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Analyse du contenu et des miracles de la vita

B- La vita prima de saint Melaine

6- Analyse du contenu et des miracles de la vita

Une vita est faite pour démontrer la Vertu d’un saint. Ainsi on trouve le récit des miracles dans une vita. D’autres hagiographes rappellent dans leurs prologues qu’ils veulent proposer un modèle édifiant. Des vitae sont écrites pour que soient reproduits ces modèles de sainteté871. Quand on espère recueillir des informations précises sur la vie de Melaine ou sur son personnage, l’historien va être déçu de la pauvreté en détails de la vita de Melaine. Pour le croyant, la vita regorge de signes de l’intercession efficace de Melaine auprès de Dieu. On

870 Cf. RAPP, Claudia, Holy Bishops in late Antiquity, Berkeley : University of California Press, 2005.

871 ISAÏA, Marie-Céline, «L'hagiographie comme modèle. Histoire et fonction d'un lieu commun », in Apprendre,

produire, se conduire. Le modèle au Moyen Âge. 45e Congrès de la SHMESP (Nancy-Metz, 22-25 mai 2014),

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trouve nombre de lieux communs dans sa vie, des topoi qui ne doivent pas toujours revêtir le même contenu en fonction de l’époque à laquelle ils sont utilisés872.

Le prologue de la vita de Melaine est très court et constitue le premier chapitre. Il est impersonnel. L’hagiographe ne se présente pas et ne cherche pas à établir une filiation avec les traditions hagiographiques précédentes mais il établit une filiation directe aux Saintes Ecritures en citant le psaume 40, 1, qui servait à légitimer son écriture873. La vita est écrite dans une langue accessible, adaptée à l’usage liturgique, la lecture lors de fêtes religieuses. Elle vise la formation chrétienne des auditeurs et plus directement leur vie morale et affective874. Dans le chapitre I, on lit alors « faire savoir ce qui sert l’Eglise, ce qui l’instruit les auditeurs et ce qui les incite au bon exemple ».

a) Le pers onnage de s ai nt Mel aine

C’est un lieu commun de l’hagiographie, et tout comme saint Fursy875 : « L’enfance de

cet homme resplendissait par les présages sacrés en préparation des miracles. » Melaine est un élu de Dieu et donc il devait être un enfant prodige. Par ailleurs, « il était alors issu du diocèse de Vannes, d’une famille de parents les plus nobles et avait été élevé dans une villa appelée Plaz ». Nous ne revenons pas sur l’origine aristocratique de Melaine. Mais ce fait aussi souligne les grandes œuvres auxquelles il est destiné par Dieu.

Pour le préparer à sa charge épiscopale et divine ultérieure, « appelé aux plus hautes fonctions par la Providence Divine, il fut instruit dans les Saintes Ecritures et dans les disciplines sacrées. Alors que son âge augmentait, l’effet de la grâce, de la Providence envers lui et de l’honneur de sa charge croissait. » L’instruction de Melaine semble probable puisqu’il devait exercer l’office le plus important dans sa civitas au VIe siècle. Bien que ce soit un topos

hagiographique, dans le cas de Melaine, l’écriture de la lettre aux prêtres Lovocat et Catihern, ainsi que sa participation au concile d’Orléans en 511 témoignent d’un certain niveau d’instruction. Même avant de devenir évêque, Melaine devait être une personne respectée pour que l’on l’élève à cet office. Il devait être connu avant d’être élu évêque puisqu’on devait le connaître pour pouvoir l’élire. D’origine aristocratique, il était probablement connu par le biais de ce réseau-là.

872 Ead., p. 48.

873 Ead., p. 47. 874 Ead., p. 50 sq.

171 *L’évêque idéal

Le culte des saints évêques trouve ses racines dans les cultes des morts romains d’une part, et dans le culte des martyrs qui s’est transformé dans le culte des saints de l’autre. Le culte des saints évêques a pu prendre son essor avec l’évolution de la place du christianisme dans l’état romain. L’importance grandissante du christianisme dans l’état romain a amené la transposition des rapports terrestre entre patrons et clients sur la cité céleste dans la représentation des croyants. Un évêque mort était donc un patron céleste qui pouvait intercéder pour le croyant (terrestre)876.

