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Chapitre 2 : Marché et historique de la réglementation

B. Historique de la réglementation

4. AP-LSFin

L’historique de la réglementation des produits structurés ne devrait pas s’arrêter à l’art.

5 LPCC. La réglementation financière est en constante évolution et celle-ci affectera le régime juridique des produits structurés.

En date du 27 juin 2014, le Département fédéral des finances a publié deux avant-projets intitulés Loi fédérale sur les services financiers (LSFin) (ci-après « AP-LSFin ») et Loi fédérale sur les établissements financiers (LEFin) (ci-après « AP-LEFin ») accompagnés d’un rapport explicatif216. Ces avant-projets avaient été précédés, voire en partie annoncés, par la publication en février 2013, d’un rapport préalable du Département fédéral des finances sur les éléments principaux d’une telle réglementation future217. La consultation sur ces projets a eu lieu dans le second semestre de 2014 et les résultats de celle-ci rendus publics en mars 2015218.

212 LOMBARDINI (2012), p. 348.

213 FF 2012 7601.

214 Message LPCC du 2 mars 2012, FF 2012 p. 3388 ss.

215 Cf. infra Partie I Chapitre 3 B.

216 DFF, Rapport LSFin et LEFin (2014).

217 DFF, Loi sur les services financiers (LSFin). Eléments principaux d'une réglementation possible (2013) ; cf. EMMENEGGER/GOOD (2013) ; THEVENOZ (2012).

218 Le 13 mars 205, les résultats de la consultation sur les avant-projets de LSFin et de LEFin de même que les premiers arbitrages pris par le Conseil fédéral ont été rendus publics. En particulier, le Conseil fédéral a renoncé à l’abrogation de LB de même qu’au maintien de ses propositions initiales en matière de facilitation des voix de droit pour les investisseurs.

67 En très grand résumé, l’AP-LEFin a pour objectif de codifier de manière transversale et dans un seul texte législatif le statut des intermédiaires financiers dont l’activité est soumise à autorisation et surveillancce prudentielle. Cette loi couvrirait les banques, actuellement régies par la LB, les « maisons de titres », actuels négociants en valeurs mobilières selon la LBVM, les représentations et succursales de banques et maisons de titres étrangers en Suisse dont le régime est décrit pour partie dans la LBVM et la LB ainsi que dans l’OBE-FINMA et l’OBVM219, les directions de fonds de placement et leurs gestionnaires dont le régime résulte de la LPCC mais également, et ce serait-là une première en Suisse, les gestionnaires de fortune indépendants qui ne gèrent pas de placements collectifs de capitaux. L’AP-LEFin fixerait « les exigences régissant l’activité des établissements financiers » susmentionnés (art. 1 al. 1 AP-LEFin), soit les conditions d’autorisation, les principes devant guider l’activité et l’organisation de ces établissements ainsi que les dispositions applicables à l’assainissement et l’insolvabilité des banques, directions de fonds et maisons de titres.

L’AP-LSFin vise, quant à lui, à « fixer des conditions comparables pour la fourniture des services financiers offerts par les différents prestataires » (art. 1 al. 1 AP-LSFin), en d’autres termes à réglementer de manière transversale la fourniture des services financiers sans égard au statut prudentiel du prestataire considéré (banque, maison de titres, gérant de fortune indépendant, gestionnaire de placement collectifs etc.). Ces règles de conduite dans l’exercice de leurs activités s’appliqueraient à l’ensemble des intermédiaires surveillés susmentionnés ainsi que, éventuellement, aux conseillers financiers (non visés par l’AP-LEFin). Largement inspirées de la réglementation européenne, elles porteraient plus particulièrement sur les domaines suivants.

Tout d’abord, il est prévu une harmonisation de la réglementation du marché primaire. Celle-ci consisterait dans une application généralisée et transversale de règles identiques en matière de publication du prospectus d’émission et de son résumé à l’ensemble des valeurs mobilières faisant l’objet d’une offre au public (art. 37 ss AP-LSFin).

Cette documentation serait complétée pour les instruments financiers présentant un certain degré de complexité, soit les instruments financiers au sens de l’art. 3 lit. b AP-LSFin220 autres que les titres de participation et destinés aux clients privés, par une

219 Ordonnance de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers du 21 octobre 1996 sur les banques étrangères en Suisse (Ordonnance de la FINMA sur les banques étrangères, OBE-FINMA).

220 Les instruments financiers au sens de l’art. 3 lit. b AP-LSFin comprennent les titres de participation, les les titres de créances, les parts de placements collectifs, les produits structurés, les dérivés au sens de

68 feuille d’information de base (art. 58 ss AP-LSFin). Cette feuille d’information de base n’est pas sans rappeler le prospectus simplifié de l’art. 5 LPCC et s’inspire également du Règlement européen PRIIPS sur les informations clés relatives aux produits d’investissement 221.

