L d’OMEGA.

La plupart des variations de ∆T peuvent être interprétés en termes physiques comme signature de la surface martienne et de ses hétérogénéités. On voit en effet que les va-riations de ∆T sont systématiquement corrélées avec les heures locales au moment de

FIGURE 3.25 – Exemple de réduction de la résolution des données. a) Trace au sol et topographie des cubes de l’orbite 2353. Les 5 colonnes centrales à partir desquelles les profils latitudinaux sont extraits sont représentées en marron. b) Comparaison des tempé-ratures simulées avec les tempétempé-ratures OMEGA pour 262 points espacés d’environ 0.3° de latitude. Les pointillés indiquent les transitions entre les cubes successifs. c) Profil la-titudinal d’inertie thermique utilisé pour les simulations de températures dans b). Pour cet exemple, ∆T= TO M EG A− Tmodele` ≈ −4.3 K.

l’orbite. Les températures mesurées par OMEGA sont plus faibles que celles simulées lorsque les observations ont été réalisées l’après-midi et plus grandes lorsque les observa-tions ont lieu le matin : la variable ∆T croît quand l’heure locale décroît. Etant donné que les températures OMEGA sont comparées à des températures simulées avec l’inertie ther-mique obtenue à partir des données de TES à 2 H, cette variation est potentiellement le signe des hétérogénéités de la surface martienne (de manière équivalente à une variation diurne de l’inertie thermique apparente comme sur la figure3.23). S’ajoute une variation saisonnière : l’amplitude des variations diurne est maximale vers 90° et minimale vers 250° de longitude solaire. Une combinaison des effets suivants est possible :

— les hétérogénéités des terrains observés selon la saison ne sont pas les mêmes. Les orbites observent généralement une soixantaine de degré de latitude et l’hé-misphère nord (respectivement sud) est plus observée à la longitude solaire 90° (respectivement 270°), durant l’été (voir section2.1.2).

FIGURE3.26 – Moyennes orbitales en fonction de la longitude solaire pour plusieurs an-nées indiquées par différentes couleurs. Les différences entre les températures mesurées pas OMEGA et celle simulées par le modèle sont montrées en haut, les niveaux de cali-bration en vol de la voie L (« OBC », en unités digitales) au milieu et les heures locales en bas. La longitude solaire 270°, correspondant à l’été de l’hémisphère sud, est représentée pas une ligne pointillée sur les trois graphiques.

Globalement, les ∆T sont faibles (moyenne globale de -2.35 K), ce qui reflète un bon accord entre les température TES et OMEGA, par comparaison avec le biais systé-matique de 3 à 6 K (au maximum, selon la température) qui affecte potentiellement les températures d’OMEGA. L’accord est moins bon (moyenne globale de -2.90 K) lorsque les températures simulées le sont avec les valeurs d’inertie thermique de la carte TES de jour, qui est considérée comme moins fiable que celle de nuit (Putzig and Mellon,2007a). Les fonctions instrumentales de transfert calculées empiriquement pour les orbites de

niveau de calibration non-nominal semblent donc être dans leur grande majorité robustes. Ce premier aperçu du signal des températures mesurées par OMEGA laisse augurer des valeurs de propriétés thermo-physiques comparables à celles de référence utilisées par la communauté et comporte probablement la signature des hétérogénéités de la surface de Mars avec un échantillonage temporel sans précédent.