L’évêque idéal n’est, quant à lui, pas le fruit d’une représentation plus tardive. Le modèle se trouve dans la Bible. La filiation est décrite dans la vita de Melaine« [Jésus] envoya ses apôtres prêcher, et, […] il choisit leurs successeurs pour prêcher ». Jésus Christ appelle lui- même les prêtres par une vocation intérieure. Aux Apôtres, Jésus confia le pouvoir de gouverner l’Eglise877, de célébrer l’Eucharistie878, de remettre les péchés879, d’enseigner et de baptiser880.

Les Apôtres transmirent ces pouvoirs par l’imposition des mains881. L’épiscopat, très tôt, avait

la plénitude de cette fonction882. En vertu de successeur des apôtres, un évêque, et surtout le saint évêque Melaine devait posséder toute les qualités pour cet office.

« [Il était un] prédicateur excellent. Il […] prêchait le Seigneur pour le salut de beaucoup. Il était encore plus noble par sa foi, éminent parmi les siens par sa charge terrestre, mais supérieur par la grâce des fonctions divines. » « Il était savant dans la lecture des Écritures Saintes mais aussi justement dans les modes de vie canonique. Dans le diocèse qu’il gouvernait,

876 HEINZELMANN, Martin, « Bischöfe, heilige », in Lexikon des Mittelalters, Stuttgart: Metzler, [1977]-1999,

vol. 2, cols 238-239, (Brepolis Medieval Encyclopaedias - Lexikon des Mittelalters Online), (consulté le 03/06/2018).

877 Mt, 16, 19 ; Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux,

et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. Mt, XVIII, 18, Je vous le dis en vérité, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. SEGOND, Louis (trad.), 1904, sur https://www.enseignemoi.com/bible/lire-la-bible.html (consulté le 05/06/2018).

878 Lc, XXII, 19,Ensuite il prit du pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna, en disant : Ceci

est mon corps, qui est donné pour vous; faites ceci en mémoire de moi. I Cor XI, 25, De même, après avoir soupé, il prit la coupe, et dit : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang; faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez. Op. cit.

879 Joh, XX, 23, Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés; et ceux à qui vous les retiendrez,

ils leur seront retenus. Op. cit.

880 Mt, XXVIII 19-20, Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du

Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde. Mc, XVI, 15, Puis il leur dit : Allez par tout le monde, et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. Lc, XXIV 47 et que la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. Op. cit.

881 I Tim, IV, 14, Ne néglige pas le don qui est en toi, et qui t'a été donné par prophétie avec l'imposition des mains

de l'assemblée des anciens. II Tim, I, 6 C'est pourquoi je t'exhorte à ranimer le don de Dieu que tu as reçu par l'imposition de mes mains. Op. cit.

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il défendait les habitants. Il était précisément le plus apte des anciens, de ses pairs ainsi que de ses sujets […] ». « […] Il rendait la joie aux gens éplorés, il amenait les criminels à la discipline […] ». « L[‘]auteur [des canons] apparaît évidemment être le prédicateur saint Melaine […]. » « […] Il visitait les bourgs qui lui ont été confiés, pour les assurer dans la foi. » « il accroissait la foi des chrétiens, et maintes fois il faisait sortir la misérable erreur des païens par ses conseils avisés. » « De même il se fortifiait dans la discipline divine, par les veillées, les oraisons, les jeûnes et les aumônes, et par les exercices de bonnes œuvres. » La liste pourrait être rallongée des traits de caractères propices à l’exercice de l’épiscopat. Dans les chapitres II à IV notamment, on trouve une liste de toutes les attitudes exemplaires et caractéristiques, non seulement d’un saint mais surtout d’un évêque. Bien que ces caractéristiques et attitudes apparaissent dans des parties des chapitres qui semblent être des sermons, elles sont tirées d’un idéal que l’on avait du saint évêque. Tout au long de la vita, les qualités éminentes de Melaine sont répétées et louées.

