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L’analyse de la valeur

L’analyse par la valeur est davantage une approche de pensée qu’une méthode car, en réalité, il existe plusieurs méthodes sous ce vocable et différents outils, comme nous allons l’expliquer ci-après.

Le champ de l’analyse de la valeur est vaste, même s’il tire son origine d’une recherche de meilleure définition des besoins, en se concentrant sur la fonction d’un produit (le « à quoi ça sert ? »), avec la logique d’obtenir la meilleure couverture des besoins au meilleur coût.

Dès lors, il est assez naturel que l’approche analyse de la valeur se soit d’abord répandue dans le domaine de l’analyse fonctionnelle pour faciliter l’expression de besoins et la réalisation de cahiers des charges fonctionnels.

Toutefois, l’important dans l’analyse de la valeur est la remise en question initiale, le principe de ramener tout choix (décision, fonction, outils, méthodes, priorités, etc.) à l’intention, le but, la fonction, afin de pouvoir trouver les réponses en solutions

optimales. Ce ne sont pas les moyens utilisés qui doivent contraindre la réflexion sur la performance et la compétitivité d’une entreprise, d’un produit, d’un processus.

Sinon, si ces derniers ne fonctionnent pas assez bien, ou se basent sur des ressources rares, on va chercher à régler le problème au niveau des moyens qu’on maîtrise habituellement, alors qu’il faut peut-être tout simplement faire autrement. D’où l’importance de structurer méthodiquement l’approche, de conduire le changement.

Un peu d’histoire

Une naissance valeureuse

L’analyse de la valeur (AV) est une méthode née aux États-Unis juste à la fin de la Seconde Guerre mondiale grâce aux efforts de Lawrence Delos Miles, ingénieur à la General Electric qui devait résoudre un problème de pénurie de matériaux nobles. Miles découvre alors que ce qui compte dans un produit, c’est la fonction qu’il exerce quelle que soit la solution utilisée pour satisfaire cette fonction.

À partir de ce constat il cherche des solutions créatives qui permettent de réaliser des économies et répondent uniquement au besoin pour lequel le produit existe.

L’AFNOR la définit ainsi : « L’analyse de la valeur est une méthode de compétitivité, organisée et créative, visant à la satisfaction de l’utilisateur, par une démarche spécifique de conception, à la fois fonctionnelle, économique et pluridisciplinaire. La valeur d’un produit est une grandeur qui croît lorsque la satisfaction du besoin augmente et/ou que le coût du produit diminue. La valeur peut donc être considérée comme le rapport entre l’aptitude aux fonctions divisée par le coût des solutions. »

En France, plusieurs normes sont en vigueur concernant l’analyse de la valeur, on peut citer :

NF X 50-153 : Analyse de la valeur – Recommandations pour sa mise en œuvre – Fascicule de documentation – mai 1985 ;

NF X 50-151 : Analyse de la valeur, Analyse fonctionnelle – Expression fonctionnelle du besoin et cahier des charges fonctionnel – 1991, dernière mise à jour en septembre 2007.

NF EN 1325-1 : Vocabulaire du management de la valeur, de l’analyse de la valeur et de l’analyse fonctionnelle – Partie 1 : analyse de la valeur et analyse fonctionnelle – novembre 1996.

NF X 50-100 : Analyse fonctionnelle – Caractéristiques fondamentales –1996.

NF X 50-152 : Management par la valeur – Caractéristiques fondamentales de l’analyse de la valeur – septembre 2007.

Le principe de l’analyse par la valeur étant posé en ces termes, son champ d’application est assez vaste, non réduit à un produit ou à un projet et couvre, sans être exhaustif :

 La gouvernance de l’entreprise, c’est-à-dire la facilitation de la prise de décisions en se posant toujours la question du bénéfice en termes de valeur (et non uniquement en termes financiers) ramené à l’optimisation des coûts, en particulier pour les décisions financières (budgets de fonctionnement, investissements, économies). On évite ainsi les approches de réduction de coûts qui conduisent à la destruction de valeur. Le budget à base zéro, ou cost killing, sont deux outils disponibles pour s’interroger sur la réduction efficace des coûts.

 L’analyse fonctionnelle : champ historique de l’analyse de la valeur, elle décline le concept dans les méthodes d’expression des besoins. Elle permet d’expliciter les besoins tout en cadrant les objectifs et les contraintes C’est un outil méthodologique qui permet d’identifier puis d’exprimer sous forme d’exigences l’ensemble des besoins, attentes et contraintes relatifs à un projet.

 La conception d’un produit : le Design To Cost (ou CCO – Conception à coût objectif) consiste à concevoir un produit en remettant en cause dès sa conception les matériaux éventuellement utilisés traditionnellement, pour satisfaire la fonction le plus économiquement possible.

 La conduite du changement : on ne change pas pour changer mais parce que cela devient nécessaire pour préserver la valeur, ou en créer. Il est important, avant de lancer toute transformation, d’en déterminer l’intérêt, de revenir à l’objectif de création de valeur pour l’entreprise, en ne se trompant pas sur ce que « proposition de valeur » veut dire (voir p.139).

Comment ça marche ?

