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Analyse de la (des) tâche(s) 127

Dans le document Le maître E dans ses rôles de partenaire (Page 128-133)

Chapitre 6 : des systèmes d’aide entre ruptures et continuités 113 

4.   Analyse de la (des) tâche(s) 127

L’analyse de la tâche que nous allons mener à présent s’organise autour de l’explicitation du but à atteindre pour l’élève, de la description du contexte social (aménagement matériel et humain) dans lequel la tâche se déroule, de la formalisation des critères de réussite et des variantes didactiques. Nous mènerons l’analyse des deux cas en parallèle pour pointer des différences ou des communautés permettant de repérer d’éventuelles régularités.

Mérini/Thomazet/Ponté

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4.1. Examen de l’explicitation du but de la tâche

Tableau 8 : Informations concernant les buts de la tâche (E_A)

But de la tâche ME_8 MO_A PAR_A MO_Abis ORT_A TOTAL

S1 4 2 2 1 2 11/18

S2 1 3 2 - - 6/13

S3 4 1 - - 1 6/9

TOTAL 9 6 4 1 3 23/40

Le but de la tâche est l’item le mieux renseigné, il traduit d’ailleurs la focalisation de l’aide sur l’action, et peut-être moins sur l’activité de l’élève (comme en témoignent certaines de nos analyses précédentes), un peu comme s’il suffisait de se mettre en mouvement par le biais de la tâche pour que le processus cognitif attendu soit actualisé, révélant par là une fausse représentation du processus d’apprentissage.

Tableau 9 : Informations concernant les buts de la tâche (E_B)

But de la tâche ME_9 MO_B PAR_B MO_Bbis TOTAL

S1 5 3 - 4 12/9

S2 3 5 4 3 15/16

S3 12 15 2 4 33/19

TOTAL 20 23 6 11 60/44

Dans le cas de E_B, le but de la tâche est fortement renseigné, mais il nous faut signaler qu’une bonne partie (100% pour MO_B) de ces explicitations est due à l’usage que la maîtresse fait d’un fichier du maître, les fiches d’exercices comportant clairement le but à atteindre ou « ce qu’il y a à faire pour l’élève » en d’autres termes, la consigne.

4.2. Examen de l’explicitation de l’aménagement matériel et

humain

Tableau 10 : Informations concernant les aménagements matériels et humains (E_A)

Aménagements matériels et humains ME_8 MO_A PAR_A MO_Abis ORT_A TOTAL

S1 t1c, t8c t8d t2, t3, t7, t9, t11 t10 t4 t6c 11/18

S2 t1d, t1e t2a, t2b t3 - - 5/13

S3 t3b, t3c t4 - - t2a, t2b, t2c 6/9

TOTAL 7 8 2 1 4 22/40

La description du contexte dans lequel se déroule l’aide peut sembler assez bien renseignée sauf à remarquer, là encore, qu’environ un quart des traces qui précisent le contexte sont des

129 règlements de jeux utilisés essentiellement par le maître E et l’orthophoniste. Par ailleurs, les informations mentionnées décrivent majoritairement le matériel nécessaire à la mise en œuvre de la tâche et non le contexte social dans lequel elle prend place (individuellement, en petits groupes, selon quel mode de regroupement : groupe de besoin, de niveau, d’activité etc.). Cette absence de description ne permet pas d’identifier si l’action d’aide est modularisée et selon quelle logique, ni de repérer les liens qui s’établissent avec les logiques de classe.38

Tableau 11 : Informations concernant les aménagements matériels et humains (E_B)

Aménagements matériels et humains

ME_9 MO_B PAR_B MO_Bbis TOTAL

S1 t3a, t5a t2a, t2b - t1, 5/9

S2 t3a, t3d, t7a, t7c t2a, t2b, t4, t6 t1, t5 9/16

S3 t4a, t4b, t4c, t4d, t4e, t9a, t9b, t9c, t9d, t9e,

t2, t3a, t8 t5, t7 t1, t6 17/19

TOTAL 16 7 4 5 31/44

Comme pour E_A, ce sont essentiellement des informations matérielles qui sont décrites, exception faite de la ME_9 qui rend compte du contexte social dans lequel se déroule l’aide : « Regroupement d’adaptation de deux élèves, dans une petite salle prêtée, car l’école

d’origine des élèves a brûlé et les classes sont « hébergées » dans une autre école. La salle comporte un tableau et la ME_9 apporte une caisse de matériel. »