b) Les mi racl es

*T ypologie des miracl es

On peut distinguer différentes manières dont saint Melaine intervient dans les miracles. Comme des contes, les miracles n’ont qu’une temporalité relative ; « un certain jour », « le temps passant », « un moment donné » etc. Dans le chapitre XII, nous avons un indice de temps très précis mais il ne concerne pas le miracle mais le début du récit de miracle : « […] le bienheureux Melaine célébra la messe du premier jour du Carême […] ». Le temps de l’accomplissement du miracle reste inconnu. La mort de Melaine, son « passage » vers Dieu, constitue une indication de temps relative.

Melaine « rendait la vue à d’innombrables aveugles, la marche aux boiteux, le rétablissement aux malades, la santé aux infirmes, la parole aux muets. D’autre part, il était tellement rempli de vertus qu’aucun démon n’osait se cacher devant lui. C’est pourquoi il libéra de très nombreux hommes possédés par les démons, par la Vertu divine, ses prières et ses mérites. » Les miracles dans la vita détaillent plus ou moins des guérisons, des exorcismes, des conversions, une aumône transformée, une résurrection, une vue rendue et des prisonniers libérés. Tous les miracles n’ont pas la même valeur spirituelle. Ainsi les miracles post mortem et autour de l’eulogie ont une grande importance religieuse883.

883 WAGNER, Fritz, « Mirakel », LexMA.

173 Les termes employés pour l’action des miracles sont « uirtus » (vertu, force), « miraculum » (miracle), « prodigium » (prodige) ou encore « signum » (signe, miracle). Ils font partie d’un champ lexical que l’on peut qualifier de « classique » dans des récits hagiographiques. La terminologie renvoie à l’opération même du miracle. La vertu, qui est mise en avant, est à la fois la force que Dieu a donnée à Melaine pour opérer un miracle, et renvoie donc à la Toute-Puissance de Dieu même, et à la fois la force sainte de Melaine, individuelle, qu’il peut employer pour intercéder auprès des hommes884. De son vivant, Melaine, qui mène

une vie tout à fait conforme à Dieu, est en quelque sorte récompensé pour cette façon de vivre par les miracles que Dieu accorde à travers sa personne885.

Les miracles dans lesquels les noms des personnages sont indiqués, ne précisent pas la maladie. Ainsi Eva, Siagrius, le fils de Medias et Eusebius sont décrits comme étant très malades mais on n’apprend pas de quelle maladie ils souffrent. A l’inverse les maladies sont détaillées pour des anonymes. Dans le chapitre VII c’est un paralysé de tous les membres, dans le chapitre IX, c’est une possédée attachée par des bandes, dans le chapitre XI c’est un fils d’un Vannetais dépouillé de son âme par un démon, et dans le chapitre XV, c’est une mère de famille qui retrouve sa vue.

chapitre souffrance geste du miracle

V possession par un démon une gifle

VI maladie signe de la croix avec la main droite

VII paralysé de tous les membres onction de l’huile bénite

VIII maladie onction de l’huile bénite

pieds contractés fomentation d’eau chaude IX possession par un démon, attachée

par des bandes

confession signe de la croix

X maladie main caressant la tête

conversion du père

Melaine saisit la main du fils XI aumône refusée au début du carême

qui se transforme en serpent

pénitence/dénouement trois confessions prières

884 Cf. HEINZELMANN, Martin, « Die Funktion des Wunders in der spätantiken und frühmittelalterlichen

Historiographie », in HEINZELMANN, Martin et alii, Mirakel im Mittelalter, Konzeptionen,

Erscheinungsformen, Deutungen, Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 2002, p. 23-61, p. 56.

