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2. Recension des écrits

4.5. Analyse des données

Les entrevues ont d’abord été transcrites. Une deuxième vérification de la transcription de chacune des entrevues a été faite par la chercheure-étudiante pour assurer qu’elle soit fidèle aux propos enregistrés. Dans l’esprit de la méthodologie privilégiée (Charmaz, 1983; Corbin & Strauss, 1990; Strauss & Corbin, 1994), nous avons fait une partie de l’analyse en même temps que la collecte des données.

La première phase de l’analyse des données consistait à réduire les données à l’aide d’un codage ouvert. Nous avons spécifié les catégories initiales et exploré leurs propriétés et dimensions (Creswell, 1998). Autrement dit, il a fallu définir ces catégories, en délimiter la portée et en saisir les variations (Charmaz, 1983; Strauss & Corbin, 1998). Le chercheur doit demeurer vigilant afin de dégager les tendances qui sont récurrentes dans les données recueillies (Corbin & Strauss, 1990; Strauss & Corbin, 1994, 1998). Les catégories deviendront plus élaborées, complexes et abstraites à mesure qu’avancera l’analyse (Corbin & Strauss, 1990; Morrow & Smith, 1995).

Par la suite, la codification a été réorganisée selon un codage axial : il s’agissait de regrouper les catégories afin de définir les composantes qui caractérisent le phénomène à l’étude, d’explorer celles qui conduisent à l’actualisation du phénomène, de préciser les actions qui en découlent et de reconnaître le contexte dans lequel celui-ci se produit ainsi que d’en prévoir les conséquences (Charmaz, 1983). À ce stade-ci, l’analyse sert alors à expliquer comment le contexte vient influencer le phénomène, que ce soit en l’accentuant ou le limitant. Les stratégies qu’emploient les personnes pour faire face aux conséquences du phénomène sont également relevées (Strauss & Corbin, 1998). Ensuite, au moyen d’un codage sélectif, une ligne directrice a été établie pour intégrer toutes les catégories du codage axial dans une description (Dey, 1999). C’est lors de cette phase qu’ont été testées les hypothèses émergentes. L’analyse a été enrichie par l’examen attentif des cas divergents ou rivaux lors de l’examen des hypothèses afin de préciser celles-ci (Creswell, 1998; Laperrière, 1997; Lessard-Hébert et al., 1990; Pires, 1997b; Willig, 2001). Toute hypothèse qui a été infirmée après cette analyse a été abandonnée (Corbin, 1986). Au cœur de cette phase de l’analyse, les énergies ont été fournies pour définir une variable principale qui permettrait d’expliquer une large part des variations observées et d’intégrer les diverses catégories découlant de l’analyse (Streubert & Carpenter, 1999). De plus, les catégories et les sous-catégories qui sont demeurées insuffisamment développées ont été précisées et améliorées (Corbin & Strauss, 1990). Classiquement, cette phase est suivie d’une étape où, par une matrice conditionnelle, les conditions sociales, historiques ou économiques susceptibles d’influencer le phénomène à l’étude sont explorées (Corbin & Strauss, 1990; Creswell, 1998). À la suggestion de Strauss et Corbin (1998), du temps a été consacré pour

mieux comprendre les liens existant entre les stratégies adoptées, les actions entreprises par les participants et les aspects sociétaux ou contextuels. Pour faciliter l’analyse des données et accéder à un traitement matriciel de l’analyse, nous nous sommes servi du logiciel N’Vivo (version 1.1). À la fin du processus de codification, 745 codes ont été créés. Certains avaient une connotation anecdotique dans le but de créer des points de repère pour mieux recréer les différents historiques, tandis que d’autres avaient une portée plus théorique. Des exemples d’arborescence de codes sont présentés à l’Annexe G.

Outre le codage, une synthèse des différents thèmes élaborés durant les entretiens a été élaborée pour chacun des participants. Cette analyse a permis non seulement d’aborder les données de façon herméneutique, en se penchant sur l’expérience individuelle de chacun des participants, mais aussi de faire une synthèse contextuelle de tous les codes relevés dans les données concernant un même individu. Ces synthèses constituent de riches descriptions qui témoignent de l’histoire professionnelle, personnelle, résidentielle, sociale ainsi que de l’expérience de la maladie, des trajectoires de soins et du rétablissement de chacun des participants. Ces descriptions approfondies ont permis de cerner les éléments contextuels qui délimitent la transférabilité des résultats. Malgré que ces synthèses soient riches, elles n’ont pas été intégrées dans cet ouvrage pour des considérations éthiques. En effet, il devient difficile de maintenir l’anonymat des participants lorsque ces diverses trajectoires sont juxtaposées dans un même document. De plus, plusieurs ont témoigné ouvertement de leur expérience sur des sujets sensibles tels que l’inceste, la violence conjugale, des activités illicites ou les troubles mentaux de leurs proches, lesquels servent à comprendre leur cheminement personnel et professionnel, mais qui doivent demeurer strictement confidentiels. Même en masquant les éléments nominatifs, le risque de reconnaître des personnes une fois que les données ont été croisées demeure trop important.

L’analyse comparative permet d’illustrer les similitudes et les différences qui existent, d’explorer les variations du phénomène, de limiter les biais ainsi que de préciser la portée de la théorie (Corbin & Strauss, 1990; Laperrière, 1997; Strauss & Corbin, 1998). C’est aussi au moyen de comparaisons constantes qu’il devient possible d’établir la relation que les variables ont entre elles (Corbin, 1986). Le chercheur peut ainsi développer sa

sensibilité théorique, soit sa capacité de donner un sens aux concepts et aux dynamiques ainsi que d’en saisir les nuances subtiles (Glaser, 1978; Strauss & Corbin, 1998).

Pour intégrer ces différentes sources de données, non seulement les différents témoignages des participants ont-ils été comparés entre eux, mais les points de convergence ou de divergence entre les différentes sources de données, dont les trames narratives, les données quantitatives et factuelles ainsi que les observations notées sur le terrain, ont aussi été étudiés. Cette triangulation des données au fil du temps et les modes de collecte a permis de renforcer la crédibilité des conclusions, de les enrichir et de les consolider (Carpenter & Hammell, 2000; Streubert & Carpenter, 1999).

Les données quantitatives ont d’abord été analysées sommairement afin d’enrichir les catégories et mieux décrire les caractéristiques de l’échantillon et des sous-groupes de participants. Au départ, aucun traitement statistique n’avait été prévu. Cependant, l’analyse de ces données a permis de consolider l’élaboration d’une variable émergente et centrale, dont il sera question au cours de la présentation des résultats.

Le journal méthodologique témoigne des a priori de la chercheure-étudiante pour assurer la transparence du processus d’analyse. Les observations, les impressions et les questions ayant été relevées sur le terrain y sont consignées. Chacun des codes y a chronologiquement été noté ainsi que les définitions des codes à connotation conceptuelle et leur modification. Des notes ont été élaborées tout au cours de l’étude, lesquels sont devenus de plus en plus élaborés et intégrés. Ces notes ont permis de construire et consolider les catégories conceptuelles, d’orienter la collecte des données et de faciliter la comparaison tel que le préconise Charmaz (1983). Morrow et Smith (1995) estiment que les notes enrichissent le processus d’analyse, explicitent la réflexion du chercheur et élargissent la banque de données. La crédibilité de cette recherche repose sur le respect de l’ensemble de ces mesures.