L’absence dominante d’information sur le contexte social dans lequel se déroule l’aide traduit sans doute une focalisation du travail d’aide sur les échanges maître/élève(s) sans intériorisation de la présence symbolique de l’autre et de l’environnement, un peu comme si le travail d’enseignement/aide se trouvait momentanément décontextualisé, comme une parenthèse où le travail s’individualise. Ce point peut être l’expression d’une limite méthodologique liée à une focalisation de la recherche sur un des élèves.

4.3. Examen des critères de réussite

Les objectifs étant peu renseignés, sauf pour les maîtres E et l’orthophoniste, très logiquement les critères de réussite ne le sont pas non plus. On peut faire l’hypothèse à nouveau de la focalisation sur l’action :

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ME_3 : « Moi je pense que les enseignants, la plupart du temps ils pensent que ça… va de soi et c'est pas la peine de…de l'écrire parce que ça va de soi, ils ont le sens du baratin quoi, ils perdent leur temps » (ACC Prof_2, lg66-68).

Ce que confirme cet autre extrait où MO_Bbis, oralise ce qu’elle aurait pu écrire :

MO_Bbis : « Moi c'était par rapport à l'aide personnalisée la... réussite par exemple pour la manipulation de jetons et des réglettes. Au lieu de passer par des étapes d'hésitation qui parlaient tout de suite par exemple au...cas par dix par exemple, ce qui était pas du tout le cas au début de la manipulation et qu'après ils parviennent à symboliser et ça de façon rapide, et organiser aussi sa fixation et.. Ça c'étaient les critères de réussite par rapport aux tâches qu'on faisait. » (ACC Prof_2, lg43-47).

Mais on ne peut écarter non plus certaines confusions ou tout au moins superpositions, ici entre objectifs et critères de réussite :

ME_9 :« Alors moi, mes objectifs, mes critères de réussite... sont beaucoup déterminés par ce que j'ai constaté au départ dans mon bilan » (ACC Prof_2, lg29-30).

S’il est clair que l’objectif découle d’une analyse de besoins et que les critères de réussite découleront de l’objectif, il y a aussi confusion ou superposition entre ce qui appartient à l’adulte (ses objectifs et les indicateurs de réussite de son action) et ce qui pourrait appartenir à l’élève (le but à atteindre et les critères de réussite).

Tableau 12 : Informations concernant les critères de réussite (E_A)

Critères de réussite ME_8 MO_A PAR_A MO_Abis ORT_A TOTAL

S1 t1c - - - t6c 2/18

S2 - - - 0/13

S3 t3b - - - - 1/9

TOTAL 2 0 0 0 1 3/40

De manière encore plus remarquable, on peut noter l’absence d’explicitation dans les traces collectées des critères de réussite, les trois traces repérées qui les mentionnent sont extraites de règlement de jeux de société. Ainsi peut-on faire l’hypothèse que cette question des critères de réussite est peu présente dans le dialogue avec l’élève, ce qui ne facilite pas son adhésion à l’activité, et surtout ne lui permet pas d’être autonome dans le repérage de ses réussites.

Tableau 13 : Informations concernant les critères de réussite (E_B)

Critères de réussite ME_9 MO_B PAR_B MO_Bbis TOTAL

S1 t3a - - - 1/9

S2 - - - - 0/16

S3 t4b, t9d - - t1, t6 4/19

131 Le cas E_B confirme et renforce cette absence d’explicitation des critères de réussite, même si dans ce cas, les cinq mentions repérées n’appartiennent pas forcément à des règlements édités de jeux.

Ce point a été discuté dans les autoconfrontations croisées : ME_2 : « Mais ça aide certainement à comprendre euh… la tâche » (ACC1, lg72).