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bénédiction par l’évêque Melaine (réconciliation)

XII possession par un démon avec mort qui s’en suit

paganisme

invocation de Dieu et de saint Martin par Melaine

pose croix sur le cœur du mort conversion de tout le peuple

XIII maladie confession/ pénitence

onction de l’huile bénite trois fois avec trois invocations de Dieu

possession par un démon Melaine parle au démon

XV vision angélique

prisonniers enfermés tour fendue en deux avec le passage du cortège funéraire

cécité touche les pieds de saint Melaine

Du vivant de Melaine, il prie l’intercession divine pour les souffrants et les guérit. Après sa mort, l’invocation de sa personne ainsi que sa présence physique suffisent pour accomplir le miracle. Les miracles post mortem sont un condensé de l’efficacité de Melaine. D’une part, l’invocation de Melaine par les prisonniers montre qu’il intervient réellement. D’autre part, ses reliques sont efficaces puisqu’au toucher la mère retrouve la vue.

*Les guéri sons

On remarque que saint Melaine opère beaucoup de guérisons (cf. ci-dessus). Les miracles de guérisons dans le christianisme en général se réfèrent aux miracles de guérisons accomplis par Jésus. Contrairement aux pères de l’Eglise, qui décrétaient à la fin du IVe siècle que la période des miracles était close, les croyants adhéraient avec ferveur à la dimension miraculeuse du culte des saints qui guérissaient886. Dans les premières vitae de saint, on trouve

encore peu de guérison. A partir du milieu du Ve siècle, et surtout au VIe siècle, les miracles de

guérison prennent leur essor, au point qu’elles étaient les dispensateurs d’espoir les plus éminents de l’époque887. Les guérisons miraculeuses offraient non seulement le recouvrement

de la santé mais aussi le salut de l’âme. En vertu de cette qualité, ils étaient un moteur de la christianisation de l’Occident888. Beaucoup de gens espéraient retrouver la santé en se

convertissant au christianisme, ce que l’on voit aussi dans la vita de saint Melaine dans les

886 « Guérison miraculeuse dans l’antiquité tardive », LANÇON, Bertrand, in SBALCHIERO, Patrick (dir.),

Dictionnaire des miracles et de l’extraordinaire chrétiens, Paris : Fayard, 2002, p. 337.

887 Idem. 888 Idem.

175 chapitres X, XII et XIII. Le culte des saints et donc l’industrie des miracles servirent aussi le rayonnement et la politique de l’évêque puisque celui-ci pouvait consolider son autorité avec l’efficacité d’un saint889. Le message derrière, par exemple, des guérisons est que la foi aide les

hommes890.

L’huile bénite utilisée pour les miracles de saint Melaine est le Saint-Chrême probablement consacré par lui-même891. Les guérisons par l’huile bénite se réfèrent, entre autres, au statut épiscopal de saint Melaine et soulignent l’efficacité de l’huile bénite consacrées par lui.

*La rés urrection

La résurrection qui s’opère dans le chapitre XII tient de la Vertu de Dieu ainsi que de saint Martin, que Melaine invoque pour ressusciter le jeune homme vannetais.

« Au nom de notre Seigneur Jésus Christ, par qui tu as permis de ressusciter par le saint frère Martin trois morts, je te supplie, Père le plus pieux, que par moi, ton prêtre indigne suppliant, alors que le peuple prie, soit croyant dans ta puissance, qui ne fait jamais défaut, et montre ta volonté, relève cet enfant. »

Dans ce miracle, Melaine se subordonne non seulement à Dieu mais aussi à saint Martin. Dieu est le Tout-Puissant qui a donné la Vertu à saint Martin pour ressusciter trois morts, Melaine, « prêtre indigne », ne demande sa Vertu uniquement pour en ressusciter un mort. La résurrection renvoie à la résurrection de Jésus dont la portée transcende le temps et qui trouve la vie éternelle après sa mort. En revanche, la résurrection simple d’un mort ramène certes le mort à la vie mais pour qu’il soit toujours voué à la mort plus tard892.

Quant à la subordination et l’attitude humble de Melaine vis-à-vis de saint Martin, on a la seule preuve dans le texte où on voit un attachement à l’apôtre des Gaules, et par extension une subordination du saint patron de l’évêché de Rennes à la métropole de Tours, et sa province ecclésiastique toute entière.

