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5. Analyses et résultats

5.3 Analyse bivariée des facteurs liés au contexte relationnel

Le dernier élément de contexte que nous abordons dans notre travail concerne les relations entretenues par les SMOs en dehors du GJM. Nous nous sommes spécialement intéressés aux relations qu’elles entretiennent avec l’Etat, que ce soit à travers les subventions qu’elles reçoivent éventuellement ou les collaborations qu’elles mènent à différents niveau territoriaux.

Comme nous ignorons de quelles institutions gouvernementales il s’agit dans chacun des cas, nous avons choisi de placer cette analyse dans un cadre conceptuel suffisamment général. Nous avons adopté les théories néo-institutionnelles qui offrent un ensemble de mécanismes explicatifs de l’isomorphisme organisationnel relatifs à l’environnement relationnel, et permettent de conceptualiser les structures étatiques de manière générale mais convaincante. Plus spécifiquement, nous avons employé le concept d’isomorphisme coercitif (DiMaggio et Powell, 1991) pour formuler nos hypothèses quant à l’effet des relations avec l’Etat sur les choix des modèles organisationnels. Notre cinquième hypothèse concerne les subventions étatiques, que nous concevons comme un rapport de dépendance face à l’Etat : H5 Les SMOs qui reçoivent des financements de la part de l’Etat ont moins de chance

d’adopter un modèle délibératif participatif de prise de décisions que celles dont le budget repose sur d’autres sources.

Pour cette hypothèse notre raisonnement est relativement simple, nous pensons qu’il existe un certain nombre de règles applicables pour l’obtention de fonds publics. Ces règles auraient tendance à favoriser l’adoption d’une organisation formelle, avec une claire définition des rôles et des responsabilités, et qui serait par conséquent plus en phase avec un modèle associationnel (voir figure 2) plutôt qu’un modèle délibératif participatif. Nous testons cette hypothèse de manière directe suivant que les organisations reçoivent ou non des fonds publics :

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Tableau 5 : Subventions gouvernementales, % d’organisations

Non Oui Total Organisations de type délibératif participatif 34.26% 12.07% 26.51%

Autres 65.74% 87.93% 73.49%

N 108 58 166

V de Cramer .240**

+p<.10; *p<.05; **p<.005; ***p<.001; n.s non significatif

Le tableau 5 montre que, dans l’ensemble, assez peu d’organisations reçoivent des fonds publics, soit un peu plus du tiers d’entre-elles. La différence entre les deux groupes (ceux qui reçoivent des subventions et ceux qui n’en reçoivent pas) est significative, mais assez faible. Parmi les SMOs qui touchent des fonds étatiques, seuls 12% sont de type délibératif participatif, soit en termes absolus 7 organisations. Cette proportion est de 34%

parmi les groupes qui ne reçoivent pas de subventions, environ trois fois plus. Parmi les SMOs pour lesquelles nous avons des informations sur la provenance des fonds, les organisations de type délibératif participatif ne représentent que 26% ce qui rend l’interprétation peu claire. Nous donnons donc les pourcentages pour les catégories de SMOs (« % en ligne »), qui ne sont pas présentés dans le tableau. Les 7 SMOs de type délibératif participatif qui reçoivent des subventions représentent 15,9% des organisations de cette catégorie (N=44). Ces 16% sont à comparer avec les 42% d’autres types de SMOs qui perçoivent des fonds publics (N=122).

Nous pouvons donc interpréter ces résultats comme un soutient à notre hypothèse. Les organisations qui reçoivent des fonds de l’Etat ne sont que rarement de type délibératif participatif. En fait seul 15% des SMOs de ce type ont recours à cette source de financement.

Cependant, la relation est assez modérée (V de Cramer=.240). De plus, nous nous attendons à ce que les organisations qui perçoivent une partie de la manne financière gouvernementale soient aussi les plus dotées en ressources financières (auxquelles les subventions contribuent) mais aussi en termes de membres, ce qui facilite sans doute l’obtention de fonds publics. Il faut également relever que nous n’avons pas d’indication quant à la proportion que représentent les contributions de l’Etat dans le budget total des SMOs. Cela limite quelque peu la portée de ce résultat.