Les règles de conduite applicables à la prestation de services financiers visés par l’

art. 3 lit. d AP-LSFin (soit l’achat et la vente de valeurs mobilières, la distribution d’instruments financiers, la gestion de fortune et le conseil en placement, la garde de valeurs pour le compte de clients ainsi que la tenue de compte et l’octroi de crédit) seraient également harmonisées et renforcées notamment s’agissant des exigences en matière des devoirs de diligence et de loyauté. Ainsi, l’obligation pour les prestataires de services financiers de vérifier l’adéquation (suitability) de leurs services de gestion de fortune avec les particularités et besoins de leurs clients, aujourd’hui déduites de la jurisprudence, trouverait un ancrage législatif et couvrirait expressément, pour ceux qui doutaient encore de l’existence d’une telle obligation, le mandat de conseil (art. 10 ss AP-LSFin). Les obligations en matière d’information des investisseurs, d’établissement des documents, de reddition de compte, de transparence et de best execution seraient également renforcées et appliquées de manière transversale (art. 7 à 9 et 15 ss LSFin).

Afin d’assurer une égalité de traitement avec les établissements étrangers offrant en Suisse leurs services cross border, les prestataires de services financiers étrangers actifs sur le territoire suisse devraient également respecter ces règles (art. 34 ss AP-LSFin).

Certaines allègements, voire exceptions, seraient applicables en fonction du degré de sophistication du destinataire de la la prestation (art. 12 et 20 AP-LSFin). Ainsi, l’LSFin distingue trois catégories de clients : les clients privés (art. 4 al. 2 AP-LSFin), les clients professionnels (art. 4 al. 3 AP-LSFin) et les clients institutionnels (art. 4 al. 4 AP-LSFin)222. La catégorie des clients privés comporterait les clients qui ne pourraient être qualifiés de clients professionnels au sens de l’art. 4 al. 3 AP-LSFin soit d’une part les établissements financiers suisses et étrangers soumis à surveillance prudentielle, les banques centrales, ainsi que les établissements de droit public, les institutions de prévoyance et les entreprises privées disposant d’une trésorerie professionnelle et, d’autre part, les clients privés fortunés qui déclareraient opter pour la catégorie des clients professionnels (art. 5 AP-LSFin). Au sein de la catégorie des clients professionnels, on distinguerait encore les clients « institutionnels », soit les

la LIMF, les assurances-vie susceptibles de rachat et les dépôts dont la valeur de rachat dépend d’un risque ou d’un cours.

221 Cf. supra Partie I Chapitre 3 A. 1. a).

222 Une classification similaire des investisseurs résulte de la LPCC (art. 10 LPCC).

69 établissements soumis à surveillance prudentielle, les banques centrales ainsi que établissement nationaux et supranationaux de droit public (art. 4 al. 4 AP-LSFin).

Enfin, l’AP-LSFin propose de faciliter aux clients les moyens de faire valoir leurs prétentions à l’encontre des prestataires de services, soit par l’allègements de certaines conditions de la responsabilité des prestataires de services financiers (ainsi en matière de responsabilité du prospectus, art. 69 AP-LSFin), soit par l’introduction de voies de droit plus rapides et moins couteuses pour les clients privés (Titre 4 AP-LSFin).

L’AP-LSFin et l’AP-LEFin formeraient ainsi avec le projet de loi fédérale sur l’infrastructure des marchés financiers (LIMF) dont le Parlement débat en 2015223 trois éléments majeurs de la nouvelle réglementation suisse des marchés financiers.

Sous l’angle de la réglementation des produits structurés, l’AP-LSFin apporterait des modifications formelles importantes mais également matérielles, à commencer par l’abrogation de l’art. 5 LPCC dont le contenu serait en partie repris, en partie modifié, par l’AP-LSFin. En ce sens, l’AP-LSFin constituerait le prolongement de l’historique de la réglementation des produits structurés décrit dans le présent Chapitre 2 B.

Plutôt que de traiter ici des propositions de l’AP-LSFin en matière de produits structurés dans leur ensemble, nous avons pris le parti d’évoquer au fil de cette étude, et en fonction des thèmes traités, les principales propositions de l’AP-LSFin connues à ce stade du processus législatif, qui auraient un impact sur le régime juridique actuel des produits structurés224. Ces propositions sont analysées à la lumière des critiques formulées à l’égard du contexte législatif actuel ainsi que des propositions que nous avançons pour y remédier.

223 Message du Conseil fédéral du 3 septembre 2014 concernant la loi sur l’infrastructure des marchés financiers.

224 Cf infra Partie I, Chapitre 3 ; Chapitre 4 ; Chapitre 5 ; Partie II, Chapitre 7 ; Chapitre 9 et Chapitre 10.

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