889 Idem.

890 PADBERG, Lutz von, Wundern in frühmittelalterlichen Predigtsituationen », in HEINZELMANN, Marin et

alii, Mirakel im Mittelalter, Konzeptionen, Erscheinungsformen, Deutungen, Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 2002,

p. 77-94, p. 78.

891 « Huile », CABROL, Fernand, in LECLERCQ, Henri et alii (éds.), Dictionnaire d’archéologie chrétienne et

de liturgie, Paris : Letouzay et Ané, 1903, t. 6, p. 2778.

892 « Résurrection », DARTIGUES, André, in SBALCHIERO, Patrick (dir.), Dictionnaire des miracles et de

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*La libération des prisonniers

Dans le chapitre XV, saint Melaine intercède auprès des prisonniers qui le prient. Ils sont libérés puisque la « turris », la tour, est fendue de haut en bas au passage de son corps mort. Lors des fouilles récentes de Rennes, aucune trace des tours mentionnés dans la vita de Melaine n’a pu être retrouvée893. Or, cette « turris » a pu désigner une tour servant de prison mais également des bâtiments hauts, c’est-à-dire à partir d’un étage d’où on pouvait précipiter des prisonniers894. Comme l’hagiographe est dans la mesure de préciser l’emplacement des tours, il devait y avoir des vestiges qui ont pu rappeler ce miracle à son époque.

Des miracles de la libération des prisonniers sont une particularité de l’hagiographie mérovingienne qui les a inventés895. A l’origine de la préoccupation de l’Eglise pour des prisonniers se trouve une affirmation dans la Bible chez Matthieu, 25, 36 : « J'étais nu, et vous m'avez vêtu; j'étais malade, et vous m'avez visité; j'étais en prison, et vous êtes venus me voir896 ». C’est un acte des justes. A partir de là, la préoccupation des prisonniers relevait des tâches sociales de l’évêque. Ces tâches furent institutionnalisées par la législation impériale au IVe et Ve siècle897. Derrière ces miracles se cachait la volonté d’intervention des évêques dans un domaine qui relevait encore de la juridiction temporelle. C’était un essai d’obtenir encore plus de compétences judiciaires du pouvoir temporel et de se réserver la juridiction des clercs à une époque898. Dans le cas de Melaine, dont nous connaissons la participation au concile

d’Orléans I et la lettre à Lovocat et Catihern, l’idée d’une volonté d’intercession pour des prisonniers et pour plus de compétences dans la juridiction temporelle semble plausible. Certes, ce miracle est post mortem mais il peut renvoyer à un souvenir de l’activité juridique et des efforts de Melaine pour la justice de son vivant.

On remarque que dans ce chapitre, le corps de saint Melaine est transporté jusqu’à Rennes pour y être inhumé. Au sens strict, pour ce miracle il s’agit d’un miracle de translation bien qu’elle fût- nous le reconnaissons- assez précoce par rapport à d’autres translations connues.

893 POUILLE, Dominique, « La ville antique… », p. 67.

894 « turris » in GAFFIOT, Félix, Dictionnaire latin-français, Paris : Hachette, (1934), 2000, [en ligne].

895 WIESHEU, Annette, « Bischof und Gefängnis. Zur Interpretation der Kerkerbefreiungswunder in der

merowingischen Hagiograhie », in Historisches Jahrbuch, München: Cotta, 2001, 121, p. 1-23, p. 5.

896 Mt, XXV, 36, La Bible, SEGOND, Louis (trad.), https://www.enseignemoi.com/bible/matthieu-25.html,

(consulté le 18/05/2018).

897 WIESHEU, Annette, « Bischof und Gefängnis … », p. 1. 898 Ead., p. 9.

177 *L’eulogie ou l’aumône

Le miracle de la transformation de l’eulogie en serpent se trouve dans le chapitre XI. La date du miracle est mentionnée puisque l’hagiographe fait savoir que Melaine était en train de célébrer une messe le jour que l’on appelle le mercredi des Cendres aujourd’hui. Ce n’est que progressivement, au VIIIe siècle, que le début du Carême eut lieu un mercredi et non le dimanche suivant899. L’hagiographe se positionne donc en faveur du nouveau jour du début, le