L’autre hypothèse que nous avons formulée concernant le contexte relationnel porte sur la collaboration des SMOs avec les institutions gouvernementales :

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H6 Les SMOs qui collaborent avec les institutions étatiques sont moins susceptibles d’adopter un modèle délibératif participatif que celles qui ne collaborent pas. De plus, l’effet est plus marqué au niveau national qu’au niveau local.

Ici nous sous-entendons que la rationalité bureaucratique qui caractérise en général les administrations tend à influencer les modèles de prise de décisions internes des SMOs. Que ce soit par le biais d’une sélection des SMOs avec lesquelles elles collaborent ou par des attentes formulées auprès de celle-ci ou encore par les attentes postulées par les SMOs elles-mêmes, nous pensons que les organisations qui sont en lien avec les institutions étatiques ont tendance, dans leur majorité, à ne pas adopter un modèle délibératif participatif. Nous employons deux mesures pour tester cette hypothèse, la collaboration au niveau local et celle au niveau national.

Tableau 6 : Collaboration avec les institutions nationales, % d’organisations Non Oui Total Organisations de type délibératif participatif 60.00% 11.01% 28.40%

Autres 40.00% 88.99% 71.60%

N 60 109 169

V de Cramer .520***

+p<.10; *p<.05; **p<.005; ***p<.001; n.s non significatif

Tableau 7 : Collaboration avec les institutions locales, % d’organisations

Non Oui Total

Organisations de type délibératif participatif 51.92% 17.24% 27.98%

Autres 48.08% 82.76% 72.02%

N 52 116 168

V de Cramer .357***

+p<.10; *p<.05; **p<.005; ***p<.001; n.s non significatif

Les tableaux 6 et 7 présentent tous deux des relations significatives et fortes entre la collaboration avec des institutions étatiques et l’adoption d’un modèle délibératif participatif.

Au niveau national, les SMOs de type délibératif participatif représentent 60% des organisations qui ne collaborent pas avec les autorités, alors qu’elles ne représentent que 28%

de notre échantillon pour cette analyse. Elles sont donc très clairement surreprésentées parmi cette catégorie des SMOs ne collaborant pas avec les autorités. La répartition au niveau local est similaire, mais moins marquée. Les SMOs délibératives participatives représentent un peu plus de 50% des organisations ne collaborant pas à ce niveau là, contre un peu moins du tiers dans l’échantillon total.

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Si nous prenons à nouveau les pourcentages « en ligne » pour la catégorie des SMOs ayant adopté un type délibératif participatif de prise de décisions, au niveau national 25%

d’entre-elles collaborent avec les autorités, contre 80% des SMOs d’un autre type. Au niveau local, ce sont en fait les organisations délibératives participatives qui collaborent davantage, puisqu’elles sont 43% à le faire, alors que parmi les autres SMOs la proportion reste stable à 80%.49

Ces résultats apportent un fort soutien à notre hypothèse. Non seulement les SMOs de type délibératif participatif sont surreprésentées aux deux niveaux parmi les groupes ne collaborant pas avec les autorités, mais la différence entre les niveaux territoriaux correspond à nos attentes. En effet, comme nous l’avons décrit, la proportion de SMOs qui ne collaborent pas avec les institutions étatiques et qui sont de type délibératif participatif augmente avec le niveau territorial. Ceci se traduit aussi dans l’évolution du V de Cramer, déjà fort au niveau local (.357), et qui augmente à .520 au niveau national. C’est la relation la plus forte que nous observons dans nos résultats. Ceci nous conforte dans notre décision de prendre en compte plusieurs types de contextes, et non uniquement le cadre institutionnel de manière classique par les POS.

Dans cette section, nous avons présenté les résultats des analyses bivariées portant sur le contexte relationnel des SMOs du GJM. Nos deux hypothèses sont supportées par ces analyses, particulièrement la seconde, relative aux relations de collaboration entretenues entre les autorités et les organisations de type délibératif participatif. Ces résultats doivent toutefois être confirmés par une analyse multivariée, afin de nous assurer que ce que nous interprétons comme une conséquence relationnelle ne relève par d’autres facteurs, notamment internes aux SMOs que nous étudions.