Psy_B « Parce que l’idée c’est que finalement l'enfant il sache un petit peu quels sont les objectifs, ce qui éviterait peut-être qu’il se les construise de façon intuitive c'est-à-dire peut-être que, qu’un enfant aussi, on lui dit euh voilà enfin je ne sais pas mais si on lui dit pas ben voilà si t'as réussi à faire ces images moi et pour moi c’est bon, il sait ce que je pense du travail » (ACC Prof2.lg234-237)

Certains professionnels pointent une nouvelle différence entre le maître E dont l’activité serait orientée vers des « petits bouts de réussite » pour placer l’élève dans une dynamique renouvelée de plaisir d’apprendre, et le maître de la classe dont l’activité serait orientée par les performances des élèves en termes d’acquisition des connaissances et compétences inscrites au programme. Ainsi il serait plus aisé pour un maître de milieu ordinaire de définir des critères de réussite pour l’élève, là où le maître E ne pourrait traduire la remise en situation de réussite en termes de critères.

ME_8 : « Je trouve que nous, on est pas trop peut-être dans les critères de réussite parce qu'on est pas sur les/compétences performance….Je reviens à ça parce que c'est lié, c'est-à-dire que le maître ordinaire effectivement il est plutôt sur des compétences…. Et forcément des performances (….) si on est dans des mises en situation de réussite, ce qui me questionne c'est… Comment définir des critères ?(…) je trouve que souvent on est sur de l'implicite parce qu'on attend ce que tu disais sur le… Le tarot des mille et uns contes et puis finalement le premier truc pour moi c'était déjà qu'ils prennent du…un peu du plaisir à rentrer dans ces cartes là » (ACC1, lg 224-270).

Autrement dit, pour le maître E, ce serait l’élève en tant qu’individu apprenant qui serait central, là où le maître de la classe serait centré sur les savoirs et les performances de l’élève.

4.4. Analyse des variantes didactiques à l’œuvre

Tableau 14 : Les variantes didactiques (E_A)

Variantes didactiques ME_8 MO_A PAR_A MO_Abis ORT_A TOTAL

S1 t1c, t8c t2, t3 t5 t9 t6a 7/18

S2 t4c t2a, t2b t3 - - 4/13

S3 t3b, t4 - - - 2/9

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132 On peut noter un recours très relatif aux variantes didactiques qui permettent de faciliter ou de complexifier la tâche, ce qui peut faire penser à un tout aussi relatif profilage des tâches sur les difficultés de l’élève. Quand il y a ajustement des variantes didactiques, c’est préférentiellement par un ré-aménagement matériel de la tâche, puis, par ordre de fréquence une augmentation de la difficulté par une modification du but de la tâche, et une facilitation de la tâche par l’introduction d’aides didactiques. L’aménagement humain qui permet de reconfigurer la tâche et l’augmentation de la charge de travail sont les variantes les moins utilisées.

Il nous faut signaler que ces aménagements sont fréquemment l’œuvre des éditeurs de jeux ou de fichiers d’exercices et non des acteurs de l’aide. L’intervenant, par le non-recours aux variantes, se prive potentiellement d’une série de différenciations qui pourrait aider l’élève selon la nature de ses difficultés.

Tableau 15 : Les variantes didactiques (E_B)

Variantes didactiques ME_9 MO_B PAR_B MO_Bbis TOTAL

S1 t3a, t5b t2a, t2b - - 4/9

S2 t7a - t6b - 2/16

S3 t4 t3 - t1 3/19

TOTAL 4 3 1 1 9/44

Tout d’abord, il nous faut signaler que les variantes didactiques mises en œuvre par MO_B sont, là encore, introduites par la fiche d’exercice elle-même, et donc pas forcément profilées aux difficultés rencontrées par E_B. La variable préférentiellement à l’œuvre est, comme pour E_A, le but de la tâche, et le plus souvent pour la complexifier. Au-delà de ces constats, la relative faiblesse de recours aux variantes didactiques semble conforter l’idée que les intervenants sont focalisés sur l’action et la mise en mouvement de l’élève dans l’apprentissage, et non sur le processus d’apprentissage qui voudrait être simplifié ou complexifié selon les capacités de l’élève. Tout semble se passer comme si aller d’une tâche à l’autre soit suffisant pour que l’apprentissage ou l’aide ait lieu. Seul le maître E « personnalise » le recours aux variantes didactiques selon les difficultés de E_B et simplifie par des aides didactiques ou un étayage (ME_B, t7a-S2).

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