« Tueurs » de coûts

Des actions ou des décisions « tueuses de coûts » peuvent en fait s’avérer de fausses économies in fine destructrices de valeur. On peut en citer quelques unes :

bloquer ou reporter les investissements de fond matériel ou logiciels : les systèmes atteindront tôt ou tard un niveau d’obsolescence tel qu’il faudra effectuer les investissements dans l’urgence, avec des coûts très probablement supérieurs à ceux initiaux en préventif ;

choisir comme prestataire le moins disant financier un ou dimensionner au plus juste les plannings de projets : détérioration de la qualité, surcoûts et dérives des projets ;

se défausser de son informatique et/ou des ressources rares : plus de proposition de valeur du système d’information ;

externaliser pour réduire les coûts sans aucune étude préalable de l’état des systèmes (voire remise à niveau) ou des niveaux de services internes : augmentation des coûts, réduction de la qualité ;

bloquer les budgets d’investissements/d’innovation : plus de proposition de valeur du système d’information.

Il faut donc être méthodique quand on « chasse » les coûts, sauf à vouloir scier la branche sur laquelle on est assis. L’analyse de la valeur est une approche qui prend tout son sens en ce domaine, notamment avec le budget base zéro. Ce dernier n’hésite pas à remettre en cause la légitimité des dépenses en remontant aux racines. Le budget de chaque activité est remis à zéro chaque année et l’intérêt (création de valeur) de toute dépense doit être démontré.

On change pour obtenir un gain, quantitatif en termes financiers, ou qualitatif (avec probablement des retombées financières indirectes) ou parce que cela est indispensable pour préserver les ressources et les compétences maîtrisées par l’entreprise. Ces derniers sont en effet les éléments fondateurs de la valeur créée. On peut également changer en raison de facteurs exogènes liés à l’environnement social et économique et aux contraintes de législation.

Quand il s’agit de la décision de l’entreprise, du groupe humain qui porte le projet de changement, c’est toujours une question de valeur à préserver, à étendre, à créer, un gain étant attendu en ce sens. Il s’agit d’une création de valeur qui porte la « vue à 360° du SI » sur les six axes définis précédemment :

 axe financier : optimiser les ressources de fonctionnement (rationaliser les serveurs, par exemple) pour diminuer des coûts non justifié, augmenter le chiffre d’affaires en distribuant grâce à un SI ouvert, des offres multicanal (mobile, PC…) ;

 axe marketing (DSI): améliorer l’image de marque de la DSI et diminuer les temps d’errance des utilisateurs, améliorer l’offre de services ;

 axe architecture : améliorer l’agilité de l’architecture pour améliorer la réactivité aux demandes d’évolution ;

 axe ressources humaines : améliorer la gestion des connaissances-clés en les formalisant pour les partager/transmettre, attirer les nouveaux talents ;

 axe métier/affaires : améliorer l’image de l’entreprise par des offres nouvelles obtenues grâce au SI (e-business, par exemple) ;

 axe sécurité : améliorer l’accès au SI pour les utilisateurs nomades, tout en préservant la sécurité…

Si l’analyse de la valeur se prête bien à analyser justement, et étayer les raisons de choix de solutions optimales, il faut également choisir au départ les sujets d’attention de cette analyse (quels axes, quels sous-axes privilégier ?). C’est là qu’un instrument comme le principe de Pareto (selon la définition de Juran, voir encadré page suivante) est intéressant à plus d’un titre. Ce principe permet d’arriver par

fusion/dichotomie à une proposition de décision simple, qui peut être combinée à l’approche « GQM » telle que décrite précédemment.

Comment ça marche ?

La loi des 80/20

La loi de Pareto connue sous le nom de loi des 80/20 est une proportion remarquable mise en évidence de façon empirique par Vilfredo Pareto (1848-1923). Elle s’énonce de la manière suivante : « 80 % des effets sont générés par seulement 20 % des causes », ou inversement (loi des 20/80), « 20 % des causes génèrent 80 % des effets ».

Le principe de Pareto est attribué à Joseph Juran, qualiticien, qui en a donné la définition suivante : « Le principe de Pareto est la méthode générale permettant de trier un quelconque agrégat en deux parties : les problèmes vitaux et les problèmes plus secondaires – dans tous les cas, l’application du principe de Pareto permet d’identifier les propriétés des problèmes stratégiques et de les séparer des autres ». La méthode ABC, qu’on doit au même personnage, est une variante précisée ainsi : « J’ai un peu exagéré en avançant que le principe de Pareto permet seulement de séparer les choses en deux parts. En réalité, il existe 3 parties. La troisième est un “résidu” qui prend place entre les composantes prioritaires et les composantes secondaires. Ce “résidu” peut être dénommé “zone à risques” (awkward-zone). Chaque élément de cette zone à risques n’est pas assez important pour justifier un lourd investissement dans l’analyse, mais leur regroupement dépasse les capacités d’analyse » (Juran, 1964).

Le diagramme de Pareto est une sorte de preuve par l’image pour voir plus facilement où concentrer les efforts (exemple ci-dessous tiré de Wikipedia, avec des données hypothétiques sur les causes de retard au travail – la ligne rouge est le cumul des valeurs en pourcentage. Ici les trois premières causes génèrent 80 % des effets).

800px-Pareto_fr.png

Figure 6-3

Exemple de diagramme de Pareto (source Wikipedia) Quelques exemples de la loi de Pareto :

management : 80 % des problèmes peuvent se résoudre avec l’analyse stratégique de 20 % des causes ;

gestion de projet : 80 % d’accomplissement d’une mise au point nécessite 20 % de l’effort ;

conception : les fonctionnalités les plus utilisées (80 % du temps) méritent le plus d’attention, même si elles sont les plus banales, alors que celles qui sont peu utilisées (20 % du temps) devraient se satisfaire d’un effort moindre ;

ergonomie : 20 % des possibilités offertes à l’utilisateur sont utilisées 80 % du temps ;

analyse des coûts : 80 % des coûts sont l’affaire de 20 % des postes.

La gestion du portefeuille